Battalia, ou la salade bulgare sauce deckbuilding.
En juin 2015, fort de mes premiers pas dans le crowfunding avec Mare Nostrum, je décidais dans la foulée de kickstarter mon second jeu avec Battalia. Ce 18 décembre 2015, en rentrant du travail, quelle ne fût pas ma joie de trouver un colis DHL sur la table du salon : mon premier jeu en provenance de KS était là. L’attente était enfin terminée, j’ouvris fébrilement la boîte et contemplait avec fierté le résultat de mon investissement.
Un sentiment d’appartenir à une communauté de joueurs bénis ayant fait le bon choix m’envahit, et je souriais béatement.
Une communauté ? Certes, mais des anonymes pour la plupart. Et si je me tournais vers la communauté qui nourrit ma passion depuis maintenant plus d’un an ?
Ainsi naquit mon envie de partager avec vous, Ludovoxiens, mon premier jeu acheté sur une plate-forme participative.
Dans le cas fort probable où j’aurais omis certaines choses, je vous renvoie vers l’excellent article de BabyAzerty.
A souligner que Monsieur était en charge de la traduction française des règles. Merci bien !
Maintenant que je vous ai raconté ma vie de façon indécente, entrons dans le vif du sujet.
On fait les présentations ?
J’ai rédigé cet article après deux parties à 3 joueurs en utilisant les règles standards et le scénario de base. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il serait erroné de vouloir réduire ce jeu à un unique mécanisme.
Si Battalia m’a donné envie de vous proposer mon premier article, vous en aurez finement déduit que j’ai eu un véritable coup de cœur.
Mais ce jeu ne sera pas à mettre entre toutes les mains : choisissez de 2 à 4 gamers dans l’âme âgés d’au moins 12 ans, pour vos premières parties. Notamment parce que la durée annoncée est de 45 min par joueur, et vous pouvez compter une heure par joueur pour vos premières parties.
Oui le jeu est particulièrement long.
De ce fait, je ne recommanderais pas le jeu pour des familles ou des joueurs occasionnels.
De quoi parle-t-on ?
Battalia : The Creation est le premier jeu proposé par les Bulgares de Fantasmagoria Games, et cela se sent. Tout au long de la campagne, l’éditeur a été fantasmagorique de présence, d’écoute et de communication envers les backers.
Alexandar et Ledha Guerovi sont les deux principaux auteurs du jeu, et à ma connaissance c’est ici leur première création. Ils nous proposent un jeu riche dans un univers heroic fantasy teinté de mythologie slave.
Quatre peuples – Les Ursidés (verts), les Insulaires (bleus), les Ambrardents (rouges) et les Nébuleux (jaunes) – chacun ayant son propre territoire d’origine d’une couleur identique (forêt, îles, montagnes et canyons), parcourent ensemble les terres de Battalia, et peuvent même y collaborer.
Mais ne vous méprenez pas, malgré cette apparente harmonie, il s’agira avant tout d’un jeu de conquête de territoires et de cités, neutres et adverses.
J’en veux pour preuve les deux conditions déclenchant immédiatement la fin de partie : dès qu’un joueur possède 5 cités de niveau 4, ou dès que l’intégralité de Battalia a été explorée (comprenez par là dès qu’il n’y a plus aucune case libre autorisée sur le plateau).
Quelle que soit la condition de fin de partie, on procède alors au décompte des points de victoire, représentés uniquement par le niveau des villes (de 1 à 4) que l’on possède. Le joueur avec le plus grand nombre de points de victoire sera alors proclamé dirigeant légitime de Battalia, et aura un cirage de pompe gratuit en plus de toute notre estime.
Bien. Les places disponibles seront chères, parfois bloquées par la route ou la ville d’un voisin, diminuant vos possibilités de constructions, donc de gagner des points de victoire.
Vous faut-il construire une ville rapidement dans cette case convoitée au lieu d’améliorer votre deck ou la reprendrez vous plus tard par la force ? Autant de dilemmes qui font que Battalia possède aussi une dimension de stratégie de placement sur le champ de bataille, voire même un semblant de course pour pouvoir construire un maximum de villes sur le plateau.
En même temps, c’est là que réside l’intérêt d’un plateau me direz vous, et vous auriez raison, mais l’objectif est rempli, et l’interaction bien présente par conséquent.
