Lords of Xidit: L’Himalaya de Season ?

Alors qu’aux salons de Cannes et de Toulouse, je n’avais pas réussi à trouver une table libre, ou plutôt pas eu la patience d’attendre, voici qu’on me propose d’essayer Lords of Xidit en version finale. Grand fan d’Himalaya, dubitatif sur le thème (effet marketing ?) et l’intérêt de modifier le jeu, je ne peux qu’accepter le défi afin de vérifier si mon a priori sur cette édition est fondé ou pas. Et puis, ça doit bien faire 5 ans que je n’ai pas ouvert ma vieille boite Tilsit, alors voyons si je suis rouillé, d’autant qu’à table au moins deux joueurs connaissent bien Himalaya et que nous n’y avons jamais joué ensemble.

Le matériel

Pas d’open the box puisque nous sommes là pour jouer. Néanmoins un mot sur le matériel : Splendide !

Bon, la comparaison avec Himalaya tourne largement à l’avantage de Lords of Xidit pour l’instant. Alors certes, Libellud nous a habitué à du beau matériel, mais là je trouve qu’ils se sont surpassés.

 Le plateau de jeu est superbe. Il est grand, très grand (au moins le double de l’original ci-contre), coloré (bon d’un autre côté, le blanc immaculé de la neige Himalayenne ne pouvait pas lutter avec les territoires chatoyants de Xidit) tout en restant très clair et fonctionnel.

Le plateau de jeu

Le côté du plateau permet d’accueillir et de ranger tout le matériel nécessaire au jeu : on distingue en haut les tuiles cités (grises), les tuiles colosses (ici le verso, ils ne sont pas encore apparus), les tuiles menaces et quelques unités à recruter .

Les unités, parlons-en ! Alors qu’avec Himalya nous avions de splendides Kubenbois, ici nous avons de banales figurines :

Bon ok, ces figurines elles en jettent ! Le plastique est à la fois rigide et souple, ce qui devrait leur assurer une longue vie. Rien à dire encore une fois. Et pour finir, à la place de jetons ordre qu’il fallait orienter dans le bon sens en les alignant les uns à côté des autres, on a un tableau avec des roues permettant de bien choisir choisir la couleur de son chemin. La seule consolation par rapport à ce splendide matériel, c’est qu’il n’exclut pas les erreurs de programmation qui font couiner leurs auteurs. Et un adversaire qui couine, c’est bon ! devil

C’est bien beau tout ça, mais le ramage vaut-il le plumage ?

Rien à dire, Marchand d’Empire, Himalaya ou Lords of Xidit sont tous d’excellents jeux. La base était déjà très bonne (Tric-Trac de Bronze en 2002, alors que ce n’était qu’un prototype), Himalaya restait un très bon jeu, un top de l’époque ; avec quelques défauts toutefois, notamment le tirage au dé de l’apparition des contrats ou la version 3 joueurs nettement inférieure. Lords of Xidit est tout bonnement excellent. Bien sûr, je dis cela avec une seule partie au compteur mais avec l’expérience d’une bonne vingtaine de parties d’Himalaya. 

Le jeu garde la même structure. Pour ceux qui ne connaîtraient pas, on commence par programmer simultanément les mouvements de son Idrakys.

Six actions à prévoir, et pour chacune d’elle, on peut :

  • Se déplacer sur l’un des trois chemins en indiquant la couleur de celui-ci,
  • Ne rien faire (utile parfois pour attendre qu’un autre joueur prenne l’unité de moindre valeur avant à son tour de prendre la suivante qui est plus puissante),
  • Agir :

– Sur une cité, cela consiste à recruter une unité, toujours celle la plus courante et donc la plus faible ;

– Sur une cité menacée, l’action est d’affronter la menace si possible et de récolter les récompenses promises ; pour vaincre une menace, il faut disposer des unités requises (celles-ci sont perdues ensuite),

– En terrain libre, tenter d’affronter un colosse s’ils sont apparus.

 

La partie

​​La partie a démarré assez vite avec une position assez favorable sur un côté du plateau.

Deux joueurs s’en sont emparés et très rapidement les unités ont été recrutées et la première menace vaincue. Cela a permis au joueur vert de construire une première école de magie et de s’enrichir un peu.

Ce départ favorable est compensé par le fait que désormais la majorité des unités à recruter est à l’autre bout du pays.

Et les autres joueurs s’en donnent à cœur joie, recrutant de nombreuses troupes.

