À QUOI TU JOUES ? AVRIL 24 : Clash of magic schools – Le projet – Explorers of the Woodlands – Metropolys -Traître Mot – La forêt de Savernake – Descendance – Chats de poche – FLASHBACK : Lucy
Quoi de neuf en ce mois d’avril bien pluvieux ? N’était-ce pas l’occasion de ressortir des boîtes de la ludothèque ou de dessous la pile ? Vous allez voir qu’il n’y a pas que de la nouveauté dans cette fournée de printemps.
Descendance
Parfois on se demande pourquoi aller toujours vers la nouveauté alors que le bonheur peut être trouvé dans son grenier. Descendance n’est pas né de la dernière pluie (2011 en VO, 2012 en VF) mais il incarne pour moi le parfait exemple de l’eurogame ou « jeu à l’allemande ». Un thème économique pas forcément sexy où vous gérez l’activité d’une famille dans un village sur plusieurs générations, un style graphique vieillot avec des couleurs jaunasses et marronnasses dominantes, de la pose d’ouvriers en guise de mécanique principale et une course à points de victoire pour gagner la partie. Sur le papier, rien de fou. Par contre, l’alchimie du bon jeu bien dosé fait tout son charme et sa réputation.
À l’image de ce que l’on pourrait trouver aujourd’hui sur un Dune : Imperium (même si on est loin thématiquement), chaque pose d’ouvrier et ses conséquences seront mûrement réfléchies. Des cubes d’Influence sont à gagner en posant son meeple et sont réparties aléatoirement sur chaque case d’action, mariant un draft ouvert à la pose d’ouvrier et ajoutant une dimension stratégique. Agissant comme des ressources, ils vous donneront accès à des voyages lointains ou vous feront économiser du temps. La vie est variée : travail à la ferme, voyages, artisanat, mariages, vie monastique… Tout s’imbrique logiquement, chaque mécanique se traduit thématiquement et chaque choix est important. Le twist principal est que sans cube d’Influence, certaines actions vont coûter du temps à votre famille. Et plus le temps passe, plus certains de vos meeples vont devoir finir au cimetière, où même ici une compétition aura lieu pour la prospérité. Lequel vais-je choisir ? Peut-être mon moine ; il était bien utile mais les places pour la postérité monastique sont rares, pas de temps à perdre !
Dans cette chronique, Grovast lui déclarait sa flamme et abordait ses extensions désormais incluses dans la nouvelle version « Big Box ». Un classique du jeu européen et must pour les amateurs du genre.
–Groule
Un jeu de Inka Brand, Markus Brand
Illustré par Dennis Lohausen
Edité par Gigamic
Metropolys
Metropolys est un jeu de de 2008, mais il reste actuel puisque en ce moment est livré Skyrise sa version kickstarter chez Roxley un peu surgonflé au kilo plastique il faut le dire.
Metropolys c’est un jeu de placement super malin, avec de la majorité et un peu d’enchères.
Nous allons construire sur le plateau nos buildings, ceux-ci sont numérotés de 1 à 13 et à mon tour je peux placer un Building dans la zone adjacente au dernier building posé, mais avec une valeur plus forte que le dernier building. Jusqu’à ce que tout le monde passe, et le gagnant peut installer son building, tandis que les autres vont récupérer les leurs, et il relance avec un building de la valeur de son choix dans une autre zone. Le jeu se termine quand un joueur a placé tous ses buildings. Le plateau est délimité en districts avec des murs et des ponts qui nous permettent de se déplacer dans le district adjacent. Le placement de départ est important, on ne peut pas toujours faire ce que l’on veut à son tour mais on peut utiliser aussi le terrain à son avantage.
Là ou c’est malin, c’est que certaines zones vont nous donner des jetons points de victoire, d’autres des jetons Metropolys qui donneront des points plus des points au majoritaire en fin de partie, d’autres même des points négatifs. Enfin, en début de partie on a tous deux cartes objectif qui vont là aussi nous donner des points selon une condition connue de nous seul, ce qui va créer une légère asymétrie. Sauf que, l’on peut deviner en cours de jeu les objectifs des autres et leur glisser quelques cailloux dans la chaussure. Le majoritaire dans un district (c’est-à-dire en comptant tous ces immeubles) va gagner 10 points.
