Lignes de fuite : le crowdfunding
Lignes de fuite : mais pourquoiiiii ?!
Pourquoi donc appeler une rubrique « lignes de fuite » ?
Et bien c’est une référence au dessin et à la peinture et est partie intégrante dans le mécanisme qui permet de représenter la perspective dans l’image. En gros, et sans rentrer dans les détails 😉
Voici donc le début d’une rubrique qui est chère à mon cœur puisque c’est un projet que j’avais en tête depuis 2005 sur la création d’un site dont le nom de domaine (lignesdefuite.com) m’a appartenu quelques années sans jamais aboutir sur quoi que ce soit de concret dont le but était de publier des textes et réflexions sur la mise en perspective des situations, des évènements et autres choses de la vie dans une optique relativiste et nuancée.
Le but est bien sûr d’amener à la discussion et rien de ce qui n’y sera exprimé n’est à prendre comme une vérité absolue (à laquelle je ne crois pas) mais plutôt comme des propositions d’opinions (à débattre si cela vous intéresse).
La rubrique n’est pas « copyright Sha-Man » donc il se peut que d’autres contributeurs y participent dans le futur.
Citations choisies :
- La vérité est une opinion.
- Courage, fuyons !
Le crowdfunding pour les nuls
Alors le crowdfunding c’est quoi ? Pour faire simple et présenter le principe de base, c’est un moyen de faire financer des projets par les utilisateurs finaux (end users) avant qu’ils ne soient publiquement disponibles.
Théoriquement les projets ne sont pas définitifs lors du lancement de la campagne et les apports des utilisateurs au cours de la campagne de financement vont être pris en compte pour faire évoluer la démarche et le résultat final du projet.
L’intérêt de ce système va être de permettre une implication des participants dans la création du résultat final et la sensation d’être partie-prenante responsable du succès du projet dans une démarche communautaire en marge du financement classique motivé par un retour sur investissement.
Il existe de nombreux systèmes mais celui le plus communément utilisé dans le monde de l’édition de jeux de société est celui basé sur les récompenses dans lequel la contrepartie à la participation des utilisateurs est sous la forme d’un bien ou d’un service plutôt qu’un intéressement sur les profits réalisés par le projet.
Les projets de crowdfunding peuvent prendre plusieurs noms : campagnes de soutien, financement participatif… mais ils réfèrent tous à une démarche similaire et sont définis le plus généralement par les éléments suivants :
- Une définition du projet et de ses objectifs.
- Un seuil initial de base à atteindre pour réaliser le projet.
- Des paliers de soutiens à divers montants donnant à droit à diverses récompenses allant du nom dans les remerciements à un produit version luxe avec goodies dans sa boîte aux lettres.
- Des objectifs déblocables en atteignant des paliers de financement au-delà du seuil initial permettant l’enrichissement du produit ou/et service final.
- Une durée limitée pendant laquelle il est possible de participer au financement.
A noter que les plateformes de financement participatif sont fournies par des sociétés à but lucratif en grande majorité et se rémunèrent soit par des commissions sur les montants récoltés dans le cas de celles hébergées et managées soit dans la vente de solutions et de services permettant de monter sa propre plateforme.
Un peu de glossaire pour démarrer :
- Backers : nom attribué aux personnes soutenant un projet de crowdfunding souvent appelé d’ailleurs campagne de soutien.
- Pledges : nom donné aux participations financières en elles-mêmes.
- Keep-it-all (KIA) : type de campagne où le porteur du projet conserve tout l’argent que les objectifs soient atteints ou non.
- All-or-nothing (AON) : type de campagne où le porteur du projet ne gagne l’argent investi par les backers seulement si les objectifs indiqués sont atteints.
- Kickstarter (KS) : plateforme majeure de financement basée aux Etats-Unis qui requiert une société Américaine pour être éligible à son utilisation pour lancer des campagnes. Très utilisée dans le domaine du jeu de société.
- Ulule : plateforme de financement participatif française qui est utilisée parfois pour des projets de jeux de société.
- Stretch goals (SG) : les différents paliers de financement au-delà du seuil initial et débloqués au fur et à mesure de leur atteinte enrichissant la proposition première du projet.
Pour vous donner une idée de la réussite de tels projets et de la réalité économique de ces systèmes, le record est détenu par le jeu vidéo Star Citizen financé à hauteur de 52 millions de $ (dont 2.1M via KickStarter) en novembre 2014. On est encore loin de ces montants dans le jeu de société, mais nous avons-nous aussi nos propres records avec Zombicide qui a atteint les 2,8 millions de $ lors de sa dernière campagne pour la 3ème vague en 2014.
De l’usage de l’outil de crowdfunding
L’outil qu’est le crowdfunding n’est pas aisé à maitriser et suppose une bonne connaissance de ce qu’il peut apporter, mais aussi des risques, car il peut être à double tranchant.
Je vais aborder certains aspects, sans être exhaustif car il y a beaucoup à dire :
- En terme d’image, le système de campagne et les outils publiques de partage, suivi de l’évolution permet de réellement utiliser l’outil dans un but de communication, mais peut aussi basculer dans l’insatisfaction générée par les attentes des backers ou dans le traitement de la réalisation / livraison du produit.
Ici les backers qui sont les clients finaux, sont aussi partie prenante dans le financement et chaque problème ou/et retard sur ce qui aura été annoncé ou/et « promis » pourra potentiellement décevoir les personnes ayant supporté le projet.
Il y a donc un réel risque d’impact sur la réputation du porteur de projet, de par la difficulté à obtenir la compréhension et l’acceptation de l’ensemble d’une communauté quant à la réalité du terrain, et celle des problèmes pouvant survenir dans la production et/ou livraison.
Il faut aussi noter que tout n’est pas acceptable sur ces plateformes et que de nombreuses controverses ont apparu, concernant l’usage de l’argent récolté, la manière de communiquer autour des produits, voire même de conduire la campagne.
La démarche de crowdfunding elle-même est parfois critiquée lorsque les sociétés donnent l’impression de l’utiliser sans en avoir vraiment besoin.
Le fait est qu’il n’y a pas toujours de cadre précis indiquant les pratiques adaptées ou non à la démarche et qu’il est difficile de déterminer si oui ou non une société a raison d’utiliser cette méthode pour financer son projet.
- En terme d’approche « Marketing », la relation directe aux clients potentiels et réels, l’engagement de l’audience dans les discussions/updates, de même que les feedbacks collectés peuvent permettre un affinement de la cible intéressée par les produits proposés par les porteurs de projet.
Cela permet également de détecter l’existence potentielle d’un marché pour des produits annexes.
Encore une fois, la démarche est risquée. On peut parler des risques d’interprétation des multiples retours non encadrés des backers, du manque d’information de profilage qui peut amener à mal identifier l’expression d’intérêt d’une niche de backers (qui n’est pas nécessairement représentative de l’ensemble des clients potentiels d’un produit et amener des choix commerciaux non pertinents.
- Le niveau de protection des backers ou des porteurs de projet dans le cadre d’une campagne de crowdfunding est extrêmement faible car d’une part l’un comme l’autre peuvent se retirer à tout moment, les premiers ayant même une période après la fin de la campagne pour retirer leur soutien financier.
D’autre part, un certain nombre de projets qui avaient été financés ont échoué à délivrer les produits à leurs soutiens. La plateforme de financement dégageant alors dans la majorité des cas sa responsabilité provoquant ainsi des controverses sur la protection que l’on peut attendre et le contrat réel qui lie le porteur de projet et les backers.
D’un point de vue de son usage, il faut bien noter que créer un projet sur une plateforme telle que Kickstarter ne suffit pas à réussir son projet.
Les potentiels backers ne vont pas trouver le projet et le soutenir par hasard : il est nécessaire de maintenir une communication importante en amont et pendant la campagne, de même qu’animer les discussions et gérer les attentes des gens de manière réactive.
