The British Way – La fin de l’Empire ouvre-t-elle les portes de la liberté ?

Si vous avez déjà lu quelques uns de mes articles, vous savez que j’aime beaucoup la série COIN de l’éditeur GMT Games. Pour rappel, il s’agit de jeux d’affrontement qui modélisent des insurrections et des contre-insurrections. Depuis la parution du premier volume, Andean Abyss, en 2012, les itérations de cette série de jeux ont été nombreuses : je vous ai déjà parlé de Cuba Libre et de Colonial Twilight, mais il faut savoir qu’en tout et pour tout, il y a actuellement quinze jeux publiés ou en précommande.

D’un jeu à l’autre, la série COIN a montré qu’elle était capable de se renouveler, en épousant des thèmes aussi variés que la Guerre des Gaules (Falling Sky) et les invasions des Îles britanniques par les Scots et les Saxons (Pendragon), la résistance non violente (Gandhi), la Guerre civile américaine (Liberty or Death) et, prochainement, d’hypothétiques révoltes sur Mars en 2250 (Red Dust Rebellion). Récemment, mon attention a été attirée par la publication de The British Way, premier jeu d’une série annexe : la COIN Multipack.

De quoi s’agit-il, au juste ? The British Way, premier volume de cette nouvelle série, contient quatre jeux différents pour deux joueurs : Palestine, Malaya, Kenya et Cyprus. On peut y jouer séparément ou au cours d’une campagne dans laquelle les Britanniques affrontent les Insurgés (Irgun, MCP, Mau Mau et EOKA). La nouveauté introduite par le Multipack est simple : les quatre jeux partagent les pièces en bois et certains jetons en carton. Les deux plateaux sont double-face. En revanche, pour chaque jeu, il y a des cartes, des aides de jeu et des jetons spécifiques.

D’un point de vue thématique, ce premier Multipack est justifié d’une part par le fil rouge de la fin de l’Empire colonial britannique et, d’autre part, par la volonté de son jeune auteur et doctorant en science politique, Stephen Rangazas, de relier ces quatre conflits dans une perspective comparativiste : par la représentation sur le plateau, il s’agit non seulement de saisir les spécificités de mouvement insurrectionnel et de la réaction du gouvernement Britannique, mais aussi de comparer les modes d’action et de répression d’un conflit à l’autre.

Pour vous parler de ces quatre jeux, je vais d’abord vous présenter quelques généralités sur le contexte historique et l’idée centrale défendue par The British Way. Ensuite je regrouperai les jeux à partir de leurs proximités mécaniques et thématiques – Palestine et Cyprus, Malaya et Kenya. Je terminerai mon article par une conclusion sur l’ensemble de ces quatre jeux.

 

Un aperçu partiel du matériel de jeu (photo de Stephen Rangazas, sur BGG).

 

La fin de l’Empire britannique

La période représentée dans The British Way commence en 1945, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, et s’achève en 1960 avec la reconnaissance de l’indépendance de la Malaisie et de Chypre. Avec la fin de la guerre et l’effort économique réalisé par les États qui y ont pris part, le contexte était favorable aux luttes décoloniales. La Grande-Bretagne n’était en effet pas prête à engager des moyens démesurés pour réprimer ces luttes et, d’autre part, l’Assemblée des Nations Unies gardait à l’œil le déroulement de certains de ces conflits.

C’était notamment le cas du tout premier. En Palestine, la cause principale du conflit résidait dans les limites à l’immigration juive imposées par les Britanniques. D’un côté, des mouvements politiques modérés tentaient de poursuivre les négociations et de faire pression sur le gouvernement, en faisant appel à l’opinion internationale et, en particulier, aux États-Unis.

