Borderland, du loot sans frais de douane

Il y a de cela presque 15 ans, un ami m’a offert le jeu vidéo Borderlands. Croisement entre Diablo et Quake, ce FPS* nerveux à souhait proposait de dézinguer des hordes d’ennemis, ces derniers lâchant à leur mort de nombreux loots* (armes, bouclier, grenades en tous genres). L’action se déroule dans un univers à la Mad Max, avec un ton humoristique décalé et décomplexé. Mention spéciale à Clap Trap, un droïde qui pourrait être le fruit improbable d’une union entre R2D2 et Marvin (le robot de H2G2) et, est devenu à l’instar d’un Bobba Fett, cultissime au fil des épisodes de la saga. Nous y incarnons un chasseur de l’Arche en quête d’un artefact alien. Quatre personnages sont disponibles, chacun avec son arbre de talents et ses compétences propres.

Cependant le jeu souffrait d’une certaine répétitivité. Les armes manquaient un brin de personnalité (exception faite des armes légendaires aux effets… surprenants ^^) et les environnements tournaient tous autour du thème désertique. 2012, Gearbox Software (les développeurs du jeu) sortent Borderlands 2 et là, c’est la claque ultime. Fort d’un gameplay et d’un univers captivant déployé avec le premier opus, Gearbox Software se concentre sur le fond. Un nombre dithyrambique d’armes, des effets toujours plus fous, des environnements variés (jungle, ville futuriste…), plus d’ennemis, plus de Clap Trap, une histoire plus longue et surtout un méchant qui a rejoint Dark Vador et Jafar dans le panthéon des vilains les plus charismatiques de l’histoire Geek : le Beau Jack.

À noter que, fort de son succès, des adds-ons ont été développés, dont Tiny Tina’s Assault on Dragon Keep, une transposition de Borderlands dans un univers médiéval-fantastique décalé où Tina masterise une partie d’un jeu de rôle, « Bunker et Brutasses« , dont nous sommes les personnages joueurs. Un premier pas entre l’univers du jeu vidéo et celui du jeu sur table – une véritable réussite qui reste pour moi le meilleur DLC de l’histoire du jeu vidéo.

Depuis, la saga a continué son bonhomme de chemin, avec un Borderlands 3, un prequel, Tiny Tina’s Wonderlands, etc. Tous d’excellents jeux mais qui n’ont jamais réussi à reproduire la superbe de Borderlands 2.

C’est donc sans surprise que sort Borderlands, L’arène des Brutasses de Monsieur Torgue, un jeu de plateau d’escarmouches où nous allons défourailler des vagues d’ennemis pour encore plus de loots.

Le jeu a été développé par Monster Fight Club. Fondé en 2018 par John Kovaleski (l’un des créateurs de Borderlands, L’arène des Brutasses de Monsieur Torgue) mais ils ont édité également Cyberpunk Edgerunners Combat Zone. Un éditeur que je ne connaissais pas, qui a visiblement ses entrées dans le monde du jeu vidéo, et qui manque encore d’expérience dans celui de l’édition du jeu de société comme nous le verrons par la suite.

quatre contre la horde sauvage

Tu as Torgue et le Torgue tue

Monsieur Torgue est un PNJ* fort sympathique et bruyant de l’univers Borderlands. Il aime le Heavy Métal et les explosions. Dans le jeu vidéo, il anime également des arènes de combat qui proposent d’affronter des vagues d’ennemis pour gagner gloire et butin. C’est donc ce contexte qui est exploité ici, avec toutefois des objectifs un peu plus élaborés que simplement exploser tout le monde.

Niveau personnages jouables nous allons incarner quatre chasseurs de l’arche, quel que soit le nombre de joueurs. Cela a l’avantage de faciliter l’équilibrage du jeu. De par le dynamisme du gameplay, le tout fonctionne bien en solo, à deux ou à quatre. Par contre à trois, cela signifie qu’un joueur incarnera deux chasseurs de l’Arche et les autres un seul.

