Les mâchoires du lion : Gloomhaven en concentré

Est-il encore nécessaire de présenter le jeu Gloomhaven ? Ce dungeon crawler a pris place depuis belle lurette en tête du classement BGG, et pour le moment on ne voit pas bien qui le détrônera. Avec ses cent scénarios, à raison de 2 à 3 heures par partie, sa vingtaine de personnages jouables, sa tonne de monstres et d’équipements différents, sa multitude de tuiles pour créer les lieux d’affrontements, sa boîte immense, Gloomhaven est le jeu de la démesure. Et son successeur Frosthaven, prend un chemin similaire.

C’est d’ailleurs cette démesure qui m’a longtemps tenu éloigné du jeu. À quoi bon acheter une boîte si énorme si on y joue trois fois ? Et puis, vais-je trouver une équipe de joueurs prêts à me suivre dans cette folie ? Bon, j’ai finalement craqué et c’est un des jeux les plus joué de ma ludothèque maintenant. Reste que cette problématique est certainement d’actualité pour pas mal de gens, et c’est dommage, car au delà de sa démesure, il offre un système de jeu qui est VRAIMENT top. Oubliez les deux actions à dépenser à notre tour, chaque personnage a un paquet de cartes uniques, avec deux effets sur chaque carte et il faudra trouver comment les combiner efficacement, chaque personnage ayant sa propre façon de jouer. Les autres donjons crawler paraissent ainsi bien fades à côté.

Et voilà donc qu’arrive Jaws of the Lion, Les mâchoires du lion en français, une extension/standlone/version light (oui les trois en même temps) de Gloomhaven et toujours M. Childres à la manœuvre. Dans une boîte plus petite, avec moins de tout, son objectif est de faire découvrir le jeu à un maximum de joueurs, notamment ceux qui comme moi, auraient été intimidés par le premier opus. Voyons voir si le pari est gagné.

Moins de place dans la kalax

 

Ce qui ne change pas

Bon, que l’on soit clair, Jaws of the Lion, c’est Gloomhaven au niveau des mécaniques. Pas de surprises de ce côté là. Vous aurez toujours la même mécanique de jeu de scénario en scénario, et chaque personnage aura sa façon de jouer. Mais attention, c’est bien un autre jeu. Ce n’est pas Gloomhaven allégé, dans le sens où vous pouvez jouer à l’un puis à l’autre sans problème et sans refaire les même scénarios. 

Vous pouvez vous baladez dans les donjons de Gloomhaven et Des mâchoires du lion pour les comparer.

Vous aurez quatre personnages inédits : Le garde rouge, facile à jouer et terrifiant d’efficacité, la gardienne du vide, qui fait agir les autres personnages (alliés ou ennemis) comme elle le souhaite, le lanceur de haches, terriblement efficace à distance, et enfin le démolisseur qui fait exploser tout et n’importe quoi. À part le dernier que je n’ai pas joué, tous ont une identité propre, différente de ce qu’on a pu voir dans Gloomhaven, c’est un plaisir de les jouer. Tous peuvent d’ailleurs être utilisés dans la version originale.

 

Nos protagonistes

 

Vous aurez également une nouvelle aventure, complètement décorrélée de celle de son grand frère. Les monstres seront pour beaucoup semblables, avec quelques nouveaux cependant.

Bref, c’est vraiment deux jeux qui partagent le même univers et la même mécanique, mais qui chacun raconte des choses différentes. Avoir l’un n’empêche pas de jouer à l’autre.

Ce qui est amélioré

Jaws of the Lion propose quand même des améliorations notables par rapport à son grand frère. Au premier rang desquelles, une introduction en douceur des règles. Les quatre premiers scénarios vont vous faire découvrir comment fonctionne le jeu, en ajoutant les éléments au fur et à mesure. Au vu de la richesse des mécanismes, ce n’est pas du luxe. Le pendant c’est que les premières parties seront donc un peu plus chiches, moins enthousiasmantes, d’autant que vous aurez des cartes de « découvertes » plus simples (et moins fun) que les cartes normales d’un personnage.

