Otys : Mets ton habit, scaphandrier !
Otys est un un jeu de Claude Lucchini, et une coédition entre les éditeurs Libellud et Pearl Games. En somme, une belle histoire comme il peut en exister dans le jeu de société : Le jeu fut proposé à Libellud qui, le jugeant un peu trop costaud pour leur coeur de cible, le proposa à Pearl Games. Ceux-ci acceptèrent le projet et proposèrent une coédition avec Libellud. Otys est un jeu classé plutôt expert. J’ai eu la chance d’essayer la version prototype à Parthenay.
Ce préambule étant posé, passons aux choses sérieuses !
Monté sur pil-Otys
Nous sommes dans un monde apocalyptique où la montée des eaux a englouti toutes les terres. Les colonies survivantes vivent au-dessus de la mer sur des plateformes aménagées. Chaque joueur a sa colonie et ses plongeurs prêts pour aller récupérer les vestiges du passé dans les profondeurs : métaux, plantes, carburant, technologies (rapidement cela sera des cubes de couleur, ne nous leurrons pas : si le thème est très bien imbriqué, on va plutôt s’immerger dans de la profondeur mécanique).
Le jeu est une course aux points de victoire sans nombre de tours défini. Lorsqu’un joueur arrive à 18 points de victoire, on conclut le tour en cours, la partie prend fin. S’ensuivra un décompte final.
Comment gagne-t-on des points de victoire ? Principalement en remplissant des cartes Objectif présentes sur le plateau ou dans les mains.
Nous amorçons la descente…
Nous avons le plateau Colonie central, avec au-dessus les cartes objectifs.
Dans le Magasin, on peut vendre ou acheter des ressources selon le cours des marchandises, on peut aussi vendre une marchandise non présente sur le magasin pour 1 PV.
Enfin sur la gauche, se trouve les tuiles “sponsors” : ces bonus que l’on empoche en activant un de nos jetons plongeurs selon le niveau. Ils permettront de gagner des crédits (monnaie du jeu), des batteries, de doubler des actions, d’améliorer un plongeur, etc.
La colonie
Chaque joueur commence avec son plateau individuel et ses plongeurs, que l’on place au hasard au tout début de la partie ainsi que 4 ressources (c’est le seul hasard dans Otys, ou peu s’en faut). Une petite somme de départ, et ses jetons clés de 1 à 5 +1 de valeur X qui corresponds à n’importe quelle valeur. Le plateau est ajouré, un peu comme celui de Dice forge ou de Scythe. Tout tient bien, pas de risque de mauvaise manipulation.
Le mécanisme de base est très simple : on utilise un jeton clé de la valeur de notre choix pour activer un plongeur. On gagnera d’abord le jeton sponsor du plateau central, puis on activera le pouvoir de son plongeur. Ensuite, on pourra / devra le faire remonter à la surface.
Ici, en utilisant un plongeur au niveau 1, j’agis sur la piste du hacker (avec les tuiles sponsor, à gauche).
Au niveau 2 je prends un crédit, au 3 une batterie, au 4 je peux améliorer un plongeur. Enfin, au 5e niveau, je peux effectuer deux fois l’action du plongeur. En utilisant un jeton X, le jeton sponsor du bas va en haut et pousse toute la disposition vers le bas, ce qui peut être source de perturbations pour les autres joueurs qui pensaient combiner tranquillement.
Puis notre plongeur va utiliser sa compétence, mais en fonction du niveau où il se trouve. En clair si je produis une ressource carburant au niveau 3, je la produis au niveau 3 et je ne pourrai pas la déplacer. C’est là où le mécanisme d’Otys s’avère complexe : je veux activer un plongeur pour sa compétence, certes, mais aussi à un niveau donné et aussi selon le jeton sponsor disponible, et bien entendu dans un monde idéal tout se combinerait parfaitement… Mais les jeux de société nous offrent toujours des choix difficiles à trancher et il nous faudra forcément choisir. Choisir c’est renoncer, voilà mon mantra !
À tout moment dans notre tour, on peut réaliser une carte objectif présente sur le plateau ou dans sa main. Il va falloir produire (et dépenser) les ressources d’une carte objectif au même niveau.
Une fois que le plongeur a été activé, il doit remonter à la surface récupérer de l’air : on le replace au-dessus et on fait coulisser les plongeurs du bas vers le haut. Faire remonter un plongeur est obligatoire, sauf si on utilise une batterie. Dans ce cas-là, il pourra rester sur place et être activé prochainement.
Mais ce n’est pas le seul dilemme que nous allons devoir trancher, car un jeton clé utilisé est placé sous son plateau et ne sera récupéré que lorsque la piste d’avancée du hacker sera complétée. Bien sûr, on peut toujours utiliser son jeton X pour réaliser une action à un niveau que l’on a déjà utilisé.
Un des plongeurs (l’ingénieur) nous permet de déplacer le marqueur vers la gauche, pour récupérer plus rapidement ses jetons et donc avoir plus de possibilités.
