[ITW] Toute l’histoire derrière… Last Heroes
L‘auteur de Last Heroes (prochain titre aux éditions Ludonautes), Eric Jumel (formation d’ingénieur en mécanique, et depuis 20 ans, dans l’informatique comme chef de projet et architecte), avait pris des notes tout au long du processus de création de son petit bébé, un jeu de cartes dont nous vous avons parlé par ici. Voilà qui s’avère bien utile pour étancher la soif des petits curieux que nous sommes !
Retour sur le parcours du jeu, depuis le proto jusqu’à la signature chez l’éditeur, puis la longue route du développement avec les derniers couacs de dernière minute… vous saurez tout sans avoir eu besoin de demander !
Alors Eric, parle-nous de « Kulkan », le jeu qui allait devenir « Last heroes » !
Comment la naissance du jeu a-t-elle eu lieu ?
Tout commence un jour de juin 2016. Après plusieurs mois à concevoir pour le plaisir un jeu expert sur les grandes explorations du début du XXè siècle (« Terra Explorare » pour ne pas le nommer), je me retrouve bloqué sur des éléments de jeu et je ne trouve aucune idée ou solution satisfaisante pour y remédier. Je décide de mettre le proto en pause et d’attaquer le développement d’un nouveau jeu.
Une idée me trotte dans la tête depuis plusieurs jours déjà. J’adore les jeux à ressources donc c’est tentant d’en développer un, mais il n’est pas forcément évident de renouveler le genre, de trouver quelque chose de novateur, ou en tout cas de pas courant.
J’ai alors l’idée suivante : et si les joueurs devaient se procurer les ressources sur le plateau des autres joueurs au lieu de les produire ? Et si en plus, les autres joueurs ne pouvaient pas refuser ?
Et c’est comme ça que naît de façon assez rapide Kulkan, le prototype qui allait devenir Last Heroes. Les actions de joueurs sont vite définies car je veux un jeu simple, avec très peu d’actions possibles mais de la stratégie. Il y aura donc l’action de mise à disposition de ressources à la communauté et l’action qui requiert les ressources, avec comme but du jeu de former des combinaisons de cartes (suite, triplé, carré). Il ne me reste plus qu’à trouver le moyen de « forcer » les joueurs à participer à l’effort collectif et de gérer d’éventuels blocages en cas de ressource indisponible : ce sera la pénalité en points de victoire et la troisième action apportant une ressource Joker.
Et l’idée des cartes à double usage (soit ressource, soit objectif consommant les ressources) était-elle déjà là ?
Oui, en effet, à part le mécanisme de la troisième action, tout est encore présent dans Last Heroes à ce moment.
Que fais-tu de ton proto alors ?
J’ai créé mon proto pour le plaisir… Je peux donc retourner à mon délire ludique de fondations archéologiques et de fouilles sur des sites légendaires ! Oui, mais voilà, c’est sans compter sur mon épouse qui me pousse une première fois à montrer Kulkan lors d’un festival à Gémenos. Pas évident pour un ours comme moi d’aller vers les autres présenter sa création…
Surpris par les premiers retours, je profite du vivier de « beta testeurs » que j’ai sous la main, la Guilde des Joueurs de Gardanne, pour pousser un peu plus l’expérience. Mêmes retours : Kulkan plaît. Bon.
Alors que je m’apprête à m’en arrêter là, mon épouse (décidément) qui sent que ma passion pour les jeux (25 ans déjà) est en train de prendre une nouvelle orientation, me suggère de m’inscrire à la protozone de quelques festivals pour voir ce que ça donne. Je n’ai rien à perdre après tout. Je décide de relever le challenge et je m’inscris à plusieurs dont Istres et le tout nouveau Protolab du FIJ.
Tu te rendras à Cannes du coup ?
En fait, quelques semaines plus tard, alors que je commence à me prendre au jeu (facile celle-là) et crée des pages facebook et un blog pour mes jeux (un petit délire au doux nom de Baron’s factory), j’apprends que Kulkan n’est pas retenu pour le protolab. Mais pour me remercier de ma participation, j’ai le droit d’acquérir un pass Pro pour y déambuler comme auteur. Je saisis l’occasion.
