Trains – Express nippon

  Je me suis offert la Black Box d’AEG, et dedans, il y avait un énoooorme jeu, Trains. Et j’ai mis longtemps à le tester, faute à tous les jeux à tester au bureau. Et une fois testé… ben, j’ai écrit un Just Played ! Quelle originalité me direz-vous.

Note : ayant joué à la version AEG, je parlerai donc de cette version-là. Les termes français utilisés par Filosofia me sont inconnus, mais je tenterai une traduction à chaque fois.

 

Tout un concept-wagon

Loin des Aventuriers du Rail, Trains vous propose surtout… du deckbuilding.

Trains_Cards_LayRails

Carte de base, permettant de construire des rails. Elle est achetable pour 3… yens.

Le matériel est aux standards d’AEG : le fabricant de cartes n’a pas lésiné sur les moyens : séparateurs en carton glacé, répondant à des cartes à l’allure ma foi solide. Comme je connais la propension des cartes à s’abîmer sur du deckbuilding, j’ai donc décidé de protéger les cartes afin de préserver l’aspect glacé et de rendre le mélange plus facile. La tâche fut ardue, puisque le jeu contient plus de 300 cartes… L’ergonomie desdites cartes est quasiment parfaite : très claires, elles ne résistent absolument pas aux joueurs chevronnés, mais ne rebuteront pas les amateurs non plus. Et puis le thème y est superbement représenté. Ça nous change des batailles fantasy ou science-fiction… Après Sail to India (En route vers les Indes), Hisashi Hayashi nous propose un nouveau voyage…

Un plateau recto-verso un peu quelconque vient agrémenter ce Trains, ainsi que des cubes en bois et de petits buildings blancs. Là, un de mes core gamers s’est extasié, tout fou, sur ce fantasme. Des cubes, plus du deckbuilding, ça l’a plongé dans une transe joyeuse, un peu comme un chien à qui on montre des croquettes. J’exagère à peine.

Les règles furent très faciles à assimiler, ce qui n’a pas empêché une erreur minimale de se glisser dans la première partie ! Quand on connaît le deckbuilding, Trains ne pose aucun souci : les mécanismes d’achat et de jeu sont à peu près équivalents à ceux de Dominion. On commence avec 10 cartes, on en pioche et en joue 5 par tour, et les achats vont à la défausse. Lorsque votre pioche est vide et que vous devez vous en servir, vous mélangez la pile de cartes usagées pour en refaire une pioche. Les trains servent de monnaie, et les infrastructures d’actions. D’ailleurs, pas de gestion des achats et des actions comme dans Dominion : on a dit, simple comme bonjour.

Sauf que le cœur du jeu ne se passe pas nécessairement dans le deck. Le paquet vous servira certes à jouer, mais le but du jeu n’est pas d’avoir la machine la plus rutilante pour s’enrichir. Pour gagner à Trains, il faut « simplement » avoir plus de points de victoire que les autres. Pour ce faire, il faut connecter son réseau ferré à des villes et poser des gares sur lesdites villes (ou profiter des gares posées par les autres !), se rendre dans des endroits perdus au fin fond de la carte, ou encore emplir son paquet d’appartements, de gratte-ciels qui ressemblent à s’y méprendre aux cartes victoire de Dominion. Elles polluent le deck tout autant, mais offrent une surprise agréable en fin de partie, puisque la majorité des points provient en général des réseaux ferrés ! Quelques moyens alternatifs, comme le Train touristique, font gagner des points de victoire pendant la partie.

 

Le chemin de St Jacques de Composté

Trains_Cards_Ironworks

Carte rouge = action. Les actions orientent ou cimentent une stratégie…

Les parties se renouvellent assez typiquement pour jeu de deckbuilding : les cartes que l’on peut acheter varient d’une partie à l’autre, pour créer des combinaisons plus ou moins propices à chaque stratégie. Le twist ? La partie se finit bien entendu si des piles sont vidées (4, pour être précis), mais peut également connaître une fin prématurée si un des joueurs pose la dernière des gares du pool commun, ou si un joueur pose son dernier rail (les cubes, hein).

Le plateau ajoute pour beaucoup à l’intérêt de Trains : l’effet des cartes est simple, presque simpliste, mais sonne toujours juste. On se consacre bien plus à la pose judicieuse d’un rail ou d’une gare qu’à ce qu’on met dans le paquet (même si c’est une source de tracas tout à fait légitime) : une gare sur une ville vaut 2 points, 2 gares rapportent 4 points et 4 gares, 8 points. Les rails, eux, ne signifient rien.

Bien entendu, il ne suffit pas de jouer la carte « Pose de rails » pour installer son petit pion sur le plateau : chaque case du plateau peut entraîner un surcoût. Vous construisez au travers d’une rivière ? 1 unité d’argent de plus sera nécessaire. Sur une montagne ? Payez 2 de plus. Une ville ? Payez 1, plus 1 pour chaque gare. Mais ce n’est pas tout : l’interaction dans Trains est toute économique. Si l’on veut construire un rail sur une case déjà occupée, on raque aussi. Ça, ça vous donne envie de prendre les chemins de cocagne, hein ?

