► E.D.I.T.O. La rejouabilité d’un jeu de société, c’est quoi au juste ?

Il est des noms que nous utilisons presque à chaque article et qui pourtant n’existent pas dans le Larousse. Le mot “rejouabilité” en fait partie. Le jeu vidéo a déjà théorisé un peu sur le sujet, mais du côté du jeu de société, ce qu’on met derrière ce terme reste encore assez vague, ou disons variable selon les personnes.

Rejouabilité, la première définition stricto sensu que l’on pourrait donner, c’est la capacité à être rejoué.
Donc, d’office, voilà qui exclut les jeux “one shot”, qui par leur concept matériel font la proposition d’une expérience unique. Ainsi, parler de rejouabilité peut nous amener à définir aussitôt ce qu’il y a de l’autre côté du spectre, le jeu “fini”, comme EXIT, où il s’agira pour les joueurs d’aller au bout de l’expérience, après quoi celle-ci ne pourra pas être rejouée. Il est intéressant de souligner que la force de ces jeux à obsolescence programmée réside précisément dans leur propriété éphémère, où à l’instar d’une salle d’escape room, la finitude de l’expérience fait partie des mécaniques de jeu. Parce que l’on sait que l’on ne pourra pas recommencer et que le temps nous est compté, la pression est intense, les choix irrémédiables, et l’intérêt du joueur à son comble.

chronometre-fb

 

Or, à quoi sert la rejouabilité ?

À garder
l’intérêt au frais.
Ainsi, fait intéressant et d’apparence paradoxale, ce n’est pas forcément en multipliant les éléments qu’on maintient l’intérêt du joueur, mais au contraire parfois en lui proposant un contenu avec des limites définies. Les Legacy jouent sur cette optique : on entretient l’envie d’y revenir en proposant une expérience unique à chaque session, jusqu’à ce que la campagne soit achevée. Là, l’intérêt retombera, voire disparaîtra, car le jeu a été consommé, l’histoire a été racontée. On peut aussi conclure de cela, contrairement à ce que Alex Harkey écrivait dans « How do we evaluate games ? Monetary value & Replay value », que le prix d’un jeu ne peut pas être indexé sur sa valeur de rejouabilité. Les joueurs se sont jetés sur Pandemic Legacy S1 et S2, même si la première boîte valait 50€ et la seconde 70€.   

 

photo legacy

Source https://www.boardgamequest.com/wp-content/uploads/2012/08/IMG_1848.jpg

 

Comment maintenir l’intérêt ?

Jeux à campagnes ou autres, quelque soit le truchement, l’objectif est donc de maintenir l’intérêt du joueur. Plusieurs remèdes à l’épuisement d’un jeu sont bien connus : intégration de facteurs aléatoires (tirage d’événements, d’objectifs, d’actions, résolution hasardée, etc), d’éléments variables (ordre du tour, plateau modulable, factions asymétriques, etc), mise en jeu de paramètres humains (créativité, rôles cachés, interaction et réactions, etc), richesse des développements (storytelling, arbre technologique, combinaisons de pouvoirs, timings changeants, etc). On le voit, beaucoup de curseurs peuvent être mis au service du renouvellement des physionomies de parties.

Dans tous les cas, plus un jeu aura une proposition cohérente et juste, plus les joueurs voudront s’y exprimer. Un Terra Mystica fait encore parler de lui aujourd’hui non pas parce qu’il a 14 factions, mais parce que ses 14 factions ont toutes été profondément réfléchies, et permettent l’émergence de gameplay renouvelé, avec chacune une multitude d’axes de développement à explorer. Tout a été conçu de façon cohérente.    

 

terra mystica

 

25 parties en un mois, et puis plus rien.

Mais finalement, et nous y reviendrons, la première cause de rejouabilité, celle dont nous parlons souvent, c’est simplement ce goût de reviens-y qui reste en tête après une partie. On parle parfois, de façon un peu galvaudée, de jeu addictif. Certaines initiatives ludiques sont si rafraîchissantes qu’elles savent déclencher une sorte de boulimie. À ce moment, on ne voit pas forcément clair dans son jeu, si je puis dire. Étourdis de sensations nouvelles, nous voilà entichés de certains gameplays parce qu’ils ont une saveur inédite, mais ces feux-là s’évanouissent parfois du jour au lendemain comme un fétu de paille qu’emporte le vent. Rejouabilité éprouvable jusqu’à l’écœurement, est-elle toujours rejouabilité ? C’est un peu au final comme s’il y avait une rejouabilité court, moyen et long terme. Celle qui pourra être rabattue intensément sur une courte période, celle qui conservera un sens sur le moyen terme, et celle qui est capable d’engendrer les grands classiques dont tout le monde connaît les noms.