Quelques jours après, je découvre que les Ludonautes cherchent un animateur pour Cannes. Je les contacte et j’échange avec Cédric, lui indiquant que je ne pourrais travailler que le samedi et le dimanche car je me réserve le vendredi pour des rencontres avec des éditeurs (hum, hum…. Je n’avais pas de réponse ferme à ce moment-là malgré quelques tentatives timides).
Cela lui convient et il me propose de venir au festival d’Istres pour s’y rencontrer et faire connaissance. Je lui réponds que je m’y rends de toute façon car j’y présente des protos. En rigolant, Cédric me dit que ce sera l’occasion de les tester…
Direction Istres ?
Et oui ! La chance sourit à ceux qui se lèvent tôt et aux audacieux ! Me voilà donc sur la route d’Istres ce samedi matin de janvier 2017 dès 7h, avec une idée derrière la tête. Arrivé sur place dans les premiers, je repère le stand des Ludonautes et m’installe juste à côté sur 2 tables de la protozone. À leur arrivée (Cédric est facilement reconnaissable), je viens me présenter et retourne à mes tables, les laissant s’installer. Et alors que commence la longue attente du samedi matin en festival, voilà que Cédric et AnneC, accompagné d’un certain Frédéric Ormières [Ndlr : Frédéric Ormières est un animateur professionnel dont la structure s’appelle Likkipelli et qui travaille pour de nombreux éditeurs comme Haba, Iello, Ludonaute, etc], débarquent pour tester Kulkan. Je ne peux plus reculer.
Et là, c’est le drame ! Je commence à peine à expliquer le principe de base du jeu, la collaboration contrainte, que Cédric me balance un « Ca ne marche jamais ce type de jeu !! ». Un peu déstabilisé, mais encouragé par AnneC, je poursuis mon explication et on attaque la partie. Tout se passe bien (à part quelques couinements de Cédric). Puis chacun retourne à ses occupations pour la journée.
Le lendemain matin, dès qu’ils arrivent, les Ludonautes viennent directement s’installer à ma table. AnneC a envie de rejouer à Kulkan. Nous enchaînons 4 parties !
Ça sent la signature !
Dès la deuxième partie, je me rends compte que Cédric éprouve le prototype en jouant de plusieurs façons. Kulkan passe le beta test. Cédric et AnneC discutent entre eux. Ils trouvent la mécanique intéressante et ont vraiment pris plaisir à jouer. Le soir, au moment de se quitter, nous prenons rendez-vous dix jours plus tard à Istres pour qu’ils me présentent les jeux que j’animerai à Cannes. J’en profite pour demander à AnneC s’ils peuvent m’envoyer un débrief à froid du jeu.
La semaine suivante, je reçois un mail qui me laisse perplexe. AnneC me demande de lui envoyer une version Print&Play (plutôt une bonne nouvelle) pour éprouver 2 défauts du jeu qui leur semblent à risque (plutôt une mauvaise nouvelle) : l’importance de la main de départ et la rejouabilité. Heureusement, le festival de Grenoble arrive le weekend suivant et j’en profite pour me focaliser sur ces deux problèmes. Mais alors que je passe entre les fourches caudines de certains éditeurs pourfendeurs de prototypes (ils se reconnaîtront – ce sont devenus des amis), le même problème de la main de départ est mis en avant : un joueur avec une majorité de cartes de valeur 1 au début du jeu ne peut pas gagner car les points de victoire se basent sur la valeur des cartes formant les combinaisons.
