Sortons Jouer à Montpellier pour la 14e édition (Bomb Busters, Word Traveler, Onix, Harmonies, Médium, Luminos…)

Ce week-end avait lieu la 14e édition du festival ludique de Montpellier, un événement convivial qui monte qui monte, prenant d’année en année un peu plus d’ampleur et de rayonnement local et national. 

L’organisation peut annoncer un flux de 11 800 visijoueurs (pour reprendre l’expression de l’Alchimie de Toulouse – 3/4/5 mai prochain – une interview à ce sujet bientôt dans nos colonnes) sur deux jours, accompagnés par plus de 200 bénévoles sur les 300 tables de jeux. Une augmentation du public en légère hausse par rapport à l’an dernier (11 000 personnes), sachant que le week-end prenait place durant les vacances scolaires ce qui entraîne généralement plutôt une baisse de la fréquentation. 

Un festival à taille humaine, avec un Corum à l’entrée gratuite, qui restait fluide dans sa circulation même si, à ses heures de pointe, les tables libres commençaient à se raréfier dangereusement. 

Un véritable succès pour cette édition s’exposant sur trois étages qui ont su mêler jeux de société modernes, tournois de jeux de figurines & de cartes (Star Wars, Lorcana, Pokemon), jeux de rôles, escapes, jeux tradi et rétro. N’oublions pas la présence de l’asso jeux et histoire qui proposait un focus sur les jeux à thème historique, un stand BGA pour s’essayer au j2s par écran à travers un tournoi et des expositions sur le jeu comme objet culturel ou le métier d’auteur… 

La grande nouveauté cette année, c’était le prix de l’illustrateur/trice, qui fut décerné à Maëva Da Silva pour l’ensemble de son œuvre et de son apport à la création ludique. 


Directrice artistique chez Libellud, vous avez déjà pu admirer le travail de cette artiste française sur du
Dixit ou du Mysterium (Park, et Kids) mais aussi Deus, When I Dream, Dragomino, Le petit prince : Voyage vers les étoiles, Château Aventure… et bien sûr, sur le tout chaud Harmonies (qui, et c’est assez malheureux de le souligner, n’affiche pas le nom de son illustratrice sur sa lumineuse cover). Harmonies était sans conteste (une fois encore !) le jeu du week-end, les tables ne désemplissant pas et la boutique officielle du festival étant sold out le dimanche.

Maëva nous confie : « Lorsque j’ai reçu la nouvelle m’informant que j’avais gagné ce prix, je n’y croyais pas. Il m’a fallu relire le mot de Christophe, le Président du Festival de Montpellier [Ndlr Christophe Fiorio] à maintes reprises pour me dire que peut-être cela pouvait être vrai ! J’ai vraiment été très touchée d’apprendre que ce prix récompensait non seulement un·e illustrateur·ice pour un jeu sorti durant l’année en cours, mais également, et surtout, le travail artistique d’une carrière. C’est un prix qui prend beaucoup de sens au vu de mon chemin professionnel et personnel qui ne fût pas de tout repos mais qui m’a tant fait évoluer ! J’ai pu partager avec le public mon amour du jeu et de la peinture ainsi que ma démarche créative. Ce sont des moments d’échanges forts et importants pour moi. Enfin, dans un monde qui court si vite, je tenais à remercier sincèrement le jury de ce prix qui, par cet acte engagé, montre l’importance de l’humain derrière la création, cette humanité dont on a profondément besoin et qui est si belle. »

Christophe Fiorio, à la tête du festival, nous livre : “Cette édition marquait une nouvelle étape pour nous avec la mise en place d’un nouvel espace de 1300m2 dédié aux tournois, initiation jeux de cartes et figurines, jeux de rôle et jeux à rôles cachés mais surtout avec la mise en place du prix de l’illustratrice ou illustrateur de l’année. C’est un prix qui nous tenait à cœur car s’il existait des prix qui récompensait des couvertures ou des illustrations d’un jeu en particulier, aucun prix n’était vraiment centré sur la personne. Nous voulions vraiment mettre en avant l’artiste pour son œuvre et son action. Un prix qui, pensons nous, en cette période où l’IA tend à effacer l’humain et l’expression artistique et sensorielle d’une œuvre, prend tout son sens. Et nous sommes vraiment très heureux que Maëva soit la première lauréate du prix. Elle représente vraiment ce que nous imaginions pour ce prix : une belle personne, une artiste formidable qui travaille bien sûr pour illustrer des jeux de société mais qui développe aussi son propre univers, et peint, dessine des œuvres qui reflètent sa sensibilité et ses émotions.”