Mais, de l’autre côté, l’Irgoun, groupe résistant de l’extrême-droite sioniste, allié avec le Haganah et le Lehi, menait des actions de sabotage et des attentats terroristes d’envergure – le plus célèbre d’entre eux, c’est celui de l’hôtel King David. Avec cette pression supplémentaire et l’inefficacité avérée de leurs méthodes contre-insurrectionnelles, les Britanniques mirent fin à l’occupation de la Palestine en 1947 sans intervenir dans la guerre civile et ethnique entre les Arabes et les Juifs de 1948.

Le plateau de Palestine, premier jeu de la campagne.

 

Un autre conflit qui avait reçu l’attention de l’ONU, c’est celui qui se déroula à Chypre (1955-1959), entre les Britanniques et l’EOKA, organisation paramilitaire de la droite nationaliste qui réclamait l’union politique avec la Grèce. En mêlant des attaques terroristes et des sabotages dans les villes chypriotes, et des opérations de guérillas dans les montagnes, l’EOKA parvint à attirer l’attention internationale. Avec les tensions croissantes entre les Grecs et les Turcs, ce conflit s’acheva par le retrait des Britanniques. Encore aujourd’hui, les Britanniques ont gardé deux bases militaires à Chypre, Akrotiri et Dhekelia.

Les deux conflits les plus sanglants de The British Way sont cependant Malaya et Kenya, dont l’opinion internationale s’inquiétait beaucoup moins. D’après les données de David French (citées dans le Playbook du jeu), ce sont quasiment dix milles insurgés, cinq milles civiles et quatre milles cinq cent membres des forces britanniques qui ont perdu la vie en Malaisie. Au Kenya, les décès de civils sont chiffrés à vingt cinq milles, et entre dix milles et vingt milles pour les insurgés.

En Malaisie, le Parti Communiste (MCP), qui s’était allié avec les Britanniques pendant la guerre pour résister à l’occupation du Japon, commença à partir de 1948 à réclamer plus de droits pour les travailleurs, tout en préparant une insurrection de plus grande ampleur dans les campagnes. La répression des Britanniques se traduisit par des fouilles et des punitions collectives, ainsi que par la concentration des populations soupçonnées d’avoir des sympathies pour le MCP dans des camps d’internement où elles pouvaient être surveillées de près. Faute de soutien extérieur, le MCP dut battre en retraite à la frontière avec la Thaïlande et, lors de l’obtention de son indépendance en 1957, ce sont les modérés qui prévalurent.

L’insurrection des Mau Mau au Kenya, mouvement nationaliste revendiquant la libération pour le peuple des Kikuyus, l’ethnie majoritaire du pays, fut limitée par un manque de moyens économiques et militaires récurrent, malgré le soutien de la population. Depuis le Mont Kenya et l’Aberdare, les Mau Mau menaient des offensives isolées et s’en prenaient également aux loyalistes.

Le plateau de Kenya à la fin d’une partie où, étrangement, les Britanniques ont fini par se détourner de Nairobi pour se concentrer sur la campagne et les réserves peuplées par les Kikuyus.

 

La répression des Britanniques agit sur deux fronts : le combat militaire dans les montagnes, pour détruire les bases des Mau Mau et le déplacement et la détention massives des Kikuyus sympathisants des Mau Mau. D’un point de vue politique, cette répression eut des répercussions au Parlement anglais, grâce à l’action de Barbara Castle et d’autres membres du Parti travailliste. Elle se solda par une défaite des Mau Mau et par l’ascension du modéré Jomo Kenyatta lorsque l’indépendance du pays fut déclarée, en 1963.

 

La thèse de The British Way et sa finalité

Stephen Rangazas, l’auteur de The British Way, est un jeune chercheur universitaire. Le sujet de recherche de sa thèse de doctorat porte sur les violences perpétrées sur les populations civiles lors de guerres civiles et de conflits insurrectionnels. Pour réaliser ce multipack, il a donc effectué des recherches documentaires sur la fin de l’Empire britannique et la décolonisation, à partir des derniers travaux universitaires réalisés à ce sujet.