Je découvrais le jeu qui dormait silencieusement dans ma ludothèque. Metropolys c’est simple à jouer, on comprend très vite, la règle s’explique en 5 minutes et on perçoit très rapidement aussi toutes les finesses du jeu. Comme placer un immeuble dans une région où deux adversaires se disputent la majorité, les laissant s’épuiser en jouant des immeubles de fortes valeurs. Ou bien la partie avançant jouer des immeubles de petites valeurs mais où il n’y a pas d’adjacence à cause des immeubles déjà posés ou des murs, gagnant un emplacement avec un tout petit immeuble..
Metropolys a un côté un peu vieillot visuellement, pas non plus hyper lisible au premier abord. Mais la mécanique ne l’est pas elle (vieillotte). Gros coup de cœur pour ce jeu très fin que je vais tenter de ressortir malgré son aspect peu aguicheur 🙂 Skyrise c’est exactement la même chose, avec des figurines et plusieurs évolutions mécaniques, mais je crois que je préfère cette version épurée.
-Atom
Un jeu de Sébastien Pauchon
Illustré par Mathieu Leyssenne
Edité par Ystari Games
Chats de poche
Chats de poche inaugure avec Solstis un nouvelle gamme de jeux pour 2 joueurs chez Lumberjacks Studio. 25 tuiles (chats, chiens et proies) sont placées face cachée en un carré de 5 x 5. À son tour, on retourne une tuile et on la déplace (mouvement différent selon le type d’animal), le but étant d’entourer les proies avec les chats de son clan et d’être majoritaire en force autour de celles-ci. Mais attention aux chiens qui annulent les tuiles chat. La joueuse avec le plus de proies l’emporte. Il existe 6 clans avec des pouvoirs différents pour renouveler les parties (mais le jeu sans pouvoir est déjà intéressant).
Les tuiles chiens amènent un côté chafouin très agréable. Le jeu est très dynamique car les positions des tuiles ne sont pas immédiatement arrêtées : diverses inversions peuvent encore avoir lieu avant la fin de partie. La mécanique fait penser à du jeu abstrait (majorité et placement), mais les tuiles initialement faces cachées apportent un peu de chaos. La saveur de ce jeu réside justement dans cette association : ne pas connaître la nature de la tuile que l’on va révéler et déplacer casse la froideur des jeux abstraits. Il faut envisager les différents cas de figure possibles (si c’est un chat de mon clan, du clan adverse, un chien ou une proie) pour décider quelle tuile il est le plus judicieux de retourner. Au fur et à mesure que la partie avance, les positions sur le terrain se figent et l’incertitude sur la nature des tuiles restantes se réduit. Chats de poche réussit son pari de proposer un jeu concis (parties de 15 minutes), dynamique et assez subtil, mine de rien.
-Manu
Un jeu de Alexandre Aguilar, Romaric Galonnier
Illustré par Davy Mourier, Jonathan aucomte, Manu Gorobeï
Edité par Lumberjacks Studio
La forêt de Savernake
Un principe simple et agréable nous qui est proposé dans ce petit « forêt building » : Chacun construit sa forêt et va nourrir ses animaux en prenant à chaque tour une carte à ajouter orthogonalement. Un animal aime de préférence certaines nourritures parmi les vers de terre, les œufs, les fraises.. et ces animaux ont une plus ou moins grande capacité de stockage. La cartes placée va prolonger le chemin et apporter de la nourriture, et en fonction de l’endroit d’où on la prend dans le marché, l’animal totem de ce lieu du marche va permettre de faire plus de stockage grâce à un pion caverne, ou valoriser davantage une nourriture avec la goutte d’eau apportée par la chèvre.
Principe agréable on le disait, seulement nous avons peu de liberté dans la construction de la forêt, elle doit se tenir dans un cadre de 4×4, une forêt bien trop carrée à mon goût, car les chemins pourraient être harmonieusement prolongés et valorisés s’ils ne devaient pas être aussi contraints. Nous pourrons ajouter un nouvel animal, la quatrième carte mise au marché chaque tour, ou bien prendre la carte du coq qui nous donnera la première place lors du prochain tour. Quatre cartes à chaque tour donc, préférez y jouer à 2 ou 3 joueurs si vous aimez avoir le choix, car il est fort désagréable de jouer en dernier et ne pouvoir prendre que la carte restante. Assez déçue au final par cette forêt fort peu naturelle.
