Orléans Jeanne d’Arc : Un feu de joie

Orléans (2014) est un excellent jeu de Reiner Stockhausen dans lequel nous envoyons nos partisans (fermiers, marchands, chevaliers et moines) réaliser des actions afin de construire un moteur qui permettra d’augmenter notre influence. Avec ce titre, Stockhausen avait initié la mécanique du Bag Building (enfin il y a débat avec Hyperborea qui date aussi de 2014).

Orléans a connu ensuite deux extensions, avec un mode coopératif et d’autres ajouts bienvenus. Grovast nous en parlait de Invasions dans une chronique, mais aussi de Commerce et Intrigue dans cette chronique. Nous évoquions aussi le cas de Orléans Stories dans cet article.

Qu’on se le dise : Ce jeu n’a pas pris une ride ! Alors quand une nouvelle version, cocrée avec Ryan Hendrickson, qui plus est une version roll and write (draw en fait) a été annoncée, mes sentiments étaient mitigés… d’un côté, vu le plaisir ressenti avec Orléans, ça donnait envie de s’y intéresser, mais il y avait le risque aussi d’une adaptation quelconque pour bénéficier de l’aura de la série (ça ne serait pas la première fois que cela arriverait !).

 

les jetons partisans

 

Du Bag building au draft

Tout le plaisir d’Orléans réside dans la construction de son sac, qu’il faut penser de temps en temps à épurer pour ne pas que notre jeu s’enlise et tourne court. Dans cette version Draw and Write, nous sommes dans du draft de jetons. 

Le joueur actif pioche autant de jetons plus un que le nombre de joueurs, il en choisit un et réalise son effet. Puis c’est au joueur suivant, et quand tous les joueurs ont sélectionné un jeton, le premier joueur va pouvoir réaliser l’effet du dernier restant. Puis on change de joueur et on continue.

Dans cette version draw, on retrouve tout ce qui fait le charme d’Orléans : un chevalier nous permet de tracer un chemin sur une route et d’y récupérer les jetons ressources que l’on va cocher dans notre entrepôt, le batelier permet la même chose, mais sur l’eau, l’évêque évolue sur la piste de savoir, si importante dans Orléans. Le commerçant nous permet de construire des bâtiments donnant des bonus ou des actions mélioratives. Enfin, l’artisan nous permet de construire des fortins, qui en fin de partie vont donner des points.

 

De l’interaction dans du roll & write 

En général dans un roll & write l’interaction se réduit à peau de chagrin. Dans Demeter par exemple, le premier à colorier tous les dinosaures d’une zone gagne 2 points supplémentaires, qui peuvent, il est vrai, faire la différence en fin de partie. Même mécanisme dans Welcome, avec les objectifs.

Le mécanisme de sélection offre une interaction froide dans ce Orléans, si un autre joueur prend le jeton que vous souhaitiez, et bien dommage, il faudra composer autrement. On a toujours la possibilité d’aller cocher un moine qui nous permettra de faire l’action de notre choix, mais nous fera perdre des points en fin de partie. À nous de bien arbitrer ce dilemme.

Les cartes lieux nous appartiennent, si j’ai construit une fromagerie, personne ne pourra en bénéficier à part moi, par contre, en construisant cette fromagerie (Niveau 1) j’ouvre le marché aux cartes de niveau supérieur. Par conséquent, on s’intéresse rapidement aux actions des autres joueurs, car elles peuvent nous créer des opportunités.

Certaines actions, vont nous donner des bonus, par exemple quand on complète une colonne ou une ligne dans notre entrepôt ou banque. Mais le premier bénéficie d’un meilleur bonus et annoncera à ses voisins qu’ils peuvent barrer, ce moine, ce citoyen, ce bouclier, etc. Idem aussi sur la piste de développement ou les premiers peuvent glaner en tout deux citoyens. Bref tout cela fait que l’on se surveille, on s’observe et parfois on se fait damer le pion, il me semble compliqué pour l’emporter de rester coincé le nez sur sa feuille.