Un mécanisme pour les contrôler tous
Vous l’aurez compris, Battalia propose un large éventail d’actions et de décisions, et tout cela repose sur un unique mécanisme : le deckbuilding.
Boaf, rien de bien novateur mon bon Monsieur vous dites vous, je n’ai pas envie de troquer mon baril de Dominion, – Thunderstone, – Rune Age,– Ascension,– Trains, – et/ou Nightfall (liste non exhaustive) contre votre baril de Battalia.
Certes, il s’agit bien d’un jeu où l’on va tenter de construire un deck plus performant tout au long de la partie, mais il se démarquera de ses aînés par petites touches.
En effet, de subtiles possibilités vous permettront un plus grand contrôle de votre deck, limitant l’aléatoire du tirage des cartes, voire de préparer votre prochain tour. Vous n’aurez que très rarement cette sensation de ne rien pouvoir faire de constructif.
La force du deckbuilding de Battalia est que toutes vos actions se feront par la création d’une combinaison de cartes. Ainsi chacune de vos cartes sera potentiellement une ressource à utiliser, dans une combinaison, afin d’acheter d’autres cartes et les inclure dans votre deck, ou bien interagir avec le plateau.
Le matériel
Impossible de vous décrire plus en avant comment jouer sans faire un détour par l’abondant et magnifique matériel et rendre ainsi hommage à l’ensemble du travail effectuer, jusque dans ses moindres détails.
Plusieurs illustrateurs ont œuvré sur Battalia, et une réelle identité se dégage de leur travail. Chaque peuple possède une couleur et des illustrations spécifiques, dans des tons et des nuances jamais criards. Bien que l’univers décrit soit somme toute assez classique dans sa conception, les illustrations ont ce petit quelque chose d’original qui attire et retient l’œil. Le charme slave peut-être.
Un gros travail dans le fond et dans la forme a été effectué, d’autant que tous les éléments du jeu sont sans texte, un énorme avantage pour un jeu dont le principal mécanisme est le deckbuilding.
De format carré classique type Taverna, la boîte est d’une profondeur plus importante que la moyenne. On sent déjà en la prenant dans les mains qu’elle est bien remplie. Et c’est le cas, le matériel est pléthorique. Presque trop. Au départ, on se sent un peu perdu devant la multitude de cartes à installer autour de la zone de jeu. Ceci explique en partie le temps d’installation relativement long du jeu.
Les règles du jeux sont en anglais dans un livret grand format de 12 pages. Les règles françaises se trouvent facilement sur le net.
Elles sont claires et précises, très bien structurées et on termine la lecture sans aucune zone d’ombre. Elles auraient cependant méritées d’être plus aérées car c’est vraiment écrit petit.
Cependant 4 fiches récapitulatives, recto verso, absolument essentielles pour une première partie viennent compenser la chose. Malheureusement, ces aides de jeux souffrent d’un problème d’ergonomie. Elles sont denses, assez peu intuitives et difficilement lisibles, particulièrement au niveau des icônes nous rappelant comment former nos combinaisons.
Le jeu possède un joli plateau épais pourvu de différents emplacements sur son pourtour et de cases vierges (7 par 7) en son centre. Le plateau est de couleur neutre facilitant la lisibilité des cartes placées dessus. Sur certaines cases, on trouve 3 types de figures géométriques différentes permettant d’établir une mise en place du jeu en fonction du nombre de joueurs (de 2 à 4).
Comme il est de rigueur dans un deckbuilding, on trouvera une multitude de cartes carrées dont le format est plutôt original et pratique à tenir en main. Les illustrations sont parfaitement mises en valeur car très peu d’informations viennent parasiter le dessin. Les cartes sont toilées et de bonne facture quoique un peu fines à mon goût, et elles se mélangent facilement, très pratique pour un deckbuilding.
En revanche leur verso ne dispose d’aucune distinction particulière, et d’une manière générale l’iconographie est petite et peu lisible de prime abord sur leur recto. Encore une perte de temps pour la mise en place.
Un mauvais point pour la couleur des tuiles terrains affiliées aux Nébuleux, peuple des Montagnes et des Cieux, dont les Héros et les cartes du deck sont jaunes. En revanche, les villes et les routes des Nébuleux sont bleu azur avec des nuages blancs, on n’est pas raccord ! Ensuite, elles se confondent un peu trop facilement avec le bleu turquoise des Insulaires sur le plateau. Rien d’insurmontable mais franchement étrange comme choix.