–Natosaurus
Un jeu de Rodrigo Rego
Illustré par Nuria Aparicio
Edité par Iello
Explorers of the Woodlands
Les Rogue-like, inspirés du jeu vidéo Rogue, se caractérisent par une mort définitive, une exploration de lieux générés aléatoirement et des combats au tour par tour. Les Rogue-lite forment une variante offrant une expérience moins punitive et permettant la progression par le déblocage de contenus. Ceux qui connaissent bien le genre vous le diront : il est associé à un état d’esprit : la persévérance à travers l’échec, les nouvelles tentatives, puis le plaisir d’aller toujours plus loin et de débloquer plus de contenu. Cet ensemble qui est le cœur du système m’a paru absent d’Explorers of the Woodlands qui s’inscrit dans cette lignée, mais qui pourtant ne réussit pas à en recréer les sensations.
L’ouverture à un public familial a été troquée contre une trop grande simplification du gameplay, menant à des défauts mécaniques majeurs. Il n’y a pas grand-chose à faire pendant la partie, pas de carotte ou de bâton, on explore les lieux jusqu’à tomber sur le Boss. L’aléatoire sans contrôle est bien trop violent : on peut tomber sur un monstre invincible et ne pas pouvoir s’en sortir, ou bien rouler sur le jeu et accumuler du matériel à tout va. La liste des défauts serait trop longue à dérouler, un public exigeant ne pourra tout simplement pas y adhérer.
Alors à qui conseiller ce jeu ? Il est plutôt à prendre comme une initiation pour les plus jeunes et les débutants désireux de découvrir le genre, sans trop se prendre la tête. Il y a de bonnes idées, de bons concepts, mais trop peu d’effort a été porté sur la finition du gameplay, qui vire totalement au naufrage.
Le public amateur de Mini Rogue pourrait y accrocher en fermant les yeux sur les problèmes mécaniques. On se retrouve dans un concept très proche, même s’il n’a pas sa simplicité et sa petite taille. Sa beauté réside principalement dans le matériel et dans la direction artistique. Pour moi qui suis en quête de beauté dans le game design, c’est une franche déception.
–Groule
Un jeu de Geoffrey Wood
Illustré par Jiahui Eva Gao,
Edité par From The Woods Studio
Traître mot
Un mot de départ (par ex « pétillant ») est posé sur la table. Chaque joueur a lui-même cinq mots à passer. À passer dans le sens où, habilement, il faudra les dire sans que les autres captent que c’est un de vos mots à placer. Il va donc falloir amener la conversation dans votre sens ou piéger les autres pour gagner des points en les démasquant, ou mieux, en les amenant à vous accuser alors que non, ce mot n’est pas dans votre liste. On part donc de « pétillant » et on suit « champagne », « mariage » « adultère », ouh la, c’est un peu bizarre comme association… non ?
Faire plonger les autres est assez jouissif, avouons le. Suivant les cartes en main, c’est fluide ou moins, il est plus facile de caler « poisson » que « présent ». Voilà donc un cadavre exquis allié au bluff. Seul faille, le vote sur la proposition hors sujet qui fait qu’on peut facilement s’allier contre un joueur. C’est malin et impeccable quand joueurs et mots sont en phase. Quand la discussion ne va pas dans votre sens, ça freine un peu plus.
-Morlock
Un jeu de Jean-Paul Monnet, Segolène Monnet
Edité par Blue Orange Games
Flashback– Lucy
Fort de son succès mérité (As dor 2023), voici Flashback 2. Exit les Zombie Kidz, voici Lucy Estrange, 15 ans, qui vient d’hériter avec son père d’un vieux manoir hanté par une ombre maléfique. Quatre chapitres (vision) seront nécessaires pour parvenir au terme de ce récit. Quatre chapitres répartis en quatre paquets de cartes qui, suivant le modèle originel, se renvoient les images formant ainsi un tout où on peut voir chacun et voir ce que chacun voit. Des petites cartes (des runes) et leur formes qu’on assemble, à l’instar de Unlock kids, donnent également accès à d’autres cartes ou explications de fin de manche, complétant ainsi les paquets. Le livret sert de BD et d’album photo, ainsi que de support pour les runes. Le récit avance ainsi.
