Voilà un jeu de missions avec scénarios qui ferait éventuellement plaisir à Henri Kermarrec(1), puisque « Libération » s’inspire de faits réels, mais qui (sauf mauvaise interprétation de ma part) ne semble pas véhiculer de messages, à l’exception d’un seul émis par le nom du jeu qui se range, fort heureusement, du côté de la libération et non de l’occupation. J’imagine mon malaise si ce jeu avait été intitulé « Occupation ».

Cela me donnera toujours autant de mauvaises sensations d’avoir sous le yeux représentés les symboles identitaires Nazis (pictogrammes inspirés de l’alphabet proto-germanique comme un célèbre logotype apposé sur les carrosseries d’une marque automobile actuelle née sous le IIIe Reich).

Seul un contexte culturel (films, spectacles vivants) ou historique (musée, reconstitution) permet de reproduire des symboles ordinairement interdit par la législation.

Le jeu étant également une pratique culturelle, il est autorisé de faire usage des différents codes signalétiques historiques sans prosélytisme. Les illustrations du jeu « Libération » permettent, à l’évidence, la cohérence entre le thème et les supports graphiques du jeu et contribuent à l’immersion des joueurs, ce qui peut provoquer une influence émotionnelle durant la partie de jeu.

Ici il ne s’agit pas de jouer contre le jeu. Son mode asymétrique implique que des joueurs jouent dans le camp des libérateurs ou dans celui des occupants. Personnellement, même si cela reste un jeu, il ne me serait absolument pas possible de jouer le rôle de l’occupant. Aussi je préfère perdre en étant le résistant que gagner en jouant l’Allemand Nazi.

Si j’avais été acteur de cinéma, j’aurai accepté de vêtir un uniforme Nazi uniquement si dans le scénario du film il était écrit noir sur blanc que le personnage que j’interprète sera arrêté ou tué par la résistance victorieuse (tout est bien qui finit bien).

Seulement, l’issue d’une partie de jeu est incertaine (correspondant au 3e point du TRIANGLE du JEU = activité non productive et non rentable parce qu’incertaine). Si je joue à « Libération » la règle de jeu n’indique pas que les occupant perdent à tous les coups. Par conséquent, le fait de gagner éventuellement la partie en jouant le rôle des occupants germaniques me serait insupportable.

Heureusement, ce jeu historique place le joueur face à un choix avant de commencer la partie (Cela respecte ce qui définit le jeu dans le 2e point du TRIANGLE du JEU = jouer est une activité libre & autonome et non imposée).

Aussi, la porosité du réel dans le déroulement fictif du jeu a ses limites (1).

(1) se référer à mes publications sur « Qui sont les auteurs du Manifeste Métaludique.