Le retour à la maison est très dur. Je ne vois pas comment je peux résoudre un phénomène subi par les joueurs de cartes depuis la nuit des temps, la malchance de la main de départ. Je m’endors même le dimanche soir en me disant que Kulkan est mort-né et qu’il va finir sur une étagère.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là…
En effet, le lundi soir, en quittant le travail, je me dis que je ne peux pas en rester là. D’autant que je vois les Ludonautes le mercredi suivant. Je fais alors une analyse du problème en bonne et due forme (déformation professionnelle) et me dis que je ne dois pas être le premier à l’avoir rencontré. Je me souviens alors de la partie du prototype de Manchots Barjots jouée avec Bruno Cathala lui-même lors du festival… d’Istres en 2016 ! Un signe ? En tout cas, je me rappelle que les cartes de faible valeur apportaient un pouvoir.
Je tiens ma solution. Chaque joueur possède déjà 3 pouvoirs qu’il ne peut utiliser qu’une seule fois dans la partie. Hors, depuis le début des playtests, un seul pouvoir est utilisé systématiquement dans chaque partie : le pouvoir d’échange. Ce seront donc les cartes de valeur 1 qui apporteront ce pouvoir lorsqu’elles seront jouées, pouvoir qui permettra notamment d’améliorer sa main.
À peine arrivé à la maison, je mets à jour le prototype et réalise des premiers tests le lendemain soir. Ça tourne bien.
Le mercredi, à peine ai-je découvert l’antre des Ludonautes et bu un café qu’AnneC et Cédric me proposent de commencer par une partie de Kulkan. Je leur explique que les règles ont évolué depuis et leur décris les changements. À l’issue de la partie, Cédric se mure dans le silence. Même AnneC est surprise ! Il semble intéressé mais n’en dit pas plus. AnneC me félicite pour les modifications apportées. Pour elle, le jeu a pris de la profondeur.
Que se passe-t-il ensuite ?
J’enchaîne les salons et les rencontres avec des éditeurs. La collaboration contrainte semble plaire. Mais rien de concret. Et puis quelques mois plus tard, alors que Cédric et AnneC viennent à la maison pour une soirée jeu, ils me tendent une boîte rouge. Au moment de l’ouvrir, je reconnais immédiatement les cartes de Kulkan. Après quelques secondes d’interrogation, je regarde mes invités et comprends le message : mon premier jeu sera édité chez les Ludonautes !
Alors, le plus dur est fait !?
Signer, c’est super ! Mais quand tu es un auteur débutant, tu te poses ensuite très vite tout un tas de questions sur la suite. Ai-je encore le droit de donner mon avis, de participer au design, de refuser des idées ? Dois-je m’accrocher à certains éléments de peur que le jeu ne soit plus mon jeu ? Si je n’ai pas de news, dois-je relancer mon éditeur? Heureusement, AnneC, Cédric et Ian [Ndlr Ian Parovel] me mettent très vite à l’aise et répondent à toutes mes questions, mêmes les plus stupides…
Avant de signer, je savais qu’ils envisageaient de changer d’univers, le sacrifice d’animaux n’étant pas forcément très vendeur. Nous commençons donc à réfléchir à un nouveau thème mais aussi à l’objectif du jeu, la réalisation de combinaison de cartes (suite, triplé, carré) faisant un peu trop Rami comme dirait un certain Florian S. (encore lui ?). N’ayant pas encore d’expérience ou suffisamment de recul, je n’arrive pas à projeter la mécanique sur autre chose que les offrandes alors que les Ludonautes commencent à proposer des idées très éloignées de tout ça : les « ressources » pourraient être de l’équipement ou des morceaux de plans.
Le nouveau thème sera difficile à trouver ?
C’est quelques jours avant le festival de Montpellier que Cédric m’appelle pour me dire qu’il a trouvé « The idea » : les joueurs vont devoir combattre les gardiens d’une forteresse où est détenue une personne que le groupe doit sauver et les « ressources » seront les armes dont les joueurs ont besoin pour éliminer les opposants. Je suis un peu sceptique de prime abord car cela ajoute des éléments de jeux et une nouvelle mécanique qui pourrait prendre le pas sur celle de base qui a attiré en salon. Mais la première partie pendant le salon héraultais balaie tous mes doutes et ouvre de belles perspectives de développement. Et la version prototypée à l’aide d’images de monstres donne plein d’idées pour revisiter le bestiaire des créatures fantastiques.