 

Quelques cartes Bâtiment

 

Richesse stratégique

Cet Orléans est très ouvert, un peu comme son grand frère qui est un bac à sable. Dans celui-ci, on pourra tracer son chemin dans le comté d’Orléans pour y glaner des ressources, mais on peut aussi en gagner avec des bâtiments ou avec des bonus.Une colonne terminée nous donne des “cadeaux”, une rangée apporte des points de victoire en fin de partie. Construire des bâtiments qui nous donnent des sous, que l’on dépensera pour construire des fortins, qui seront un multiplicateur de points de victoire en fin de partie. Chaque choix stratégique aura ses avantages et ses inconvénients. Par exemple, la stratégie Fortin nécessite d’avancer sur la piste de savoir, car multiplier par zéro ça fait zéro 🙂

La stratégie ressource, nécessite d’avoir des bâtiments qui donnent des ressources pour remplir le grenier, sans quoi on marquera peu de victoires, car pour en marquer il faut terminer une ligne. En revanche une colonne offre un bonus, choisir, renoncer …

 

le feuillet en fin de partie

 

Il arrive que l’on complète une colonne de notre entrepôt qui nous donne un moine bonus que l’on va utiliser pour avancer sur la piste de savoir qui va nous donner un autre moine, qui va encore par truchement nous donner un autre moine et en quelques actions, nous avons gagné plusieurs ressources, rempli les finances etc. Un moment qui va arriver une ou deux fois par partie, très satisfaisant quand on réussit notre planification. 

Un jeu plus tactique que stratégique, dans lequel on s’adapte aux jetons sortis du sac. Toutefois, avec les bâtiments on pourra mettre en place une stratégie. Il est difficile de dire si les stratégies se valent toutes, car justement elles vont dépendre des facteurs humains et de l’aléa.

Le mode solo est intéressant, on peut se battre contre Jeanne d’Arc avec une sorte d’Automa. À son tour, on tire une carte du mode solo qui nous indique l’action qu’elle va réaliser, et elle va se comporter comme un joueur, nous volant un bonus, un jeton citoyen, construisant un fortin plus rapidement que nous, édifiant une carte bâtiment. Il existe 3 niveaux de difficulté, et elle est hargneuse Jeanne, même si le hasard est important, surtout dans son premier niveau et quelquefois elle va se jeter sur les citoyens, ou bien nous ôter des voies stratégiques, ou bien construire la où on a déjà construit, ce qui n’a pas d’effet. Fait amusant, thématiquement on ne sait pas trop pourquoi on doit se battre contre ce personnage historique, logiquement on devrait plutôt coopérer.  

 

Le mode solo

 

 

Jeanne d’arc au bûcher ?

L’édition est de bonne qualité, mais nous avons noté deux petites choses : c’est une bonne idée de donner des crayons à papier, cependant on vous conseille plutôt l’emploi de stylos de couleur, afin de suivre les évolutions des autres joueurs, car au crayon de papier on ne perçoit pas vraiment les chemins que nos adversaires ont empruntés. Le setup de base des bâtiments est imprimé sur les feuillets, il vous suffit donc de cocher la case quand vous le construisez, ou de la barrer si un joueur l’a fait avant vous. Un petit détail qui n’en est pas un, car ça permet de lancer une partie rapidement, et surtout de jouer à distance avec la même configuration.

 

Les bâtiments du setup de base imprimés sur le feuillet.

 

Si j’avais peur que cette version soit superfétatoire, on va dire que cet Orléans Jeanne d’arc Draw and Write nous a agréablement surpris. Les sessions sont plutôt variées avec le renouvellement des cartes Bâtiment, le jeu offre une richesse stratégique intéressante pour le genre. On a surtout été marqué par l’interaction directe et indirecte, chose plutôt rare dans ce type de jeu qui sont souvent des solitaires à plusieurs. 

On retrouve les sensations d’Orléans dans une version condensée, plus rapide à mettre en œuvre. Attention c’est une version roll Draw & write, ce n’est pas totalement comparable, on ne retrouvera pas le plaisir de la gestion de son sac (mais un autre gameplay tout aussi intéressant), ni les événements qui pouvaient mettre des bâtons dans les roues aux joueurs (et un peu de chaos). Au final, il ne se contente pas de réutiliser les ingrédients de son grand frère, mais les adapte d’une autre manière. Une belle réussite que cette itération en jeu à cocher.

 

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1 Commentaire

  1. Tropala 03/04/2023
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    J’attendais un « jeu de foi » quelque part dans le texte… or, les enfants, c’est quand même bien dark que de trop bûcher là-dessus, et dans un article bien construit et qui donne envie, ç’eût peut-être été la dernière rouen du carosse, jeanne ai bien conscience.

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