C’est la nature même du système. On implique les gens dans le financement et la réalisation, il faut se donner les moyens pour être présent et leur donner satisfaction dans une certaine mesure, mais aussi être prêt à expliquer et défendre ses choix / décisions qui seront assez souvent remis en question par les participants.
C’est un métier de communiquant et qui n’a rien à voir avec le métier de « création » et « développement » d’un jeu de société, mais tout aussi important pour donner une réalité et une vie au projet.
On ne peut pas débarquer dans une démarche de campagne participative d’un jeu de société sans avoir une vision assez claire de ce que l’on veut créer, de la manière dont on va le dévoiler au fur et à mesure de l’avancement du financement, mais aussi de l’énorme effort de communication qu’il faudra fournir pour que la réussite soit à la hauteur de l’attente.
Je vais vous proposer maintenant de parler de quelques exemples de différentes approches de projets de financement participatif dans le monde des jeux de société (Massilia, ZNA, Zombicide et Conan), de l’approche qu’ils m’ont semblé avoir et de leurs résultats.
Massilia
Nous sommes en 2012 et la société d’édition Krok Nik Douil (KND) dirigée par Alain Epron lance un Ulule pour financer le jeu Massilia qu’il fait tourner à divers endroits en France pour le faire essayer et dont de nombreux sites ont parlé.
Le jeu propose quelque chose d’intéressant d’un point de vue gameplay et la communauté suit plutôt la démarche sur la demande de 6000€ du projet participatif.
Le projet est financé le 30 avril 2012 à 124% et les gens se réjouissent.
10 mois plus tard, aucune nouvelle de l’éditeur.
Les backers commencent à s’énerver et sollicitent à de nombreuses reprises l’éditeur par divers moyens, aucune réponse n’est apportée, la tension monte.
On en vient à évoquer l’arnaque, les insultes fusent, l’absence totale de communication de l’éditeur permet toutes les interprétations et les réactions les plus extrêmes.
Les backers finissent par comprendre / apprendre que KND c’est fini, radiée du registre des sociétés le 2 septembre 2014 et le jeu ne se fera pas.
Entre temps le dirigeant de la société de financement participatif Ulule aura également annoncé être prêt à rembourser l’intégralité de la commission réalisée sur l’opération.
Coup de théatre, la société d’édition Quined fait passer un message officiel selon lequel elle reprendra le jeu, l’éditera et en distribuera les copies lors d’Essen 2014 aux backers initiaux.
On en apprend alors un peu plus sur ce qui s’est passé apparemment, KND était en mauvaise posture financière, le fabriquant l’aurait plantée pour Essen ceci ayant un gros impact sur la capacité à présenter le jeu à un moment clef de possibilités de ventes dans le monde du jeu, le montant levé par Ulule a bouché les trous de trésorerie mais n’a pas suffi à permettre à la société de remonter la pente, son dirigeant Alain Epron a fait une dépression et ainsi s’achève l’histoire de KND.
Pour ma part j’ai essayé Massilia puisque je l’avais backé et l’ai donc récupéré à Essen en 2014 auprès de Quined et j’ai eu l’impression de jouer à un jeu non abouti.
Mon sentiment ?
Le financement participatif n’était pas le remède miracle pour sauver KND. Les réactions ont fait ressortir l’importance de la communication dans ce genre de campagne et le rendu final me laisse penser que, dans sa hâte de reprendre ce projet pour l’amener à Essen, Quined a peut-être mal évalué le travail de développement qu’il restait à faire sur ce sujet avant de le présenter comme un produit fini.
Zombicide
La série Zombicide sur Kickstarter est la démonstration de ce que l’on peut réaliser avec une bonne communication, en ciblant bien son public et en s’appuyant sur de nombreuses références communes actuelles.
La première campagne était assez classique des Kickstarter du genre et proposait des stretch goals assez modestes de nouveaux personnages, monstres, addons de jeux montrant bien toute l’étendue des idées des créateurs du système de jeu et ils ont atteint le score très honorable, peut-être inattendu pour eux, de 700 000 $.
Mais je trouve que l’on voit clairement l’évolution derrière le passage à la saison 2 (2,2 M$) puis 3 (2,8 M$), la confiance dans les fans qui vont suivre et la démarche a glissé : on a un vrai catalogue d’achats optionnels intégré dans le KS, des centaines d’artworks et de concepts de sculptures sont déjà prêts avec le graphisme qui va bien et on propose aux backers un catalogue complet intégré.
Le summum de l’opération est atteint sur la saison 3 où des boîtes spéciales avec des artistes invités sont proposées à la vente. Tout peut être acheté directement via le financement participatif hors du cycle de vente classique avec distributeurs et boutiques : les boîtes de base, les personnages, les extensions, les goodies, les dés… tout, même ce qui se trouve déjà en boutique.
Je n’adhère plus à cette démarche. Certes, il y a du matos magnifique, et oui, il n’y a peut-être aucune autre plateforme aujourd’hui qui permette de mettre en avant à ce point des projets de cette envergure, mais je ne peux m’empêcher de sentir qu’on me prend un peu pour un con.
J’en viens à me demander si KS a vraiment été créé pour ça, non plus pour permettre la transformation d’idées de jeux et de prototypes en jeux édités, mais en grosse usine de communication de masse permettant de réaliser de gros chiffres de commande sur une période de 30 jours et ce en réduisant le nombre d’intermédiaires avec une marge.
C’est d’autant plus dur à avaler, et je ne suis pas le seul à le dire, quand on sait que les créateurs de Zombicide avaient annoncé que si les montants atteignaient certains paliers (ce qui a été le cas), cela servirait à financer les boîtes suivantes.
Il y a bien sur des investissements plus que conséquents et un travail monstrueux sur ces jeux, ne me faisons pas dire ce que je n’ai pas dit, mais ont-ils encore vraiment besoin de passer par ça pour faire leurs projets ? Doit-on accepter comme normalité de voir tous les jeux se lancer de cette manière-là ? N’y a-t-il pas un risque pour le circuit classique de vente de jeux de société ?
ZNA
L’encre a déjà beaucoup coulé sur cette campagne avortée (interview de Philippe Nouhra ici), mais un certain nombre de points me paraissent néanmoins très intéressants.
Cette campagne a probablement souffert de manques de communication « marketing » à mon sens et était trop « réaliste ».
Tous les stretch goals étaient connus à l’avance car Funforge souhaitait clairement atteindre au moins les montants permettant le développement de leur application de réalité augmentée qui faisait vraiment du jeu quelque chose d’innovant dans son approche du jeu de société mêlant des concepts du jeu vidéo à un système qui n’aurait été sinon peut-être qu’un jeu tactique coopératif de figurines dans un univers à zombies. Le créneau est plutôt encombré en ce moment, vous en conviendrez.
Il n’y avait pas d’achats optionnels, tous les stretch goals débloqués allaient directement dans la boîte de base et les seuls pledges étaient l’achat de la boîte avec un prix réduit pour les 300 premiers.
Bref, la campagne a été annulée après avoir atteint 1089 backers et 124 000$ de financés sur 80 000$ demandés initialement pour la raison que la campagne était en progression négative depuis plusieurs jours et était loin d’atteindre les 800 000$ attendus par Funforge pour débloquer le premier palier d’application de réalité augmentée.
Mon sentiment ?
Dommage. J’aurais aimé que ce jeu se fasse de cette manière-là, je trouvais l’utilisation du Kickstarter vraiment justifiée ici pour financer une idée innovante.
Malheureusement il y a eu, je pense, des erreurs et manquements divers : manque de communication autour du jeu, besoin de plus d’explications et justifications autour du prix du jeu et de ses contenus, le manque de vidéos ou d’articles externes de review du jeu et de ses concepts permettant ainsi de crédibiliser le projet en amont.