Sur la droite du plateau, en bleu, nous pouvons aussi agir sur la piste du mécanicien. Que permet-elle ? En dépensant une batterie, on peut déplacer vers le haut ou vers le bas un de nos plongeurs d’autant de crans que la compétence de notre mécanicien. C’est ce qui va nous donner de la souplesse. Dans Otys, on peut toujours faire quelque chose, si tant est qu’il ne nous manque pas une ressource pour le faire…
Les plongeurs
Nous avons 4 experts qui produisent des ressources (bleu, vert, noir, blanc). Une négociante qui nous permet d’acheter ou de vendre une ressource au prix du marché, toujours en respectant la règle de niveau. L’ingénieur augmente la capacité du hacker ou du mécanicien. L’espion porte bien son nom, on réalise l’action d’un plongeur adverse, il faut par contre qu’il soit au même niveau que votre espion. L’espion permet aussi d’acheter des cartes contrats (on en pioche 3 on en choisit une). L’éclaireur permet moyennant 2 crédits de prendre au display de la colonie un des deux jetons récompenses afin de gagner un bonus immédiat,(crédit, batterie) toujours selon le niveau du plongeur.
Ensuite, on retourne le jeton que l’on place sur notre plateau (un point de victoire, un crédit). À chaque fois que l’on va résoudre un objectif à ce niveau on gagnera le bonus associé.
Et tous ces plongeurs peuvent être upgradés, celui qui produit des cubes verts donnera en plus un crédit, celui qui donne des cubes blancs permet en plus de déplacer le marqueur hacker, la négociante rapporte un crédit de plus ou coûte un de moins (si on achète). La encore on va n’avoir que l’embarras du choix.
Les contrats que l’on va remplir donnent des points de victoire, mais aussi parfois des bonus en crédit ou batterie. De plus, en réalisant un contrat on peut prendre un bonus présent sur le plateau éponyme que l’on va placer sur notre plateau, toujours en respectant le niveau. À partir de maintenant si l’on refait des contrats sur ce niveau, on profitera d’un bonus immédiat, en crédit, batterie ou points de victoire.
Conclusion dans le sas de décompression
Belle collaboration entre deux grands éditeurs ; chacun d’eux a travaillé dans son domaine de prédilection. Libellud a planché sur l’édition, l’iconographie et comme d’habitude le résultat est excellent avec une ergonomie au top. L’équilibrage a plus été le fait de Pearl Games. Quoiqu’il en soit, ça donne un OLNI intéressant de par sa mécanique unique.
L’interaction est faible, mais existe ne serait-ce que par la course aux points de victoire, et aux contrats qui sont disponibles pour tout le monde.
Les jetons X chamboulent aussi l’ordre des jetons sponsors et ce point peut mettre à mal votre coup suivant si tout à coup le bonus sur lequel vous comptiez n’est plus à la bonne place…
Beaucoup de choix et beaucoup de paramètres à prendre en compte dans cet Otys. La partie cérébrale du gamer risque d’être fort flattée. On programme et planifie tout en s’adaptant selon le jeu ou les joueurs.
Quoi qu’il en soit, Otys fut pour moi une excellente surprise, j’ai apprécié le défi qu’il propose, les choix tendus que l’on doit arbitrer, les renoncements que l’on doit accepter, et comme c’est une course, on lève son nez pour voir où en sont les autres joueurs, s’ils sont en capacité de déclencher la fin et on reste en haleine jusqu’au bout.
De plus le jeu profite d’une belle rejouabilité si l’on utilise les tuiles sponsor dans leur mode avancé. On pourra même les panacher. Les illustrations sont signées Paul Mafayon, dans un registre plus sombre qu’à l’accoutumée.
Le jeu plaira sans doute aux amateur d’optimisation, de planification, de titres où chaque choix est important. Otys devrait sortir pour Essen et je le conseille les yeux fermés (ouvrez-les quand même pour jouer, c’est plus pratique) si vous faites partie de ce genre de public.
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Les articles de Atom
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Vous voulez aller plus loin dans les profondeurs ? > Aquasphere, vu par Eolean
La fiche de jeu de Otys
Un jeu de Claude Lucchini
Illustré par Paul Mafayon
Edité par Libellud, Pearl Games
Distribué par Asmodee
Pays d’origine : France
Langue et traductions : Anglais, Français
Date de sortie : Essen 2017
De 2 à 4 joueurs
A partir de 14 ans
Durée moyenne d’une partie : 60 minutes
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6gale 05/09/2017
Un jeu fait pour moi 😉
atom 05/09/2017
Tu as clairement le profil idéal 🙂
TheGoodTheBadAndTheMeeple 06/09/2017
J’abais bien senti l’interaction faible a la lecture des regles… ca se confirme, clairement pas pour moi. Mais intéressant la reprise de plus en plus courante du systeme de la riviere d’actions, à la Conan.
Meeple_Cam 21/09/2017
C’est effectivement ultra mecanique et casse-neurones. Je lui reprocherai sa très faible interaction et l’effet tuile-X. C’est à dire que tu réfléchis 15 minutes à ton prochain coup. Et comme tout jeu de ce genre qui se respecte, tout se calcule au poil de cube près. Or le joueur juste avant change les bonus de place, et tes 15 minutes de stratégie sont à l’eau car il te manque LE sou qui était indispensable. Plus qu’a recommencer, ce qui peut facilement faire perdre un ou deux tours de jeu. Ce qui donne un peu d’analysis-paralysis . Néanmoins, le thème reste bien présent et les illustrations très chouettes.