SOLO IS BEAUTIFUL #5 [Village Attacks, Blackout: Hong Kong, Fini !, Hit Z Road]
2019 est arrivée et les jeux solo continuent de débarquer. Comme d’habitude, on vous présente des nouveaux, des anciens, de la figurine et de la carte histoire de varier les plaisirs. GO !
BLACKOUT: HONG KONG
- Auteur : Alexander Pfister
- Type : 1 à 4 joueurs
- Sortie : 2018
- Mécanique de solo : Battre un scénario + Battre son score
- Durée : 1h + 2 minutes d’installation
- Thème : Contemporain
- Place sur la table : Jouable sur un tapis de 90×90
- En résumé : Gestion de main, gestion de ressources, deckbuilding, points de victoire
Sorti fin 2018 en version anglaise et repéré lors du salon d’Essen, Blackout: Hong Kong est un jeu de gestion solitaire jouable à plusieurs (Atom nous en parle dans son Just Played ici). Alexander Pfister est formel, en 2020 Hong Kong va subir de plein fouet une panne générale. À nous, citoyens concernés, de rebrancher les fusibles quartier par quartier et de glaner un maximum de points de victoire au passage.
Comment fait-on pour rallumer la lumière en solo? Niveau règles, peu de changement avec un aménagement qui indique que les Plans d’urgence n’ont pas d’effet de complétion et qu’ils resteront sur notre plateau plutôt que d’atterrir dans notre zone d’objectifs validés.
La fin du jeu ne change pas non plus, c’est-à-dire qu’elle intervient lorsque on ne peut plus réapprovisionner le marché avec de nouvelles cartes.
Pour jouer en solo, on a deux possibilités : jouer une partie classique ou se frotter à la campagne proposée. Elle se compose de 5 scénarios, tous compatibles en solitaire et chacun dispose de conditions de départ différentes (une carte « Plan d’urgence » imposée), d’une mise en place spécifique (un nombre de cartes plus ou moins important dans la pioche) et d’une ou deux conditions de fin à réaliser obligatoirement pour calculer notre score et connaître notre performance dans un classement de type « 60pts = 1 étoile ; 75pts = 2 étoiles…). Une fois les 5 scénarios achevés, le cumul du nombre d’étoiles obtenues nous donne le classement final de la campagne.
Côté mécanique et sensations de jeu, rien à dire, le jeu tourne bien et il est limpide dans le déroulement des 8 phases de jeu. Réflexion et anticipation sont bien présentes et on s’attelle à la tâche avec ardeur. Comme dans un jeu à l’allemande, cette mécanique de précision vient compenser le thème, assez anecdotique et austère dans les tons utilisés (jouer plus sur les clair-obscurs pour apprécier les détails des illustrations ?).
Et côté rejouabilité ? Aïe, c’est là que le bât blesse. Le système de scénarios est bienvenu mais aurait gagné à être plus original en terme d’objectifs/conditions de victoires. Car, le jeu est très mécanique avec ses 8 phases consécutives. On joue un peu de la même façon d’une fois sur l’autre et à l’exception d’un des scénario de la campagne, notre stratégie n’est que peu impactée par ces objectifs.
Je pense (j’espère) que la sphère des fans va vite concocter des scénarios solo complémentaires aux conditions de victoires rocambolesques tant le jeu s’y prête, mais l’idée n’a pas été poussée jusqu’au bout par l’auteur.
En conclusion, je dirais que Blackout: Hong Kong est un jeu parfaitement huilé où la réflexion est bien présente. Calculer ses ressources, anticiper celles qu’on aura au prochain tour est très plaisant mais répétitif. Passé la barre des 6-7 parties, on s’en refera une de temps en temps parce qu’il reste un jeu agréable mais sa belle fluidité et la scénarisation partielle n’apporte pas le renouvellement nécessaire pour enchaîner les parties en solo.
