K3 : L’Abstrait au sommet

Helvetiq, maison d’édition Suisse, est connue pour ses nombreux jeux aux formats petits cartes (Bandido, Omerta, Tucano…), mais sort également régulièrement des jeux en bois, comme Four Senses, Smak, ou Team Up.

K3 fait partie de ceux-là, et l’on y retrouve la recette classique, à savoir un matériel de qualité et des règles simples pour un jeu très familial. Alors, voyons si la recette fonctionne ici, et pour cela je vous invite à aller faire un tour du côté des règles du jeu avec le pratique Ludochrono.

 

L’auteur qui tombe à pic

Avant même d’ouvrir la boite, le nom de l’auteur, Philippe Proux, a sonné à mes oreilles. Auteur peu connu mais ô combien talentueux dans les jeux abstraits, il est notamment à l’origine du célèbre Tasso. On a l’habitude de voir ses jeux sortir en auto-édition, et cela a été une surprise pour moi de voir que cette fois-ci, il avait pris le chemin de l’édition « classique ». Peut-être a-t-il senti un potentiel plus fort sur le jeu et a-t-il voulu être accompagné d’un éditeur qui pourrait l’aider à le diffuser au mieux à travers le monde ?

Quoi qu’il en soit, l’édition de ce jeu est de très bonne facture. Les pièces en bois hexagonales sont bien peintes, parfaitement usinées et agréables à utiliser. Certaines couleurs auraient mérité un peu plus de nuances, comme entre le blanc et le bois, car si vous jouez dans une pièce faiblement éclairée, vous pourriez avoir du mal à les distinguer. On pourra regretter également ce choix de format de boite carrée, qui n’est ni pratique à ranger, ni à transporter. Heureusement, le petit sac fourni permet de l’emmener en balade !

 

Le petit sac de voyage contenu dans la boite, plus pratique à transporter

 

À l’ascension du K3

Comme son nom l’indique, le thème de ce jeu évoque la célèbre montagne éponyme, et nous met donc à la place d’alpinistes qui vont préparer leur ascension. Pour cela nous allons dans un premier temps préparer notre camp de base, puis partir à l’ascension du sommet.

Le thème est à la fois plutôt bien choisi et complètement accessoire. En effet, comme pour la plupart des jeux abstraits, le sujet est rapidement oublié, laissant place au calcul et à l’optimisation. Cependant, je trouve qu’il fonctionne plutôt bien dans ce jeu. En effet, on peut très bien imaginer que les pièces en bois représentent des ressources comme des vivres, des piolets, des mousquetons et autres, et qu’on va les dépenser durant notre ascension. Il faudra juste faire attention à prévoir d’utiliser les bonnes ressources au bon moment. De plus, au fur et à mesure de la partie, la montagne prend vraiment forme devant nous, et cela s’avère forcément très agréable à construire.

 

La base du K3 est faite, nous sommes prêts à l’attaquer

 

Une accessibilité à toute épreuve ?

L’une des forces de K3, c’est son accessibilité. Les règles sont vraiment très simples, et il est aisé de visualiser ce qu’il faut faire dans le jeu pour gagner. Les petites subtilités de règles concernant les pièces spéciales ou la règles de pose sur une couleur double sont complètement accessibles même pour des joueurs non habitués. Ainsi, j’ai pu jouer sans soucis avec ma mère de 65 ans – qui accessoirement a gagné toutes ses parties contre moi…

Le fait que l’on joue en deux temps est également propice à cela. On commence par construire un camp de base complètement inadéquat, puis on peut en parler ensemble en même temps que l’on continue à expliquer le jeu, et à ce moment-là, le joueur novice découvre petit à petit l’intérêt de la pose et de son ordre. Il comprend de lui-même qu’il ne pourra pas aller utiliser les pièces de bois qui sont en dessous de sa pyramide.