La thèse qui est représentée et défendue dans son jeu est que, contrairement à l’idée répandue d’une décolonisation britannique pacifique par contraste avec la décolonisation française et belge, la décolonisation de la Palestine, de la Malaisie, du Kenya et de Chypre a comporté une répression violente et cruelle des insurgés. Des atrocités ont également été commises sur les populations civiles. Cette thèse prend appui sur des recherches récentes d’historiens comme David French, auteur de l’étude éponyme du jeu, sur la décolonisation de l’Empire britannique entre 1945 et 1967.

Au travers des quatre conflits, les mécaniques de ces jeux nous montrent que le gouvernement britannique n’a pas plus conquis les cœurs et les esprits des populations locales que les Français en Algérie ou les Belges au Congo. Palestine, Malaya, Kenya et Cyprus donnent à voir qu’il y avait chaque fois une part plus ou moins importante de violence dans la répression de ces luttes décoloniales.

La finalité du multipack – et, comme nous le verrons, mon expérience de jeu le confirme – n’est pas de rassembler des jeux similaires, mais de modéliser chacune de ces luttes décoloniales par des mécanismes appropriés, aussi bien du point de vue des populations que du gouvernement. Dans Malaya et Kenya, on retrouve alors les guérillas d’un grand nombre de jeux COIN, avec un mode d’action parfois similaire à d’autres volumes (Cuba Libre, Fire in the Lake, Colonial Twilight) – c’est particulièrement le cas pour Malaya, le plus classique des quatre jeux.

En revanche, Palestine et Cyprus modélisent l’action terroriste des Irgun et de l’EOKA et, de ce fait, comportent des différences significatives : l’objectif de ces factions sera de répandre la terreur sur le plateau et de saboter les infrastructures de transport et les centres économiques. Ils mènent à bien leurs attaques en obtenant certains résultats aux dés et ils peuvent accroître leurs chances de réussite en utilisant une cache d’arme – cela remplace les bases des insurgés. L’action du gouvernement qui repose en grande partie sur les forces de police consistera souvent à instaurer le couvre-feu ou à espionner les terroristes pour que sa répression soit plus efficace.

Avec de la chance aux dés pendant deux Attaques terroristes, les Irgun sont arrivés à placer quatre jetons Terreur à Tel Aviv. Chaque pion Terreur dans une ville donne un avantage de 3 PV aux Irgun pendant la phase de Propagande.

 

Palestine et Cyprus

J’ai d’abord découvert ce COIN Multipack en jouant à Palestine sur Vassal, quelques jours après la publication officielle du module par GMT Games. Il m’avait d’abord donné l’impression d’un COIN excessivement simplifié, où la stratégie cédait le pas au hasard, du fait de l’importance des lancers de dés pour la faction du mouvement terroriste nationaliste des Irgun. Il me semblait que le jeu se résumait, pour les Britanniques, à tenter de limiter les dégâts, et, pour les Irgun, à espérer d’avoir de la chance aux dés.

En réalité, Palestine est plus subtil que cela, mais il faut y jouer deux ou trois fois pour réaliser les choix stratégiques qui s’offrent aux joueurs. Tout d’abord, il faut bien comprendre que l’objectif du Britannique n’est pas d’accumuler un nombre précis de points – dans le jeu, ils sont mesurés par une seule piste de Volonté Politique (Political Will) qui oscille entre 1 et 20 – mais d’éviter que la piste descende à zéro. Cela veut dire que si, à la troisième Propagande, la Volonté Politique est supérieure à zéro, les Britanniques gagnent.

Pour diminuer la Volonté Politique, les Irgun mènent des attaques terroristes et des sabotages dans les provinces, les campagnes et le réseau ferroviaire. La plupart du temps, ils concentreront leurs sabotages et leurs attaques dans les villes et sur les rails, car chaque marqueur Sabotage et chaque marqueur Terreur présent sur ces espaces font baisser la piste de points de deux ou trois points. Autant dire que, si les Britanniques ne font pas attention à leurs villes et au réseau de train, la situation peut rapidement dégénérer.