La gestion du happening, le déblocage de stretch goals gardés secrets (par exemple) permet de relancer la dynamique à chaque découverte et pas de concentrer toute la discussion autour du Kickstarter à son lancement, particulièrement justifié quand on connait la difficulté à toucher un maximum de sa cible dans un temps court.
Bref tout ça, pour moi,c’est du marketing et de la com’ et c’est là que c’est le plus dommage, parce que quand j’ai rencontré l’auteur et le patron de Funforge à Essen, j’ai vu le jeu et je me suis dit que c’était ambitieux et que je voulais en être.
Je me suis dit que j’avais confiance dans leur approche d’édition et de développement du jeu, mais ce n’est pas ça qui a plombé le projet au final.
Les questions que l’on peut se poser, et pour lesquelles je n’ai pas de réponse, sont :
- Est-ce que Kickstarter est toujours fait pour ce genre de projet ?
- Est-ce simplement un problème de gestion de la communication ?
Conan
Le cas de ce jeu est très intéressant parce qu’on a clairement quelque chose de très maîtrisé à tous les niveaux. Du boulot de pro, très clairement.
Une communication en amont et pendant la campagne très efficace, des stretch goals très réalistes et des pledges clairs. Le jeu est nouveau donc malgré la mise en avant d’un catalogue d’add-on et de matos supplémentaire on voit que ce n’est pas seulement du gonflage de chiffre d’affaires, car ce genre de chose n’existe pas en boutique.
On a une impressionnante brochette de créateurs et de personnes « publiques » de l’édition ; cela laisse présager du bon et, surtout, le jeu a été montré. Il a été testé en public.
Mon sentiment ?
Très positif. On voit une capacité éprouvée à gérer la communication et le buzz (dans le bon sens du terme, je vous vois venir…), du répondant dans les questions réponses, du flux continu dans les updates.
Le challenge et les motivations du Kickstarter sont très clairement présentés :
- Pourquoi ça coûte ce prix et pourquoi KS ? Et bien en passant par KS on peut optimiser certains coûts directs du circuit de vente classique qui permettent de fournir plus aux backers alors qu’en boutique cela ne tiendra clairement pas pour ce prix.
Il y a eu des investissements importants en amont et il faudrait être aveugle pour ne pas reconnaitre l’effort nécessaire pour communiquer de cette manière autour d’un jeu, pour le présenter autant que possible et pour avoir des concepts arts aussi poussés au lancement de la campagne.
- On nous explique et démontre par les noms d’auteurs, éditeurs et illustrateurs au crédit, mais aussi par le temps qui a été pris pour faire connaitre le prototype et le faire essayer qu’un soin particulier a été apporté à son développement et on ne peut présager que du bon.
De mon côté, je n’ai pas nécessairement trouvé les principes de jeu exceptionnellement innovants, mais je n’accorde pas à cet aspect une importance considérable. On n’est pas obligatoirement tenu de faire le jeu que personne n’a jamais vu pour que ce soit un excellent jeu.
Le système de jeu me parait très bon, l’univers développé est superbe dans son aspect graphique comme dans le soin qui a été apporté à le retranscrire dans le gameplay.
Maintenant, qui vivra verra.
Les lignes de fuite
De mon côté, je suis assez mitigé concernant KS, ce constat en demi-teinte pour un système, qui selon moi sur le papier, permettait d’être vraiment la traduction littérale du terme crowdfunding, le financement par la foule, le pouvoir au peuple 😉
Une sorte d’utopie qui prend à revers le capitalisme quand il déraille (attention, je ne généralise pas, je parle bien de cas particuliers), qui propose un moyen de financement en échange de services ou de biens par les consommateurs eux-mêmes plutôt que le système classique basé sur le retour sur investissement.
Beaucoup dans le monde du jeu y ont vu (surtout de très petites sociétés voulant démarrer) un moyen de s’affranchir de l’investissement initial ou de la trésorerie nécessaire à la conduite d’un tel projet, mais les expériences récentes sur un certain nombre de projets nous montrent qu’il y a tout d’abord de nombreux écueils :
– la capacité réelle des personnes portant le projet à gérer une société et tout ce que cela implique ;
– la capacité également de ces sociétés à être vraiment dans le développement d’un jeu pour proposer quelque chose de bien testé et de qualité ;
– le risque financier du fait du retrait des backers à tout moment ;
– la roulette russe du « est-ce que ça va marcher ? »
Justement, Kickstarter est devenu un lieu de marketing et de communication où il va falloir des community managers pour entretenir l’excitation autour du projet, maintenir le flux de pledges.
L’éditeur va devoir évaluer la somme à mettre en avant pour motiver les backers au démarrage tout en calculant la somme réelle dont il a besoin pour faire le jeu dont il rêve, car mettriez-vous un pledge pour un projet demandant 1.5M$ au démarrage ? Ne seriez-vous pas découragé par une somme trop importante ?
Le travail nécessaire pour faire un KS réussi est phénoménal et les tâches à effectuer relèvent de la stratégie publicitaire. Ce n’est pas nécessairement mauvais en soi, car les sociétés doivent bien vivre et ont besoin de communiquer pour vendre leurs produits, ne tombons pas dans l’excès consistant à dire que tout le monde roule uniquement pour la « passion du jeu ».
On a vu fleurir nombre de dérives sur KS entre les échecs pour diverses raisons, les jeux « pas finis », les opérations de précommande (un certain éditeur étranger qui écoulait seulement des stocks d’un jeu déjà prêt à être envoyé dans ses entrepôts), les opérations purement marketing avec des artworks / contenus exclusifs déjà prêts et seulement là pour faire monter la sauce.
Quand on regarde les projets qui marchent le mieux, il semblerait que ce soit plus lié à ceux proposant un grand nombre de contenus exclusifs qui ne seront pas dispos en magasin à la sortie, que ceux qui le font simplement pour tenter d’exister.
Si le projet ne fait pas assez rêver avec des trucs qu’une minorité seulement aura, et est trop réaliste sur le « il nous faut ce montant pour développer cet aspect du jeu », alors ça ne suit pas pareil.
J’ai le sentiment que l’excitation de cet espèce d’acte punk de financement alternatif d’un truc qui n’existe pas encore est en train de disparaître pour des considérations beaucoup plus terre à terre.
On en vient à se demander pourquoi passer par KS en tant que consommateur. C’est un choix personnel je crois, veut-on adhérer à ce lancer de dés hasardeux qui consiste à soutenir un projet de jeu ? Le fait-on pour l’avoir en avance, avoir des goodies exclusifs, faire exister le jeu ?
Pour ma part, je continue d’utiliser KS dans une certaine mesure, sans forcément le crier sur tous les toits (facebook, twitter…etc) car, comme je le disais, je ne ressens plus vraiment le frisson de l’acte punk qui donne envie de dire « yeah je l’ai fait », j’ai juste cédé à l’impulsion créée par les gens dont le métier est de communiquer efficacement.
Encore une fois, ce n’est pas le mal. Pragmatiquement, le monde a tendance à tourner un peu comme ça aujourd’hui, pas besoin d’en rajouter forcément une couche.
Je backe des jeux, comme je l’avais fait pour ZNA, pour les voir se faire et pour les avoir tout simplement, car tellement de jeux ne sont plus disponibles après le KS du fait du fonctionnement du système de distribution classique qui n’a rien à voir avec des opérations KS ou celles des salons.
Je suis moyennement sensible aux contenus exclusifs, je vais avoir tendance à être plus terre à terre, par exemple j’ai pris le King Pledge pour Conan. Pourquoi ? Pour les héros et monstres supplémentaires pour avoir plus de variété dans les parties, car une fois dans le circuit classique, qui sait quand l’extension qui le permettra sortira. Pour pouvoir parler du jeu sur Ludovox avant qu’il ne sorte, pas pour dire « moi preum’s », mais pour le présenter avant que la majorité des gens y aient accès en boutique et puissent se faire un avis à partir de notre review.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Soutenez-vous ce genre de projets ?
