Happy pigs : Dans le cochon tout est bon ?

Happy Pigs est un jeu taïwanais conçu par Kuraki Mura (Wa Chat Bi… ) sorti initialement en 2013, et repris maintenant par Iello. Ils ont fait appel à Biboun pour illustrer le jeu avec des cochons cubiques et lui donner un côté plus mignon, plus kawaii.

C’est un jeu qui se joue de 3 à 6 joueurs dans l’édition originale, mais une version spéciale deux joueurs a été développée pour Iello par Mr Cathala.

Happy-Pigs-eclate

Pitch et scoring

Nous sommes dans la peau de fermiers, plus exactement d’éleveurs de cochons, et nous devons gérer notre cheptel sur une année. Il s’agit d’un jeu d’achats / ventes : on va gagner de l’argent en revendant les cochons présents dans nos prés (plus ils sont gros, plus ils rapportent) et le plus riche d’entre nous gagnera la partie, mais attention à ne pas oublier de vacciner nos bêtes car les pertes pourraient être lourdes…

 

Comment élever ses cochons

Nous jouons sur une année de 4 saisons, de 4 tours chacune. Oui chez Kuraki Mura, une année a 16 mois ! Bon, on a qu’à dire que chaque tour représente 3 semaines et on sera raccord.

hpigs01

On commence le jeu avec un petit pécule de 45 dollars avec quoi on peut s’acheter 5 éléments, que ça soit des cochons de différentes tailles, des vaccins, des compléments alimentaire pour qu’ils grossissent un peu plus vite, ou des amulettes pour les porcelets (qui leur donneront une taille de plus).

hpigs03

Nous avons aussi un pré de départ pour y mettre nos cochons. 

hpigs02

Ici avec toutes les tailles de cochons.

 

À chaque tour de jeu, tout d’abord, on tire une carte saison avec un événement à résoudre (souvent à la fin du tour).

saucisse

 

Puis on a 4 actions possibles, mais on doit en choisir qu’une seule :

hpigs04

On peut :

  • Nourrir nos cochons (dans ce cas-là on remplacera notre cochon par un cochon de taille supérieure)
  • Faire une saillie (reproduire nos cochons adultes, avec un cochon on en obtient un de plus, mais bébé).
  • Aller au marché pour acheter du matériel, et soyons fous, des cochons.
  • Aller au marché pour vendre nos cochons.

 

La colonne vertébrale du jeu est simple : On achète des cochons, on les fait grossir, on les revend, on agrandit nos prés pour accueillir plus de cochons, et on recommence. On va donc choisir secrètement notre action, puis on les révèle tous ensemble. Et c’est là tout le sel du jeu : on va se partager l’action, en fonction du nombre de joueurs qui auront choisi la même. Il est donc conseillé de regarder où en sont vos adversaires pour ne pas faire les mêmes choix. 

sanitaire

 

Par exemple : ici on est deux à avoir choisi de nourrir, on voit que pour ce tour il y a 9 actions « nourrir », le premier dans le sens du jeu va faire 5 fois cette action (pourra nourrir 5 cochons) et le deuxième 4 fois. Si on était 3 à l’avoir choisie, ça réduirait encore le nombre d’itérations. Vous avez compris : pour s’en sortir il va falloir jouer à contre-temps.

On peut faire l’action jusqu’à 5 fois dans mon exemple, sachant que si l’on ne peut pas profiter pleinement de toutes nos actions on récupère un dollar par action non réalisées en compensation.

Quand tout le monde a terminé ses actions, on résout la carte événement, et on tire la carte suivante.

Attention à la fin de la saison, c’est-à-dire après 4 tours et 4 cartes événements : tous les cochons qui n’ont pas été vaccinés partent à l’équarrissage. Il faudra soit les avoir vaccinés – et pour cela il faudrait avoir achetés des vaccins avant ce tour fatidique -, soit les avoir vendus avant. Pratique : ceux qui sont vaccinés le reste jusqu’à la fin de la partie.

 

Cochon qui s’en dédit

Nous avons commencé notre première partie à 5 joueurs, avec Timothée, 6 ans, qui a voulu jouer à l’apprenti éleveur. Comme on est quand même des joueurs plutôt aguerris, j’ai proposé d’intégrer la variante où l’on a connaissance de l’événement du prochain tour. Cela permet de donne un peu de piquant.