L’oracle solaire, une spécificité du jeu, représente un ancien monument aux pouvoir divins permettant une double interaction avec les artefacts communs.
L’oracle solaire guide donc un peu les joueurs dans leur achat ou leur action, leur donnant le timing pour acquérir un artefact de la couleur désirée ou bien effectuer une action plus puissante.
Cependant, l’oracle n’est pas très stable une fois posé sur la table. Un joueur, en plus de tourner la branche intérieure à chaque tour, doit s’assurer que les decks d’artefact correspondent bien aux branches leur faisant face.
Finalement, en dehors de quelques soucis d’ergonomie et de lisibilité, on retiendra un matériel abondant et d’excellente qualité. Le travail d’édition est absolument remarquable.
Pour connaître le matériel bonus de la campagne KS, cliquez ici
- Un Art Book proposant plus de background pour les peuples.
- La présence d’un insert of fame à l’intérieur de la boîte : on ne va pas bouder son plaisir.
- Des fiches spécifiques à chaque peuple, conférant 4 pouvoirs différents à chacun de vos héros.
- Quatre magnifiques Dashboards, d’excellente facture : bien épais, joliment illustré. Ils renforcent bien l’immersion et sont un plaisir pour le sens du toucher. Ils apportent peu pour l’instant, mais permettront de tenir vos comptes lors de prochains scénarios.
Et bien d’autres cartes : des artefacts légendaires en plus,des mercenaires, des scénarios, une figurine de personnage non joueur…
A noter que les règles liées à ce matériel ne sont pas présentes dans la boîte. Fantasmagoria Games a préféré assurer la livraison du jeu dans les temps et proposer en ligne des règles téléchargeables. Elles devraient être disponibles au cours du mois de Janvier.
Enfin une seconde campagne Kickstarter est prévue dans l’année. Son premier palier sera le dernier non atteint de la première campagne.
Que faire en un tour ?
Votre tour de jeu se déroulera en 5 étapes. Les étapes 2, 4 et 5 étant obligatoires.
Annonce de cohorte :
Au début de votre tour, si vous avez en main au moins trois cartes de la même faction (donc couleur), vous pourrez annoncer fièrement, puis montrer, une cohorte.
Annoncer une cohorte vous permettra de piocher immédiatement des cartes en plus : 1 carte pour une cohorte avec trois cartes de la même faction, 2 pour quatre cartes, 3 pour 5 et 4 pour 6.
Cette idée est vraiment ingénieuse, et explique à elle seule tout l’intérêt qu’un joueur va avoir à acheter des cartes de la faction majoritaire dans son deck, d’autant que toutes les cartes disponibles à l’achat sont disposées face visible.
C’est à souligner car c’est rare qu’un jeu le permette. Cela permet aux joueurs de planifier leurs achats en fonction des factions qu’ils souhaitent acquérir, et augmenter leur chance d »avoir des cohortes. Donc préparer des tours plus puissants. En général, un grand « Bouh ! Comme tu vas pleurer, petit Ursidé » sera annonciateur de ce genre de tour.
Enfin, de façon plus triviale, cette idée permet aussi de s’affranchir de la sempiternelle présence de cartes permettant de piocher plus dans la zone d’achat.
Récupérer ses cartes en embuscade :
Une des actions possibles dans l’étape 3 sera de placer de une à trois cartes face cachée en embuscades. Des emplacements prévus à cette effet sont dessinés sur le plateau pour chaque joueur.
Si vous l’avez fait le tour précédent, vous êtes obligé de toutes les reprendre en main à ce moment précis.
Là encore, brillante idée : mettre une carte en embuscade nécessite de retirer une carte de son jeu de façon permanente.
Pourquoi c’est brillant ? Parce que vous faites deux actions pour le prix d’une :
Premièrement vous pouvez préparer votre prochain tour. Vous savez avec certitude que ces cartes viendront dans votre main.
Vous voulez absolument déclencher un combat au prochain tour ? Mettez donc une arme en embuscade.Vous savez que vous allez être attaqué ? Mettez donc un ou deux seigneurs en embuscade : vous aurez la possibilité de les récupérer pour vous défendre. Vous avez compris le principe.
Deuxièmement, en exilant une de vos cartes, vous allez enlever les cartes dont vous n’avez plus besoin afin d’augmenter les probabilités de tirer celles qui sont cruciales.