À partir de là, vous allez enchaîner les parties de playtesting ?
Oui, la première réunion de travail est programmée courant juin 2017. Elle sera intense. En repartant de la version Forteresse, nous enchaînons les parties et les idées fusent, sont challengées, rejetées, enrichies, déclinées après chaque test. Le principe pour tuer les monstres est maintenu : il faut pouvoir leur donner une série de coups bien définis (les fameuses combinaisons de Kulkan) représentées par les cartes collectionnées par les joueurs. Mais au lieu de juste devoir les combattre, nous tombons vite d’accord qu’il faut renforcer le faux côté collaboratif : l’idée d’un objectif commun à atteindre en groupe mais avec un seul vainqueur à la fin commence à poindre… ce sera le boss de fin de niveau, avec un bonus à celui qui lui portera le coup fatal !
Et pour accentuer encore ce côté « je dois aider les autres mais ça doit me rapporter » naît ce même jour le concept de la brèche. Les monstres sont organisés en une armée à trois niveaux, le nombre de coups pour les vaincre croissant avec les niveaux. Quand un joueur élimine un monstre, il fragilise le monstre du niveau supérieur. Il y aura moins besoin de coups pour s’en débarrasser.
À la fin de la journée nous avons l’impression d’avoir fait un bond énorme. Les nouveaux concepts tournent bien et ajoutent de la profondeur stratégique.
Qu’en est-il de l’idée du boss de fin de niveau ?
Après quelques playtests en salon, l’idée du boss de fin de niveau se révèle vite une fausse bonne idée. Le jeu n’étant pas collaboratif, les joueurs peuvent très bien ne pas s’entendre et ainsi ne pas tuer voire même ne pas atteindre le boss.
C’est alors qu’apparaît l’idée des artefacts détenus par les monstres de niveau 3 et des deux fins de jeux possibles : soit tous les artefacts sont récupérés, la partie s’arrête alors immédiatement et chaque artefact rapporte 5 points à son propriétaire, soit les 10 tours sont atteints et les artefacts récupérés ne rapportent rien. Et pour rendre le jeu encore plus « collaboration contrainte », nous ajoutons la règle qui fait couiner : ce n’est pas celui qui tue le monstre de niveau 3 qui gagne l’artefact mais le joueur qui ouvre la brèche au niveau inférieur !
Les playtests continuent encore après ça ?
Oui, pendant tous les salons du premier semestre 2018. Nous revoyons l’équilibrage des points de victoire et la distribution des cartes 1, 2 et 3 par couleur, nous ajoutons des pouvoirs à chaque artefact, utilisable 1 fois, mais tout le reste est maintenu.
Puis arrivent le salon de Valence et une partie avec du beau monde (Ludovic Maublanc, Théo Rivière et Olivier Reix). A la fin de la partie, Ludovic (merci à lui) émet un doute sur le nombre de manipulations à effectuer, notamment avec les munitions à prendre sur les cartes des autres joueurs. Cela nous tracasse Cédric et moi, et nous mettons nos cerveaux en marche alors que nous rangeons le stand.
La solution des chargeurs nous apparaît comme une évidence et Cédric se lance dans la conception dès le lundi suivant. Je ne sais plus comment est apparue l’idée des crânes… Les premiers tests à Toulouse nous conforteront dans l’apport des chargeurs.
Finalement, vous arrivez au bout du développement ?
Oui et je suis super content du résultat. Le jeu a pris de nouvelles dimensions. Il peut être joué avec une approche purement stratégique comme il peut l’être en mode « j’embête mes petits copains ». Le jeu reste simple, avec seulement 2 actions possibles à chaque tour (partager des munitions ou charger une arme) et l’attaque qui reste optionnelle. Et le faux côté collaboratif a pris plusieurs facettes et ça, j’adore !
Qu’est-ce qui t’a le plus marqué pendant cette collaboration avec les Ludonautes ?