Pendant la saison du printemps, c’était prévisible mais on s’est un peu tous rués chez le marchand pour agrandir notre cheptel et acheter des vaccins. Tous sauf un, Jean Marie, qui en a profité pour nourrir ses cochons. Il a pu maximiser son action et même récupérer de l’argent en prime. Jean Marie a profité aussi des événements et il a eu des petits cochons en plus dans son élevage, mais n’ayant pas pu les vacciner à la fin de saison, il connaîtra une hécatombe. Après l’avoir interviewé sur ce dégât sanitaire, il m’a répondu que c’était un « dommage collatéral », « les aléas de la vie d’un éleveur ».

En été, la vie est un long fleuve tranquille, on tente chacun notre tour de bonifier nos stratégies, mais l’ami JM – encore lui – a déjà un beau cheptel. Il s’est offert un troisième pré et il a plein de cochons bien grassouillets, lui permettant – là aussi – de profiter des effets des événements. Même s’il a encore perdu des petits porcelets (mais appelez la SPA !) son avance se confirme de plus en plus.

Octobre : rien à signaler, on répète grosso modo les mêmes actions.

Quant à moi, c’est en hiver que j’ai pu un peu en profiter : j’ai vendu presque tous mes cochons pendant les deux fêtes de la saucisse ! Le dernier tour, par contre, fut un tour à vide. 

Malheureusement, Timothée a abandonné la partie en hiver. Il était un peu à côté du jeu, se préoccupant plus de la santé de ses cochons, de leur bien-être… Ses bêtes étaient toutes vaccinées, et avaient bien de la place pour gambader : 

hpigs05

Elevage pas très intensif

 

Sans surprises, JM finit premier avec 321 $, je termine deuxième avec 232 $ et Joëlle nous suit avec 212$, tandis qu’Aurélien possède 150 $ (quant à Timothée, il a abandonné au dernier tour mais il avait tout de même 100 $).

hpigs06

L’exploitation de Jean Marie.

 

Jean Marie, notre grand gagnant, est indubitablement celui qui a joué le mieux a contre-temps, se permettant de maximiser ses actions. Il a aussi bien profité des cartes évènements, gagnant les subventions par exemple. Par contre, c’est lui qui a perdu le plus d’animaux à la fin des saisons. Mais d’après lui : « c’était des pertes acceptables », du menu fretin. C’est tout de même le plus cynique qui l’emporte…

 

Alors, dans le cochon tout est bon ?

Ce qui rend le jeu intéressant c’est cette mécanique de partage des actions : quand on est plusieurs à choisir une action, cette dernière est minimisée, ce qui nous oblige à jouer contre-temps, donc à deviner sur quoi les adversaires misent. Je me pose une question sur le fonctionnement du jeu selon le nombre de joueurs. Ce sont les mêmes cartes que l’on soit deux joueurs ou six – donc à deux joueurs on fera plus d’actions qu’à six – mais tout le monde a toujours la même contrainte.

Les cartes événements sont puissantes, et pour certaines, on ne peut pas passer outre : quand il s’agit de gagner 25 pièces grâce à une carte événement, c’est comme si on vendait deux cochons bien gros bien gras… Et quand c’est deux fois la même de suite qui tombe, c’est deux fois le même joueur qui en profite. Je pense là qu’il n’y a pas assez de cartes événements différentes (d’autant que dans chaque saison, il y a deux fois le même événement). Du coup, pas de grandes variations et une impression de redondance. 

Les stratégies peuvent être variées, mais ne pas tenir compte des cartes événements est tout de même difficile. Si on ne veut pas vacciner (ce que j’avais prévu au départ) il faut vendre souvent. Cette stratégie aurait pour autre avantage de ne pas avoir besoin de beaucoup de prés, mais elle est très risquée, il faudrait être sûr de vendre avant la fin de la saison.

levrette

Tuile promo pour la reproduction

 

Mon impression à vif : On ne peut pas dire que l’on passe un mauvais moment, mais c’est répétitif, sans trop de tensions. À chaque saison on accomplira peu ou prou les mêmes choses. Il n’y a que ce côté guessing qui sauve un peu la partie. Vous vouliez faire des tours de cochons à vos adversaires ? Il faudra repasser. L’interaction réside surtout dans le côté « course » à l’argent, et la vigilance que l’on maintient sur les actions adverses pour essayer de les prendre à contre-pied. 

Le jeu est plutôt fluide car nous avons décidé de résoudre les actions en simultané, ce qui donne un certain dynamisme et un côté « foire d’empoigne » très dans le thème finalement. Bien sûr, ce n’est jouable comme ça uniquement s’il n’y a pas de tricheurs à la table.