Or, épurer son deck et pouvoir contrôler le tirage suivant sont deux éléments récurrents dans les jeux de deckbuilding. La solution proposée ici est élégante, simple et efficace. Et rend le jeu délicieusement contrôlable, notamment dans les derniers tours.
Réaliser des actions :
On arrive enfin au cœur du jeu. La force du deckbuilding de Battalia, c’est de proposer un grand nombre d’actions possibles aux joueurs simplement en produisant des combinaisons de cartes sous forme de ligne devant soi, chaque carte ne pouvant être utilisée qu’une seule fois.
Voici quelques actions qu’il vous sera possible d’effectuer :
– Recruter des unités militaires : En payant le coût indiqué, achetez une unité et gagnez une carte provision au passage.
– Créer un artefact : Au nombre de 7, ils sont absolument essentiels dans la construction et l’optimisation de votre deck et n’ont pas vocation à remplacer d’autres cartes, mais à les améliorer.
Certains seront à jouer seuls pour pouvoir vous déplacer sur le plateau, ou vous apporter du contrôle sur votre prochaine main.
D’autres vous permettront de recruter vos héros et de déclarer la guerre.
Certains vous permettront d’effectuer des transformations. Avec ces derniers artefacts, Battalia va se démarquer des jeux plus classiques, et vous offrir plus de contrôle sur votre deck. Ainsi, vous pourrez vous orienter vers une faction au départ, puis vous adapter à la situation au cours du jeu, en modifiant la couleur de vos unités. De même, vous pourrez rendre vos unités plus puissantes au fur et à mesure de la partie, directement à partir de votre main. Vous serez donc beaucoup moins tributaire d’un mauvais départ, de tirages malchanceux à répétition ou d’une situation qui dégénère.
Enfin un dernier artefact apportera un peu de chaos en vous octroyant un bonus ou malus aléatoire, ce qui peut s’avérer extrêmement puissant ou dévastateur en combat.
Les artefacts sont pris en compte pour la création des cohortes, d’où l’importance de pouvoir choisir leur couleur lors de l’achat à l’aide de l’oracle solaire.
– Construire des villes et des routes : L’unique façon d’engranger des points de victoire sera de construire des villes. Et comme vous n’avez pas le droit de construire deux villes orthogonalement adjacentes, il faudra aussi établir des routes.
Dans les deux cas, il faudra la bonne combinaison pour le faire, et vous choisirez la ville ou la route qui va bien en fonction d’où vous allez la poser. Vous devez toujours pouvoir relier la carte que vous posez à une ville que vous posséder via une route. Vous pouvez aussi améliorer vos villes existantes.
Cet aspect de placement est loin d’être anecdotique dans Battalia. J’ai déjà dit que les places sont chères, et il vous faudra peut-être construire avant les autres sous peine de devoir se battre plus tôt que prévu pour obtenir des points de victoire.
Mais cela va aussi un peu plus loin. Dois-je établir des routes me permettant un accès rapide et facile vers les autres cités avec mon héros ( et réciproquement fatalement), ou bien je me cale tranquillou dans un coin difficile d’accès pour ne pas me faire piquer mes points de victoire. A vous de voir.
– Déplacer vos Héros : en jouant une carte provision ou un cheval. Ils devront respecter le tracé des routes entre les cartes du plateau.
– Déclencher un combat : La force d’une unité correspond à son niveau, donc au chiffre écrit en haut à droite de la carte (1 à 4). Toute carte dans une ligne de combat pourra donc participer à hauteur de sa force.
Vous pouvez engager un combat contre une cité neutre, une cité ou un héros adverse. Dans tous les cas vous devrez disposer d’au moins un de vos héros sur la case où vous voulez combattre.
Contre une cité neutre, vous devez dépasser la valeur de la cité. Si vous y parvenez, la cité vous appartient et gagnez donc une ville de niveau 4 ainsi qu’un seigneur de la couleur de la faction de la tuile. Désormais des regards envieux se tournent vers vous, il va falloir penser à la défendre.
Contre une cité adverse, les chosent sont légèrement différentes. Le joueur adverse peut décider de se rendre, de récupérer ses éventuelles cartes en embuscade, et d’impliquer ou non son héros dans la bataille, sachant que s’il perd, il sera démobilisé. Il vous faudra donc de nouveau le recruter.
C’est dans les combats que vos cartes en embuscade et/ou conservées sous les artefacts « tente » prendront toute leur importance.