Ne nous y trompons pas : Trains propose un alliage très complet d’un jeu de deckbuilding simple et d’un jeu de placement, lui aussi assez simple. Mais le placement influence la façon dont vous construirez paquet et stratégie… et vice-versa. Les processus cognitifs développés sont complexes, mais intuitifs. En résumé, de ce côté-là du jeu, c’est vraiment, vraiment très réussi, et ça peut convenir autant aux joueurs occasionnels : j’applaudis la démarche !

 

Waste not, want not

J’ai pour l’instant passé sous silence ce qui, à mon avis, fait la grande force de Trains : la gestion des déchets du deck. Trains vous oblige à prendre une carte Débris (Waste) dans votre paquet dans de multiples occasions :

  • Vous construisez une carte de victoire (jaune) ;
  • Vous construisez une gare ;
  • Vous construisez un rail ;
  • Vous construisez un rail sur une case déjà occupée.

 

Trains-Board-Osaka

Le plateau d’Osaka. Très lisible, mais pas très joli.

 

On se rendra facilement compte qu’avec les   20 rails qu’il est possible de poser durant la partie, les 30 gares et les pénalités induites par l’interaction, ces cartes Débris s’accumuleront très vite, et deviendront facilement un handicap. On peut bien entendu s’en débarrasser ! Certaines cartes (Décharge, Personnel de gare, train de fret (Landfill, Station crew, Fret train)) permettront de les retirer de votre paquet, alors que d’autres tireront profit de leur inutilité (Train de courrier (Mail train)), quand d’autres minimisent leur impact (Aiguilleur (Conductor Station)). Il est enfin possible de passer son tour pour renvoyer toutes les cartes en main dans la pioche de cartes Débris : c’est une gestion d’urgence qui est quasi automatique lorsqu’on a au moins trois Débris en main…

Cette gestion des déchets, quoi que pas très écolo (l’enfouissement pour s’en débarrasser, hein…), montre bien aux joueurs que chaque avancée a un prix qui dépasse celui de la simple action, et que chaque pas en avant a des conséquences dans l’avenir – du moins, dans celui de la partie. Bloquer un adversaire d’un rail bien placé devient vite tout un art, et on s’ingéniera ainsi à couvrir les cases libres pour ne se frotter aux adversaires que dans les villes…

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Les cartes de base. Source : geekdad.com

 

Des défauts dans la carrosserie ?

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Carte à combo, certes, mais combien en acheter ?

Trains a peut-être quelques défauts, mais ceux-ci sont minimes. Les différentes configurations de table orientent les stratégies (une partie à deux permettra de développer son jeu beaucoup plus qu’une partie à quatre, mais au fond, ce n’est pas si mal.

Les configurations de cartes, en revanche, peuvent être plus problématiques lorsqu’elles interdisent aux joueurs de réaliser telle ou telle stratégie. Interdire est sûrement un trop grand mot pour décrire ce qui se joue réellement, mais on se sent à l’étroit quand la plupart des cartes d’un tirage ne combotent pas. Dommage. Pour autant, ça n’arrive pas à chaque partie et dans la très grande majorité des cas, le jeu tourne bien.

Peut-être Trains souffre-t-il de sa trop grande simplicité : il n’invente absolument rien, et emploie des poncifs du deckbuilding comme du placement sans aucune vergogne. Il est tout à fait possible de dire « ah, cette carte, y’a la même dans Dominion » à de multiples reprises. Seulement, la fusion entre ce jeu de placement / conquête facile et le deckbuilding force l’admiration, et ne manque absolument pas de profondeur et de thématisation. C’est donc un regret minimal que celui-ci, d’autant qu’il existe une extension, Rising Sun, que je n’ai pas encore testée.

Les deux cartes proposées sont intéressantes, mais si elles lassent, il est toujours possible d’en récupérer, soit via les extensions, soit via Internet…

 

Verdict après contrôle

J’aime Trains. Vraiment, passionnément. C’est un des meilleurs jeux de deckbuilding auquel j’ai joué, et je le place sans conteste devant des cadors comme Dominion ou Thunderstone (pas Advance, autant le préciser).

Cependant, il sacrifie beaucoup de potentiel pour rester accessible. Si ce n’est absolument pas un mal, les joueurs les plus acharnés le regretteront peut-être un peu vite ; reste un superbe jeu bien fagoté, qui oblige les joueurs à sortir la tête du guidon et à se pencher sur ce plateau pour ferrer toutes les villes du Japon, et qui évite ainsi de tomber en plein dans l’écueil typique des deckbuilders, à savoir le manque d’interaction avec les autres joueurs. Et la gestion des cartes Débris est absolument à voir, tant elle s’installe comme élément perturbateur et rampant.

 

 

                                                                                                                .