C’est un titre qui pourra séduire un public familial, et sera sans doute une bonne passerelle pour des jeux plus costauds, mais l’expérience décevra les experts en jeux de gestion car il y a trop peu de choix et surtout trop peu d’événements. J’ai personnellement peur de m’en lasser rapidement, n’ayant déjà pas trop de goût de reviens-y. Face à l’hyperproduction ludique que l’on connaît de nos jours, c’est un titre dispensable à mon goût, à moins que l’on ait follement envie de se mettre dans les bottes d’un éleveur porcin.

Happy pigs

Un jeu de Kuraki Mura
Illustré par Christophe « Biboun » Fossard
Edité et distribué en France par Iello
Langue et traductions : Anglais, Chinois, Français
Date de sortie : 03-2015
De 3 à 6 joueurs
A partir de 8 ans
Durée moyenne d’une partie : 30 minutes

LUDOVOX est un site indépendant !

Vous pouvez nous soutenir en faisant un don sur :

Et également en cliquant sur le lien de nos partenaires pour faire vos achats :

acheter happy pigs sur espritjeu

7 Commentaires

  1. morlockbob 28/03/2016
    Répondre

    J’avais testé la VO et ça m avait bien plu..le passage en VF ne m’a pas donné la même satisfaction ???? car je ne crois pas que le jeu ait beaucoup évolué entre les deux, cela voudrait il dire que passé la découverte on s’aperçoit que oui, ce jeu est répétitif et pas si passionnant (à part la vague de choix à plusieurs (les bonus des saisons n ‘étant pas non plus très variés).

    Quant a le destiner à un public familial, il va falloir que la famille soit motivée, c est quand même pas si évident.

     

    • atom 28/03/2016
      Répondre

      Il faudrait voir ce que ça donne avec plus d’événements, j’avais vu sur la vidéo du vendredi que des extensions allait probablement sortir, mais j’ai l’impression qu’elles sont purement cosmétiques, car elles permettent de jouer avec un autre animal (canard ou pingouin).

  2. morlockbob 28/03/2016
    Répondre

    ca c est un truc a eux… tout comme la version a deux qui est gentille… des fois iello on sent que c est un fourre tout où on espère sortir le lapin du chapeau en croisant les doigts….

    le pb avec ces jeux, (en général) c est de plaire à tout le monde en espérant vendre le stock. ce qui se passe. Tout le monde attend le hit, on se croirait chez RnB et consorts

    • atom 28/03/2016
      Répondre

      Bon pour le coup je ne sais pas trop quoi dire, ils ont choisit une ligne éditoriale et ils s’y tiennent c’est cohérent. Je trouve dommage qu’ils abandonnent les jeux experts (What your games par exemple) mais en même temps si ça ne se vends pas. Et puis ils ont une belle gamme très variée, j’attends Bunny Kingdom avec un certain intérêt. Cs Files est un très bon choix aussi (Jp a venir) En distribuant Ravensburger ils ont quand même des jeux d’un autre calibre ( le très bon Broom service).

      Pour revenir a nos cochons, les choix sont logiques dans leur ligne éditoriale, mais pour certains joueurs il manque quelque chose. Est ce qu’un public plus familial accrocherait plus ? Peut être. D’ailleurs si quelqu’un veut donner un autre son de cloche qu’il ne se gènes pas, bien au contraire.

      • Grovast 29/03/2016
        Répondre

        Il y a une interview très intéressante de Matthieu Bonin à Cannes sur Proxi-Jeux (ici), il explique tout ça.

        Pas sur Happy Pigs en particulier, mais sur leurs choix en général, les familiaux +, le crève-coeur qu’est la non-rentabilité des trads WYG? (malheureusement), etc. Bref, je ne vais pas me faire l’avocat de Iello, allez écouter 🙂

        • atom 29/03/2016
          Répondre

          Merci, en effet c’est intéressant. Je me faisais la même réflexion, sur ces gros jeux sans texte que l’on peut acheter n’importe ou surtout quand on est fous. On peut les remercier d’avoir essayer, et de les avoir fait connaitre, je pense que je n’aurais jamais connu Madeira par exemple sans Iello. Et maintenant WYG distribue eux même en France.

  3. madtranslator 29/03/2016
    Répondre

    Pur Happy Pigs, je pense qu’il faut le voir comme servant d’introduction à des jeux beaucoup plus gros. J’ai la version taïwanaise depuis un an un an et demi et s’il sort beaucoup en « famille » (à 5) c’est que nous ne sommes pas forcément adeptes des très gros jeux, lourds et qui durent 2h.

    Il va aussi permettre a un public de non-joueurs de s’initier tranquillement à un jeu de gestion, pour peut être ensuite passer à un autre plus gros. Je ne pense pas que ce jeu soit familial +, juste familial ou pour initier des novices en terme de jeux.

    Bonne journée à toutes et tous 🙂

Laisser un commentaire