 

Les obligations de base

Il va sans dire que la jouabilité est un pré-requis à la rejouabilité. Cela peut paraître bête, mais finalement pas tant que ça (enfin, je crois ^^). Une expérience ludique peut être satisfaisante sur une session, et donner envie d’y revenir en soi, sans que cela ne soit le cas in fine. Une vraie entrave à l’envie de ressortir peut être liée à la manipulation, la longueur de la mise en place ou à la non-intuitivité des règles. Ainsi, certains jeux pourtant alléchants finissent par prendre la poussière : ils sont techniquement tout à fait rejouables, mais en pratique, écrasés sous le poids de leurs propres contraintes, les voilà vite délaissés à la faveur d’autres titres qui, à plaisir et sensations égal, seront plus ergonomiques, plus facile à expliquer, à installer, moins “inutilement compliqués”, plus épurés, bref, en un mot, plus susceptibles d’être rejoués. 

Notons que le jeu est par ailleurs assujetti à ses conditions matérielles et ne peut les renier. C’est rare, mais certaines boîtes ne peuvent plus être jouées, car des cartes ont rendu l’âme à force d’usure, les couleurs sont devenues illisibles, les carnets du roll & write se sont épuisés, etc. La question bassement concrète de la qualité de la fabrication entre parfois en considération dans la durée de vie. Ce n’est pas juste par coquetterie si les joueurs prennent moult précautions avec leur jeux (certains protègent leurs cartes, par exemple). Le jeu de société n’est pas uniquement une création éthérée de l’esprit : sans un matériel efficient, il devient in-rejouable.

magic

   

Ajout, approfondissement ?

L’édition d’extensions parvient souvent à réveiller l’appétit endormi du joueur. Elles permettent de redécouvrir un jeu, qui devient une “base”, sous un angle nouveau. Elles se contentent souvent d’élargir l’ensemble structural (avec un joueur de plus, un mode solo, une variante coop’, etc), parfois elle propose du gameplay qui peut commuter ou s’ajouter (Cities of Splendor), et enfin il s’agit dans quelques cas simplement de décliner à l’envi la même proposition initiale (l’exemple typique serait Dixit qui démultiplie les illustrations au fil des extensions).

Selon le travail opéré par les créateurs, ces ajouts permettent donc de revivre à l’identique l’impression de découverte originelle, ou au contraire, d’aller plus loin dans l’approfondissement du jeu, avec parfois une complexification du sujet.
Évoquer les extensions, qui par nature sont là pour allonger la durée de vie, permet, en tant que critique, de mettre en exergue deux espèces de rejouabilité. Celle qui se base sur l’accumulation et celle qui joue sur la profondeur. Il n’y a pas de mal à jouer sur l’accumulation, même si parfois démultiplier les éléments ne changera rien (ou presque) du côté des sensations de jeu. En clair, il arrive que malgré la quantité d’éléments à disposition, le joueur aura tout de même la sensation d’avoir fait le tour du jeu après deux parties. C’est parfois un gage de sérieux en trompe-l’œil, argument notamment utilisé dans les stretch goals des Kickstarters pour attirer le chaland à la recherche d’un jeu “qui tiendrait la route” : on empile les propositions artificielles, quitte à déséquilibrer l’écosystème mécanique subtil qui maintient l’intérêt du jeu.