Christophe et Maëva

 

Vous pouvez d’ores et déjà noter la date de la prochaine édition de Sortons Jouer, ce sera les 26 et 27 avril 2025.

Nous avons joué un peu figurez-vous ! 

Mais à quoi ? 

 

Harmonies

Dans le dernier Libellud, chacun va développer son petit paysage en plaçant (et empilant) des jetons colorés (tirés du sac) sur son plateau personnel, avec en sus l’action facultative de récupérer une carte objectif d’animaux parmi un marché de cinq cartes. Chaque paysage offre différentes configurations pour marquer des points, tandis que les animaux permettent encore d’autres scoring possibles – vous allez donc vous mettre à l’œuvre pour choisir et configurer vos jetons de façon à ce que tout se combine au mieux.

Accessible mais profond, le challenge est satisfaisant pour les neurones, et la DA l’est encore plus pour les yeux. Un Just Played arrive bientôt pour vous en dire plus car il le mérite bien ! D’ailleurs, ce mois-ci sur Ludovox, il est à gagner à la tombola du Tipeee si vous nous lâchez un tip 😉  

Un jeu de Johan Benvenuto Illustré par Maeva Da Silva Edité par Libellud Distribué par Asmodee

 

Luminos

Dans Luminos (Schmidt Spiele), à chaque tour on choisit une tuile du marché et on la place adjacente à une autre, chacun sa zone de ciel étoilé, car sur ces tuiles sont présents des soleils, des étoiles et des lunes, de 0 à 3. Quand on ferme un carré de quatre tuiles, on compte le nombre de chacun des éléments et on note le(s) plus faible(s) exemplaire(s). 


Par exemple, si mon carré montre 3 lunes, 3 soleils et 4 étoiles, je score 3 lunes et 3 soleils. Il faut construire son ciel et tenter d’équilibrer tout autant les carrés en éléments (afin de scorer plusieurs éléments en une prise) que d’équilibrer les lignes de notre carnet de score, car en fin de partie, seules les lignes complètes (avec les trois icônes) comptent dans le score. C’est malin comme du Knizia (mais c’est un jeu de l’autrice Kirsten Hiese), mais pas facile de savoir construire son ciel étoilé et de lire les opportunités. Un jeu agréable, mais surtout à jouer à peu nombreux, car à part le contre draft, on construit dans son coin pour tenter d’optimiser son score. Par contre, en jeu solo relaxant,
Luminos pourra séduire. 

Natosaurus

Un jeu de kirsten hiese Illustré par Lukas Siegmon Edité par Schmidt

 

NéVaches

NéVaches (Kuhfstein en VO, le jeu de mots ne s’est pas perdu en route) propose lui aussi (décidément) un jeu de construction de paysage, ici chacun pose des tuiles du marché pour former un environnement composé de champs fleuris, de lacs cristallins et de fermes pittoresques. Quand vous voudrez scorer un pattern, vous devrez envoyer vos Meeples vaches dans les lieux – ce qui veut dire qu’il faudra aussi les ramener au bercail (pour mieux les redéployer au bon moment, sachant que seuls des Meeples adjacents peuvent être récupérés).

Il y a toujours quatre cartes de pattern (et leurs points) et cinq tuiles de paysage. Celui dont c’est le tour a deux actions parmi quatre possibilités, prendre une tuile, prendre une carte, jouer sa carte et envoyer ses vaches sur les tuiles pour scorer si le pattern demandé est exécuté, ou récupérer ses vaches. On ajoute à cela des objectifs personnels ainsi que d’autres points potentiels dans la pose des arbres (5 points par arbre, ce n’est pas négligeable). Le jeu se termine après le tour au cours duquel un joueur a franchi la barre des 65 points – et oui c’est une course ! Celui qui a alors le plus de points gagne. Comme dans Harmonies, vous essayerez de planifier, tout en saisissant les opportunités quand elles se présentent, sans omettre de construire sur les modèles que vous avez déjà pour maximiser vos PV. Un jeu tout juste “Initié” (les règles sur la reprise des vaches le sort de la catégorie Famille) très accessible qui atteint un niveau de profondeur intéressant. Malheureusement pour lui, Harmonies est beaucoup plus beau !

Un jeu de Rita Modl Illustré par Stefan Sonnberger Edité par Schmidt

 

Médium

Dans ce jeu compétitif signé Anthony Chaillan pour 1 à 4 joueurs, chacun essayera de réaliser une combinaison de cartes, appelée Prédiction – ou de deviner les Prédictions que tentent de faire les adversaires.