Ils se constituent une armée qui leur permettra d’affronter plusieurs menaces successivement.

Les équilibres s’établissent et les écoles de magie fleurissent alors que les bardes chantent les louanges principalement des rouges et jaunes.

Et c’est là qu’est tout le sel du décompte par élimination.

En effet, on effectuera trois décomptes : un sur les écoles de magies (le plus d’étages construits sur le plateau), un sur la renommée (les deux plus majoritaires par région en nombre de pions bardes marquent des points, et on fait la somme totale sur toutes les régions), et un sur l’argent.

L’argent est le seul qui soit totalement caché. La renommée n’est cachée que dans la région centrale qui rapporte le plus de points. Les étages d’écoles de magie se dressent fièrement et clairement. Mais, on ne fera pas le total de ces trois décomptes, on va les examiner un à un, dans un ordre tiré au hasard en début de partie, et éliminer à chaque fois le joueur le moins bien placé. Il faut donc avant tout ne pas être dernier dans un décompte. Et l’on peut gagner sur le décompte final sans être le joueur majoritaire, si tant est que celui-ci s’est fait éliminé à un décompte précédent.

Trompettes de la renommée…

Sur la partie en cours, les Idrakys bleu et verts sont clairement en retard sur la renommée. Et de mémoire, le vert est bien placé sur l’argent alors que le bleu est également en difficulté. On remarque sur la photo que l’idrakys vert est en avance sur la magie, et c’est la magie qui permettra d’emporter la partie. En revanche, si l’Idrakys vert se fait éliminer sur la renommé, c’est un autre qui gagnera, même si il reste le meilleur en magie. Celui-ci va donc s’efforcer désormais de réclamer les récompenses de renommée, tandis que le bleu va tenter de gagner de l’argent pour ne pas se faire éliminer dès le premier décompte.

La partie a progressé et on peut voir que l’Idrakys vert a largement accru sa renommée. Quant au bleu, si on regardait derrière son paravant, on remarquerait que sa richesse a augmenté de façon impressionnante.

Entre temps, les colosses sont apparus et deux d’entre eux ont déjà été vaincus. Ceux-ci nécessitent simplement un nombre de troupes quelconques et peuvent être attaqués de n’importe quel endroit libre. Le gain est souvent moins intéressant que celui apporté par une cité libérée.

En revanche, ils peuvent être vaincus assez facilement puisqu’on n’a pas à se rendre dans une cité, et ne nécessite pas de combinaison de troupes particulière.

La partie touche à sa fin et les tours de magie se dressent fièrement à travers tout le royaume tandis que nombre bardes chantent les louanges des différents Idrakys. Reste la richesse, source secrète de pouvoir et interrogation permanente au moment de choisir ses récompenses. 

Le décompte final

Finalement pas de suspense, car les joueurs vert et jaunes ont dominé dans presque tous les domaines alors que le joueur rouge est minoritaire partout. À noter que le joueur jaune a frolé l’élimination dès le premier décompte, ce qui ne lui aurait pas permis de lutter pour la victoire. Le vert qui était en difficulté en milieu de partie sur les bardes a fini par être l’Idrakys le plus renommé. De même le joueur bleu en difficulté sur l’argent est le plus riche en fin de partie.

Pour illustrer le décompte par élimination, regardons ce qui se serait passé si on avait décompté dans l’autre sens. Le joueur bleu aurait été en position de gagner puisque le plus riche. Mais malheureusement pour lui, il aurait été éliminé sur le décompte de renommé et c’est donc le joueur vert qui aurait gagné.

Lords of Xidit a-t-il vaincu l’Himalaya ?

On y retrouve le pick-up & delivery d’Himalaya, la programmation, l’ordre des marchandises, pardon des troupes, imposées, et surtout le fameux décompte par élimination. Tout ce qui avait fait le succès d’Himalaya. À cela il faut rajouter l’odre du décompte qui change à chaque partie, l’arrivée des cités ou des menaces que l’on peut anticiper grâce à une file d’attente, les décomptes intermédiaires qui deviennent un élément clé de la tactique (dois-je attendre pour libérer une citée afin de profiter du décompte, ou dois-je patienter et tant pis si je perds l’occasion ?) et un matériel qui contribue énormément au plaisir. Je suis moins convaincu par les colosses, mais encore une fois, ceci n’est qu’une impression après une partie. 