Retenir le joueur, c’est avant tout lui démontrer partie après partie que des stratégies ou des situations nouvelles peuvent encore émerger, et cela ne nécessite pas forcément ni beaucoup de matériel, ni une grosse complexité. Cela dit, l’un et l’autre peuvent faire illusion, au moins pendant un temps, et c’est pour certains joueurs suffisant (et n’y voyez aucun jugement de valeur, c’est parfait tant que chacun y trouve son compte et sait ce qu’il achète). Si vous êtes submergé par le jeu (que ce soit à cause de ses règles extrêmement touffues et imbriquées, ou de ses factions et combos extrêmement nombreuses par exemple), vous aurez a priori besoin d’y revenir pour en faire le tour.

fedex

Mais que le complétiste qui a déjà fait le tour de tous ses all-in vienne me démentir, c’est rarement au nombre d’add-on que l’on mesure la réelle qualité d’un jeu, et sa rejouabilité. Un peu comme dans les jeux vidéo d’aventure qui tentent de vous pousser à continuer à jouer en vous agitant votre pourcentage de complétion sous le nez. Souvent nombre des dites aventures proposées sont de l’ordre de la “quête FedEx” qui viennent artificiellement augmenter la rejouabilité. Cette finalité-là représentera une motivation que pour une petite partie des joueurs.

 

Tout ça, c’est de la poudre de perlimpin !

Pour beaucoup d’autres, l’envie “d’y revenir” provient tout d’abord d’une chose toute simple : l’intelligence de la proposition inhérente au gameplay, proposition dont la nature et l’objectif varie selon les types de jeu. Est-ce si fun qu’on aura envie de le sortir 1000 fois (party game) ? Est-ce si profond que l’on voudra l’explorer encore pour tester la viabilité de nouveaux patterns de victoire, ou escalader la courbe d’apprentissage (eurogames ou jeux abstraits) ? Est-ce si spécial que l’on voudra “suspendre notre incrédulité” encore et encore (narratif, ameritrash) ? etc. Le jeu se rejoue tant qu’il demeure en adéquation avec sa promesse initiale… ou jusqu’à ce qu’un autre opus débarque, et fasse mieux.

 

netrunner

Oui, a priori, qui dit rejouabilité, dit durée de vie, dit aussi suivi éditorial. La concurrence est si rude que le hit d’hier sera souvent balayé par le buzz de demain, peu importe s’il en avait encore dans le ventre ou pas, l’attention du joueur est détournée par de nouvelles sirènes aux chants grisants et merveilleux… Pourtant, certains titres font preuve d’une durée de vie remarquable dans cette jungle, d’aucuns sont même abandonnés par leur éditeur mais continuent d’être joués avec passion par la communauté (ce fut le cas avec le premier Netrunner par exemple) tant et si bien qu’ils reviennent finalement sur le marché. Pour tenir sa place face au balayage continuel des sorties et se maintenir en vue, il faut être capable de se renouveler tout seul comme un grand. C’est cela, la rejouabilité dont nous parlons dans nos colonnes.

Alors dites-nous, chez vous, quels sont les titres qui savent rester attrayants et continuent de frayer leur chemin jusqu’à la table de jeu malgré les années ? On veut des noms ! 😉

 

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22 Commentaires

  1. eolean 13/06/2018
    Répondre

    Bel article et vaste sujet. Quand on y réfléchie, on se dit que des jeux comme la belote ou le tarot sont indémodable pour beaucoup de monde. Pourquoi est-ce que je peux passer une soirée à enchaîner les parties de poker et que je suis difficilement capable de faire deux parties d’affilés d’un même jeu de société moderne ?

    Bien sûr, la typologie du jeu, les extensions, la profondeur stratégique, etc… sont des éléments qui rentrent en ligne de compte. Quand on parle de rejouabilité, on comprend la capacité à rejouer à un même jeu sans s’y ennuyer.

    Je crois qu’il faut aussi prendre en compte le profil de joueur que nous sommes. J’émets une théorie selon laquelle un joueur possède un profil selon 4 composantes : Exploration, perfectionnisme, gagne et social. Si je devais donner un exemple, je dirai qu’en ce qui me concerne, mon profil serait le suivant :

    Social : 50% => Je prends grand plaisir à retrouver ma table de joueur toutes les semaines, et je joue d’abord pour les retrouver et qu’on passe un bon moment ensemble. On pourrait faire un tarot ou une belote ensemble qu’on s’amuserait néanmoins.

    Exploration : 30% => Mon principal plaisir ludique est de découvrir un nouvel univers, de l’explorer, comprendre comment il fonctionne, ce qu’il a dans le ventre, ses différentes stratégies possibles et comment je vais pouvoir y évoluer

    Gagne : 10% => Je joue pour gagner, mais ce n’est pas un enjeu majeur ou important pour moi.