Et si oui, pourquoi ?
acariatre 13/02/2015
Merci pour cette analyse détaillée et personnelle du phénomène qui a phagocyté toute l’actualité ludique des dernières semaines (pas de référence à Exploding Kittens tiens ?).
Je suis, en revanche beaucoup plus pessimiste que toi sur la récupération de ce système de financement. La vocation première de permettre à des petits acteurs de réaliser un projet convaincant en dehors des circuits traditionnelles avec l’aide d’une audience engagée a complètement disparu. Et même si la notoriété, le respect et la sympathie de Fred Henry est à la base de l’enthousiasme de la campagne Conan, les motivations des backers une fois le projet assuré me semblent beaucoup plus égoïstes et consuméristes (priorité, rareté, exclusivité).
L’amateur a perdu une bataille de plus et Internet est récupéré une fois de plus par les professionnels. Encore raté.
Sha-Man 13/02/2015
Je me suis demandé ce que je pouvais dire d’Exploding Kittens par rapport au monde du jeu de société.
Mais en fait est-ce que ça a vraiment quelque chose à voir avec ce qu’on connait ? Je ne suis pas sur.
Il s’agit surtout d’une espèce de goodie pour les fans du site oatmeal ou d’un gros délire je sais pas trop.
Un jeu de roulette russe, donc bon niveau mécanisme on a vu mieux, juste avec des cartes sans rien de particulier niveau matériel et pour un objectif de 10000$. C’est plus que ce que demandais Massilia où il y avait une vraie boîte avec du matos dedans.
En ce qui concerne le détournement du principe, je suis d’accord sur le « dommage », mais sachant que Kickstarter est une société dont le but est de gagner de l’argent, était-ce vraiment le but de se cantonner à des petits projets amateurs ?
Ont-ils été victimes de leur succès ou le business plan s’est juste déroulé sans accroc ?
Jobe314 13/02/2015
Pour « Exploding kittens », je pense qu’il est important de signaler qu’il s’agit d’un jeu assez « classique » mais qui a bénéficié d’un tapage médiatique énorme en passant à une heure de grande écoute dans un journal national aux US.
Tout ça parce que le journaliste a trouvé ça marrant des chats qui explosent, il a fait explosé le KS de la Team qui voulait faire 1000 copies de leur jeu à la base et qui en sont à + de 150 000 aujourd’hui… Le rêve américain.
Mevlido 13/02/2015
Pas vraiment d’accord pour Conan. Même si une partie des backers est motivée par l’exclu, la collectionnite aïgue, Conan semble être un jeu dont le système est éprouvé grâce à de nombreux tests. Les gens ont backé car ils avaient pleins d’infos sur ce jeu et qu’ils l’ont approuvé. De plus, l’investissement financier, le développement et le risque pris pour ce jeu était énorme. La campagne a été très bien gérée. Après l’avenir nous dira s’il aura une vie boutique comme ZS1.
Ce que tu décrit, c’est finalement plus pour ZS2 et 3 qui eux surfent eux sur la vague « rentabilité » et 0 prise de risque.
Quant à FF, je suis aussi déçu que la campagne ZNA n’ait pas fonctionné mais FF voulait 800 000 $ pour une appli dont on ne savait rien ou pas grand-chose. Quand on veut un financement pour un projet, le projet doit être aux petits oignons. C’est comme quand tu montes ton entreprise et que tu vas voir ton banquier. Si tu dis : « j’ai un super truc qu’il faut que je développe et il me faut 1M$ », tu risques de te prendre une claque.
Je ne suis pas sûr que KS ait une vraie vocation a aidé les petits qui ne peuvent pas faire autrement. Vu leur mode de financement, ils ont plus intéret à des projets comme Conan. Mais les « petits » peuvent en tirer profit avec un peu de com’ et de marketing, comme dit Sha-Man.
Editeur, c’est un métier qui nécessite de « croire » en son jeu et d’y mettre tous les moyens pour le développer et le vendre.
Shanouillette 13/02/2015
tu dis : « Pas vraiment d’accord pour Conan. Même si une partie des backers est motivée par l’exclu, la collectionnite aïgue, Conan semble être un jeu dont le système est éprouvé grâce à de nombreux tests. Les gens ont backé car ils avaient pleins d’infos sur ce jeu et qu’ils l’ont approuvé. De plus, l’investissement financier, le développement et le risque pris pour ce jeu était énorme. La campagne a été très bien gérée. Après l’avenir nous dira s’il aura une vie boutique comme ZS1. »
heu c’est bizarre que tu ne sois pas d’accord, c’est exactement ce qu’il dit non ? (extraits : « …cela laisse présager du bon et, surtout, le jeu a été montré. Il a été testé en public. » ; « Le système de jeu me parait très bon, l’univers développé est superbe dans son aspect graphique comme dans le soin qui a été apporté à le retranscrire dans le gameplay. » ; « Une communication en amont et pendant la campagne très efficace, des stretch goals très réalistes et des pledges clairs »…)
Djinn42 13/02/2015
Acariatre, effectivement. Fred Henry et sa sympathie ne sont pas seuls à l’origine des 200 $ moyens versés par près de 15 000 personnes dans le monde. Il semble que le jeu soit aussi bon. Je ne comprend pas non plus l’égoïsme et le consumérisme dont tu parles. C’est pas du bénévolat, c’est certain. Le fait que ce soit du crowfunding se traduit logiquement par les avantages dont tu parles.
acariatre 13/02/2015
Je ne reproche pas à Kickstarter de faire son beurre, à Frédéric Henry de vendre son jeu et aux amateurs de l’acheter. En revanche, je regrette fortement que ce qui aurait pu être un système de « financement participatif » ait été aussi vite récupéré pour devenir de la campagne de communication 100% contrôlée pour de la précommande avec exclusivités. En fait de « participatif », on observe surtout un engouement collectif pour une vente « privée ».
Du coup, des initiatives qui lorgnent du côté du soutien avec prise de risque ou du don pur et simple sont éclipsées par la prédominance de Kicktarter et des ses énormes campagnes menées par et pour des professionnels.
Et ça me fait râler (faut parfois que je mérite mon pseudo).
Par ailleurs, le fait que le jeu soit bon reste à prouver pour beaucoup d’acheteurs qui ne l’ont encore jamais eu entre les mains. On touche à d’autres facteurs d’achat ici.
Djinn42 13/02/2015
Si on est toujours sur Conan il a tourné dans plein de salon et on voit beaucoup de présentations (vidéo ou articles) sur internet. Fred Henry a mis pas mal de billes comme il le fait pour chaque projet et c’était Kickstarter ou rien pour sortir son jeu de figurine. Il le fait depuis une société crée de toute pièce. Kickstarter a permit qu’ensuite le jeu poursuive son cycle de vie en boutique. Beaucoup de gens pourront ensuite profiter de l’engouement de 16038 personnes. Je me sent pas bienfaiteur auprès des futurs acheteurs mais je suis content d’avoir apporté ma pierre à l’édifice.
Plutôt que d’acheter un jeu tout fait, j’ai permit qu’il voit le jeu et j’en récupère les fruits sous forme de contenu supplémentaire. Rien de bien égoïste, je n’enlève rien à personne et les places étaient pas limitées. Et tous ceux qui ont participé avaient les moyens d’évaluer si ce projet était fait pour eux ou pas. Rien de compulsif dans une campagne de 30 jours, contrairement à un achat boutique qui t’a fait venir pour un jeu qui n’est pas dispo et te fait repartir avec un autre… parce que tu étais venu acheter un jeu.
Je trouve ta vision un peu à côté de la plaque.