Alors vais-je craquer ? Oui, sûrement. Car Himalaya faisait partie de mes jeux préférés et Lords of Xidit rajoute des éléments qui enrichissent encore le jeu. Une autre nouveauté qui m’attire dans cette version est la configuration à trois joueurs qui a été revue et d’après ce que j’ai pu lire semble enfin d’intérêt.

Et pour un joueur ne connaissant pas Himalaya ? Il ne faut pas hésiter. Lords of Xidit est un jeu riche aux règles simples (seule la règle d’apparition des colosses nous a paru un peu tarabiscotée et mérite, pour un joueur peu habitué à lire des règles, de se la faire expliquer). Le jeu est fluide car la seule phase demandant de la réflexion se joue en simultané. Les inévitables erreurs de programmation ajouteront du piment et l’occasion d’en rire ou de râler. 

Un regret ? Oui le thème. J’aimais bien le thème de l’Himalaya, c’est un thème peu exploité. Et la livraison de troupes fait un peu artificielle par rapport à la livraison de marchandises. Sans compter qu’incarner un Idrakys ne parle pas, pas plus que j’ai vraiment ressenti l’affrontement contre les forces du mal. Ce fléau noir parait bien lointain. Nous en sommes pour la plupart restés à parler de livraison de troupes et pas d’affrontement, j’ai même continuer à poser des Stupas ! laugh Néanmoins, il faut reconnaître l’effort pour intégrer ce jeu dans l’univers de Seasons et sans doute que quelqu’un de moins marqué par Himalaya sera très vite immergé dans l’ambiance de Xidit : un peu finalement comme à Smallworld vs Vinci ; les anciens ont eu du mal à accrocher au nouveau thème tandis que les nouveaux joueurs ont accroché et ont fait le succès de la nouvelle version. Il n’y a plus qu’à souhaiter à Lords of Xidit la même chose, tant ce jeu le mérite, ne serait-ce que par ses qualités ludiques.

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12 Commentaires

  1. eolean 16/09/2014
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    Merci pour ce just played Cormyr ! N’ayant jamais joué à Himalaya, je me posais quelques questions sur ce lord of Xidit. Va falloir que je l’essaye je pense. C’est original de vouloir inclure le jeu dans l’univers de seasons. J’ai un peu l’impression qu’on va aller dans ce sens dans les prochaines années. J’en veux pour preuve la volonté pour Bombyx d’inclure le background d’abyss dans la durée.

     

    J’ai pas bien compris le principe de décompte par élimination par contre. Est-ce que ça veut dire que si je suis par exemple dernier sur les tours de magie à un moment, je ne pourrai plus décompter dessus par la suite ? Ce n’est pas handicapant ? (effet win2win)

  2. Grovast 16/09/2014
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    Le décompte par élimination est une pure merveille de subtilité. Il intervient uniquement à la toute fin du jeu et détermine le vainqueur. Trois domaines sont successivement évalués dans un ordre précis. A chaque étape du décompte, le joueur le moins avancé dans le domaine concerné est « éliminé », c’est à dire qu’il ne gagnera pas. Le troisième domaine évalué est une sorte de « finale » entre les deux concurrents restants.

    Par contre, j’ai l’impression que l’ordre d’évaluation est variable dans LoX, alors qu’il est fixe dans Himalaya, si mes souvenirs sont bons.

    Merci Cormyr pour ce just played qui confirme l’image que je m’étais faite du jeu. Bien convaincu par les petits ajustements mécaniques, malheureusement ce thème là n’a que peu de chances de déclencher l’enthousiasme dans mon entourage.

  3. Umberling 16/09/2014
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    Dans Himalaya, on éliminait d’abord sur l’or, puis sur la renommée, puis sur les Stupas (si ma mémoire est bonne). Dans LoX, on tire l’ordre du décompte (tours, argent, bardes) au hasard avec trois tuiles.

    En gros, on élimine des joueurs jusqu’à ce que deux restent pour le décompte final.

    Si tu as 20 or, 30 renommée et 0 tour de magie, et que l’ordre est Magie -> or -> renommée, tu es éliminé à la première passe. Tu retires tous tes pions du jeu, tu peux commencer à remballer. C’est donc un équilibre qu’il faut atteindre, et une prise de risques à tenter.

     

    Au cours de la partie, on recense juste les unités, et si tu as une majorité d’unités d’un certain type, tu gagnes des boni en fonction, ce qui crée un effet de tempo vis à vis des monstres à dézinguer.

