Small is beautiful # 47: 12 chip trick, sire sire, heckmeck, Flip circus, marabunta, inicio, wok up, tornaloco, marvel remix

Quand on publie ce genre de chronique en Mars, le festival des jeux de Cannes est passé par là, et on ne peut l’ignorer. Les aventuriers ludiques de ce site en ont parlé quasiment en direct. Et ceux qui n’y étaient pas ? Niveau découverte, cela ne change pas grand-chose, beaucoup de titres présentés sont souvent déjà sortis en boutique ou ne vont pas tarder. Cette année, félicitons le jury qui a mis en lumière les petits jeux et les « petits » éditeurs, et récompensé la prise de risque par rapport aux produits calibrés. Bravo donc à Trio et Faraway. Oui, on peut encore surprendre son public par des créations pleines de fraîcheur. Alors laissons venir à nous ces petits formats que nous aimons, et découvrons qui s’est glissé sur notre table ces dernières semaines.

 

Flip Circus

 

 

Suite inavouée de Ringmaster (Iello 2021) ou pas suite du tout, ces titres partagent en tout cas la même présentation (conditionnement), le même contenant (un sac), et le même thème (le cirque des années 40/50). La comparaison s’arrête là tant au niveau du matériel que des mécanismes. Il s’agit, cette fois, d’un jeu à 2 avec des jetons en plastique façon poker, affichant des personnages et leur pouvoir. Pour gagner, il faut réunir trois personnages identiques l’un à côté de l’autre et ainsi s’emparer d’une tuile à leur effigie. Pour ce faire, deux actions sont disponibles par tour : intervertir deux jetons, retourner un jeton (et donner un indice à son adversaire), activer la compétence d’un artiste, permettant de consulter secrètement des jetons (la voyante) ou d’ intervertir les positions (magicien/acrobate). Les clowns vous offrent une salve d’applaudissements étoilés. Vous pouvez alors jouer un coup supplémentaire ou regarder un jeton.

 

 

C’est le cirque ou quel bon numéro ?

La présentation est soignée de par l’esthétique liée au thème, ou encore ce sac qui donne une petite impression classe (si vous possédez Love Letter, vous savez de quoi je parle), on rentre ainsi facilement dans l’univers du jeu. La référence au jeu cité n’est pas innocente, ce circus jouant sur une épure de moyens. Bien que les pouvoirs soient présents, la direction est simple : on essaie de regrouper ou d’empêcher l’adversaire de regrouper ses pions. Les jetons étant recto-verso et puisqu’on peut les échanger, les retourner, on a vite fait de se perdre. On se concentre sur un, deux personnages et on en oublie les autres jusqu’au moment où… La dresseuse, le magicien, l’acrobate, la voyante sont là pour vous aider, Monsieur Muscle est plus difficile à manœuvrer car lourd, et seule la dresseuse aura prise sur lui.

Pour éviter que la partie ne traîne ou s’enlise, si les deux joueurs sont à égalité (chacun deux tuiles artistes sur les cinq), le premier qui fait apparaître les 5 clowns est le gagnant. On préfère un peu de panache et trouver le dernier des cinq artistes, mais rien n’y oblige. Regrouper des clowns durant la partie permet de jeter un œil sur un jeton ou de gagner des applaudissements, ce qui est un bonus important et peut faire la différence en fin de partie, c’est à ne pas négliger et permet également de temporiser. Mais la vraie question est surtout celle-ci : avez-vous de la mémoire ? Car c’est le nerf du show. Un jeu minimaliste qui se gagne sur le fil (celui du funambule sûrement) et propose un spectacle réussi. Et bon anniversaire à l’éditeur puisque depuis la création de Cartagogo, il a tenu bon pour fêter cette année ses 20 ans !

Un jeu de Julien Gerard
Illustré par Meybis Ruiz Cruz
Edité par Iello

Ludochrono

 

12 Chip Trick

 

 

Nous l’avons vu l’année dernière, les jeux de plis ont la côte. Certains sortent du lot tels Scout ou Cat in the box, d’autres disparaissent à peine sortis (comme euuh… m’en souviens plus). Mais il n’y a pas de cartes dans cette boite, que raconte-t-il ? Effectivement, ce jeu qui tient dans la poche est composé de jetons de poker (décidément !) et de sous-bock. Des jetons bleus (1/2/3 – 10/11/12) et des jetons rouges pour les valeurs intermédiaires. Comme un jeu de plis, on pose une valeur, le gagnant du pli récupère en priorité le jeton rouge et le stocke. Les autres prennent un des jetons restants dans leur main. Attention de ne pas dépasser 21. On vous en parlait dans cette news.

