[Just played] Un monde oublié

Ce nouveau jeu de l’auteur de 8 minutes pour un Empire et de City Of Iron était dans notre radar (cf la preview d’avant Essen je vous conseille d’y jeter un oeil pour mieux cerner la bête) et nous avons enchaîné quelques parties avec zom depuis que nous l’avons adopté.

Chapitre 1 : adopteUnNouveauMonde.com

Oui, nous l’avons adopté, en tout cas, jusqu’ici, on le garde, car il est propre et agréable à vivre, et très joueur. Je l’entends ronronner sur ma table, il sait que je parle de lui, le coquin, il fait miroiter ses jolis dessins pour m’attirer…

Oui, les illustrations de l’auteur rendent bien hommage au jeu : douces, en demi-teintes presque voilées, insufflant ce qu’il faut de mystère pour donner le sentiment de ne voir qu’une partie cachée de ce bel univers. C’est bien vu, car c’est vraiment l’impression qu’on a, après une ou deux parties, d’en avoir vu qu’une fraction, cela grâce à la quantité non négligeables de cartes. On en utilise peu à chaque partie, du coup, on ne voit pas tout des combo possibles, et ça donne ce petit goût de reviens me gratter le dos, tu vas voir ce que tu vas voir la prochaine fois.

Chapitre 2 : ça va être du medium canaille

Quand je m’installe devant le jeu la 1ere fois, c’est d’abord en me disant « ça va être du gros » (90 minutes – à partir de 13 ans) et s’il est vrai que je ne savais pas trop par quel bout commencer lors des premiers tours, l’ensemble m’a paru rapidement très limpide. Du coup, en fait non, je le clame haut et fort, c’est clairement du calibre medium. 

Le livret de règle mangé (lui aussi se digère bien) nous attaquons. Je sais que pour gagner, il faut collecter des « bannières » qui apparaissent sur deux types de cartes : certaines d’entre elles s’achètent avec des ressources (les cartes Empires), d’autres doivent être combattues et peuvent laisser quelques dégâts (les cartes Titans). C’est aussi cet aspect là qui nous attirait. Des titans ? Du combat ? On lance même des dés, hoho ! Tout ça dans un jeu de pose d’ouvriers ? Mais oui ma petite dame, c’est fini le temps des cathédrales, le monde est entré dans un nouveau millénaire heu pardon – j’ai des restes du Konito music dans les synapses diantre ! -. Concrètement, ça ne va vraiment pas beaucoup plus loin que ça, mais c’est tout de même sympa, ce petit coté « canaille d’améritrash ».

         En deux mots

Il s’agit donc d’un jeu de développement pas trop heavy où vous construisez votre empire en posant des cartes qui vont vous apporter les ressources nécessaires à plus d’essor ainsi que des PV cumulatifs en fin de partie, et vous recrutez des armées pour faire taire les géants qui terrorisent les enfants de votre royaume.


Chapitre 3 : au commencement était l’action

Le plateau de jeu vous propose donc des actions où vous allez envoyer vos « ouvriers »  ou plutôt des jetons « citoyen » : on en a 3 au départ mais on termine souvent avec 5. Sachant qu’il y a un peu d’enquiquinement entre joueurs à ce niveau-là : une fois qu’on a placé un citoyen quelque part, le (ou les) adversaires, pour réaliser la même action, devront poser un citoyen d’une valeur supérieure (sauf exceptions). Du coup, il faut aussi faire gaffe à ne pas se bloquer soi-même… !

Certaines cartes Empire gagnées peuvent vous ajouter de nouvelles actions qui seront-à-vous-rien-qu’à-vous (bien agréable ça) et le plateau en lui-même va dévoiler progressivement quelques menues actions supplémentaires. Cela fait, on termine souvent la partie avec une combinaison d’au moins 10 actions possibles (au lieu de 7 au 1er tour), et cette progression diffuse qui élève le nombre d’options donne cette sensation séduisante qu’on a toujours des choix qui s’ouvrent à nous – en plus du fait que meuler du Titan reste toujours disponible -.

L’attaque des Titans, parlons-en. Cette action-ci est en effet différenciée des autres du plateau et peut se réaliser quand on veut (enfin, à son tour quand même, ne faisons pas n’importe quoi). Tant qu’on a des titans prêts à se laisser lyncher (ça, c’est pas un problème, on a le choix entre 3 niveaux de difficulté de Titans quasiment tout le long du jeu) et tant qu’on de la soldatesque prête à aller sauver le monde (ça, c’est moins gagné avec l’inflation toussa toussa…).

