Rise of the Necromancers : J’ai succombé. Plusieurs fois.

Rise of the Necromancers (Thorbjørn Christensen & Christoffer Kyst) fut un jeu initialement édité en 2018 chez Sore Loser Games mais jamais traduit en français malgré une assez belle aura du côté des amateurs d’Ameritrash. Une lacune bientôt réparée puisque la maison Mythic (Super Fantasy Brawl, Steam Watchers…) s’apprête à lancer une campagne participative ce mois-ci (notre news). 

Voilà un jeu qui joue avec le côté obscur de la force puisque vous êtes invité à incarner un Nécromancien. Au départ, un Nécromancien en herbe, qui doit se faire un nom, puis qui deviendra de plus en plus balèze en collectionnant des sorts et des objets magiques, en levant son armée impie de morts-vivants putrides jusqu’à pouvoir oser attaquer des villes, descendre dans les pire donjons et s’octroyer pourquoi pas, la chaire d’une académie de magie noire.

Concrètement, nous sommes chez un descendant lointain de Talisman. Ça peut potentiellement refroidir présenté comme ça, mais cela permet de cerner tout de suite mieux la nature de la proposition, où le hasard aura son mot à dire. Cela dit, Rise of the Necromancers est tout à fait agréable à jouer pour ce qu’il est, et nous avons apprécié chacune de nos parties, même débattu longuement après chacune d’elles des possibilités offertes par le jeu. Bref ne jugez pas l’habit sur cintre, il faut le voir porté, et même s’il peut sans doute être un peu retouché aux ourlets, il n’en reste pas moins que cette robe noire tombe plutôt bien. 
À ce propos, Mythic devrait s’amuser à mettre les mains dans le cambouis pour retoucher, pour le mieux on l’espère, certains rouages. Nous jugerons ici sur la seconde version que nous avons pu tester, avant les révisions Mythiciennes donc. 

« T’as pas mouru » 

Si Rise a quelque chose d’un fils de Talisman, il n’est pas non plus sans aucune filiation de genre avec un Mage Knight. Vous allez entrer en compétition frontale avec les autres joueurs dans une guerre d’influence. Vous souhaitez étendre votre domination sur la carte du monde. Posséder une cité vous permettra de la taxer, et ainsi de gagner des ressources tout à fait indispensables à votre hobby favori, à savoir redonner quelques couleurs aux trépassés. Vous pouvez aussi asseoir votre domination suprême en accomplissant des quêtes dans les donjons, ou en collectant des cartes (objets ou sorts) potentiellement fort utiles. Tout au long du jeu, les Nécromanciens peuvent augmenter leurs capacités de combat et de mouvement en levant leurs armées. Les serviteurs d’un Nécromancien peuvent également être laissés derrière lui pour protéger les villes et les donjons conquis.

Notre vœu est de récupérer le trône du roi Nécromancien et pour cela il nous faudra poser nos 13 pierres tombales. Bonne nouvelle : tout (ou presque) ce que l’on va faire dans la partie permet de les placer d’une façon ou d’une autre, à savoir capturer et conserver des villes, explorer les donjons avec succès, devenir archimage d’une académie… et il y a aussi cette possibilité de créer des collections de cartes (objets et sorts) qui est très bien vue car ces pierres tombales sont posées et pas “volables” tandis que les autres peuvent être disputées jusqu’à la dernière minute de jeu. 

Le hasard, je le disais d’emblée, sera présent quoi que vous fassiez, et c’est cela qui est au final bien malin : surtout au début, quel que soit votre choix, l’issue de vos actions reste toujours incertaine. Pour compléter une collection, il faut tirer trois cartes, et on ne sait pas ce que la pioche nous enverra. Pour attaquer une cité, il faut lancer des dés, et on ne sait pas si les dés seront avec nous. Pour descendre dans un donjon, on pioche une carte et on ne sait pas du tout de quoi il retournera (sans doute est-ce encore la voie la plus hasardeuse de toutes).

Bon point : Toutes ces actions sont rapides, on ne passe jamais 10 minutes à résoudre un combat, même les plus épiques. Pourtant, et malgré tout, ces actions sont à peu près toujours satisfaisantes (je reviendrai après sur le “à peu près”). C’est un peu comme cela que l’on pourrait résumer le gameplay de ce Rise of the Necromancers d’ailleurs : simple, mais gratifiant. En effet, rares sont les actions qui découlent sur une déroute complète, mais quand cela arrive, on se remet bien vite en selle, tant tout tourne très vite autour de la table. Il n’est pas inhabituel au début que votre seule action à votre tour soit “je me déplace d’une zone, je lance le dé, je gagne la ressource indiquée, au suivant”. Et c’est sans doute aussi là où le jeu donne un départ un peu trop mou : il nous faut plusieurs tours à farmer tout doucement avant de commencer à pouvoir vraiment jouer avec le palpitant du jeu.   