Globalement, les règles ont aussi été simplifiées sur certains points. Enfin, non ce n’est pas exactement ça. Ce n’est pas qu’elles aient vraiment changé, c’est que les mécanismes qui créaient le plus de questions ont été escamotés. Par exemple, exit les invocations ou les améliorations de decks qui permettaient de piocher des cartes supplémentaires (et qui posaient question au niveau des attaques avec avantages/désavantages).
Le livret de règles est d’ailleurs pensé « à la FFG », c’est à dire avec un livret qui nous prend par la main et nous permet de jouer tout de suite, et un « glossaire » qui donne plus de détails sur des points spécifiques. On aura notamment des annexes qui précisent des sujets particuliers comme l’IA des ennemis. C’est bien, mais pas toujours pratique quand c’est l’interaction de deux mécaniques qui posent question, car on ne sait pas dans quel paragraphe chercher.

L’énorme atout de Jaws reste sans aucun doute sa facilité de mise en place : en effet, son grand frère utilisait moult tuiles à trouver, à agencer correctement et à mettre du bon côté pour créer ses donjons. L’intention était bonne, chaque niveau devait avoir son identité propre, et le jeu était très généreux en matériel pour représenter cela. Sauf que d’une part, il fallait créer son propre système de rangement pour s’en sortir et surtout… et bien le résultat escompté n’était pas atteint. Chaque niveau, à part sur sa topologie, ressemblait fort aux autres.
C’est donc là qu’arrive la bonne idée de Jaws, avec son livret de scénario qui va nous servir… de plateau de jeu ! Au début d’une partie, il suffit de l’ouvrir à la bonne page et hop c’est prêt. Ou presque : il faut ajouter les ennemis, les pièges et les trésors, mais tout cela est indiqué directement sur le livret (avec au passage, une meilleure iconographie). On gagne ainsi un temps considérable. Surtout, chaque scénario bénéficiant de son illustration spécifique, il sera bien plus immersif. Une embuscade sur la route ne sera pas la même chose qu’un égout ou la demeure d’un riche marchand. On est donc ici gagnant sur tous les plans ! Et je ne parle pas de l’économie de matériel.

 

L’histoire globale est ici plus courte. Elle se compose de 25 scénarios maximum. Vous n’en jouerez réalité que 21 à cause des embranchements. On suit un groupe de mercenaire sur la piste de mystérieuses disparitions aux conséquences plus graves que prévues. Rien que du très classique, mais l’histoire ne se perd pas en dizaines d’embranchements, et on la suit sans trop de problèmes, ce qui n’était pas toujours le cas dans Gloomhaven. Elle sera moins riche, d’accord, mais au moins elle nous garde sur les rails du début à la fin, et on n’aura pas le sentiment d’avoir raté quelque chose. De plus, elle sera assez généreuse en terme de bonus d’expérience, et vous passerez assez vite les niveaux, ce qui donne une agréable impression de progression.

 

Le lieu des aventures, plus petit

 

Ce qui est un peu moins bien

Si l’histoire au globale est plus ramassée et plus intéressante, ce n’est pas vraiment le cas des scénarios. Certes, dans le premier jeu, l’objectif était très souvent « tuer tout ce qui bouge ». Dans Jaws, c’est encore plus le cas. Dommage, car l’extension de Gloomhaven, sortie avant, semblait avoir amélioré ce point là.

Une histoire plus directe implique moins d’embranchements et de choix, ce qui peut en décevoir certains. C’est aussi ne plus avoir la possibilité de changer de personnages pendant la campagne, c’était un des plaisirs du jeu. Au pire rien ne vous empêche d’échanger de personnages avec les autres joueurs pendant la campagne. En échange, Jaws propose des boîtes « secrètes » qui se débloqueront au niveau 5 de vos personnages, et donneront un petit twist de gameplay. Bon, j’ai trouvé cela plus anecdotique qu’autre chose mais pourquoi pas.