Chapitre 4 : Pas de bill

En effet, une des idées sympas du jeu, c’est le système coercitif des armées. On ne peut pas faire son gros bill. On débute avec deux cartes armées, qui apportent par exemple chacune 2 « couteaux » et 2  « flèches » (thématiquement, c’est du combat au corps à corps et à distance). La première fois que l’on souhaite envoyer une armée au combat, on lui payera une solde d’une pièce. Une armée n’attaquera qu’une seule fois par tour. La pièce qu’on a dépensée reste sur la carte armée, et le tour prochain, si on veut ré-envoyer cette même armée, il faudra débourser une pièce de plus que ce qui est présent sur la carte.

Du coup si vous envoyez la même armée 3 fois au combat, sa 4e attaque vous coûtera 8 (1 + 2 + 4 = 7 + 1 = 8) ce qui fait très cher dans le jeu ! Autrement dit, on aura plutôt intérêt à passer nos soldats en mode « vétéran » et à embaucher des jeunes qui partiront avec des petites ambitions salariales. Les anciennes cartes armées sont alors retournées, elles sont toujours présentes, avec une valeur très amoindrie certes, mais présentes tout de même.

On le voit sur cette photo, lorsque l’on achète une carte armée, on retourne alors une des précédentes et on place la nouvelle par-dessus, cela ayant pour effet de montrer un bonus de vétéran de l’ancienne carte, plus faible que sa puissance initiale, qui va bénéficier la nouvelle armée.

On peut faire ça à l’infini, cela représente les techniques transmises par les vétérans à la bleusaille qui débute.

        Titan va la cruche à l’eau qu’à la fin il nous casse en deux

Quand on attaque un Titan, on sert toujours un peu les fesses. Hey oui, c’est des Titans quand même. Donc on lancera 1, 2 ou 3 dés (selon leur niveau de difficulté) qui infligeront des dégâts. Et on a de grandes chances d’en subir, statistiquement (4 chances sur 6 d’endommager notre empire, 1 chance sur 6 de nous faire perdre des sous, soit 5 chances sur 6 que ça se passe pas super), et s’ils contre-attaquent notre empire et on devra alors retourner certaines de nos cartes face cachée. Une action du plateau permet de les réparer, mais bon, ça nous ramènera pas Joe Dassin.

4 jetons ouvriers, une carte Titan niveau 3, les 3 dés, quelques pièces et un jeton Savoir

Chapitre 5 : quand l’argent ne faisait pas tout

Certaines cartes vont vous permettent d’avoir des bonus à l’attaque, de gagner des pièces ou du savoir notamment. Le savoir est une autre devise du jeu, globalement plus difficile à obtenir (1 parchemin vaut de base 3 pièces). Mais il permet notamment d’acheter des cartes Provinces, qui elles, nous offrent souvent la possibilité d’ajouter des cartes Empires supplémentaires… Et c’est le cercle vertueux du développement et de l’évolution. 

Bien sûr, c’est pas nouveau, on achète des cartes qui permettent d’avoir des ressources qui permettent d’acheter d’autres cartes etc. Mais là, il faudra regarder à deux fois avant d’acheter, car il n’y a pas que leurs effets pendant la partie qui comptent. Comme je l’expliquais au début, ces cartes ont des bannières de couleur. Plus vous aurez des bannières d’une même couleur, plus vous aurez de points au final. Il faut trouver le bon équilibre entre les rouages de votre développement et les collections de points, et cela est bien pensé.

Pas de bras pas de chapitre…         

Grâce à ses ressources et ses actions disséminées, Un monde oublié n’a pas un gameplay punissant, et se joue agréablement. Evidemment, comme dans tous les jeux de pose d’ouvriers, si vous tardez trop à mettre vos nouveaux citoyens en lice, vous vous en mordrez les doigts car vous aurez moins d’actions que les autres joueurs. Oui mais à condition de pouvoir les nourrir sinon c’est la famine ! En effet, à la fin d’une manche, quand tout le monde a passé, on commence par récupérer toutes nos ressources avant de vérifier nos cartes : elles doivent présenter assez de symboles « nourriture » pour combler les ventres de tous nos compatriotes.

Sinon, ceux qui ne mangent pas vont bouder dans un coin et ne seront pas utilisés lors de la prochaine manche. Sachant qu’on débute le jeu avec 3 symboles nourritures (un de base apparaît sur notre mini-plateau perso « la capitale », et nous avons deux cartes Empire toutes simples qui nous aident à démarrer). Les combats contre les titans et les dégâts sur les cartes empire représentent d’ailleurs une part de risque non négligeable car peuvent nous priver de nourriture pour nos citoyens.

…mais une conclusion : a pleasant & forgotten world

On sent qu’un grand soin a été apporté à ce jeu, qu’il a été développé avec patience et amour. Les règles sont bien écrites, la rejouabilité bien pensée (avec les decks de cartes Empire divisés en 2 niveaux). On devine que dans son travail de game design, l’auteur est parti de quelque chose de bien complexe pour aller vers une épure progressive. Il en est resté une belle richesse dans les cartes, les actions/bonus qu’elles apportent et cela fait tout le renouvellement du jeu.