Sha-Man 13/02/2015
Pas de violence c’est les vacances (pour certains) 😉
Je comprends la vision d’Acariatre, mais je ne suis pas sur qu’il reste beaucoup de place dans notre monde pour l’acte « punk » ou de soutien désintéressé vu comme tout est bien organisé, rationalisé.
Cela n’enlève rien au mérite du jeu et à la démarche sur Conan, mais de mon point de vue, comme je l’ai dit dans l’article : une campagne et un projet bien maîtrisé et cela au sens professionnel du terme.
KS est surtout un accélérateur de développement ici et va permettre d’assurer une stabilité à la société pour la distribution classique et une longue série d’extensions potentielles et d’autres jeux avec des prises de risque moindres.
De là à dire que le jeu n’aurait pas vu le jour sans KS, ce serait nous faire croire que toutes les sociétés qui sortent des jeux à figurines ne peuvent plus se passer de l’outil et que l’investissement / développement classique est mort.
Ils avaient une vision dont l’ambition requérait peut être KS pour donner la visibilité et la capacité de levée de fonds en 1 semaine voila ce que j’en pense.
Plus généralement, je suis d’accord sur le fait que l’on observe sur KS la même chose que l’on observe dans un modèle de commercialisation plus classique : la force de la communication qui éclipse les plus petits projets.
Mais franchement, je me sentirais très idéaliste de croire qu’il pourrait en être autrement.
Djinn42 14/02/2015
Pas de violence, non. Ni d’angélisme. Je suis ni fanboy ni rien de tout ça. L’expression « à côté de la plaque » est malvenue.
Ceci étant je ne saisis pas l’idée de « vente privée » dans la mesure où le nombre de places n’est pas limité.
Pareil pour l’aspect « égoïste ». Ce jeu vise à rassembler autour d’une table entre 2 et 5 personnes. Il me semble que c’est plutôt le contraire. Pareil avec l’aspect communautaire qui s’est crée spontanément et que Monolith veut encourager (partage de scénarios, etc).
A part le proto qui a tourné personne l’a eu dans les mains, justement Kickstarter a pour but sa fabrication. Le système de jeu n’est un mystère pour personne et les visuels ont déjà été largement diffusés.
Les autres facteurs d’achat je vois pas. Mais à 90 € le ticket d’entrée pour un jeu qui sera pas distribué avant octobre, j’imagine mal l’aspect compulsif ou à la gentille tête de Fred Henry.
Je vois pas bien ce qu’on peut trouver à redire à ce jeu.
Pour avoir participé à une autre campagne (Smallworld 2) et suivi une seconde (Grim Dawn mais pas participé ne le sentant pas), je peux dire que de bout en bout c’était une campagne de financement bien fichue.
On peut taper dessus quand c’est fini et qu’on compte les points, mais avant qu’elle se lance quelques investisseurs et analystes avaient quand même eu le nez creux en prétendant qu’un tel projet était pas destiné à soulever les foules. C’est pas pour ça qu’une foule bêlante s’est levée. Et avec ses précédents jeux on n’était pas sûr que Fred Henry, tout sympathique qu’on puisse le trouver, avait les épaules assez larges pour un tel projet. La série Timeline, Cardline et les bâtisseurs c’était pas du même niveau. Il a aussi ses casseroles, des jeux qui n’ont pas pris trop la poussières sur les étagères dans les boutiques.
Donc d’un coup, un type culotté déboule, réunit la dream team dans plein de secteurs du jeu (graphistes, auteurs, sculpteurs, etc), investi des ronds personnels parce que mine de rien il y croit à son jeu. S’entoure de ce qu’il faut comme gars sérieux pour la distribution et la logistique. Se démerde pour faire que ça campagne ait de la gueule, éviter de trop inciter à la dépense en rendant l’offre de base très intéressante. Ca marche du feu de dieu, au point que médiatiquement ça déborde du strict cadre ludique.
Ton ressenti faisant intervenir de l’égoïsme, un aspect vente privée ou des facteurs d’achat que tu ne développes pas me font pensé plus à de l’agacement qu’à une analyse critique. C’est pas comme si les gens se montaient une vitrine de figurines des chevaliers du zodiaque pour le plaisir de les regarder ou les montrer à leurs amis (« non, ton gamin y touche pas, c’est pas un jouet »). La finalité c’est quand même de partager ensuite et de créer des moments de convivialité autour de ce support.
J’imagine que si je dit fierté de sortir le truc autour d’une table tu penses snobisme. Mais on ne rentre pas dans le débat dans ce cas, mais dans l’idéologie. Le truc qu’on peut pas vraiment débattre.
Pour revenir à Grim Dawn, un jeu PC, j’avais suivi tardivement le jeu Titan Quest. J’avais adoré l’aspect Hack and Slash dans l’univers mythologique. Le studio ferme, certains employés sont sur le carreau. Une poignée remonte une structure, rachète les droits et récupère du code pour faire une suite spirituelle. Grim Dawn. Un Hack and slash avec le même moteur et une grande ambition. Niveau artistique et niveau gameplay, pas mal de bonnes intentions.
Le jeu a été financé par Kickstarter et est sorti mais n’a pas vraiment tenu ses promesses. J’ai pas investi dedans ne sentant pas trop avancer comme je le voulais le développement du jeu. C’est pas le flop du siècle mais pas non plus un bon jeu.
Le côté pépite a ses limites. Et pour moi s’apparente pour le coup à une forme de snobisme autant qu’a ce fameux esprit communautaire. Je comprend que certains rejettent les énormes succès, ça peut agacer, et qu’ils recherchent les choses plus confidentielles. Ces projets qui donnent l’impression d’avoir notre libre arbitre parce qu’on ne suit pas le courant. Mais dans tous les cas on suit le même courant, celui de nos émotions et de nos envies. C’est pas plus malsain d’avoir les mêmes envies que 16037 autres personnes dans le monde. Le premier qui parle de partie fine…
Ce qui m’agace moi c’est ceux qui te sortent l’album que personne connait et sont tout fier de te le faire découvrir. Et du moment que ça commence à être connu passent à autre chose parce que ça les agace de partager. J’ai connu ça avec Jeff Buckley ou Ben Harper par exemple. C’est assez symptomatique.
eolean 13/02/2015
Super intéressant cet article et cette chronique également ! Moi qui aime les débats, je plussoie ! ^_^
Pour ma part, je n’ai encore jamais pledgé. Il y a plusieurs raisons à ça :
-> Je n’ai aucune patience ! J’arrive pas à me dire que je vais mettre de l’argent dans un jeu maintenant pour le voir éventuellement dans 6 mois. J’admet être un peu compulsif dans mon acte d’achat tel un gamin, je veux mon bonbon le plus vite possible. C’est con, mais pour pledgé, il faut poser ses billes à long terme.
-> Il y a beaucoup de projet sur des jeux » démonstratif « mais un peu moins sur les euro game, or c’est plus mon domaine de prédilection.
-> Je suis encore frileux pour ce type de financement. Un peu comme on pouvait l’être avant d’acheter pour la première fois sur internet ou par correspondance (pour nos ainés ^^)
J’ai pourtant failli franchir le pas avec Steampunk Rally dernièrement. Mais au dernier moment j’ai annulé. Je me suis dit que je pouvais attendre qu’il sorte en boutique, quitte à risquer qu’il ne sorte jamais. Parfois j’ai des regrets, comme avec Euphoria où j’ai attendu le jeu plus d’un an pour le voir arriver après sa campagne de Crowfunding. Mais finalement, la version française rééditée s’est vu corriger quelques écueils du jeu de base, du coup, c’était quand même préférable au final d’attendre.
Concernant le principe en lui-même, j’en vois beaucoup de dérives qui ne me plaise pas vraiment. Le concept original consistant à se mettre à plusieurs pour permettre à un auteur de mettre en pratique son idée si elle correspondait aux attentes d’un grand nombre me semble avoir été perverti par le système des entreprises.