Pour les fans de la série, les personnages jouables sont Moze, Mordecaï, Amara et Salvador. Monster Fight Club a puisé dans les différents opus de la saga pour offrir un roster* varié : Mordecaï snipe*, Salvador multiplie les attaques, Amara est plus à l’aise aux corps à corps et Moze invoque sont Mécha de combat histoire de calmer les ardeurs des brigands en folie.

 

Prêt au combat !!!

Chaque personnage dispose d’un pouvoir et de trois arbres de talents pour débloquer de nouvelles compétences. Trois !? Comme dans le second opus des jeux vidéo. D’ailleurs, au début de chaque partie, nous pouvons changer d’arbres de talents et y réattribuer les points de talents gagnés durant la campagne, comme dans le jeu vidéo. C’est chouette, pas de stress dans le choix de nos compétences, puisqu’il n’est pas définitif.

 

C’est la campagne, faut se mettre au vert

Borderlands, L’arène des Brutasses de Monsieur Torgue se joue en campagne. Cependant, il ne s’agit pas d’un jeu narratif. Chaque scénario propose une arène de combat où défourailler une horde d’ennemis tout en réalisant un objectif donné. Puis, en fonction de la réussite, de l’échec, ou de choix personnels, l’arborescence de la campagne nous envoie vers un autre scénario.

Un des points qui j’ai le plus apprécié dans le jeu est son système d’actions.
Chaque personnage dispose de jetons d’action (trois au démarrage). Le jeton vert permet de se déplacer de trois cases ou de jeter un dé 12 pour les actions, le jaune de se déplacer de deux cases ou de jeter un dé 8 pour les actions et le dé rouge d’une seule case et de jeter un dé 6 pour les actions.

L’action que nous ferons le plus souvent est attaquer. Dans ce cas, nous choisissons notre jeton action, lançons le dé associé, ajoutons éventuellement le bonus de caractéristique du personnage et comparons le tout à une valeur de défense de l’ennemi. Une attaque touche = un dégât. Chaque arme dispose en plus de bonus (relance, dégâts bonus, etc). C’est simple, c’est dynamique, ça colle bien à ce que l’on veut pour un jeu nerveux comme Borderlands.

des dés des dés des dés ^^

C’est encore mieux en défense : quand un ennemi nous attaque, nous devons battre sur notre jet de défense son score d’attaque. Dans ce cas, nous choisissons l’un de nos jetons actions (même s’il a déjà été utilisé) pour jeter le dé associé. Vous me direz, bandes de petits malins, que, dans ce cas, autant jeter le dé vert. Sauf qu’en cas d’échec, le jeton usité est remplacé par un jeton rouge (rouge = 1 dé 6). Et que, si nous utilisons un dé rouge en défense et que le jet est raté, c’est la mort (enfin presque) !! Bon, la mort façon Borderlands, moyennant 500$ nous respawnons au début du prochain tour à la station éclair la plus proche, s’il n’y a pas de quoi payer, la partie est perdue (comme ça au moins, il n’y a pas de joueur sur la touche).

Nous pouvons également garder des jetons action pour réagir aux actions adverses, et même tenter un combat pour la survie. Comme dans le jeu vidéo, en cas de mort, nous avons un dernier recours : dans un râle d’agonie, nous pouvons utiliser un jeton action conservé pour l’occasion et, si cette ultime attaque élimine un ennemi, nous voilà tout frais tout neuf et revigoré. J’ai adoré cette mécanique de choix de jetons qui amène une dose de stratégie bienvenue, et le système de mort qui colle bien au jeu vidéo.

2 au jet + 2 en tir contre 8 en défense, c’est un tir raté

Tu as le loot coco

Le but, je le disais, est de réussir l’objectif du scénario tout en survivant aux hordes d’ennemis qui s’enchaînent. C’est assez jubilatoire de dézinguer des mobs par parquet, on sent que nous sommes des brutasses, des vraies. D’ailleurs, pour amener un flot continu d’ennemis, le système de jeu développé par John Kovaleski est plutôt ingénieux. Nous avons un paquet de cartes « Annonces ». D’abord constitué de cartes niveau 1, elles seront progressivement remplacées par des cartes niveau 2, puis 3 dès que les héros montent de niveau.