Le timing est crucial car il faudra se décider vite quand les cartes arrivent sur la piste : à la fin du tour, elles sont défaussées à jamais pour toujours. À la vie, à la mort, à la vie, à la mort, au compte à rebours. Et on en sort d’autres, c’est la grand roue de la vie.

Il n’y a pas d’interaction directe avec les copains, si on oublie le fait qu’on se tire la bourre sur l’acquisition des cartes (ce Titan est à moi !), et bien sûr les blocages possibles (mineurs à deux joueurs, sûrement plus coriaces au-delà) dûs aux règles de placement des citoyens, mais voilà, ça reste un jeu plutôt friendly.

Bref, l’ensemble est vraiment appréciable (avec une mention spéciale aux illustrations), même si certains gamers s’attendent sûrement à du plus gros – ceci n’est pas un brainburner et vous pouvez même faire deux parties de suite sans qu’aucune fumée ne sorte -. Une belle envie d’y retourner pour ma part !

 

+ Le commentaire du Sha-Man

Un des plaisirs particuliers de ce jeu est ce sentiment de simplicité, de pureté dans les actions qui rendent les tours fluides tout en ayant un joli niveau de programmation.

Il ressort du gameplay le même genre de sentiment poétique qui se dégage des illustrations et de l’univers visuel. C’est beau, c’est doux, il y a peu de frustrations, on entrevoit beaucoup de possibilités et on a le sentiment d’arriver à bien les exploiter, tout en gardant à l’esprit cette impression qu’il y a beaucoup plus à voir que ce que le regard et les mains atteignent lors d’une partie.

Du coup, on fait facilement plusieurs parties et on en ressort avec une certaine satisfaction bienheureuse d’avoir bien occupé son temps.

Sensation qui peut se tarir probablement si l’on pousse le jeu dans ses retranchements absolus à coup de trop de parties ou si l’on fait trop de theory crafting.

Mais c’est typiquement un jeu où j’ai envie de jouer plutôt que de gagner, où je n’ai pas envie d’analyser la moindre action mais plutôt de profiter du plaisir de construire, de développer et de combattre les titans de ce monde oublié.

 

Récap

Auteur : Ryan Laukat
Illustrateur : Ryan Laukat
Joueurs : 2-4.
Âge : à partir de 13 ans.
Durée : 90 min.
Prix : 35€

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8 Commentaires

  1. ahuacatl 03/11/2014
    Répondre

    Merci pour ce retour détaillé, j’étais perplexe à la lecture des règles, je vais pouvoir le tester jeudi mais votre test me rassurre un peu et donne envie.

  2. Nelijah 03/11/2014
    Répondre

    J’avais vu plusieurs avis assez divergents et mitigés sur ce jeu, comme une part de hasard trop présente et en effet pas assez calculatoire mais vous m’avez donné envie de le tester 🙂

  3. Shanouillette 03/11/2014
    Répondre

    oui tout dépend de ce qu’on attend d’un jeu 🙂 les retours que j’ai eu jusqu’ici sont tous bons, mais j’imagine que si on est du genre à manger du Madeira au ptit dej, celui ci ressemblera à un ptit jeu d’apéro light. 🙂

  4. eolean 03/11/2014
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    Il a l’air bien sympa dit comme ça 🙂

    J’ai l’impression qu’il est à ranger dans la même catégorie qu’un Mangrovia ou peut-être même La Isla. C’est du familial +

    Le genre de jeu que tu peux jouer cool avec des joueurs détendus mais qui peuvent te faire des noeuds au cerveau si tu es à une table un peu plus core player… 

    C’est comme tout finalement, c’est les joueurs qui font le jeu ^^ Je suis sûr que si tu fais une partie de Dada avec des passionnés de Stats ou autres jeux plus complexe, alors ça devient gore ^^ (un dada avec des Chagars pour ceux qui connaissent Bloodlust :p)

  5. Zuton 03/11/2014
    Répondre

    Ce jeu me fait les yeux doux et je suis de plus en plus proche de craquage… J’ai comme l’impression qu’à lire cet article: l’essayer, c’est l’adopter ! 🙂 (On est à la SPA ou quoi ? )

    Quel est la durée d’une partie à 2 et 4 joueurs : vraiment 90 minutes ?

     

    • Shanouillette 03/11/2014
      Répondre

      on a joué qu’à deux comme je le disais ; la 1ere partie nous a duré un peu moins de 90min, et la 2e partie s’est passée bien plus vite mais je me souviens plus précisément.

    • DoM 04/11/2014
      Répondre

      Je l’ai eu à mon annif Chris, peut-être jeudi ? 🙂
      On peut jouer en 1h30 à 4 sur la deuxième partie je pense.

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