On aura aussi un peu moins d’objets à acheter, mais on nous en proposera aussi de nouveaux.

Enfin, ma dernière critique concerne le tableau qui sert à déterminer la valeur de l’expérience, de l’argent et des dégâts des pièges en fonction du niveau du scénario. Il est tout simplement perdu au milieu du livret de règles, et on passe son temps à le chercher en début et fin de partie, ce qui est assez agaçant, alors que le mettre au dos du livret aurait été bien plus pratique (et c’est ce qu’avait fait dans Gloomhaven).

Alors On y va ?

En fonction de votre profil, est ce que ce Jaws of the Lion est fait pour vous ?

Si vous avez aimé et fini Gloomhaven et son extension, et n’en pouvez plus d’attendre Frosthaven, alors allez y ! Ce n’est pas une version moins bien, ce sera juste du contenu en plus pour vous.

Si vous voulez découvrir Gloomhaven, mais avez peur de ne pas aller au bout de cette énorme boîte, celle-ci est faites pour vous ! C’est tout aussi bien que l’original, la majorité des choses qui ont changé, l’ont été pour le mieux.

Allons même plus loin : même si vous n’avez jamais entendu parlé de Gloomhaven, si je dois vous conseiller un dungeon crawler, c’est clairement devenu ma recommandation numéro 1. On a là un jeu avec une vraie personnalité, coopératif, une mécanique intéressante, des évolutions de personnages engageantes, et tout ça dans une boîte « contenue » pour ce type de jeux. N’en jetez plus, nous avons ici un hit vraiment plus accessible que son grand frère. On l’a dit, ce dernier est numéro 1 au top BGG, mais devinez qui pointe maintenant à la quatrième place ?

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4 Commentaires

  1. Groule 26/09/2022
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    Merci pour ce chouette article clair Fouilloux ! Tu as répondu à plusieurs de mes questions mais il m’en reste quelques unes :

    – JOTL me titille mais j’avais été super blasé par la lourdeur des règles sur la maintenance des ennemis dans Gloomhaven (100 trucs à retenir par coeur, des questions sans réponse sur le net…). Je ne me sens pas de devoir m’acharner 10 heures sur un jeu pour commencer à le prendre en main sans bloquer. Est ce qu’on est dans le même schéma ou bien les nouveaux apports (petites règles de ¤#%$ escamotées, nouveau livret possiblement plus complet (?)  scénarios d’intro) ont changé la donne ?

    – est SURTOUT : est ce toujours un jeu Legacy avec modification du contenu (stickers) ? Je n’aime pas ça XD

    Merci !

    • fouilloux 26/09/2022
      Répondre

      Hum, pour le premier point oui c’est un peu plus simple: on te prend par la main pour apprendre les règles, il y a une aide de résumé plus simple, donc c’est allégé de ce côté, mais je ne suis pas sur que ça change fondamentalement la donne. J’ai tendance à dire que si, mais j’ai plusieurs dizaines de parties de Gloomhaven dernière moi donc ça ne me pose plus trop de soucis. Après c’est coop: si t’a un doute, tu tranches sur ce qui te semble le plus évident et ça roule.

      – Non et oui: tu colles juste des autocollant sur la carte de la ville au fur et à mesure que tu débloque les scénarios. Cela n’apporte rien au jeu, c’est vraiment gadget et tu peux complètement t’en passer.

      • Groule 28/09/2022
        Répondre

        Merci ! Si je trouve des joueurs motivés pour 25 parties je lui donnerai peut être sa chance 🙂

        • fouilloux 29/09/2022
          Répondre

          22. Tu en sautes certaines. (et même un peu moins si tu n’est pas 4 dans le groupe, car 4 scénarios demandent la présence d’un personnage spécifique)

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