Zapotec : Régle de trois mexicaine

On avait découvert Fabio Lopiano avec Calimala (Just played), si visuellement c’était très aride, voire daté (le jeu ne date pourtant de 2017), il nous proposait une mécanique originale avec une interaction subtile et très peu de temps morts. Une belle mécanique avec une profondeur de jeu correcte dans un temps très ramassé. 

Ce qui est intéressant quand on s’intéresse à un auteur, c’est que l’on découvre sa patte, ses mécaniques, ses évolutions, il affine son game design dans une direction ou dans une autre. Ce qui nous a séduit, c’est l’élégance de la mécanique au service du jeu et l’interaction forte, de type symbiotique. 

En 2019, il est revenu avec Ragusa où, comme dans Calimala, on active les bâtiments des autres joueurs. Puis dans Merv on retrouve encore cette volonté d’interaction, on en parlait dans ce Just Played. Ce quatrième jeu, Zapotec, (en attendant Autobahn et Mushroom in Mail), nous propulse dans la civilisation zapotèque, avec construction de pyramides, de temples, et des sacrifices pour calmer les dieux  (sous forme de piste calmez vous !).

 

 

Règle de trois

Vous allez jouer avec des cartes. Au début de chaque manche vous allez en choisir une de votre main, et tout le monde la révèle en même temps. Cette carte jouée va indiquer plusieurs choses : la zone de votre plateau personnel qui va être activée et ainsi produire vos ressources, la zone ou le type de bâtiments que vous pourrez construire, mais également un numéro qui déterminera l’ordre du tour.

 

Zapotec – cartes indiqant une ressource, une zone, une intiative

 

Zapotec est basé sur le chiffre trois : trois informations sur nos cartes, trois types de bâtiment, dans trois régions différentes, constituées de trois terrains différents. Mais on pourrait continuer aussi en énumérant les trois ressources de bases ainsi que les trois ressources améliorées ou encore les trois cartes rituels présentes pour la partie. En constatant que le titre du jeu est composé de trois syllabes, on s’étonne presque de jouer une partie de cinq manches.

Au tout début, notre carte nous permet de récupérer une seule ressource, et nos actions sont très limitées, en gros, on se contente juste de construire nos bâtiments afin de récupérer les tuiles présentes et les placer sur notre plateau matrice d’actions pour produire plus de ressources et réaliser des actions bien plus efficaces. Enfin on termine son tour, en enrichissant sa main de cartes en en prenant une dans la rivière.

Zapotec – plateau personnel

 

À la fin de la manche, on réalise un décompte selon la carte présente sur le plateau. Dans le cas ci-dessous, les joueurs marquent deux points pour chaque bâtiment de leur couleur dans la zone du dieu doré. La carte que les joueurs n’ont pas prise dans la rivière n’est pas défaussée mais placée sur le plateau et déterminera le décompte de la prochaine manche.

 

 

Par conséquent, être haut dans le niveau d’initiative a l’avantage de nous permettre de réaliser nos actions en premier, mais le dernier pourra potentiellement décider du décompte prochain. Les cartes jouées ce tour ne sont pas défaussées mais placées dans la rivière pour le tour prochain, une certaine forme de draft.

Le tour suivant selon ce que l’on aura récupéré comme ressources, notre champ des possibles va évoluer, désormais on va pouvoir gravir la piste des sacrifices, construire une partie des pyramides, et décider d’un scoring de fin de partie. On peut aussi se placer sur une carte de Rituel (encore du scoring). 

 

 

La première manche est rapidement exécutée, les manches suivantes vont s’allonger, surtout les deux dernières où l’on va tenter d’optimiser au mieux pour chercher la victoire. En plus des points que l’on aura récupérés durant la partie, on en marquera selon notre avancée sur la piste sacrificielle, mais aussi sur les constructions des pyramides, et les cartes rituels. Les pyramides, si elles sont terminées, donnent plus de points aux joueurs qui ont participé à leur construction.

Zapotec, le jeu qui Mexique ?

Fabio Lopiano réussit un tour de force, la mécanique est rapidement intégrée et les règles sont simples, pourtant cela devient très vite calculatoire. Les dilemmes sont importants, l’optimisation est cruciale et il faudra réfléchir en planifiant avec un petit coup d’avance. Les parties sont très rapides, à deux ou trois joueurs on ne dépasse pas l’heure de jeu, à quatre guère plus (entre une heure et une heure trente). On perçoit rapidement la marge de progression d’une partie à l’autre.

Zapotec – objectifs

 

Pour autant, après plusieurs parties dans des configurations différentes, j’aurais quelques petites réserves à formuler. La première concerne l’ouverture du jeu qui va probablement être la même à chaque partie, à savoir construire deux bâtiments pour pouvoir préparer sa phase de production suivante et avoir un moteur de jeu puissant. Le plus gros grief concerne la séquence d’action, en effet à votre tour, vous faites toutes vos actions, et elles sont nombreuses et ne peuvent être faites à la légère. Par conséquent si à deux joueurs cela va très vite, à trois joueurs, un petit peu moins mais ça reste acceptable. En revanche à  quatre joueurs vous devez attendre que les adversaires jouent l’entièreté de leurs tours. Si vous êtes le quatrième dans l’ordre du tour, vous allez avoir tendance à vous désengager de la partie, d’autant que cela ne sert trop à rien de réfléchir hors de votre tour, car il est probable que d’autres joueurs aient pris les tuiles technologies que vous désiriez, ou les constructions que vous aviez ciblées.

Zapotec – tuiles technologie

 

Le thème est totalement anecdotique, Zapotec est un jeu très mécanique. Si l’on a apprécié l’exercice de style, le jeu est tout de même très sec et serré, il vous manquera probablement une action pour finir en apothéose. Il a un game design très vieille école, les erreurs ne sont pas pardonnés.

Si on retrouve le game design de Fabio Lopiano (comme la matrice), Zapotec s’il est plus léger que Merv, est tout aussi abstrait et mécanique, mais on a perdu sur le chemin le plaisir que l’on avait ressenti avec Calimala ou Ragusa où l’on ne s’arrête jamais de jouer, pas de temps mort entre les tours.

Au final, Zapotec propose une mécanique intéressante avec de la combo, de l’optimisation tout cela dans une durée relativement maîtrisée. On peut regretter les ouvertures assez scriptées d’une partie à l’autre, mais surtout il semble que la configuration idéale soit trois joueurs, à deux on perd un peu en interaction tandis qu’à quatre on perd en investissement. La rejouabilité est plus ou moins assurée par les cartes Rituels, mais reste assez limitée.

 

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