Vous avez 5 cartes disposées sur votre présentoir. Chacune dispose de trois informations (symbole, valeur, couleur), et le dos de vos cartes en révèle une parmi ces trois aux autres médiums. Pour marquer des points, vous devez essayer de réunir une combinaison de cartes (votre objectif est imposé par une carte Prédiction) sans que vos adversaires vous interceptent en cours de route. Le premier joueur à atteindre les 6 points l’emporte. Au centre, un marché de cartes vous attend (appelé la Galaxie), duquel vous pourrez échanger une carte à votre tour : attention en faisant cela, vous devez retourner votre carte au passage, dévoilant le recto ou le verso, selon le cas, et donnant donc d’autres informations à la tablée sur votre jeu. Observez ce que font les autres et retenez un max d’info pour pouvoir les accuser. Que défaussent-ils, que reprennent-ils en main ?

Vous pourrez aussi activer un de vos trois Pouvoirs : cela pourra être par exemple de piocher une nouvelle Prédiction (vous pouvez en avoir plusieurs), utiliser une carte de la Galaxie pour accomplir une Prédiction, échanger une carte avec un adversaire, etc. Si vous avez compris ce qu’un autre médium tentait de réaliser comme Prédiction vous pouvez l’accuser au début de votre tour. Attention, en cas d’erreur, vos points se fragilisent : un PV est représenté par un fragment côté blanc, on le retourne alors côté rouge, et la prochaine erreur il sera brisé (défaussé). Subtil et joliment édité, ce Médium peut peut-être durer plus longtemps que les 30 minutes annoncées avec certains joueurs. 

Un jeu de Anthony Chaillan Illustré par Barbara Ciardo Edité par Don’t Panic Games

 

Word Traveler 

L’auteur de Decrypto a-t-il frappé encore aussi fort avec ce nouveau jeu d’association d’idées et de mots ? Word traveler est complètement coopératif, nous sommes des touristes à New York, et nous cherchons à faire comprendre à nos collègues où nous souhaitons aller. Car chacun d’entre nous a une grille secrète qui représente le plateau de 49 cases (les centres d’intérêt de la ville), grille sur laquelle on trouve des points à marquer si on passe par ce point d’intérêt (la statue de la liberté en A5 par exemple). On a un sablier de 4 mn pour créer chacun dans son coin son parcours idéal dans sa tête, parcours que nos partenaires de jeu vont devoir deviner. Comment ? Parce qu’on aura associé des mots (avec 10 cartes d’adjectifs : sale, espiègle, traditionnel, etc) avec des directions afin que les collègues comprennent sur quelle case mon pion veut s’arrêter (par exemple vigilante + noble, pour faire deviner la statue de la liberté).

C’est une idée intéressante que Thomas Dagenais-Lespérance nous propose, mais qui ne révolutionne pas le monde du jeu d’association d’idées coopératif. On a du mal à comprendre certains choix éditoriaux comme le système de points final ou l’utilisation des jetons direction (a priori pas placés sur le plateau si on a eu la bonne explication) et le fait que rien ne nous empêche d’aller au bout d’une ligne afin de scorer éventuellement tous les points d’intérêt rencontrés. Le jeu, finalement pas assez contraignant, un peu trop lâche, ne nous a pas plus convaincus que ça malgré une idée centrale fort attirante. En tout cas, c’est plus familial que Decrypto. (Attention, il est présent sur BGA mais c’est un jeu social où les discussions sont au cœur de l’expérience !).

Natosaurus

Un jeu de Thomas Dagenais-Lespérance  Illustré par Peter Slattery  Edité par Office Dog Distribué par Asmodee

 

Bomb Busters

Un nouveau coopératif à communication restreinte, voila ce qu’est Bomb Busters, un gros format pour l’éditeur Cocktail Games qui cible habituellement le très grand public. Bomb Busters débute avec des petits niveaux sur des scénarios peu compliqués, mais promet une forte augmentation de la difficulté tout au long des 66 niveaux contenus dans des enveloppes. Nous n’avons pu jouer qu’au niveau 4 proposé en festival.