Ça fait 25 ans que je suis un joueur passionné, et pourtant c’est seulement maintenant que je me rends compte du travail réalisé par un éditeur. Le nombre de petits détails auxquels il faut penser est tout simplement monstrueux. Je ne vais pas tous les lister, car certains sont aussi apparus par plaisir, issus de petits délires entre Cédric, Ian, Bruno, AnneC et moi, mais plusieurs m’ont marqué.
Par exemple ?
Lorsqu’il a fallu donner un look aux personnages incarnés par les joueurs se sont posées les questions de la représentativité des peuples et de l’égalité homme-femme, avec le risque de tomber dans les clichés typiques des blockbusters américains. Nous avons donc opté en notre âme et conscience pour 2 femmes, 2 hommes et 1 personnage non identifiable, et des représentants d’origine asiatique, africains et européens.
Dans la même veine, à l’issue encore une fois du festival de Valence où je discute avec 2 joueuses qui félicitent les Ludonautes pour le traitement « naturel » des personnages féminins de Luma, je me pose des questions à propos de 3 monstres féminisés qui montrent une partie de leurs poitrines. Je m’en ouvre auprès des Ludonautes qui, par acquis de conscience, contactent des distributeurs américains. Nous sommes au début de #MeToo. Le retour est très clair. Par respect pour vous, Mesdames, nous décidons de changer les illustrations.
D’autres détails sont heureusement moins sujets à polémique, mais participent tout autant à créer l’harmonie de l’édition. Comme choisir les différentes armes dont pourront disposer les joueurs. C’est tout bête, mais à partir du moment où les joueurs doivent avoir à charger leurs armes, cela exclut tout ce qui est arme contondante et tranchante. Adieu sabres laser, haches à 2 mains et autres shurikens…
Ou comme donner des noms aux personnages. Tout est parti de la réutilisation d’une proposition de nom pour le jeu : Beast Hunters, Beast étant un nom également utilisé en anglais pour appeler le diable, le mal, le chaos. Lors d’un échange avec les 3 compères masculins des Ludonautes, et alors que nous délirons via Discord sur le nom des perso (désolé AnneC, on n’a parfois pas été super productifs), je ne sais plus qui suggère que les initiales des personnages devraient former un mot. Nous cherchons des mots de 5 lettres et je propose BEAST. Nous voilà donc à trouver des noms pour coller avec l’anagramme (collaboration forcée ?). Après de multiples échanges, nous tombons d’accord sur Blind, Echo, Ace, Silent et Tank. La B.E.A.S.T. team est créée !
Qu’est-ce qui aura été le plus gros challenge dans cette aventure éditoriale ?
Trouver le nom du jeu. Alors que les premières illustrations de monstres arrivent début janvier 2018, notre choix s’arrête sur Fantasy Hunters. Ça sonne Heroic Fantasy, ça explique ce qu’incarnent les joueurs, bref, ça nous plaît. Mais à Cannes, alors que nous discutons avec une distributrice canadienne trop sympa, nous apprenons que le terme Fantasy de l’autre côté de l’Atlantique fait plutôt penser à des monstres en tutu rose en train de danser le Lac des Cygnes. C’est bon ? Vous aussi vous l’avez, l’image de Chtulhu en ballerines en train de réaliser un porté avec le Beholder ? Bref, il faut changer.
S’en suit une longue période où nous brainstormons, blacklistons, skypons (ça fait moche quand même ces francisations) mais aucun nom ne fait l’unanimité : Beast Hunters, Beast Squad, Night Hunters, Hell Squad…
Quand Ian décide d’opter pour un design rappelant DC Comics, nous orientons nos recherches sur des noms type the Guardians, the Defenders, the Watchmen.
Malheureusement, tous ces groupes de héros existent déjà dans les univers DC Comics ou Marvel. Et pour ne rien arranger, Paris Est Ludique pointe son nez. Hors nous nous sommes fixés cette date comme limite pour renommer Fantasy Hunters…
Et puis, lors du voyage vers Toulouse, pendant lequel nous nous prenons la tête encore une fois pour trouver un nom, surgit… Sentinels. Nous le répétons plusieurs fois, avec différents intonations, ça sonne bien ! Nous validons.