 

 

Chip ou cheap ?

L’éditeur propose un  format minimaliste où aucun espace n’est en trop. Les sous-bocks de score et les jetons de poker sont de très bonne facture. Bref, petit et impeccable. Question mécanique, nous voilà avec un mélange de jeu de plis et de Blackjack où dépasser 21 est déconseillé. Sauf si… Si tout le monde a chuté, c’est alors la plus haute valeur qui l’emporte. Point de règle important, ce qui vous reste en main est ajouté à vos gains. Tous ces détails pour vous faire comprendre à quel point ce jeu peut devenir calculatoire si on le désire. Il y a donc plusieurs directions à prendre, des hypothèses à formuler selon les jetons qui sont joués et défaussés, et bien sûr mémoriser qui a quoi.

Si le matériel est beau et que le jeu va plus loin qu’une simple redite, poser des jetons n’est pas glamour et cet exercice de calcul ne nous a pas convaincu, car peu ludique. Si le jeu est donné pour 2 à 4 joueurs, préférez l’expérience à 3, c’est la vraie dimension du jeu. Si les dérivés du Blackjack vous amusent, Jour de chance reste beaucoup plus marrant tout en gardant un fond de stratégie.

Un jeu de Root
Illustré par Chong
Edité par Mandoo Games

Ludochrono

 

Sire Sire

 

 

Le nouveau Oya est arrivé. Toujours en petite boîte et résolument pour rigoler cette fois. Voilà un grand jeu de partage, enfin non, pas vraiment. On peut tout prendre si on est seul sur sa rangée. Et des rangées il y en a… jusque 8 pour 4 joueurs ! Dans chaque rangée on trouve un peu de tout : des animaux, un roi, un chevalier, une fermière… Jeu de collection et de choix, il faudra donc pour ramasser un maximum, être le seul à demander la rangée.

 

Un jeu qui a du cachet ou triste sire ?

À la façon d’un Stupide Vautour, il va falloir désigner une rangée pour en récupérer la totalité des cartes. Si deux joueurs pointent la même rangée, on retire une carte et ils continuent. Évidemment, d’un coup c’est moins intéressant. Sauf si la ou les cartes qui’ m’intéressent ou intéressent mon adversaire s’y trouvent. Les collections ne se valent pas toutes. Certaines affichent de simples points (les blasons). D’autres, les églises ou les chevaliers doivent remporter la majorité pour gagner. Les animaux sont exponentiels. Le fermier doit rencontrer sa fermière et habiter dans sa ferme…

Petite surprise dans la partie, un premier décompte a lieu au bout de 13 cartes et celles marquées d’une croix rouge disparaissent. Cela vaut pour les églises, blasons et la famille et ferme. Faut-il se battre pour gagner dix points (églises) ou avancer lentement en accumulant le même type (36 points si on possède tous les rois ! mais qui va vous laisser faire !). Dans ce jeu on est toujours partagé par l’appât du gain et freiner le voisin. Parfois, chacun obtient ce qu’il veut, sans heurt. On préfère quand ça frictionne ! Le principe du « tout le monde va se mettre là, alors personne ne va y aller donc j’y vais » fonctionne bien. Un jeu simple, familial et amusant, dynamique, où plus on est nombreux mieux c’est, afin de batailler comme il faut.

Un jeu de Reinhard Staupe
Illustré par OIiver Freudenreich, Sandra Freudenreich
Edité par Oya

 

Heckmeck Am Karteneck

L’été n’est pas encore là, mais les fans de barbecue peaufinent déjà leurs recettes, surtout s’il s’agit de vers grillés (dont « le vermisseau de Strasbourg en feuilleté » nous dit la règle française). C’est à vous de composer le menu…à la carte ! Ce jeu de dominos ornés de vers se joue avec des cartes de six couleurs différentes. Le but sera d’aligner la plus grande somme pour être le premier à se servir dans le marché des dominos. Des vers et des dominos, cela rappelle quelque chose ? N’attendons pas plus longtemps et avouons que ce jeu pourrait s’appeler Pickomino 2 ou Pickomino cartes, car il s’agit bien d’une version alternative du jeu bien connu. Comme son prédécesseur, il va falloir atteindre une somme pour gagner les dominos. Ici en jouant des cartes, mais attention, une fois une couleur posée, plus question d’y revenir. Et n’oubliez pas de joindre une carte grise (= vers) pour valider votre somme. On peut aussi choisir de s’arrêter rapidement si on ne le sent pas, si on a peu de cartes (et ainsi en piocher) ou si l’enjeu (bof, que des petites valeurs) n’est pas intéressant (et les petites valeurs sont plus faciles à voler chez le voisin si on totalise exactement la somme). La partie s’arrête lorsque tous les dominos ont été récupérés. 