    Perfectionnisme : 10% => Je vais tenter de faire le mieux possible dans la stratégie que j’ai choisi. Je peux perdre une partie, si j’ai eu le sentiment d’avoir bien optimisé mon jeu je serai content. A l’inverse, si je gagne mais que je n’ai pas trop compris comment, ça ne m’intéressera pas.

    Tout cela pour en venir au fait que mon appréciation de la rejouabilité pourra être différent de celui qui préférera gagner quelque soit la stratégie ou de celui qui voudra maîtriser complètement tous les aspects et les techniques d’un jeu…

    La rejouabilité dépend donc aussi de notre profil de joueur.

    J’assume le fait d’être un joueur kleenex et j’ai trop de deux mains pour compter le nombre de fois où j’ai rejoué à mes préférés. Mais pour répondre à la question, si je devais citer quelques noms des jeux les plus rejoués chez moi (hors party game) ce serait : Deus, nefertiti, notre-dame. A contrario, mes jeux préférés seraient plutôt : Trajan, Steam works et Russian railroads. Mais on ne déguste pas une côte de boeuf comme on mange un kebab 🙂

  2. Umberling 13/06/2018
    Répondre

    Il y a des modèles de comportements appliqués au jeu, notamment celui des big five.

     

    Sinon, la rejouabilité est – indeed – un vaste sujet. Je pense très humblement qu’un jeu bon et profond suffit à être rejouable. Les échecs sont profonds et ouverts, permettent un gameplay émergent, quand un jeu plus dirigiste tend à être orienté sur le contenu.

    • eolean 13/06/2018
      Répondre

      Ah oui ça va tout de suite plus loin ! Mais c’est passionnant, je ne connaissais pas, merci ! 🙂

      • Umberling 14/06/2018
        Répondre

        Les Big Five ont leurs limites et on leur préfère aujourd’hui d’autres modèles. 😉

        Sinon, sur le complétionnisme et les jeux vidéos d’aujourd’hui, on va chercher à avoir des jeux ouverts à plusieurs types de public, quitte à rester générique… car c’est le nombre de ventes qui fait tourner la boîte.

  3. fouilloux 13/06/2018
    Répondre

    Depuis le temps que je voulais écrire un truc sur la re-jouabilité, content que tu l’ai fait, c’est bien mieux que tout ce que j’aurais pu faire.Je rajoute juste deux trucs, pour provoquer le débat:

    Je pense que ça sert à rien pour un jeu la re-jouabilité : Unlock, joué une seul fois, me plait bien plus qu’un 7th contient, dont je sais par avance que j’achète plus que ce que je pourrais utiliser. J’ai l’impression de faire du gaspillage du coup. Et puis si je suis éditeur, ce qui m’intéresse, c’est que le jeu soit acheté non? Qu’il soit joué une fois ou 4, je m’en fous quelque part (du moment que les gens ont passé un bon moment). Je suis complètement provocateur là, ceci est un appel à débattre 🙂 et à me contre dire.

    Et puis, comment on mesure la rejouabilité: un jeu joué 20fois, chaque partie durant 5 min, a t’il une meilleur rejouabilité qu’un autre où on en fait 5, mais où chacune dure une heure? C’est du coup paradoxal: si on prend les demeures de l’épouvantes par exemple: sur la V1, une fois joué on ne peut pas vraiment revenir sur un scénario. Alors que ceux de son extension l’appel de la forêt sont à priori re-jouable à l’envie. Pourtant, j’ai passé beaucoup plus de temps à jouer à la V1 qu’à l’extension.

     

    Sinon pour répondre à la question finale: ils sont nombreux les jeux que je pensais gardé à vie, et qui finalement ont quitté ma ludothèque: 7wonders et Mr Jack par exemple. mais il reste quelque indéboulonnables que je ne vois pas partir un jour (mais qui sait): Battlestar Galactica, Carcassonne, Dixit, Caminos, DOminion, race For the Galaxy, hanabi, Siam

  4. morlockbob 13/06/2018
    Répondre

    une  question  me taraude : pourquoi Petra ?