Seul petit bémol : les différences de mise en place suivant le nombre de joueurs. Savoir si l’on a une ou deux pièces en bois, si la pièce blanche va dans, ou à côté de sa pyramide … Ces petits détails techniques grincent un peu, et font qu’à chaque partie, on retourne dans le livret de règles pour vérifier l’info. Dommage qu’il n’y ait pas moyen d’avoir une mise en place standard suivant le nombre de joueurs, mais cela est directement lié à l’équilibre du jeu. A défaut, un rappel sur la 4e de couverture du livret aurait été un plus, plutôt que d’aller retrouver la bonne page à chaque fois.

Le camp de base est prêt ! Reste à voir si les couleurs s’enchaineront bien.

 

Entre chaos et contrôle

Une fois la partie lancée, il n’y a ni temps morts, ni interrogations. La partie se déroule avec une fluidité exemplaire et les joueurs se concentrent pour faire au mieux coup après coup. C’est plaisant, prenant, et rapide, puisque les parties durent normalement entre 5 et 10 minutes.

Plus on avance, plus la partie est tendue, car les choix s’amenuisent. Certaines de nos pièces deviennent impossible à poser, d’autres le sont sous contraintes, comme le fait d’avoir une punition et de se faire voler une pièce par un adversaire si jamais vous osez poser une pièce chevauchant deux pièces de la même couleur. La tension monte, jusqu’au moment fatidique où l’on ne peut plus jouer… et c’est l’élimination si vous êtes bloqué.

Les parties peuvent parfois être terriblement courtes et frustrantes, si d’aventure notre programmation se retourne contre nous. En effet, on a beau essayer de tout planifier, il peut arriver que les adversaires s’arrangent pour jouer contre nous. Ou alors un enchaînement de coups improbables nous coincent et nous sortent de la partie fissa.

Certains crieraient qu’un jeu abstrait soumis à un tel chaos est un scandale… mais c’est à mon goût la force de ce K3. En effet, le mélange de chaos et de contrôle est savamment dosé, car même si notre préparation semble parfaite, elle va dépendre grandement de celle des adversaires et de leurs coups. Sans compter le fait que la distribution des pièces en début de partie est complément aléatoire, et peut nous embarquer sur des déséquilibres de couleurs qui peuvent être bien compliqués à gérer.

Joué au bon moment, ce petit élément blanc peut faire toute la différence, et vous sauver

 

Jouable de 2 à 4, on pourra profiter à 2 joueurs d’avoir plus de contrôle et de stratégie, là où à 4 joueurs, le chaos s’avère très présent (tout pourra arriver entre deux de vos tours).

Personnellement, j’aime beaucoup l’idée de cogiter de longues minutes sur la préparation de mon camp de base, et de me rendre compte à la découverte de ceux de mes adversaires, qui cela va être très compliqué de m’en sortir au vu des couleurs qu’ils vont jouer au début.

 

Le K3 commence à être bien avancé à ce stade, et les possibilités se réduisent

 

Un peu chaotique donc, mais très agréable à jouer. On essaye tant que possible de bloquer nos adversaires, mais il faut être vigilent, car la moindre erreur est très punitive.

Il est à noter que le jeu contient une variante coopérative, mais que je ne l’ai pas essayée, n’étant pas attiré par ce type de mode de jeux. Il doit néanmoins être plutôt plaisant d’essayer d’optimiser ses coups à plusieurs pour reconstituer la montagne.

 

Fin d’ascension

Au final, ce K3 est une très belle découverte. Le matériel est beau et agréable à utiliser, malgré ses petits travers comme la couleur de pièces en bois trop proches. Ses règles sont très intuitives et intergénérationnelles et les parties sont agréables et rapides.

Ce jeu procure une expérience assez rarement proposé par le jeu abstrait : on oscille en permanence entre chaos et contrôle. Cela permet aux joueurs avertis de s’amuser à essayer de tout prévoir et contrôler, tandis que des joueurs moins aguerris ou impliqués prendront tout autant de plaisir à jouer à l’instinct.

 

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