 

Piqué au vif ou piquer un roupillon ?

Oui, les titres ne sont pas toujours en anglais et ça fait plaisir, même s’il va falloir se lever de bonne heure pour demander le jeu en boutique. Cette version reprend donc l’esprit de son aîné avec les dominos (plus fins), les vers et des cartes à la place des dés. Pour gagner le meilleur domino, il n’est plus nécessaire de parvenir à la somme qu’il affiche, il suffit d’avoir la plus grosse valeur additionnée à la fin de la manche en posant simplement des cartes des 6 couleurs. Bien sûr, vous aurez peut-être une série de 1, ou alors aucune carte grise, obligatoire pour valider votre achat…

Le hasard reste présent. Il faudra temporiser pour piocher, se contenter de petites prises par manque de valeurs importantes ou simplement pour protéger vos gains puisque chaque domino est placé sur le précédent. La mécanique de pose de carte n’est pas si bête mais ne colle pas avec son propos. On s’est ennuyé rapidement avec ce jeu beaucoup trop long où la chance a son importance au détriment du reste, laissant finalement peu de latitude aux joueurs. Plus dynamique, nous aurions adhéré.

Un jeu de Reiner Knizia
Illustré par Doris Matthäus
Edité par Zoch zum spiel

 

Marabunta

 

 

Sixième boîte de l’éditeur dans la gamme 2 joueurs, ce roll & write dans le monde des fourmis va se baser essentiellement sur deux mécaniques : la division en lots (i split you choose), et la prise de majorité. Tout cela à travers des dés. Hasard mâtiné de choix cruciaux, voilà le programme.

Le plateau biface s’assemble pour donner une carte aux multiples terrains colorés, lieux des futurs affrontements. De chaque côté, le plateau personnel de chaque joueur affiche plusieurs symboles. Les caisses offrant des bonus, deux fourmilières de départ pour se placer, une rangée de cupcakes (perdus par des promeneurs ?) donnant des points. Pour s’implanter sur les territoires, il faut lancer six dés et les partager, avec une tuile bonus en prime. Ensuite, il n’y a plus qu’à inscrire le chiffre sur le lieu, toujours en adjacence avec une autre de ses valeurs. On n’oublie pas de cocher les cases des feuilles qui, si vous êtes majoritaire sur le terrain de la même couleur, vous offriront des points de victoire à la fin du jeu.

 

 

Fourmidable ou appelez un tamanoir ?

Roll & write, ou plutôt roll, divide & write au visuel passe-partout, Marabunta demande à être joué pour convaincre. C’est ce principe simple de division en lot, qui est au cœur du jeu. Si les premiers tours on n’a pas vraiment choisi de terrain à conquérir, se placer reste primordial. Les ajouts des futurs dés se font en adjacence, il faut donc se ménager des ouvertures. Si vous n’avez aucune valeur sur un terrain, il est impossible d’y aller. On peut donc rapidement bloquer une frontière et laisser moins de souplesse de décision à l’adversaire. Les valeurs des dés sont associées à une couleur et, à part le zéro, on ne se place pas où on veut. Et c’est là le gros dilemme des lots : que prendre, que laisser ? Comment ne pas se retrouver avec des dés inutiles ? Ajoutons un tirage malheureux, des valeurs faibles et c’est le pompon. Car à la fin de la partie, il faudra être majoritaire, avoir la somme la plus haute pour revendiquer le lieu et marquer via les feuilles.

Le jeu est fourbe à souhait et proposer des lots est par moment cauchemardesque. L’auteur (R. Knizia, encore lui !), à l’aise dans ce genre d’exercice prouve une fois de plus ses qualités. C’est simple et hyper efficace. Seule petite déception, on aurait bien aimé une possibilité d’assemblage plus ouverte du plateau central afin d’avoir plus de propositions de terrains. (Et pourquoi pas un feutre noir plutôt que bleu, il n’y a pas de fourmis bleues (à part chez les Schtroumpfs)).

Un jeu de Reiner Knizia
Illustré par Ingrid Desmidt
Edité par Space Cowboys

Ludochrono

 

 

 

 

Pour terminer, une salve de petites boîtes arrivées toutes en même temps, de la part de Hot Macacos, l’équipe qui se cache derrière Captain Macaque et un titre que vous avez sûrement croisé : Cortex Challenge et ses suites. 