Les joueurs seront donc des Sentinels, un groupe d’hommes et de femmes formé depuis la nuit des temps pour contrecarrer le Chaos et son armée. Nous écrivons les règles, elles sont royalement mises en forme par Cédric et Ian et des prototypes sont fabriqués.
Arrive donc PEL où Sentinels est présenté version finalisée avec des grandes bâches faisant la part belle aux illustrations de Romain Gaschet. Le jeu est bien accueilli et les parties s’enchaînent. La production va être lancée.
Oui, nous avons d’ailleurs un article qui est publié sous le nom de Sentinels que nous avons renommé ensuite ! Que s’est-il passé ?
Après PEL, les Ludonautes commencent à envoyer aux différents médias des informations sur leurs futures sorties, dont à Board Game Geek qui se fend d’un article présentant notamment Sentinels. Et là, c’est le drame. Nous découvrons qu’un jeu non localisé en Europe s’appelle Sentinels of the multiverse, qu’il a pour thème les super héros et a un design à la DC Comics. Les commentaires sur les forums sont assez virulents, certains accusant même les Ludonautes de vouloir profiter de la notoriété du jeu aux US. D’autres vont même jusqu’à comparer les polices de caractères, qui se ressemblent bien sûr puisque tous les codes des DC Comics ont été appliqués.
Là encore, pour éviter toute polémique, les Ludonautes écrivent à l’éditeur américain pour expliquer la situation. Mais sa réponse sûrement formulée par un avocat est sans appel : nous aurions tout intérêt à changer le nom !
Et voilà ! Retour à la case zéro ! Le jeu n’a plus de nom alors que la fabrication doit être lancée. Il y a urgence. Nous passons tout un week-end chacun aux 4 coins de la France à échanger par sms pour trouver un nom. Nous ressortons tous les noms, d’autres fusent, mais nous n’arrivons pas à nous mettre d’accord. Nous décidons alors que chacun doit proposer un nom et un seul et nous choisirons parmi cette liste. Pas évident comme exercice ! Au final, « Last Heroes » fera l’unanimité !
Maintenant que le jeu est dans les pipes, dans quel état d’esprit es-tu ?
En fait, plusieurs sentiments se mélangent : de l’excitation, de l’impatience, du scepticisme aussi.
TheGoodTheBadAndTheMeeple 19/10/2018
belle histoire.
Machiavel 20/10/2018
Visuellement, ça claque. J’ai peur que le jeu soit juste beau, mais creux au final.
Torghul 30/10/2018
Bonjour
J’espère que vous aurez l’occasion de jouer à Last Heroes afin de vous rendre compte par vous-même du gameplay et de sa richesse.
Eric
Beersson 22/10/2018
Je suis toujours étonné de voir des professionnels du monde du jeux avec une culture ludique aussi pauvre…
Les références sont… en fait il n’y a que manchot barjots comme référence et la non connaissance de sentinels of the multiverse. Un simple check sur google ou bgg aurait marché…
TSR 23/10/2018
Qu’un jeune auteur se fasse avoir passe encore, mais qu’un éditeur expérimenté se fasse avoir de cette façon c’est assez incompréhensible… Je me souviens l’avoir mentionné lors de notre Playtest à PeL…
TSR 23/10/2018
Voir le sous titre de mon article « antimultiversement »… J’aurais du être plus explicite : « Ohé ! Il y a un autre jeu qui a le même nom, problème ou pas ? »
Torghul 30/10/2018
Bonjour, on a fait le check, mais comme le jeu n’avait pas été localisé en France, et est radicalement différent en termes de gameplay, nous pensions qu’il n’y aurait pas de souci. D’autant qu’avec le nombre de jeux qui sortent par an (1200 rien que pour Essen), cela va commencer à être compliqué de trouver des titres pas trop proches des autres. Mais face aux réactions sur le site de BGG, nous avons préféré contacter l’éditeur américain pour finalement prendre la décision de changer le nom.