On se retrouve maintenant avec des grosses boites qui font des campagnes pour la publicité, pour ne pas prendre de risques, pour être « à la mode », etc… Et ces boites ou ces projets professionnels mettent sur la table des moyens qu’un auteur particulier ne sera jamais capable de faire ! Et de fait, un décalage se crée. Même Conan, avant de mettre le projet sur KS, Fred Henry disait qu’il en était déjà pour 200 000 euros de sa poche ! Alors, je reconnais qu’il est passionné et qu’il a pris tous les risques pour son bébé et donc il ne l’a pas volé. Mais comment comparer ces mastodontes du KS, ou même des boites comme Queen Games avec le créateur qui a eu une bonne idée dans son garage ?
Je regrette l’aspect professionnel et communicatif à outrance que prend petit à petit le crowfunding. Parce que même s’il reste encore de la place pour les petits auteurs, les « gros » tire la couverture vers eux et s’attire la plus grosse part du gâteau que les backers sont capables de mettre. Bien sûr, ils n’empêchent pas les auteurs de proposer leur projet, et bien sûr personne nous empêche de miser sur les petits plutôt que sur les gros. Mais soyons honnête, l’aspect communication, marketting et professionnel des gros attire bien plus de lumière et nous amène vers eux qu’on le veuille ou non (sinon ces métiers n’existeraient pas). Et si on ne veut pas, alors il faut rentrer en résistance active, ce qui demande bien plus d’énergie et tout le monde ne le fera pas, c’est pour ça qu’ils arrivent à leur fin. Au final, l’acte de pledger avec les gros revient à une simple précommande et non plus le geste un peu punk que tu évoquais…
Sha-Man 13/02/2015
Et oui c’est sur que quand on pledge, faut être patient derrière.
Des gens m’ont demandé sur twiteer ce matin « Et toi tu vas les peindre tes figurines de Conan ? ».
Euh bah franchement, si je commence à y penser maintenant, j’ai largement le temps d’oublier tout ce que je prévois de faire avec le temps que ça arrive 😉
Cormyr 13/02/2015
Très bel article sur un sujet qui devient désormais majeur dans le monde du jeu de société. Avant de donner très rapidement mon sentiment, une petite correction : le record jeu de société et désormais détenu par Conan (3,2M$) qui a donc détrôné Zombicide 3 😉
Je te rejoins sur la dérive actuelle qui consiste à voir dans ces plateformes un outil marketing et surtout un moyen de s’affranchir des risques liés à l’investissement initial. Et c’est pourquoi moi aussi je reste très très mesuré sur l’utilisation de ce type de plateforme. Le summon de cette dérive étant de mon point de vue la société Queen Games, société qui est très bien installée sur le marché, possède un catalogue de jeux conséquent, et qui désormais sort tous ses jeux via la plateforme kickstarter. Le pire c’est qu’elle ne propose même pas (ou très peu) de stretch goals intéressants. Cela lui permet juste d’éviter l’investissement initial. Aucune prise de risque, pas de trou dans la trésorerie, l’idéal pour une société qui n’en profite même pas pour faire un retour positif vers ses financeurs (aucun stretch goal) ou pour mieux rémunérer les auteurs et illustrateurs. Car je rappelle que l’éditeur, si il prend une grosse marge c’est justement, normalement, pour financer les risques. L’auteur, lui, n’a qu’un très faible pourcentage. Le système est donc complètement dévoyé de mon point de vue. Le rêve du capitalisme : se faire financer par d’autre sans les rémunérer pour en conserver tous les fruits.
Concernant la dérive consumériste à base d’exclusivités, elle me gêne moins. Je considère qu’on est dans l’esprit de la récompense à la prise de risque. Car l’avance de trésorerie, les plus gros risques, sont pris par les financeurs, c’est à dire nous, les pledgeurs, les clients. On aurait pu imaginer un retour sur investissement sous forme de pourcentage (certains l’avait imaginé d’ailleurs, sans succès), le retour sous forme de bonus au jeu, voir de bonus exclusif me semble assez cohérent et juste. Après que certains en jouent pour augmenter la mise initiale à base d’extensions multiples et variées ou d’autres goodies inutiles mais exclusifs, nous ne sommes pas obligés d’y souscrire et ton pledge raisonnable sur Conan le démontre bien.
Moi, finalement, ce que j’aimerai, c’est que les joueurs soient plus responsables et ne financent que les projets qui correspondent à cet esprit de prise de risque, de projet impossible à financer autrement, de lancement d’une idée audacieuse, d’un produit de niche. Si en plus le joueur évitait de tomber dans la course aux add-ons, le marché s’autorégulerait. Nous sommes tous collectivement responsables de la dérive que tu observes. Arrêtons de financer Queen Games, arrêtons de financer la nième campagne de Zombicide. Finançons plutôt ZNA, World of Yoho, Conan ou Time Master, ces projets, soit de jeunes sociétés démarrant, soit innovants et risqués, soit tout simplement excessivement couteux à produire avec un seul de rentabilité difficile à atteindre par les circuits classique.
fouilloux 13/02/2015
J’avoue n’avoir jamais pledger (je suis fainéant et ne suis pas les campagnes, et j’aime bien en plus savoir ce que j’achète), mais si cela m’intéressait au début, je suis maintenant largement rebuté par ce mode de financement. Justement parce que je sais que je ne prendrais pas le temps d’aller voir quels sont les petits projets qui pourraient m’intéresser. Queen Games est définitivement l’exemple à ne pas suivre. Concernant la prise en compte des auteurs, dans une interview de proxi-jeux, Bruno Cathalla parle aussi de cet aspect là: certes, Sha-man le montre bien, faire une bonne campagne kickstarter c’est un vrai métier et cela ne s’improvise pas. mais le risque financier n’est vraiment plus le même malgré tout.
Sha-Man 13/02/2015
J’avais entendu beaucoup de choses au sujet de Queen Games et j’avais prévu un paragraphe à ce sujet initialement aux côtés de Massilia / ZNA / Conan, mais je n’avais pas assez d’éléments factuels sur leur chiffre d’affaire, sur les résultats de leurs jeux.
Mais il est vrai qu’il y a eu le scandale de jeux déjà prêts dans les entrepôts au lancement de campagnes, de jeux moyennement finis…etc.
Djinn42 13/02/2015
Barbarian pledge pour Conan de mon côté. La boîte de base sans add-on ni trucs exclusifs. Je suis très terre-à-terre et pas assez fan pour débourser autant. Si le jeu m’emballe vraiment j’irai très certainement compléter ça par des extensions, il semble qu’on aura beaucoup de suivi sur ce jeu et déjà pas mal d’extensions ont été présentées.
Ce qui est intéressant dans l’exemple de Conan c’est que des gens comme moi sont une minorité. Le pledge moyen pour la campagne est de 207,49 $ (soit plus de 180 €). Pour un total de 3 327 757 $ pour 16 038 backers. On constate donc que les 1369 radins comme moi (90 € tout de même avec frais de port*) représentent 8,5 % des backers. Ils ont peut-être pris pour certain d’autres éléments ceci dit. Pourtant le contenu correspondant à la boîte de base est énorme vu les stretch goals atteints. Pourquoi alors autant de personnes ont payé 200 $ ou plus** ?