À peu près satisfaisant donc, car on a l’impression que cette montée en puissance perd un peu de temps inutilement à l’allumage. Peut-être pourrait-on débuter avec quelques menues ressources, et peut-être pourrait-il y avoir des cités encore plus fortes à conquérir pour déplacer le curseur vers plus de peps…? Mais c’est un reproche qui ne doit pas éclipser les belles qualités de cet Ameritrash bien équilibré par ailleurs. On aime placer nos pierres tombales un peu partout pour marquer notre progression, on aime surveiller et attaquer les autres joueurs qui n’hésiteront pas à venir réclamer leurs biens si on les houspille d’un lieu, le tout se jouant dans une guerre d’influence bien sur le fil.

Avec ces Nécromanciens, on ne manigance pas longtemps seul dans son coin, et cette course entre personnes qui adorent la mode gothique se révèle au final plutôt enlevée et réussie. Chaque action incarne une micro prise de risque, et reste dans la plupart des cas gratifiée (même quand la récompense n’est pas celle que l’on attendait, elle n’est jamais vaine et servira plus tard). La sauce dark classique prend bien, d’autant que la direction artistique est dans l’ensemble cohérente et bien menée (on y retrouve Jonas Springborg qui a par exemple œuvré sur Star Wars : Bordure Extérieure). 


Blood Hunter

Le “rise” du titre s’avère très fidèle à l’expérience avec cette sensation de montée en puissance (ah, ces grandes et arrogantes cités qui finissent par plier sous le joug démoniaque de nos armées de dragons squelettes, que c’est bon !! Mais hum, je m’emporte…). Et surtout, ces Necromanciens savent raconter des histoires variées. Chaque partie se développe différemment, selon votre perso de départ et la stratégie que l’on choisit de suivre. Chaque Nécro offre ses menus avantages, et vos parties peuvent ainsi s’orienter dans diverses voies spécialisées. Vous aimez le frisson des donjons ? Essayez d’augmenter la puissance et les attaques de votre Nécromancien, car il n’y a que lui qui arpentera ces couloirs-là ! Vous voulez prendre des villes en pagaille et amasser des ressources ? Levez des armées d’os ! Vous rêvez d’être directeur d’académie, mais êtes-vous plutôt branché Putréfaction, Brume, Sang ou Ossements ? Essayez donc de cumuler un max de cartes et de sbires d’une même catégorie ! Tel perso misera tout sur sa horde de zombies qu’il pourra faire exploser, tel autre deviendra un maître du combat à la faux, etc.


Ici, après trois parties, du fait du hasard de la pioche (pas totalement incontrôlable avec ses trois cartes, mais tout de même opportuniste) il est clair que nous n’avons pas fait le tour de toutes les possibilités offertes par le jeu. On a l’impression d’avoir à chaque fois développé notre Nécromancien de manière différente et on garde ce sentiment qu’il reste encore plein de possibilités de combinaisons. Bref, le goût de reviens-y est bien là. 

Expanse

Cerise sur le crâne, la première extension a su nous parler avec sa variante coopérative (classique mais convaincante avec ses forces de la lumières, assez violentes, il faut le dire) et l’ajout des Démons qui permettent un mode “coopétitif” bien retors (on joue ensemble contre la Lumière, mais un seul peut l’emporter). À noter qu’un mode solo est aussi possible avec cette boîte. 
De surcroît, une nouvelle extension avec Undead Sea devrait être proposée par la campagne. Celle-ci fait déménager les Nécromanciens sur un autre plateau. C’est-à-dire qu’à force d’avoir ravagé la terre, nos nécros n’ont même plus assez de cadavres pour exercer dignement. Ils doivent donc se rendre sur des récifs pour déverser leur âme dans un vaisseau naufragé et le relever des eaux et des rocs. Ce vaisseau sera asymétrique et pourra s’endommager au gré des vents capricieux. Utile, il peut transporter vos troupes spectrales, mais aussi effectuer des batailles navales… et qui dit naval dit monstres marins. Les Nécromanciens peuvent ressusciter les cachalots et autres monstres aquatiques pour garder leur bateau. Dernier point, les conditions de victoire changent : il faudra placer ses 13 marqueurs de domination
et conquérir au moins une cité des Terres de Lumière, loin tout à l’Ouest…

 

Au final, retrouver ce feeling un peu à l’ancienne de ce que l’Ameritrash fait de moins en moins, à savoir assumer pleinement d’user des dés pour du pur aléatoire, tout en maintenant une tension équilibrée sur les divers chemins menant à la victoire, n’est finalement pas si courant sous nos latitudes. Rise of the Necromancers est un jeu avec de la chance certes, mais aussi et surtout de la prise de risque et de l’appropriation d’opportunités. Si vous êtes friands de ce genre de frissons, vous devriez garder un œil sur la campagne à venir.  

 

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2 Commentaires

  1. ochsenbein 07/01/2022
    Répondre

    Le thème me plait beaucoup. J’ai peur que le démarrage mou me refroidisse 🙁

    • Shanouillette 11/01/2022
      Répondre

      Oui c’est mou au début, mais ça s’accélère quand même ensuite, avec souvent un crescendo final bien tendax.

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