 

Vous l’aurez compris, je recommande donc vraiment ce jeu.

I like trains.

Pour vous en convaincre lisez donc mon test ! Il est sorti avec 89%…

 

Planes Logo Color

Pas le même designer, mais le même éditeur. Vu la trempe de Trains, je dois vous avouer qu’il me tente sacrément.

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20 Commentaires

  1. TheGoodTheBadAndTheMeeple 23/01/2015
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    Planes et trains, rien à voir fais gaffe 😀

    Bon je me note d’essayer Trains même si je suis toujours sceptique, moi allergique à Dominion …

  2. Umberling 23/01/2015
    Répondre

    Je sais bien que Planes est différent, mais bon.

    La différence entre Trains et Dominion peut paraître ténue à la vue des cartes, mais on joue moins dans son coin (gagner, c’est phagocyter les autres réseaux ferrés), et on a des tours qui roulent moins. Jouer la moitié de son deck en un tour, ce n’est pas tellement possible dans Trains. D’ailleurs, les moyens d’écrémer son deck ne font pas légion comme à Dominion ; Trains demande d’être plus précautionneux dans ses achats, sous peine d’avoir un deck énorme et en sous-achat. La granularité économique de Trains et de Dominion est en revanche similaire, et on bloquera à 5 et 7 yens. En tout cas, je vais avoir du mal à jouer à Dominion après Trains : on sent vraiment que les cartes sont liées au plateau, et on tourne moins « dans le vide » : on a un vrai but dans Trains. Il ne faut pas hésiter à gêner les adversaires, et du coup, à prendre des risques d’ouverture.

    Je dirais que ça dépend ce qui te dérange dans Dominion. Si c’est l’aspect deckbuilding, alors c’est sûr, passe ton chemin. Si c’est l’espèce de roue libre aveugle, alors essayer Trains vaut le coup.

  3. Vidberg 23/01/2015
    Répondre

    Nous aussi on a mis trains dans nos indispensables du Deckbuilding : http://www.laselectiondudimanche.com/les-indispensables-les-jeux-de-deckbuilding/

    Par contre, Planes, c’est très moyen !

  4. Umberling 23/01/2015
    Répondre

    Zut, je suis déçu ! Merci du passage, comme d’hab 😉

  5. bibulus 23/01/2015
    Répondre

    Super article!

    Quelqu’un a des infos sur une éventuelle traduction de l’extension rising sun?

  6. Umberling 23/01/2015
    Répondre

    Aucune idée, la question mérite d’être posée à Filosofia. Je vais tester Rising Sun sous peu !

  7. bibulus 23/01/2015
    Répondre

    Oui et visiblement elle apporte beaucoup ce qui n’est pas souvent le cas pour une extension…mais depuis les cas Bruges et Suburbia et d’autres, je suis plus hésitant quant a l’achat du jeu en VF.

  8. Shanouillette 23/01/2015
    Répondre

    Question envoyée 🙂

  9. Umberling 23/01/2015
    Répondre

    Idem !

  10. bibulus 23/01/2015
    Répondre

    Génial ça c’est de la réactivité.

  11. eolean 23/01/2015
    Répondre

    Je n’entends que du bien de ce jeu. Le look et le thème ne m’ont pas attiré du tout à Essen, mais il va falloir que je me rende à l’évidence, j’ai sûrement raté le coche sur ce jeu !

    A tester d’urgence ^^

  12. Umberling 23/01/2015
    Répondre

    Test ici d’ailleurs : http://ludovox.fr/test/le-test-de-trains-2013/

    J’y raconte sensiblement les mêmes choses, avec plus de recul et de jugement.

  13. tartopom 23/01/2015
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    Pfffff, bravo. Maintenant j’ai envie d’y jouer.

  14. Zuton 23/01/2015
    Répondre

    Jeu testé par deux fois en ce début d’année sur la VF et deux fois conquis ! Un espèce de Dominion du Rail dans lequel il faut jongler entre l’extension avec la construction à outrance de lignes et villes sur le plateau et gérer un moteur d’argent pour acquérir des cartes jaunes lucratives en PV (appartement, résidence…). Difficile de remplir les 2 objectifs en même temps !

  15. yoda37 24/01/2015
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    jeux très intéressant effectivement, injustement meconnu…

  16. Shanouillette 27/01/2015
    Répondre

    réponse de Filo : « Pour l’instant, la publication en VF pour l’extension de Trains n’est pas dans les plans immédiats. Cela ne veut pas dire qu’elle ne le sera pas un jour 😉 « 

    • tartopom 28/01/2015
      Répondre

      Je ne suis pas tellement surpris. Le jeu de base n’ayant pas eu l’envolée méritée. Pourtant, depuis Essen 2013, je le convoite.

      Tout comme Russian Railroads. Oui, ma chérie aime les trains. 😉

    • bibulus 28/01/2015
      Répondre

      Ah dommage, je vais encore patienter a ce moment la en espérant une possible traduction à l’avenir…

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