HIT Z ROAD
- Auteur : Martin Wallace
- Type : 1 à 4 joueurs
- Sortie : 2016
- Mécanique de solo : Survie + Battre son score
- Durée : 15-20 min + 3 min d’installation
- Thème : Zombies
- Place sur la table : jouable sur un tapis de 60×60
- En résumé : Parcours, jets de dés
Martin Wallace est un des « grands » du monde ludique, réputé pour ses jeux exigeants et experts. Mais attention ça n’est pas parce qu’on s’appelle Martin Wallace qu’on a pas le droit de faire du léger de temps en temps ! Et à juste titre, Hit Z Road est presque un jeu apéro voir d’ambiance sur le thème d’un road-movie où il faut survivre pour atteindre l’Ouest des USA à coup de jet de dés pour défourailler du zombie.
La mise en place du solo est quasiment la même qu’à 2 joueurs en composant 3 chemins de 2 cartes. Cependant, les cartes ne sont pas toutes visibles : les deux cartes du premier chemin sauf à se cachée, une sur deux pour le second chemin et toutes les deux visibles pour le 3ème chemin. Il y aura une « prime » de 2 ressources à s’aventurer sur le premier chemin, aucun gain sur le chemin du centre et une perte de deux ressources avant même de débuter le 3ème chemin. Il y a donc une prime de risque à la prise de risque 🙂
On va donc sélectionner un chemin parmi les 3 en fonction des gains/pertes estimés (combats, pertes de ressources ou de membres de l’équipe). On résout la première carte puis la suivante, enfin on défausse les 4 cartes qui n’ont pas été jouées, on recréer 3 chemins de 2 cartes et ainsi de suite jusqu’à épuisement de la pioche.
Comme dans le jeu multi, la tension va venir de la raréfaction des ressources et du poids du hasard (peu contrôlable) dans la résolution des combats à coup de dés. Mais selon moi il manque l’essentiel : l’ambiance.
Hit Z Road est un jeu où il faut faire vivre sa partie, vanner les autres sur le chemins pourri qu’on leur laisse, les provoquer, se moquer, mettre l’ambiance quoi! Sinon il est d’une froideur implacable et on enchaîne juste les jets de dés et on subit notre malchance… Le problème c’est qu’ici cette ambiance est absente vu qu’on joue seul. Et comme personne n’est là pour nous mettre la pression sur les chemins accessibles, on hésite peu sur le chemin à parcourir, puis on applique les conséquences (gains, combats) et recréer les 3 chemins suivants. En terme de sensation de jeu, on a pas l’impression de rentrer dans le jeu ce qui rend le tout fade et mécanique, malgré les illustrations réussies.
Pour renouveler un peu les parties, il aurait été intéressant d’ajouter quelques cartes objectifs, de type « sauver au moins 3 personnes, fuyez impérativement les hordes… » Cela aurait donné un peu de peps au jeu, mais non, un seul et unique niveau de difficulté, pas de conditions spécifiques…
Ajouté à cela un objectif de fin de partie façon « Battre son score » qui n’est pas foncièrement le plus intéressant dans les jeux (une fois qu’on a fait notre meilleur score, on fait quoi?) et on obtient un jeu au solo décevant.
En résumé, vous l’aurez compris, Hit Z Road en solo est un jeu mécanique, répétitif et qui manque cruellement de ce qui en fait le sel quand on joue à plusieurs. Dispensable.
FINI
- Auteur : Friedemann Friese
- Type : 100% solo
- Sortie : 2017
- Mécanique de solo : battre un niveau de difficulté
- Installation/rangement : moins d’une minute
- Durée : 25 minutes
- Thème : Inexistant
- Place sur la table :
- En résumé : carte à effets, jeu de collection de cartes, mémoire
Fini est le deuxième jeu 100% solo de Friedemann Friese après les très plébiscité Vendredi sorti en 2011 (voir mon test dans le Solo 1). Malgré son âge vénérable, ce dernier occupe encore le top 10-20 jeux solos les plus joués par la communauté des solistes francophone et anglo-saxonne.
Friedemann Friese retente le coup du jeu en solitaire en nous glissant dans la peau de… nous-même, puisqu’il n’y a pas vraiment de thème ni de personnage à incarner. Il y a bien sur les illustrations de cette femme rousse aux grands yeux ronds mais bon…
Peu importe, nous sommes là pour classer des dossiers ! YEAH ! Et pour cela nous avons 48 cartes à reclasser dans l’ordre croissant de la carte 00:01 à la 00:48. Si c’est le cas la partie est gagnée. Simple non?