 

 

Tornaloco

Ce proto qui avait fini à l’époque chez Blue Orange pour un Treasure Rush inachevé, revient sous la forme qu’il aurait dû avoir (dixit l’auteur). Le changement est salutaire. Les visuels colorés créent déjà l’ambiance. Quatre sous-bock double-face avec image ou chiffre. Des contrats qui tombent : image, chiffre, image, etc. À vous de composer avec vos sous-bocks ce qu’on demande, dans l’ordre, et le plus vite possible. Un peu de mémoire, de dextérité pour des parties énergiques où ça va couiner. Vamos !

Un jeu de Nicolas Bourgoin
Illustré par Sébastien Lopez
Edité par Hot Macacos

 

 

Inicio

Une mini boîte contenant 90 illustrations de photos retouchées et tramées, ce qui donne un certain style. Six piles qui vont se dépiler si on trouve des associations (commençant par la même lettre) entre deux photos ou parties de photo. Un boxeur et une baleine, mais aussi un gant (celui du boxeur) et une grimpeuse. Si vous parvenez à associer trois cartes alignées, c’est la victoire immédiate (et ce n’est pas si compliqué).

Si les piles se dépilent, les joueurs, eux, ne se poilent pas vraiment. Un peu léger pour y retourner. Avec la règle maison, en mettant la pression avec un minuteur et en notant les associations sur une feuille avec annulation s’il y a doublon, ça passait mieux. Je dis ça je dis rien.

Un jeu de Nicolas Bourgoin
Illustré par Sébastien Lopez
Edité par Hot Macacos

 

 

Wok’ Up

Là encore un jeu d’ambiance, observation/rapidité avec des jetons, logos, illustrations qui vont servir à valider des contrats. Chacun jette dans l’arène du wok (constitué de baguettes), ses jetons légumes, poulets, etc. Autour du wok, des recettes où taper si dans la poêle cuisent 6 piments, un poulet + un brocoli +…  Il faut avoir l’œil et le calcul rapide. Wok up ne réinvente pas la cuisine et propose un jeu de kung food dynamique qui peut caler un petit creux en attendant plus consistant.

Un jeu de Alexandre Droit, Johan Benvenuto
Illustré par Sébastien Lopez
Edité par Hot Macacos

 

 

 

ON AURAIT AUSSI PU VOUS PARLER DE…

 

FANTASY REALMS : MARVEL REMIX (Don’t panic games)

Fantasy Realms l’adaptation, sauce super héros (quand c’est pas Star ouar, c’est Marveul). Même tarif, faire du combo dans sa main, se délester de quelques cartes, changer de stratégie jusqu’au moment où 10 cartes sont alignées au marché.  Et on compte les points (avec des scores moins délirants que d’habitude). La variante ici : on doit posséder un super-vilain pour valider les points. Les S.V enlèvent des PV ou pourrissent votre main. Malgré une tripotée de symboles, le jeu reste lisible. Les belles illustrations tirées des comics donnent fière allure à ce titre (à part le dos des cartes sorti tout droit d’un flyer pour soirée disco). Les Vilains sont fumés mais, si ce Remix n’occulte pas la version originale, il écrase sans problème la version Star Trek.

 

 

À bientôt

 

 

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3 Commentaires

  1. atom il y a 28 jours
    Répondre

    Chip Trick est très malin, par contre j’ai pas compris pourquoi on propose un mode 2 et 4. c’est un jeu à 3 joueurs, à 4 cela ajoute un chaos vraiment pas agréable qui casse le jeu à mon avis.

    Je ne sais pas si j’apprécie Marabunta, je trouve ça très bien fait, mais on se retrouve souvent à se neutraliser, le probléme du Split and Choose c’est qu’il faut que l’on ait des intérêts divergents pour proposer des choses qui soit un peu osées. Ici on va essayer de proposer quelque chose d’équilibré, jamais totalement, mais pas extravagant, car on va perdre d’un coté ce que l’on va gagner de l’autre. Un peu comme Great Split on fait du jeu à somme nulle (bon ça reste quand même plus intéressant que Great Split).

  2. Salmanazar il y a 27 jours
    Répondre

    Très bonne remarque pour l’intérêt du split and chose. Il faut des intérêts divergents !

    • atom il y a 24 jours
      Répondre

      Bonjour Salmanazar,

       

      J’ai beaucoup réfléchi sur le split and choose. C’est que j’ai un article en chantier sur ce sujet, sur cette mécanique depuis euh longtemps (trop longtemps), j’arrive pas à le finir, à être satisfait, c’est un exercice difficile, surtout quand il faut passer derrière Mr Grovast. Bref tu me motives à le finir 🙂

       

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