    Tout à fait d’accord avec l’analyse de Cormyr et Grovast sur le thème : je préférais les yaks, mais il ne faut pas perdre de vue qu’Himalaya est introuvable, et que LoX est peut-être plus vendeur, sur le papier. Mais les ajustements font de LoX un bien meilleur jeu, si l’on met de côté la dimension narrative. 🙂

  4. Cormyr 16/09/2014
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    Grovast a répondu sur le decompte par élimination et je le rejoins sur « merveille de subtilité ». 

    Pour compléter la réponse, si tu regardes la photo du décompte final et tu prends l’ordre de décompte de droite à gauche, le joueur vert gagnerait malgré le fait que sur le dernier décompte (celui de gauche), c’est le bleu en tête. Pourquoi ? Parce que le bleu aurait été éliminé sur le deuxième décompte (au centre) terminant 3ème sur ce décompte. 

    La procédure est la suivante :

    – le 4ème du premier décompte est éliminé et ne pourra plus gagner

    – le 3ème du second décompte est éliminé et ne pourra plus gagner 

    – le second du dernier décompte est éliminé et c’est donc le premier de ce dernier décompte qui gagne même si il n’était que 3ème du premier décompte ou 2nd du second décompte. 

     

    Et effectivement les ajustements réalisés, en particulier les décomptes intermédiaires, l’ordre d’arrivée en partie prévisible des ressources et demandes améliorent le jeu d’origine qui était déjà excellent. 

    Qaunt au thème, je n’accroche pas à celui-ci mais je suis sûr qu’il est nettement plus porteur auprès d’un large public. 

  5. Le Dimensionaute 16/09/2014
    Répondre

    Très sympa et instructif ce « Just Played »  !

    Ça m’aide bien de lire cet avis, vu que le samedi 11 octobre je suis censé présenter et animer ce jeu en version géante dans une boutique sur Rouen. Et jusqu’à présent je n’ai pas de matos en main… Je n’ai fait que lire les règles en version pdf et j’ai maté une vidéo sur le site « Le repaire des Jeux ». Bon, de par le passé j’ai joué une ou deux fois à Himalaya, mais ça commence à dater. En fait je suis déjà bien informé, mais j’aime confirmer mes premières impressions afin de ma préparer convenablement pour expliquer un nouveau titre. Et grâce à cette petite lecture, je me sens à bloc  !

    P.S: si vous habitez près de Rouen, l’événement aura lieu à « Camisole » durant l’après-midi. J’y serai pour le compte de l’association ludique « Les Fous du Jeu » (site ou facebook) dont Camisole est partenaire.

  6. eolean 17/09/2014
    Répondre

    Merci pour vos réponses ! Effectivement, je n’ai jamais joué ce système, va falloir que j’essaye ça 🙂

  7. Shanouillette 17/09/2014
    Répondre

    +1 ! ça me donne trop envie moua !

  8. Umberling 17/09/2014
    Répondre

    Le jeu à trois introduit un mécanisme de joueur neutre. On fixe les stats du neutre en fonction de la difficulté qu’on veut imprimer à la partie, et il ne joue que lors des décomptes. Simple !

  9. TheGoodTheBadAndTheMeeple 18/09/2014
    Répondre

    De bons souvenirs d’ himalaya de mon cote pour ce systeme original dont le principal ennui etait :

    – Une personne loin derriere sur le premier decompte pouvait passer plus de la moitie de la partie a subir.

    – Un ennui parallele etait le fort king making associe.

    Cela a-t-il ete gomme ? Voici ma principale interrogation…

    Ce systeme est elitiste et ne plaira pas aux joueurs dilettantes la plupart du temps.

  10. Cormyr 19/09/2014
    Répondre

     

    Sur une seule partie jouée, je dirais que oui, cet inconvénient a été gommé. En effet, le fait de savoir à l’avance où vont arriver les menaces ou les nouvelles troupes disponibles permet d’anticiper et de se repositionner afin d’être avant les autres prêt à livrer. De plus comme les récompenses sont variables, on peut, pour se rattraper sur une décompte, se concentrer sur celles qui rapportent le plus dans la catégorie voulue. 

    D’ailleurs on l’a vue sur notre partie. Le joueur qui était fortement en retard sur le premier décompte est revenu en seconde position sur ce décompte.

     

  11. Wraith75 21/09/2014
    Répondre

    Merci, ça confirme tout le bien que j’en pensais.
    Celui-là, il me le faut smiley

     

    Pour ceux qui connaissent Himalaya, allez voir ici.

  12. TSR 21/09/2014
    Répondre

    Allez, convaincu ! Commandé ! Merci Cormyr !

     

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