    • Shanouillette 14/06/2018
      Répondre

      C’est Mat qui s’est fait plaiz. La longévité toussa 🙂

      • Umberling 14/06/2018
        Répondre

        Les monuments attirent les touristes précisément parce qu’ils sont datés. Je trouve la dichotomie entre l’utilisation première et l’utilisation nouvelle intéressante et pas foncièrement débile quand on parle de jeu de société et de rejouabilité 😉

        • Firebird 15/06/2018
          Répondre

          Je m’étais posé la même question concernant les illustrations (la vignette de l’actu représente l’égypte ancienne). Merci pour l’explication !

          Mais tant qu’à pousser l’analogie, la photo de Petra aurait pu être la façade de El Khazneh (le Trésor) plutôt que El Deir (le Monastère). A moins que les joueurs soient vu comme une sorte de secte ludique à la dévotion absolue ?… Humm. Ah oui, ça marche aussi ! 😉

  5. Val 14/06/2018
    Répondre

    Smallworld, Seasons, Citadelle, Noe, Minivilles, Guilds of cadwallon, augustus ils sortent tj autant sinon plus avec le temps 😉

    Avec Not alone, Clank, paper tales, sheriff nottingham, looterz qui sont plus recent mais pas pret de quitter la table non plus 😉

    • Shanouillette 14/06/2018
      Répondre

      Merci ! C’est marrant après une partie de Clank je me suis dit que ça allait être toujours pareil et j’ai pas ressenti l’envie d’y revenir. Pourtant sa réputation aurait du me pousser à aller plus loin, et j’aime bien voir si je peux me contredire !

      • Umberling 14/06/2018
        Répondre

        Pareil…

      • atom 14/06/2018
        Répondre

        La réputation ou le buzz parfois ça déclenche l’effet opposé. On en attends trop et finalement ça crée de la déception. ça me fait ça sur Azul par exemple.

  6. steeve 14/06/2018
    Répondre

    on parle de rejouabilité …

    pourquoi on dit  pas jouabilité pour gameplay ?

    • Shanouillette 14/06/2018
      Répondre

      Je sais pas, pour moi, jouabilité a un sens plus restrictif, il permet en gros de parler de l’ergonomie, tandis que le gameplay c’est plus large, c’est un terme qui permet de parler des mécaniques et de leur alchimie (game design, ressentis du joueur). Pour moi on a pas réellement d’equivalent satisfaisant en français.

    • Umberling 14/06/2018
      Répondre

      Dans rejouabilité, on a « abilité », « capacité à ». Or le gameplay n’est pas stricto sensu la jouabilité mais « le jeu », ses sensations, mécanismes. Ce qui amène à confusion avec l’objet qui porte le gameplay : le jeu 😉

  7. Liopotame 14/06/2018
    Répondre

    Bonjour,

    Première fois que je commente, je vais donc commencer par vous féliciter pour votre ligne éditoriale. De chaque article, quelque soit le rédacteur, se dégage une simplicité, une humilité, qui font un bien fou. Avec toujours cette petite touche d’humour rafraîchissante, jamais lourde. Vous savez écrire des choses sérieuses sans pour autant vous prendre au sérieux. Et il n’y a qu’ici que je commence parfois à lire des articles de jeux que je sais qu’ils ne m’intéressent pas, et je finis malgré tout par les lire d’un bout à l’autre. Bravo !

    Concernant le sujet, il me semblait évident qu’un jeu rejouable c’est avant tout un jeu dont la configuration initiale n’est jamais la même. Et finalement… L’article m’a donné à réfléchir.

    Me viennent en tête 2 exemples de jeux qui auraient tout pour répondre à la définition de rejouabilité, et pourtant… Prenons Rajas of the Ganges. Tout est basé sur les jets de dés, les tuiles pour construire notre domaine changent à chaque partie. Malgré tout, j’avais l’impression qu’on n’avait au final que 3 lignes directrices : favoriser les points de prestige, favoriser l’argent, ou avancer sur la rivière. Certes les adversaires peuvent nous bloquer, nous obligeant à revoir la manière de s’y prendre, mais on arrive toujours à nos fins d’une manière ou d’une autre, ce qui donne assez vite l’impression d’en avoir fait le tour.