Il y a un beau, gros, travail sur cette édition et les cartes vision formant le décor de chaque chapitre en imposent une fois étalées. Hélas, est-ce le sérieux de l’histoire, sa trame ultra classique, la fin gadget, mais je ne suis pas parvenu à m’attacher au personnage et à sa quête. Autant les cartes sont majoritairement belles (trois types d’illustrations) et bien pensées (bravo au chapitre 2), autant l’effet rebond/miroir des Zombie Kidz me paraissait moins linéaire. Ils possédaient aussi des outils amusants qui manquent ici. Si je félicite encore une fois les auteurs et l’éditeur pour la structure et la présentation, il manque à Lucy le souffle de l’aventure pour que cet épisode soit réellement prenant.
-Morlock
Un jeu de Baptiste Derrez, Gabriel Durnerin, Marc Antoine Doyon
Illustré par Laure de Chateaubourg
Edité par Le scorpion masqué
Le projet
Ce jeu de Corey Konieczka sorti en 2022 traînait dans ma pile de la honte depuis un moment. Il s’agit d’un jeu coopératif de déduction en campagne. Comme Eila et l’éclat de la montagne, chaque partie est introduite par une page de BD. Nous sommes des ados dans les années 90 qui jouons à un jeu de décodage d’énigmes dans une ambiance espionnage… À chaque partie nous allons devoir décrypter un message. La mécanique est classique, mais le matériel plutôt original : on se déplace sur le plateau pour récupérer des jetons glyphes qui nous permettront de révéler progressivement le message mystère caché derrière les petits volets de la console de mission. Ce n’est pas toujours un texte directement lisible, il faudra parfois décrypter le message caché. Le jeu introduit progressivement différentes techniques de cryptographie assez classiques. C’est un jeu familial qui se joue en 30-45 minutes, donc le niveau de difficulté de cryptage est plutôt faible.
En cours de campagne il y a quelques petits twists qui viennent pimenter un peu la partie (des ennemis qui se mettent en travers de notre chemin ou bien de nouveaux pièges), toutefois nous n’avons jamais été mis en difficulté et nous avons remporté toutes les parties sans trop transpirer. Au bout des 15 missions de la campagne principale j’ai trouvé que les parties se ressemblaient beaucoup, on jouait en mode semi-automatique et on était motivé juste par l’aspect décryptage. J’ai tout de même apprécié l’histoire dans la BD et les moments de décryptage de fin de parties. Il y a dans la boîte 3 autres mini campagnes (8 missions chacune) où le décryptage est plus complexe apparemment. Je me laisserai peut-être tenter dans quelques temps avec d’autres joueurs, pour leur faire découvrir le principe sur une partie ou deux.
-Manu
Un jeu de Corey Konieczka
Illustré par Andrew Brian George, Chan Chau, David Ardila
Edité par Unexpected Games
Clash of magic schools
Cette réédition de Babel (de Uwe Rosenberg et Hagen Dorgathen) opère un changement d’univers, passant de l’antiquité à une école de magiciens sur laquelle plane l’aura d’un certain Harry P. Vous allez vous affronter en duel pour remporter 15 points d’épreuves en jouant de votre côté du plateau des cartes élèves de 5 couleurs différentes. Ca pourrait ressembler à Lost cities raconté comme ça, mais non. Ce jeu est beaucoup plus méchant (le clash du titre n’est pas usurpé). Vous pouvez défaire ce que votre adversaire a construit, lui voler des cartes élèves, lui faire défausser une partie de sa main.
Les illustrations de Naïade sont belles et variées (et naturellement plus au goût du jour que celles de la version de 2014), mais je déplore la disparition du mot clé sur les cartes qui rappelle le pouvoir qu’elles permettent de faire (il faut désormais se rapporter à l’aide de jeu). De plus, je trouvais le thème de la construction de la tour de Babel en 6 étages successifs plus adaptée à la mécanique du jeu.
Avec 3 cartes piochées à chaque tour, on a une petite marge de manœuvre sur ce qu’on peut faire, mais on n’échafaudera pas des plans à long terme car si on ne joue pas rapidement ses cartes, on risque de se les faire retirer par l’adversaire. Les parties donnent lieu à pas mal de retournements de situations avec des remontées au score assez rapides, mais elles peuvent aussi s’enliser et traîner en longueur si le tirage des cartes épreuves n’est pas favorable (difficile de se défaire du hasard dans un jeu de cartes).
-Manu
Un jeu de Hagen Dorgathen, Uwe Rosenberg
Illustré par Naïade
Edité par Iello
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