Je m’explique cet énorme succès par plusieurs choses :
la personnalité de Fred Henry et son franc parler. Il a présenté son jeu dans tous les salons qu’il a pu, pas spécialement pour en faire la promo. On l’a vu au salon de St Vincent de Boisset (vous ne connaissez pas,c ‘est normal) et il a présenté son jeu à trois ou quatre groupes de joueurs. Une infime partie des visiteurs du salon. Le but étant plus de voir les réactions des joueurs qu’en faire une promo agressive. Pas de mégaphone ou d’affiche. Pourtant les visuels manquaient pas. Le prototype était vraiment un prototype en contreplaqué, le sort de bouclier magique de la sorcière du groupe un verre en plastique retourné sur la figurine. Encore qu’il y avait même pas de figurine à proprement parler il me semble.
l’équipe autour de lui. Il s’est entouré d’une équipe dynamique, de contacts connus du ludo-public. Les frères Bombyx, des scénaristes de renom, des graphistes réputés et talentueux, des sculpteurs aux doigts agiles, d’un expert en Conan pour approuvé (ou pas) les éléments narratifs du jeu, etc. Même le circuit de distribution a été évoqué avec Asmodée, Philibert.
La communication. En amont, pendant et encore après. D’abord les essais dans les salons, petits et grands. Mais pour les grands il y avait une couverture médiatique.De nombreuses vidéos, interviews, previews, avis de testeurs. On a pu voir le lancement des 5 premières minutes sur Tric Trac avec les 80 000 $ atteints en 5 min et demie. Pendant la campagne on pouvait les suivre sur internet très régulièrement. La page Kickstarter était mise à jour très rapidement pour chaque Stretch Goal atteint. Sur Facebook l’équipe Monolith et Bombyx répondait à tout ou au moins « aimais » tout ce qui se disait. Sur le forum Tric Trac c’était la folie avec la participation de tous les protagonistes (Erwan ,Fred, Patrice Louinet et le pseudo Monolith qui représente leur boîte d’édition montée pour le projet***).
Les stretch goals. La gestion des stretch goals avec une vraie écoute de la communauté mais aussi des choix propres et très bien sentis. Pas mal de variété. Beaucoup de figurines mais aussi pas mal d’autres éléments de jeu. Ma boîte de base a plus que doublé de volume avec tout ce que la campagne a permit de débloquer. D’ailleurs, un des stretch goals consiste en une boîte de rangement pour tout ça.
L’esprit communautaire. Les backers ont été très entendus et Fred et d’autres participaient très volontiers aux discussions quotidiennement. Equipe de jour et équipes de nuits se sont relayées pour poursuivre le fil des discussions.
J’ai adoré cette campagne, la fin était vraiment prenante. L’esprit qui a régné entre joueurs et l’équipe Monolith était extraordinaire. Le jeu a crevé le plafond prévu, mais n’a pas échappé aux concepteurs qui ont su réagir à l’engouement qui a dépassé leurs attentes. On a même vu Fred Henry sur le plateau de BFM expliquer son projet au moment des 1,5 M $. Ce financement fera date je pense.
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(*) Une petite blaguounette sur les frais de port qui ont été l’occasion de voir que c’était pas si pro que ça niveau communication. Ce qui est justement intéressant c’est qu’ils ont fait preuve de beaucoup de simplicité et de bonne volonté. Contrairement à une communication carrée et froide, ici il y a eu cafouillage puis rattrapage. C’est étrangement porteur de confiance, contrairement à quelque chose de trop aseptisé et cadré. Il y a toute une liste des « scandales » qui ont rythmé la campagne KS : le late pledger gate, le shipping gate, le Rules-Gate, etc. L’aspect communautaire a joué à plein.
(**) Le all-in, c’est à dire l’ensemble de l’offre, approche ou dépasse les 500 $ si je me souvient bien.
(***) D’après des informations obtenues lors d’une interview de Fred et dont j’ai eu la confirmation par Erwan vers la fin de la campagne, la société Monolith a été pensée pour un premier projet de jeu. Mais ce jeu a été reporté et c’est Conan qui a été le premier projet à voir le jour. Il existe donc un second projet dans leurs cartons, et celui-ci sera aussi porté par une campagne Kickstarter.
Jobe314 13/02/2015
Je me suis également posé la question car 90€ ce n’est pas rien pour un jeu! Bien plus cher qu’un Zombicide ou un Descent pour comparer dans la même gamme de jeu. Mais avec les SG, on arrive à beaucoup de matériel et finalement un prix attractif, mais je ne me voie pas acheter la boite de base « barbarian » sans tous les SG en boutique à 90€ environ.
D’où une de mes questions, Que deviennent les boutiques dans tout ça?
Je dénonce également comme certains le rapport qu’à Queen Games avec KS; mais aussi celui de Cool Mini or not avec tous ces jeux à figurines qui font des grosses levées de fond à chaque KS. Pourquoi ne pas avoir juste un site de précommande avec des bonus équivalent aux SG? Ils n’ont plus besoin de KS pour avoir des fonds, et ils ont la notoriété suffisante pour ne plus passer par cette plateforme qui prend une com au passage non? L’intérêt devient juste la visibilité?!
Sha-Man 13/02/2015
Zombicide / Descent v2 c’est quand même dans les 70-80€, la différence n’est pas énorme.
Dans les gammes edge tu as quantité de jeux à 85€ (Rivet wars / arcadia quest) et je te parle de prix boutiques en dur, parce que bien sur ça va descendre sur internet.
Perso, je connais pas le prix final que Conan aura en boutique, mais il est clair que pendant un KS, s’ils ont bien maitrisé (et je pense que c’est le cas) le contenu vs prix, il y a une estimation des couts supplémentaires des SGs qui se débloqueront + de la commission de la plateforme KS + des couts inhérents à la campagne (com / pub…etc) réduits de l’élimination des intermédiaires des circuits de la distribution classique.
Ne pas oublier que les boutiques ont une marge de 40-50% sur les jeux qu’ils vendent, ce qui veut dire que l’éditeur a quand même une certaine latitude pour gonfler le matos.
Après je ne connais pas exactement les coûts de distributeur dans le cas d’un KS, est-ce l’éditeur qui se débrouille ou y a-t-il un distributeur derrière ?
Cormyr 13/02/2015
À noter que le barbarian revient à 80,10€ hors frais de port avec le,taux de change. Donc pas plus cher qu’un Descent ou Zombicide
Jobe314 14/02/2015
80,10€ c’est en comptant les frais de ta banque ou sans?
Djinn42 14/02/2015
2 € de frais de banque
79 € pour la boîte Barbarian
10~15 € de frais de port
Djinn42 13/02/2015
J’ai lu un article à propos d’un concepteur de jeu vidéo qui expliquait que sa campagne KS visait à montrer à un investisseur hésitant l’engouement de la communauté. Le financement KS seul ne suffisait pas, mais permettait d’embrayer avec de l’investissement plus classique auprès d’investisseurs pas très éclairés sur le potentiel du jeu.
Pour revenir à Conan, je ne suis pas grand amateur de figurines mais à priori les 90 € de la boite qui sera en vente vaut son pesant de figurines. Elles seront à priori de qualité, par des sculpteur reconnus. Le jeu arrive en boutique avec pas mal d’extensions et des scénarios communautaires. Les boutiques n’auraient pas vu arriver Conan sans Kickstater. Maintenant que le financement est réussit elles vont voir arriver beaucoup de boîtes et Fred Henry semble avoir envie d’assurer un suivi régulier. Je pense donc qu’elles sont très heureuses de la tournure qu’ont pris les choses. Monolith va s’appuyer justement sur les boutiques pour la suite, le financement ne visait pas à couper les joueurs de leurs boutiques. Sans KS la boite était pas à 90 € mais 1,5 fois plus cher ou quelque chose comme ça.
TheGoodTheBadAndTheMeeple 13/02/2015
Le cas Conan peut selon moi se résumer en deux mots : passion et professionalisme. Alliés à la perfection durant la campagne. Attendons quand même de voir évoluer le bébé, mais a ce moment, la confiance règne. Moi pledge King + campagne, j’ai réussi à ne pas craquer plus.
Massilia c’est le cas arnaque qui joue sur le foncitonnement risqué de KS
Zombicide a commencé avec la passion et ne subsiste maintenant que le profesisonalisme.