La ligne des annonces détermine les actions des ennemis

Chaque scénario nous indique un nombre de cartes « Annonces » à placer face visible. Puis, en bout de fil, nous ajoutons la carte Annonce rouge, celle du carnage, celle qui amène une cohorte d’ennemis, un sol enflammé et donc une mort imminente.
Une fois que les héros ont fini de s’amuser à tout détruire, c’est au tour des méchants. Nous regardons simplement la carte « Annonce » du début de la rangée, nous la résolvons, puis elle est retournée. Arrivée en bout de rangée, la carte « Annonce » rouge de la mort qui tue reste toujours visible et sera activée désormais à chaque tour. Chaque carte peut faire venir des moobs supplémentaires, les faire bouger, attaquer, les rendre furieux… Un système qui permet d’anticiper ce que font les ennemis et qui est facile et rapide à gérer, ce qui est bien vu le nombre d’adversaires.

Certaines cartes annonces déclenchent une carte évènement

Quand les ennemis bougent ou attaquent, ils ciblent le héros qui a le projecteur braqué sur lui. En début de partie chaque personnage reçoit une carte projecteur qui définit comment il va attirer l’attention (éliminer trois ennemis en un tour, bouger de trois cases, etc). Il faut donc bien planifier qui agira quand pour faire quoi afin de bien gérer l’aggro.

4 paquets conséquents de matériels


Borderlands
est un looter Shooter. En ce qui a trait aux récompenses, Monster Fight Club a mis en place un système relativement simple : lors de la défaite d’un ennemi, nous tirons un jeton d’un sac. Certains gains permettront de recharger vos armes et grenades, d’autres de soigner vos blessures et il y a un paquet pour les armes, un paquet pour les grenades et mods de classe, un paquet pour les boucliers et un paquet pour les « légendaires ».

Ce système de loots est facile à prendre en main, ne nuit pas au rythme de la partie, mais bien vite il s’essouffle quand nos personnages se retrouvent avec un équipement de qualité. Dommage que les cartes n’aient pas été classées par niveau pour garder de l’intensité. J’aime vibrer au moment de révéler une carte équipement, tel un enfant découvrant son jouet Kinder ou un joueur de Magic au déballage d’un booster.

En fin de partie, deux cartes par paquet sont révélées, plus une du paquet Torgue (les Légendaires). À ce moment-là, les pions et équipements reçus lors du scénario et non utilisés vont pouvoir servir de monnaie pour nos achats. Attention, ici, il n’y a pas de banque. Ce qui n’est pas dépensé est perdu !

Les jetons que l’on pioche après avoir vaincu un ennemi

À la foire fouille tu trouves de tout si tu es malin

Nos héros peuvent s’équiper de deux armes, d’un bouclier qui offrira des dés bonus en défense, voire d’effet annexe, d’un mod de classe fournissant des capacités spéciales, et des grenades. J’y ai retrouvé des sensations proches du jeu vidéo. Pour ne pas avoir à gérer le nombre de balles dans le chargeur, certains évènements vont demander à un personnage de recharger ses armes. Pour ce faire, il doit utiliser un pion « rechargement ». En début de partie, cela peut être problématique, il faudra alors aller taper au corps à corps, ce qui peut être délicat pour certains personnages pas très à l’aise dans cet exercice.

Le changement de niveau se fera à la fin de certains scénarios, mais également en piochant le jeton « talent » du sac de loots. Dans ce cas, il suffit de placer un jeton sur notre arbre de compétences.

Oui, de farouches adversaires

Nul n’est parfait

Borderlands, L’arène des Brutasses de Monsieur Torgue n’est pas exempt de défauts, notamment au niveau de son édition. Rien d’impardonnable, mais des détails auxquels je ne suis plus habitué au vu de l’excellence qu’atteignent les productions d’aujourd’hui.