Il nous faut couper les fils de la bombe, par paire, pour des couples de numéros allant de 1 à 12. Les numéros sont tirés au hasard en début de partie, répartis entre nous et mis face cachée pour les collègues. Il sont classés sur un présentoir, du plus petit au plus grand, pour permettre de faire de la déduction, avec de l’information incomplète qu’il vaut faudra tenter de parfaire. Tous les fils peuvent être coupés si on les coupe par deux, et c’est perdu si on coupe le seul fil 8 ½. Pour nous aider quelques pouvoirs qui pourront se débloquer. Et ça, ce n’est que le niveau le plus simple, viendront plus tard des fils 8,1 et autres gourmandises pour les cerveaux surentraînés à Hanabi du même éditeur. Une belle proposition coop, attendue pour septembre.

Natosaurus

Un jeu de Hisashi Hayashi  Illustré par Dom2D  Edité par Cocktail Games  Distribué par Asmodee

 

Onix

Un petit jeu de cartes de Florian Sirieix (qui proposait un “gagne ton auteur”) & Benoit Turpin où votre objectif est de collecter 4 symboles de pierres précieuses, représentées sur des cartes. Vous débutez avec une collection de départ de 4 cartes, et les autres sont arrangées en 5 piles disposées en cercle au centre de la table. À votre tour, vous choisissez une gemme visible sur les piles et récupérez une ou plusieurs cartes avec cette gemme, après quoi vous pouvez activer son pouvoir. Si vous avez complété une série, elle va dans votre réserve, vous rapprochant de la victoire.

L’opportunisme est le fil rouge d’Onix, mais vous tâchez de repérer quel pouvoir vous permettra de prendre les autres par surprise. Des parties rapides pouvant réunir 2 à 6 joueurs dès 7 ans, le jeu sortira en mai prochain chez Blue Cocker. 

Un jeu de Benoit TurpinFlorian Sirieix  Illustré par Henri Kermarrec   Edité par Blue Cocker Games

 

Surfosaurus Max

Un thème improbable de dino faisant du surf pour ce jeu de cartes malin comme tout que nous avons eu la chance de découvrir en dehors du festival. 84 cartes avec des chiffres de 1 à 12 en 7 couleurs différentes. À votre tour, vous jouez 1 carte de votre main (que vous posez sur la table devant vous) et piochez 1 carte de la pioche. En jouant, vous visez de réaliser, coopérativement, une combinaison de cartes directement inspirée du Poker (suite, carré, flush, quinte…) : le hic, c’est que tout le monde ne marquera pas autant de points. C’est du chacun pour soi avec un seul gagnant mais où les négociations iront bon train avec des alliances plus qu’éphémères. Chaque joueur qui a contribué de une ou plusieurs cartes à la combinaison gagnante reçoit des points pour cette ou ces cartes. Lorsque plusieurs personnes ont joué les mêmes couleurs ou valeurs, les points sont partagés, mais minimisés, étant moins rentables comme ça. Globalement, plus la valeur de la carte est faible, plus elle vaudra de points car plus il est difficile de marquer avec les petites cartes.


Surfosaurus Max est une très belle découverte, un jeu accessible inspiré du Poker, très dynamique et ultra interactif puisque la tchatche est le maître mot ici. Et avec des dino qui font du surf, sérieux ! Bref, du fun. 

Un jeu de Ikhwan Kwon  Illustré par Lisa GoldsteinMatthias Mödl

 

Prey Another Day

Une autre partie jouée en dehors du festival. Le jeu se déroule en plusieurs manches. À chacune, les joueurs peuvent choisir une carte parmi leurs 5 animaux. Les animaux les plus forts peuvent chasser plus tôt, mais les plus faibles rapportent plus de points. Un jeu de double-guessing ultra compact, condensé en quelques cartes, qui gagnera à être joué en configuration haute (plutôt 4 ou 5 que 2 ou 3) pour donner tout son sel (vous pourrez être éliminé de la manche, mais no stress, la partie dure 15 minutes).

L’espace de décision est plus grand (et sournois) que ce que l’on pourrait imaginer de prime abord. Nous sommes pourtant dans une sorte de variante multijoueurs du chifoumi avec ce Citadelle simplifié (ici, que des assassins !). L’aspect méta évolue en permanence jusqu’au climax de la dernière chasse. Plus la partie avance, plus les retournements de cartes sont des retournements de situations. On vous l’avait déjà dit à Essen dernier, et derechef à Cannes, mais Prey Another Day est décidément une excellente pioche. Certains le voient comme prochain Spiel des Jahres, pour vous dire ! La localisation est assurée par Blackrock avec de nouveaux visuels signés Stéphane Escapa (mais nous on aimait bien la touche indé de Nele Brönner !). 

Un jeu de Brett J. GilbertMatthew Dunstan  Illustré par Nele Brönner  Edité par Edition SpielwieseGood Little Games  VF : Blackrock

 

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