Trad Alien Frontier = passion sans profesisonalisme
Voyez Rattlebone, 6M pour quoi ? des figurines, des figurines encore des figs !
En général, KS ne donne pas la parole aux créateurs. Comme toujours quand on vend des choses, l’essentiel demeure la communication.
Ya pas vraiment de démon, ni de nouveau métier derrière tout cela selon moi. Juste un nouveau moyen de capter l’attention et l’argent des clients.
Perso, je pense que des perles peuvent sortir en cachette maintenant via KS. Nous avons les moyens de les trouver, et de les porter. A un prix fort d’un très gros boulot d’investigation.
C’est ce qu’on voit fleurir dans le webludique genre la chronique KS hebdomadaire de Tom Vasel (the dicetower).
Decouvertes du moment 27th passenger > pas un KS 🙂
Paper Back > un petit KS
Fred la loutre 13/02/2015
Pour ma part je ne pledge jamais.
Je pars du constat que si le jeu est bon, il sera traduit et distribué en france par un editeur. Donc je n’ai aucun probleme a attendfe que le jeu soit traduit.
Sans compter le fait que je n’achete jamais un jeu sans l’essayer. Des regles et des avis donnent un appercu, mais le ressentit du jeu est tout autre
Djinn42 13/02/2015
Un peu comme « la barbichette ». J’ai attendu une traduction et de tester moi-même avant de me lancer. Je regrette pas d’avoir attendu.
https://www.youtube.com/watch?v=ypES3CU7Pfo
Paul 13/02/2015
Très bonne idée cette chronique: débat intelligent, véritable façon de penser, va-t-elle permettre enfin de « désasceptiser » le paysage ludique français ?
Opyros 13/02/2015
Comme mon comparse du haut, c’est effectivement une bonne idée de provoquer le débat sur ce sujet. Pour ma part j’ai jamais franchi le cap du « krakage », comme certains j’ai tendance à être trop impulsif pour me modérer. Faut dire aussi que j’ai du mal à trouver la dimension « prise de risque » dans la plupart des KS. Quant au cas Conan, j’ai du mal à ne pas le ranger aux côtés de Zombicide, j’ai eu l’impression d’un gigantesque rouleau compresseur médiatique (je dis ça parce que je n’ai eu que sporadiquement internet ce dernier mois et même en passant 15 minutes sur le net toutes les semaines j’en ai entendu parler à toutes les sauces). Ce n’est peut être rien d’autre que de la comm’ maitrisée, ou un kickstarter bien géré ; mais au final j’ai pas eu l’impression de voir petit projet se muer en une hydre titanesque par la seule impulsion des joueurs, me suis juste dit que le rouleau compresseur avait bien fait son boulot. Me suis même demandé si j’allais y participer moi même. Quand on voit le ratio prix/figu’ on se dit que c’est intéressant. C’est à ce moment là que j’ai renoncé à l’idée. Si la seule chose qui motive c’est un argument économique et non ludique, autant éviter.
Pour moi la dynamique qu’a impulsé ce type de financement au marché est doublement dangereuse. D’abord vis-à-vis de la dérive que ça entraine au niveau de la création/production, comme mettre sur ks un produit déjà finalisé pour économiser quelques kopecks. Ensuite du côté des joueurs car cela installe un mode de consommation pas toujours très sain à mon avis. Au croisement tout ça on peut trouver des produits « bâtards », comme Myth, qui peuvent enquiller les problèmes de productions, envoies, règles et où on arrive paradoxalement avec une boite de base trop pauvre pour être réellement viable dans le commerce.
Cormyr 13/02/2015
Je pense que c’est au joueur de se modérer et d’être plus raisonnable. Ton attitude vis à vis de Conan me semble saine et exemplaire : à partir du moment où tu t’es rendu compte que tu achetais de la figurine au poids plutôt qu’un jeu, tu as renoncé. Quant à moi, j’ai tendance à suivre ce raisonnement t et c’est bien pour cela que je n’ai que 6 projets en financement participatif :
1775 car je connaissais 1812
extension solo du réveil de l’ours car j’ai le jeu et la présentation, je le connais bien et la présentation qui en a été faite m’a convaincu
Essen the game : joué à Cannes et à Toulouse : le jeu m’a plus, les auteurs sont super sympathiques t c’était un projet pur Kickstarter
le game calendar : là c’est la faute à Shanouillete, mais je ne prenais pas grand risque d’être déçu
et enfin Conan : j’en ai fait 4 parties et sans ces parties je n’aurais certainemét pas pledgé. J’ai d’abord été convaincu par le jeu et j’avais décidé dd m’y la t avant même d’avoir vu une figurine. J’ai opté pour le King’pour la campagne. Là aussi c’est l’argument ludique qui l’a emporté : j’ai failli y renoncer car économiquement le barbarian était plus intéressant, mais l’intérêt ludique de la campagne m’a convaincu. J’ai rajouté quelques exclus qui me semblaient intéressantes en terme de gameplay
c’est un projet qui a été bien mené sur tous les plans : tests nombreux pour convaincre les joueurs, superbes figurines pour les figurinistes, une licence connue pour les fans et quelques exclus pour les collectionneurs.
Sha-Man 30/03/2015
Un article d’Acariatre sur son ressenti sur la campagne Conan.
Son avis personnel est bien argumenté et intéressant.
Je ne le rejoins pas forcément sur tous les points, notamment après avoir beaucoup discuté avec des éditeurs sur le sujet CrowdFunding et les coûts de développement même des Stretch Goals et autres contenus additionnels.
Ces discussions apportent en effet un regard intéressant sur les bénéfices réels de ces opérations lorsque l’on appréhende l’aspect coût de développement des jeux, souvent caché car pas toujours représentés par du matériel.
A lire pour ce faire son avis sur la question.
Merci Acariatre.
Opyros 30/03/2015
Je suis assez d’accord avec l’argumentaire d’Acariatre (cf. mon premier commentaire un peu plus haut). Après peut être que cela laisse un peu trop dans l’ombre l’aspect « éditeurs/créateurs ». Mais du simple point de vue d’un joueur lamb(a)da, « l’effet kickstarter » apparait assez problématique sur le long terme. La pérennité d’un jeu kickstarté dans le commerce se pose à mon avis. Par exemple, je me suis pas mal intéréssé à Shadow of brimstone. J’adore le principe, du PMT à la sauce Far west/tentacules ; j’adhère tout de suite ! Mais après beaucoup de lecture il apparait qu’une boite seule rend le jeu assez limité. Quand on voit que le prix de revient d’une boîte est entre 85 et 100 euros sur le net, ça fait cher l’addition. Je pense que Shadow of Brimstone a été pensé de manière globale, c’est à dire avec toutes les choses qu’ont apportées le kickstarter. A ne prendre qu’une boite de base on aurait qu' »une partie » du jeu (je grossis un peu le trait). Et si je devais faire un comparatif objectif avec des jeux de la même gamme de prix, il n’y a pas photo. Arcadia Quest me fait un peu la même impression. Un jeu plein de qualité mais dont le prix me semble peu justifié. Pour autant je ne suis pas totalement pessimiste. J’ai acheté Battlecon : devastation of indines, issu d’un kickstarter et je n’ai pas été déçu du tout (bien au contraire). Mais j’avoue que cette dynamique inflationniste globale (j’ai l’impression de voir ça aussi chez FFG) au niveau du prix des jeux m’inquiète un peu. Pas que je sois radin, étant ameritrasheur ça ne me dérange pas de payer cher un jeu. Mais je n’aime pas l’idée d’un jeu en kit (comme d’un jeu-vidéo qui nécessite des DLC pour être viable). Je me rends compte au final que le centre de tout ça c’est la notion d’objet. A quel moment sacrifie-t-on l’unité et la complétude d’un jeu à trop cumuler de SG ?