Par exemple, si la boîte est bien compartimentée pour les figurines et les paquets de cartes, il n’y a aucun emplacement prévu pour ranger les cartes de ses chasseurs de l’arche entre chaque partie. À nous de prendre un sachet zip, d’y ranger les cartes équipement et jetons talents gagnés durant la campagne et de trouver une place où les ranger dans la boîte. Les règles ne sont si compliquées, et pourtant, lors des deux premières parties j’en ai fait des allers-retours dans le manuel, car sa rédaction n’est vraiment pas ergonomique.
De plus, un élément nous a embrouillé en début de campagne : comme expliquer, la couleur de jetons détermine le type de dés jetés. La portée des armes exploite le même code couleur (rouge = 1 case de portée, jaune 2, et vert 3). Donc, vous pouvez utiliser un dé 12 (jeton vert) pour effectuer un tir avec une arme de portée 1 (couleur rouge). Il aurait été surement plus opportun d’utiliser un autre code couleur pour la portée des armes ! J’ai mis trois parties à chercher quels jetons étaient quoi avant de me rendre compte que le descriptif du matériel avait été mis… à la fin du livret de scénarios. Enfin, les effets des capacités des ennemis sont imprimés au dos de leur carte. Il faut donc faire des allers-retours recto/verso pour regarder les caractéristiques du moob et ses compétences… 

Bref, pas mal de petites erreurs d’édition qui ne fluidifient pas les choses. Ho, et si vous n’aimez pas lire de longs textes sur les cartes, passez votre chemin ! 

Les effets et compétences des cartes ennemis sont imprimés au verso

Le poids des licences

Travailler sur un jeu à licence est à double tranchant. D’un côté vous avez un background qui a fait ses preuves, avec son lot de fans. Mais d’un autre côté, il faut être à la hauteur des attentes qui peuvent être très élevées. Borderlands est un monument du monde vidéoludique. Je l’ai moult fois conseillé à des amis. À chaque fois ils mettent quelques mois avant de se lancer dans l’aventure, mais, une fois que c’est fait, ils comprennent pourquoi il ne faut pas se fier qu’aux apparences. Derrière ses graphismes en dessins animés et son gameplay plutôt basique (moi tue moi loot ^^), Gearbox a imaginé des personnages et un univers hyper charismatique, avec un humour décapant digne des meilleurs films humoristiques. Le jeu vidéo est un projet colossal, avec une campagne conséquente, du contenu late game* et un système de génération d’armes pharaoniques (plus d’1 milliard d’armes différentes dans Borderlands 3). Et c’est là que le bât blesse.

Borderlands, L’arène des Brutasses de Monsieur Torgue est un jeu d’escarmouche sympathique, avec d’excellentes idées dans son gameplay, mais il se contente de reproduire les phases de combat sans le souffle épique et l’humour ravageur de Borderlands. J’aurai voulu une carte du monde avec plein de missions, de vrais dialogues, des rebondissements, des PNJs déjantés, bref, un projet grandiose digne de ce monument. Si j’y joue avec plaisir, mon cœur de fan reste sur sa faim et je referme la boîte avec un brin de mélancolie. Au final, je me suis réinstallé Borderlands 3 qui a bénéficié d’une grosse mise à jour suite à la sortie du film !

Les figurines sont de bonnes factures, mais le matériau ne leur rend pas hommage

Le glossaire du Geek

Add-ons : extensions

Aggro : attirer l’agressivité (et donc les attaques) des ennemis

FPS : First Person Shooter : jeu vidéo dans lequel nous voyons l’action à travers les yeux du personnage pour plus d’immersion

Late game : contenu de jeu destiné aux joueurs ayant fini la campagne principale

Loot : trésor

Looter shooter : jeu qui consiste à tirer sur des ennemis pour qu’ils lâchent du loot.

Mobs : monstres ou ennemis

PNJ : Personnage Non Joueur, généralement présent pour converser et nous fournir des quêtes

Roster : effectif dans lequel nous pouvons choisir un héros

Sniper : fusil permettant de tirer à très grande distance

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1 Commentaire

  1. thomas derouet il y a 25 jours
    Répondre

    Quoi?!!! C’est une blague !!! Quand je l’ai kickstarté j’avais aucune option pour de la langue française

    Magnifique…

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