Pour engager le combat, vous devez jouer suffisamment de cartes pour dépasser la valeur de la cité que vous attaquez. Votre adversaire à alors l’opportunité de jouer des cartes de sa main pour égaler votre force. S’il y parvient, c’est de nouveau votre tour pour surenchérir.
Et ainsi de suite jusqu’au moment où les deux joueurs décident de passer.
Si la force de l’attaquant est inférieure ou égale à celle du défenseur, la cité demeure inchangée et l’attaquant perd son héros.
Si la force de l’attaquant est strictement supérieure à celle du défenseur, il en devient le propriétaire.
Désormais des regards haineux se tournent vers vous, et il va falloir penser à changer de jeu.
Si vous avez uniquement joué des cartes de la faction de votre héros, vous avez un bonus de +1 ( en attaque ou en défense).
C’est franchement très anecdotique et un poil léger. A dire vrai sans réels pouvoirs, l’utilité des héros est pour l’instant réduite à peau de chagrin. Mais patience…
Enfin, vous pouvez directement attaquer un héros ennemi. Mais le joueur adverse à l’opportunité de battre en retraite à deux cases minimum. D’où un intérêt vraiment limité, là encore.
Puis nous avons deux dernières étapes qui sont :
Défausser toutes vos cartes ;
Piocher une nouvelle main de 6 cartes.
La partie Oui je sais il est temps !
Ben justement parlons-en du temps. Parce que Battalia est vraiment chronophage. C’est sans conteste son principal défaut.
La création de Battalia, c’est beau mais… c’est long.
Lançons-nous gaiement m’écriai-je à l’attention de mes deux compères F et C !
Grossière erreur de débutant, ou plutôt d’irréductible impatient.
Disons-le clairement Battalia fait partie des jeux dont la mise ne place vous donne envie que la session se déroule à domicile, histoire de préparer le jeu avant l’arrivée des convives, que l’effervescence ne retombe pas avant d’avoir pu démarrer.Les possesseurs d’Andor, d’Earth Reborn ou Heroes of Normandy verront sans doute de quoi je veux parler. Comptez donc 25 bonnes minutes d’installation.
Ensuite ajoutez 30 minutes d’explications de règles.
Donc vous venez de laisser filer facilement une heure, largement de quoi bien débuter l’apéro.
Et vous vous souvenez qu’au bas mot, vous êtes partis pour 45 min par joueur. Toujours motivés ?
Nous décidons d’inclure les 8 mercenaires dans le jeu. Ces derniers comptent dans les cohortes et leur force peut être boostée dans un combat à l’aide des cartes provision.
Finalement le jeu débute.
Chacun reçoit un deck de 10 cartes : 3 citoyens, 1 chef et 1 prêtre. Le tout accompagné de 5 cartes provision.
Un rapide coup d’œil est permis pour connaître la composition de son deck en terme de faction majoritaire. Et là on se jette sur la fiche récapitulative pour découvrir ce que l’on va pouvoir faire dès le départ.
Durant les premiers tours, nous avons délaissé le plateau pour recruter des unités ou construire des artefacts, en visant en priorité notre faction majoritaire. Annoncer des cohortes, cela semblait fort à tout le monde.
Malgré l’abondance de matériel et de possibilités, les tours s’enchaînent de manière vraiment fluide. Pas le temps de s’ennuyer quand les autres jouent. Vous avez déjà votre prochaine main, donc vous cogitez et préparez les prochaines actions.
L’achat d’une amulette au 2ème tour et un jet de dé chanceux me permettent d’être le seul à posséder l’artefact « titre » assez tôt. Grâce à lui, ma stratégie sera d’augmenter le niveau de mes unités pour, à terme, être capable de créer directement des citées de niveau 4.
Mes adversaires décident de partir sur une stratégie d’expansion par le combat.
C’est au moment de la construction de la première route que nous nous penchons vraiment sur le plateau et commençons à réaliser qu’il faudra à minima un Héros pour interagir avec les différentes cités, les neutres en priorité. Et qu’en construisant les routes pour y aller, il est nécessaire de les placer correctement pour ne pas perdre des cases valides pour construire nos propres cités.
Mes adversaires construisent alors des routes se dirigeant vers la même cité neutre. A terme, l’affrontement est inévitable.
De mon côté, je parviens à construire un réseau de routes difficiles d’accès, me laissant du temps pour construire mon deck et m’étendre vers les cités neutres.