Si je le compare aux autres COIN auxquels j’ai joués, Palestine me semble simplifié mais pas dénué d’intérêt stratégique, bien que le calcul des points indique clairement aux joueurs sur quelles zones de la carte il vaut mieux concentrer ses efforts. J’ai fait plusieurs parties et j’ai remarqué que, contrairement aux apparences, les Britanniques peuvent vraiment compliquer la vie aux Irgun si on joue bien cette faction. J’ai également beaucoup apprécié le fait que la simplification des mécanismes de jeu ne se faisait pas au prix de la cohérence avec le thème que Palestine épouse de près.

 

Le plateau de Chypre à la fin d’une partie au cours de laquelle les Britanniques auront accumulé énormément de jetons de Renseignement (Intel Chit) sans avoir l’occasion de les utiliser très souvent. Comme pour Palestine, si la piste de points ne descend pas à zéro, les Britanniques gagnent.

 

En revanche, je suis moins convaincu par Cyprus – mais c’est aussi le jeu du Multipack auquel j’ai joué le moins. Il est probable que d’un point de vue thématique, les mécanismes soient tout à fait cohérents. C’est plutôt au niveau de l’expérience de jeu que je suis moins satisfait. Sans rails et avec un plateau composé majoritairement de villes, il m’a semblé que l’avancement de l’EOKA était difficile à contrer. Or, les retours de certains joueurs semblent indiquer le contraire, si bien qu’une variante pour équilibrer le jeu en faveur des Insurgés a été proposée.

Je n’ai probablement pas assez joué à Cyprus pour saisir la diversité des choix stratégiques qui s’offrent aux Britanniques, mais je dois avouer que je le trouve trop épuré et simplifié pour avoir envie d’y rejouer plus. En revanche, il est probable que Cyprus constitue une excellente porte d’entrée au système COIN, dans la mesure où les Opérations et les Activités Spéciales de chaque faction sont faciles à assimiler et comportent peu de cas particuliers.

 

Dans Palestine comme dans Cyprus, les Couvre-feux (Curfews) empêchent les Insurgés de recruter de nouvelles cellules terroristes et, dans certaines circonstances, permettent aux Britanniques de repérer les cellules qui voyagent, en les mettant à découvert (on retourne alors le cylindre sur le côté avec l’étoile).

 

Malaya & Kenya

C’est peut-être pour mes inclinations politiques ou parce que les insurrections de guérillas m’intéressent plus que les organisations terroristes, mais, sans disqualifier Palestine qui est aussi un très bon jeu, Malaya et Kenya sont mes favoris de ce Multipack. Ne me demandez pas lequel je préfère, je ne saurais pas vous répondre car ils m’intéressent et me plaisent pour des raisons différentes.

Mais d’un point de vue historique, Malaya et Kenya sont également les jeux les plus difficiles à jouer car la répression de l’Empire britannique contre les populations locales a été particulièrement cruelle et a causé plusieurs dizaines (voire centaines, suivant les estimations) de milliers de victimes, surtout au Kenya. On ne jouera donc pas la faction des Britanniques avec le cœur léger, bien au contraire. Certaines actions à disposition des Britanniques (Resettle, dans Malaya, et Relocate, dans Kenya) et reproduisent d’ailleurs avec précision leur stratégie de déplacements massifs des populations locales, à des fins de contrôle et de répression.

Celles et ceux qui connaissent Colonial Twilight auront peut-être une impression de familiarité à la découverte de Malaya. Non seulement parce que les Opérations et les Activités Spéciales des factions ont quelques ressemblances, mais aussi en termes d’expérience de jeu. Il est vrai que le plateau de Malaya comporte moins de provinces et que le Malayan Communist Party ne surgit pas partout sur le plateau avec la même rapidité que le FLN.