Le twist du jeu c’est que les cartes ne sont mélangées à aucun moment pendant la partie mais placées dans l’ordre où nous les défaussons. Cela veut dire que pour reclasser les cartes dans l’ordre nous allons avoir besoin d’utiliser à bon escient les pouvoirs des cartes en dépensant des bonbons afin de les activer. Nous recevons ces bonbons en début de jeu, à chaque fois qu’une carte « bonbon » est révélée ou lorsque 3 cartes consécutives ou plus (ex : 26, 27, 28) sont défaussées. Un tour de jeu s’achève lorsque la pioche a été entièrement passée et que la carte 00:48 est défaussée. A ce moment, on défausse une tasse de café qui nous sert de compte-tours et nous avons 8 tours pour tout classer, sinon, c’est le placard.
En fonction de la difficulté choisie, nous aurons plus ou moins de bonbons et de tasses de café pour finir notre classement de dossiers.
Sans trop rentrer dans la mécanique du jeu (mais un peu quand même), il faut parler des 3 zones où nous allons poser des cartes : quand on commence un tour, on révèle 3 cartes de la pioche dans la zone qu’on appelle le « Présent ». On les arrange comme bon nous semble et si on le souhaite (et qu’il nous en reste) on peut utiliser des bonbons pour activer la capacité des cartes que nous avons devant nous. Une fois nos actions réalisées, les cartes de la zone Présent sont envoyées dans le Passé. C’est-à-dire qu’elles sont toujours visibles mais on ne peut interagir avec qu’en utilisant les capacités de la nouvelle série de 3 cartes qu’on repioche dans le Présent. La troisième zone est l’Avenir. On y envoie des cartes depuis le Présent via des capacités de cartes.
Ainsi se met en place le roulement des tours : Présent > Activation des capacités avec des bonbons / Éventuellement Avenir selon les capacités des cartes > Passé > Sous la pioche.
Bon j’espère que j’ai perdu personne. C’est vrai qu’à la lecture des règles, on ne sait pas trop où M. Friese veut nous mener. Malgré l’effort de mettre beaucoup d’exemples dans la règle, la difficulté commence dès la compréhension des mécanismes.
Mieux vaut éviter de lire le livret en diagonale au lit le soir. On préférera déballer tout le matériel pour simuler quelques tours. Une fois les concepts assimilés, Fini roule tout seul.
La stratégie à mettre en place est très circonstancielle à nos cartes et va dépendre de notre stock de bonbons. Sans eux, on se condamne à faire défiler les cartes du Présent vers le Passé sans pouvoir rien y faire et se sentir démuni. À nous de bien gérer nos ressources sucrées pour éviter la panne sèche et ne pas les « cramer » à la première occasion.
Ce qui fait malgré tout l’intérêt de Fini ! C’est un je-ne-sais-quoi qui fait qu’on va enchaîner les parties (j’en ai plus de 25 au compteur). Il n’y a pas vraiment de thème mais comme le jeu est bien huilé, on a envie de le battre avant de changer de niveau de difficulté. La rejouabilité du titre vient du challenge proposé, corsé.
Niveau place, Fini ! Se joue sur un tapis de 60×60 pour des parties de 30-35 minutes en moyenne (mais plutôt 45-50 minutes quand on le découvre) et un temps d’installation ridicule (mélanger le paquet, mettre la carte 00:48 sous la pioche et c’est parti).
En résumé, je dirais que Fini ! est un jeu de patience 100% solitaire au thème absent, très mécanique mais fluide bien que déroutant à la lecture de la règle et lors de notre première partie. On peut même avoir la tentation de penser « tout ça pour ça ? » mais avec l’expérience et si on ne s’arrête pas à une première impression en demi-teinte, il s’avère être un jeu de réussite plaisant où nos actions seront dictées par des anticipations, des intuitions et où les résultats ne sont visibles qu’au tour suivant. De plus, la difficulté étant très présente, cela peut donner l’impression de ne rien contrôler, et détourner des joueurs qui prennent plaisir dans l’immédiat. Mais il serait dommage de passer à côté d’un jeu malin, retors et petit format.