Une question nous tarabusta alors l’esprit. Etant donné qu’il fallait avoir à peu près tous les types d’unités dans son deck, les plus faibles étant utiles pour former certaines combinaisons, étions-nous dans un jeu de deckbuilding où l’épuration de son deck n’est pas une nécessité ? En tout cas rien ne nous y poussait spécialement. Notre deck augmentait à vue d’œil, et malgré cela, à chaque tour nous trouvions quelque chose de constructif à faire. Au pire, il restait le mulligan. Sensation étrange mais pas déplaisante.
Pendant que mes comparses s’enlisaient un peu dans leurs affaires, j’annexais ma deuxième cité neutre peu après la moitié de la partie, me permettant d’avoir 4 seigneurs dans mon deck. Je possédais alors 4 cités, dont deux de niveau 4 et un de niveau 3. Et je disposais d’emplacements pouvant en accueillir encore.
Comprenant mes intentions, ils changèrent alors leur fusil d’épaule. Tout d’un coup, mes cités devinrent sacrément alléchantes. Leur héros se ruait vers mes terres.
Et c’est là que j’obtins la réponse à la question précédente : deux choses devinrent primordiales pour moi.
D’abord je devais absolument pouvoir tirer mes seigneurs en même temps pour construire des cités de niveau 4 et améliorer celle de niveau 3 pour m’assurer la victoire.
Ensuite, je devais pouvoir défendre mes villes face aux assauts en préparation. C’est là que la partie épuration est devenue limpide. Et trois cartes en embuscade par tour, ça vous écrème un deck vite fait bien fait.
Malgré quelques combats qui ont retardé ma stratégie, j’ai pu mener à terme ma stratégie moins d’une dizaine de tour après, déclenchant la fin de partie.
Score final : D- 22 points, suivi par F- 17 points et C- 13 points.
Lors de notre première partie, la fin avait été déclenchée par manque de cases disponibles, et les scores étaient plus bas. On sent la progression dans la maîtrise du jeu.
Un seul d’entre nous a été recherché un des artefacts légendaires au centre du plateau, mais le ratio investissement temps/apport au deck n’est franchement pas convaincant. A voir dans un autre type de scénario.
Personne n’a vu le temps passer, l’immersion étant forte grâce au plateau, car finalement c’est là que tout se joue.
Quand on relève la tête 4 heures après, les visages sont souriants et l’envie d’en refaire une omniprésente. Si seulement ce n’était pas aussi long…
Заключение (Conclusion)
Les joueurs achètent sans cesse de nouveau jeux, donnant l’impression d’être en quête du jeu mythique, idéal, qui leur fera oublier tous les autres.
Je ne sais pas si j’ai trouvé mon Graal ici, mais je pense que les autres jeux de deckbuilding risquent de me paraître bien fades après Battalia, tant ce dernier fourmille de bonnes idées, possède un gameplay riche et profond, et propose une interaction et une immersion supérieures à la moyenne, vous faisant littéralement oublier le temps qui s’écoule autour de vous.
Ce premier opus de Fantasmagoria Games a l’audace et la fougue du « premier jeu ». De par sa générosité débordante, on sent bien que les auteurs n’ont voulu faire aucun compromis et donner le maximum aux joueurs. Cela le rend dense, riche mais aussi long et difficile d’accès. Battalia aurait peut-être mérité quelques simplifications par endroit, sans pour autant lui faire perdre de sa superbe.
Battalia en bref
Points faibles :
Chronophage : Entre l’installation, l’explication des règles et la partie, arrangez-vous pour avoir 4 heures devant vous.
Une extension pour 5 joueurs est déjà prévue. Est-ce vraiment une bonne idée ? Sortir un jeu durant 7 heures est devenue une véritable sinécure (-cf. Twilight Imperium).Faible intérêt des héros dans les règles standards.
Les tuiles terrain des Nébuleux ne sont pas de la même couleur que les cartes de cette faction.Les figurines, bien que de grande taille, auraient mérité une finition plus détaillée.
L’obligation de se référer continuellement aux fiches récapitulatives pour connaître les combinaisons à utiliser.
Quelques problèmes d’ergonomie, notamment pour les fiches d’aide : profusion d’informations dessus, taille de police trop petite et pictogrammes peu intuitifs pour les combinaisons. Mais cela s’améliore avec les parties.