 

Pour que le MCP remporte la partie, il suffit que le Political Will soit compris entre 0 et 2 pendant une phase de Propagande. Pour les Britanniques, le PW doit être compris entre 18 et 20.

 

Mais la sensation de tir à la corde entre les Britanniques et le MCP est bien présente et, à chaque action, on a encore plus l’impression de prendre une décision qui va avoir des conséquences mesurées, mais importantes sur le déroulement de la partie. Les changements significatifs sur le plateau de Malaya se préparent petit à petit, carte après carte, sans précipiter les choses.

Les possibilités stratégiques sont également plus nombreuses que dans Palestine et Cyprus : dans Malaya et Kenya, une part importante de Volonté Politique peut être ajoutée ou soustraite par le contrôle des Provinces et des Villes, ainsi que par leur Soutien ou Opposition au pouvoir des Britanniques. Le résultat d’une attaque terroriste (Terror) n’est pas soumis à un lancer de dés, ce qui est en revanche le cas pour les attaques (Attack), comme dans d’autres COIN.

Alors que, dans Malaya, ce sont les Britanniques qui peuvent se retrouver à court de ressources, dans Kenya, la pénurie de ressources posera régulièrement problème aux Mau Mau. Historiquement, cela s’explique par un soutien international faible sinon inexistant, par la difficulté à rallier les locaux au mouvement et par la rareté de l’approvisionnement en armes. Confrontés à cette difficulté, les Mau Mau chercheront à garder un réseau de guérillas cachées ou de provinces opposées aux Britanniques, entre leurs bases et Nairobi pour gagner des ressources avec l’Activité Spéciale Supply.

Avec l’Activité Spéciale Oath, les Mau Mau peuvent inciter les Réserves à s’opposer aux Britanniques s’ils ont une guérilla cachée.

 

Ce que j’ai beaucoup apprécié dans Kenya, c’est que les changements de l’état du plateau peuvent se produire très rapidement. Cela donne au jeu une allure plus nerveuse et en apparence moins réfléchie que Malaya, tout en exigeant une réflexion stratégique sérieuse, aussi bien de la part des Britanniques que des Mau Mau. Il sera difficile, pour les Mau Mau, de garder une présence dans la capitale Nairobi. En revanche, ils pourront s’étendre plus rapidement dans les provinces, et susciter l’opposition facilement dans les Réserves de Kikuyus.

Si, d’autre part, les Britanniques délaissent les Réserves ou les Provinces, ils pourront certes garder Nairobi, mais l’opposition de la population et la terreur semée par les attaques des Mau Mau fera baisser la Volonté Politique de façon significative. Enfin, j’apprécie tout particulièrement l’Activité Spéciale Raid permettant aux Mau Mau de se déplacer depuis la Montagne et d’effectuer une Opération au cours du même tour de jeu. Les Mau Mau utilisaient en effet les montagnes comme cachettes, réserves d’armes et bases depuis lesquelles mener des attaques vers les provinces environnantes.

 

Quatre fois plus de COIN, quatre fois plus de plaisir ?

En toute honnêteté, je suis ravi de la publication de ce premier COIN Multipack car, en plus de comporter quatre jeux différents, il résout quelques difficultés que je rencontre en tant qu’amateur de la série. Étant conçu pour deux joueurs, il est beaucoup plus facile de jouer à ce Multipack régulièrement qu’aux COIN pour trois ou quatre joueurs.

L’expérience de jeu est variée d’un jeu à l’autre : Palestine, Malaya, Kenya et Cyprus viennent chacun avec des possibilités stratégiques différentes et avec un nombre de cartes Événement suffisamment important pour introduire de la variabilité d’une partie à l’autre. La durée d’une partie est également très raisonnable : comptez une heure et demie environ pour une partie entre joueurs expérimentés ou un peu plus de deux heures si l’un des joueurs découvre le système. Pour une campagne, il faudra compter donc entre six et huit heures.