VILLAGE ATTACKS
- Auteur : Adam Smith
- Type : 1 à 5 joueurs
- Sortie : 2017
- Mécanique de solo : battre un scénario, gérer plusieurs personnages
- Durée : Dépend du scénario + 15 minutes d’installation
- Thème : médiéval-fantastique
- Place sur la table : jouable sur un tapis de 90×90
- En résumé : personnages à pouvoirs, plateau modulaire, figurines
C’est mauvais, des villageois en colère. À trop les harceler, ils mettent des gilets jaunes montent des expéditions punitives et direction le château maudit le plus proche pour le débarrasser des monstres qui terrorisent les alentours. Oups, pas de chance, les monstres c’est nous !
Pour la faire courte, Village Attacks (le Just Played est ici) est un jeu améritrash (donc avec des dés) où on incarne des monstres tentant de repousser des hordes de paysans rageurs tout en atteignant un objectif fixé par le scénario choisi… et accessoirement sauver votre peau (fripée ou squameuse, ou écailleuse…).
Dans les faits, le jeu ressemble beaucoup à un MOBA (Multiplayer Online Battle Arena) façon League of Legends ou Dota 2, puisqu’il en reprend l’essentiel des caractéristiques : des « rôles » orientés (dégâts/tank/support) à faire monter en puissance, des compétences à acquérir et améliorer, des vagues de « minions » qui rushent vers le cœur du château pour le détruire, des pièges à poser…
Et sinon le solo ? Inutile de chercher une section Solo dans la règle puisque, la mécanique fait en sorte que notre mode préféré est complètement imbriqué dans le jeu : on ajuste seulement le nombre de paysans qui apparaissent à la fin du tour en fonction du nombre de monstres joués (2 au minimum). Le tour de jeu commence par l’action des monstres, suivi du tour des villageois qui attaquent et bougent, puis recommence jusqu’à la réussite ou la défaite du scénario. Donc qu’on soit 1 ou 5 joueurs, les phases ne changeront pas.
Les 14 scénarii sont donc tous jouables en solo comme en multi-joueur Les cinq premiers font office de tutoriel et ce n’est qu’à partir du scénario 6 que le joueur joue avec tous les éléments du jeu. Attention cependant, les 4 derniers scénarii nécessitent l’extension Horror of the Sand pour être joués (vous la sentez, la ribambelle d’extensions à venir ?) mais sont adaptables avec le matériel de la boîte de base.
Concernant la règle, sa lecture est assez évidente et limpide. On comprend que le jeu a été épuré pour laisser un maximum de place à la réflexion et la planification de nos actions. Donc attention aux apparences, on est pas dans un défouloir bête et méchant mais dans un jeu où la coopération et la stratégie sont centrales.
En terme de sensations de jeu, on prend plaisir à gérer nos horreurs sur pattes et à jouer le mauvais rôle. La montée en puissance est intéressante et les compétences qu’on débloquent oriente le gameplay de notre personnages. Pour parler chiffres, la phase d’installation et de rangement durent bien 15 minutes chacune pour des parties de 30 min à 1h en fonction du scénario choisi.
En résumé, y a pas grand-chose à dire : des règles limpides, des parties intenses, un thème original où les monstres doivent se défendre, une mécanique épurée, une qualité de sculpture des figurines indéniable, certes un temps d’installation d’un bon quart d’heure mais proportionné à la durée de la partie. Une réussite.
Voilou pour cette chronique, et comme d’habitude, vos réactions et suggestions sont les bienvenues ! À bientôt les solistes !
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Gougou69 01/02/2019
Un grand merci pour ce nouveau numéro d’une rubrique que je suis avec assiduité !
Keltys 02/02/2019
Si tu prends autant de plaisir à la lire, que nous à l’écrire, alors l’objectif est atteint !
Cripure 01/02/2019
OUI ce Village Attacks est excellent en solo !
Ludiquement conseillé.
Bonne continuation à toute l’équipe de Ludovox et merci pour vos articles que je lis régulièrement.
Umberling 01/02/2019
Merci pour ce compliment du dimanche soir ! Ça fait toujours plaisir à l’équipe 🙂
fa 04/02/2019
Rubrique captivante ! merci
keltys 05/02/2019
Merciii ! On est pas sectaire et si tu as des idées (critères ou suggestions) faut pas hésiter hein ?