Il vous sera difficile, voire quasi impossible, d’amener un néophyte aux jeux de deckbuilding avec Battalia.
Points forts :
Un matériel abondant et de qualité, on sent le souci du détail.
De magnifiques illustrations, donnant une véritable identité à l’univers de Battalia.
Des mécanisme ingénieux, parfaitement dans le thème.
Les cartes sont toutes sans texte.
Immersion et interaction fortes.
Plus qu’un jeu de deckbuilding, on y trouvera de la conquête, du placement, de la stratégie voire même un semblant de course : un savant mélange bien maîtrisé.
On peut customiser ses parties : règles avancées, pouvoirs des Héros, différents scénarios possibles… La rejouabilité est assurée.
[Je tiens à remercier La Team Ludovox pour son aide précieuse.
Cycnos , merci pour ton temps et ta patience autour du jeu et de cet article, pour le prêt de ton appareil photo et de ta superbe table de salon qui nécessite d’être ingénieur pour pouvoir l’utiliser !]
Un jeu de Alexandar Guerov , Ledha Guerova
Illustré par Albena Noveva, Atanas Lozanski , Borislav Barzev, George Pike Tanev, Vasil Hristov
Edité par Fantasmagoria
Langue et traductions : Anglais
Date de sortie : 11-2015
De 2 à 4 joueurs
A partir de 13 ans
Durée d’une partie entre 60 et 180 minutes
LUDOVOX est un site indépendant !
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Cycnos 22/01/2016
Pavé César ! 😉
Haaa le voilà enfin ce JP de Battalia ! On sent vraiment la passion du jeu c’est cool ! C’est très complet !
Seul bémol si je peux me permettre, tu as fait une compression de sauvage sur certaines photos ! 😉
Sinon pour ma part, c’est un jeu que j’ai vraiment apprécié ! mais vraiment trèèèèèèèèèèès long lors d’une première partie au regard de la richesse du jeu ! Mais une excellente surprise en tout cas, je pense que les autres deckbuildings vont me paraitre très fade désormais…
M3th 22/01/2016
Merci cycnos.
Je dois avouer que je ne comprend pas pourquoi les photos rendent cette impression. Pas du tout conformes à celles que j’ai faites. Si la hiérarchie ludovox peut m’aiguiller, histoire de ne pas refaire la même erreur.
atom 22/01/2016
Merci Damien, très bon Jp, si ce n’est que maintenant j’ai encore plus envie de l’acheter. Je me demande si ça ne vaut pas le coup de se faire une aide de jeu pour faciliter et réduire le temps, car j’ai remarqué que souvent dans des jeux ce qui allonge la durée de jeu c’est le temps que l’on passe a chercher. J’aime beaucoup l’idée du plateau de jeu en plus du deck building, et c’est pour cela que j’adore « Trains ». Cela rajoute de la tension, on doit surveiller ce que fait l’adversaire (ou les adversaires). Tiens d’ailleurs, a deux ça tourne ?
BabyAzerty 24/01/2016
J’ai testé à 2, 2 fois. Il y a une configuration du plateau pour le 1vs1 qui supprime de nombreuses tuiles (le plateau est donc plus petit – tu supprimes les colonnes et lignes en extrémité et ça devient un 5×5). Tu retires également un peuple du jeu. Et bien, c’était un peu une course à l’artéfact légendaire (la tuile au milieu du plateau) contrairement aux parties de Damien. Après c’est peut-être notre façon de jouer qui fait que…
Bref, ça marche très bien à 2 🙂
M3th 22/01/2016
Merci Atom pour ton retour.
Si tu as encore plus envie de craquer sur le jeu, j’ai atteint mon objectif.
Une aide de jeu oui pourquoi pas. Sachant qu’il y en a déjà mais elles sont bien denses. Cependant après quelques parties ca devient plus clair quand même. Par contre trouver quelque chose pour la mise en place assurément.
Je n’ai pas encore joué à 2, je ne peux vraiment dire si cela reste intéressant, mais le plateau s’adapte à cette configuration.
Umberling 23/01/2016
Edition de l’article : correction de quelques photos et d’autres menus détails 😉
M3th 23/01/2016
Merci beaucoup.
BabyAzerty 24/01/2016
J’ai finalement trouvé le temps de lire cet excellent article ! Bravo !
L’aspect chronophage est en effet parfois déroutant surtout lorsque l’on a envie de se submerger dans un jeu fantastique mais que l’on n’a à peine 1h-1h30 devant soit.