En termes de nouveautés mécaniques, si The British Way s’inscrit en continuité avec la série, il n’en est pas une répétition pure et simple. Malaya est le plus classique du Multipack, Kenya comporte des variations très intéressantes, Palestine et Cyprus viennent avec une part plus importante de nouveautés pour refléter les spécificités de l’action terroriste des Irguns et de l’EOKA, tout en rendant le système plus accessible aux novices.

 

Le plateau de Cyprus au début d’une partie.

 

J’apprécie également cette dernière mouture de la piste d’initiative pour deux joueurs qui garde l’esprit de la piste conçue par Brian Train pour Colonial Twilight, tout en la simplifiant grandement. Nous avons trois possibilités (Opération Limitée, Événement et Opération avec Activité Spéciale) et, en fonction du placement de notre pion de faction, nous serons premier ou deuxième joueur au tour suivant.

De même, la possibilité d’enchaîner les jeux dans une campagne qui n’alourdit pas les règles des jeux, est très intéressante d’un point de vue thématique : nous pouvons ainsi parcourir le déclin de l’Empire colonial britannique, depuis le retrait en Palestine jusqu’à Chypre – où les Britanniques ont gardé des bases militaires encore aujourd’hui – et mesurer les effets des politiques coloniales sur le long terme.

 

Le plateau de la campagne mesure le Prestige Impérial à la fin de chaque jeu. Celui-ci va augmenter ou diminuer en fonction du résultat obtenu par les Britanniques à la fin de chaque partie.

 

Le thème historique me semble particulièrement bien représenté aussi bien dans les jeux que dans les livrets de règle et le livret de campagne. Des explications historiques sont fournies pour les événements de chaque carte et Stephen Rangazas a aussi inclus plusieurs essais, dans lesquels il s’est concentré aussi bien sur la politique et la stratégie des Britanniques, que sur leurs pratiques de déshumanisation et de déplacement des populations. Une riche bibliographie est donnée pour le Multipack dans son ensemble, comme pour chaque jeu.

À ma connaissance, GMT Games n’est pas directement engagé pour produire des jeux moins polluants et plus responsables d’un point de vue environnemental. Cependant, l’idée du Multipack est intéressante : au lieu d’avoir quatre jeux séparés avec leur matériel respectif, nous trouvons pas moins de quatre jeux dans une seule et même boîte. Deux plateaux recto-verso, des cubes en bois et des pions en carton communs, mais aussi des decks de cartes et des pions spécifiques pour chaque jeu.

Très satisfait de ce Multipack (hormis pour Cyprus pour lequel j’ai quelques réserves), je garderai à l’œil les prochaines publications de Stephen Rangazas et je surveillerai l’avancement de son deuxième COIN Multipack : The Guerrilla Generation devrait nous amener en Amérique Latine pendant la Guerre froide.

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Au moment où je termine cet article, le conflit israélo-palestinien continue malheureusement de faire de nouvelles victimes. Dans ce contexte, il n’a pas été facile de « jouer » à Palestine depuis l’intensification de ce conflit et il me semble juste et nécessaire d’exprimer ici une pensée pour toutes celles et ceux qui sont décédé(e)s à cause de cette guerre, et tout particulièrement pour les enfants.

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3 Commentaires

  1. saka-saka 07/12/2023
    Répondre

    Bravo pour ce travail fouillé et documenté ! Hâte d’y jouer en physique, puisque je suis trop une quiche pour le faire fonctionner sur Vassal… 😉

  2. El Duderiño 07/12/2023
    Répondre

    Merci !

    Ne serait-ce pas Vassal qui serait trop une quiche pour le faire fonctionner sur Saka-saka ? 😛

    • saka-saka 07/12/2023
      Répondre

      Si, sans doute ! En tout cas, Vassal ne m’aime pas, et je le lui rends bien !

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