    Mon deuxième exemple serait Grand Austria Hotel, la configuration initiale est toujours différente (clients, empereur, objectifs), mais au final je l’impression de toujours faire la même chose : satisfaire des clients pour remplir des blocs de chambres de la meilleure manière pour répondre aux désirs de l’empereur et réaliser les objectifs.

    Paradoxalement, Azul ou Les Aventuriers du Rail ne paraissent pas très rejouables : peu d’actions différentes, configuration initiale toujours identique. Et pourtant, j’ai davantage l’impression qu’aucune partie ne ressemble à une autre. Il faut dire que l’interaction est plus directe, on peut obliger l’adversaire à revoir entièrement ses plans, contrairement à Rajas et GAH où l’on trouvera toujours un moyen de faire ce qu’on avait prévu.

    Donc la rejouabilité se trouverait-elle dans l’interaction ?

    Ce n’est pas aussi simple, car l’un de mes jeux préférés, justement car je trouve sa rejouabilité exceptionnelle, Marco Polo, propose une interaction froide. Mais ici c’est la mise en place du plateau toujours différente (cartes cités) et les personnages aux pouvoirs variés qui vont changer la manière dont on va appréhender la partie et qui vont amener la rejouabilité, cette envie d’explorer d’autres possibilités et façons de jouer. Contrairement à d’autres jeux, tels ceux cités, où la variabilité d’une partie à une autre semble plutôt artificielle.

    Au final je me rends compte que je n’ai pas vraiment de réponse à apporter, la question méritait bien d’être posée !

    • Shanouillette 14/06/2018
      Répondre

      Bonsoir et merci beaucoup pour ce premier message, qui, lui aussi, fait un « bien fou » :)) et en effet pour la suite de l’intervention, c’est clair que la façon dont l’interaction amène les joueurs à se réinventer (ou pas) aurait pu donner lieu à un édito entier. 🙂 Dans certains jeux, chacun déroule dans son coin, et on surveille l’autre uniquement pour voir son avancée sur la piste de score. L’adversaire met la pression mais ne vient pas casser nos plans ou nous forcer à nous réinventer. Au contraire certains jeux misent beaucoup de leur rejouabilité sur l’interaction. Si on laisse un joueur dérouler tranquille on sait qu’il gagnera, aussi devons-nous user de stratégies permettant à la fois d’avancer dans nos plans tout en forçant l’autre à sortir de sa zone de confort. Quand un jeu donne aux joueurs de quoi déranger / rebondir  intelligemment, les chemins vers la victoire se démultiplie et la rejouabilité augmente. C’est en effet, pour peu qu’on ait les bons joueurs, une rejouabilité bien plus intéressante que la rejouabilité de façade parfois proposée, comme tu le soulignes bien, avec les set-up qui diffèrent mais qui produisent in fine les exacts mêmes patterns.

      • Umberling 15/06/2018
        Répondre

        Je plussoie Shanouillette : ça fait du bien de lire ça ! Merci ! 🙂

      • eolean 15/06/2018
        Répondre

        C’est l’une des raisons pour lesquelles je suis toujours très méfiant concernant une extension. La plupart du temps, elles viennent ajouter un renfort à un mécanisme existant. Elles ne viennent pas modifier le jeu et les sensations qu’ils procurent.

        Il y a une citation d’einstein qui dit « la folie, c’est de faire toujours la même chose et s’attendre à un résultat différent »

        Quel est l’intérêt de jouer 2 fois au même jeu et d’y faire deux fois la même chose ?

        Le but de la rejouabilité est donc de nous pousser à faire des choses différentes pour qu’on (ré)-éprouve du plaisir à jouer au jeu.

        Pour ça, on peut miser sur l’interaction entre les joueurs, le hasard, les choix stratégiques, etc…

  8. Sedenta 21/06/2018
    Répondre

    Quand j’étais jeune, le manque d’argent était la principale rejouabilité de mes jeux 😀

  9. Angepastel 22/06/2018
    Répondre

    Bonjour à tous! Je suis à plus de 50 parties de Bruxelles et je ne m’en lasse toujours pas! Isle of Skye possède aussi une rejouabilité énorme! Mais les champions de la rejouabilité sont certainement pour moi les jeux abstraits de Kris Burm avec son projet GIPF!! Respect total!!

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