Je suis parti en quête d’un scénario qui pourrait baisser le temps par joueur 🙂
D’ailleurs, certaines images sont broken 🙁
Umberling 25/01/2016
Pas d’images broken chez moi. Lesquelles sont problématiques pour toi ?
BabyAzerty 29/01/2016
Pardon pour le late reply, mais même en flushant le cache, c’est capoute
https://imgur.com/a/JTumn
Umberling 30/01/2016
Merci ! J’investigue et corrige ça dans le weekend.
M3th 24/01/2016
Merci babyazerty, c’est un article chronophage tout comme le jeu. Cest vrai que c’est dommage que l’on puise pas caser le jeu dans un laps de temps plus bref. Faut que je teste à deux. Et vivement les règles additionelles.
Zuton 31/01/2016
Merci Damien pour ce bel article et je te rejoins dans ta liste de points forts et faibles, avec le bémol d’une seule partie au compteur, mais quelle partie de plaisir !
J’ai découvert le jeu en fin d’année et ne cesse de me dire depuis que je dois absolument y rejouer, surtout qu’on avait fait une énorme erreur de règle en ne détruisant pas la 2ème carte lors de l’embuscade mais en la défaussant seulement ! Résultat : des decks mous et épais en fin de partie ! Mais même avec cette bévue, j’ai vraiment été séduit par le jeu.
J’aime beaucoup l’idée des variantes qui permettent d’adapter le jeu à ses goûts ludiques.
Sait-on si un éditeur s’est positionné pour une VF ?
M3th 31/01/2016
Merci Zuton pour le commentaire sympa.
N’étant pas dans les hautes sphères je peux seulement te dire que je n’ai rien lu quelque part indiquant une future édition française. Ceci dit tout le jeu est textless et la règle en français facile à trouver, même si celle que jai à une ou deux coquilles. Franchement cest un jeu où je ne trouve pas la VF essentielle. Sauf si tu es vraiment anglophobe.
Jai refait une partie à 3 avec la variante proposée: tous les joueurs partent du centre avec un héros et ne peuvent prendre qu’une cité neutre sous laquelle repose un artefact face caché, et avec les règles avancées des territoires. Un régal. Comme tu récupère assez tôt un artefact, tu te rends compte que c’est quand même bien puissant. Il y a plus de combats et tu construits plus de routes pour bloquer les adversaires. Miam.
Maintenant j’ai hâte d’avoir toutes les règles annoncées, notamment les pouvoirs des héros spécifiques à chaque peuple.
M3th 27/02/2016
Bon , mieux vaut (re)tard que jamais, les règles additionnelles officielles sont enfin disponibles pour l’Unbound Buff et les pouvoirs des Héros. Vivement que je puisse essayer cela.
atom 03/03/2016
Il est distribué par Intrafin en france (pas traduit juste distribué)
source ? : Intrafin eux même sur leur stand a Cannes.
par contre les extensions en français de Mage knight je crois qu’on peut faire une croix dessus.
atom 06/03/2016
Joué enfin une partie entière a Battalia. Déjà les couleurs des routes ou cités avec le thème ça ne me choque pas. Ok c’est pas très visuel, mais pourtant les nébuleux peuple du ciel dans le ciel ça se tient. Je trouve que quand on joue avec les pouvoirs ça nous parle immédiatement.
La ou j’ai eu le plus de mal c’est a réfléchir a ma stratégie avec toutes ces icones, pas évidemment de tout bien intégrer. pas évident aussi de comprendre que les petites unités sont nécessaires et qu’en manquer c’est se mettre de gros bâtons dans les roues. C’est un jeu vraiment élégant. les combats sont épiques avec un léger bluff. A refaire mais ça a été long très long je crois que l’on a dépassé les 5h de jeu. Je me demande si on ne peut pas réduire a 4 cités de niveau 4 au lieu de 5.
M3th 14/03/2016
L’intérêt des héros est totalement relancé avec les pouvoirs désormais.
Shanouillette 15/03/2016
ha ça y est ?
M3th 15/03/2016
Uiiiii. Content !
atom 15/03/2016
On a directement commencé avec les pouvoirs. Qu’on a d’ailleurs mal joué a cause de traduction française. Je ne sais pas si on aurait autant accroché sans.
M3th 15/03/2016
Oui étrange que cette traduction soit sortie telle quelle.