World of Tanks, du deckbuilding à coups de canons de 100mm
Dessine-moi un tank
World of Tanks est un jeu vidéo en ligne, développé par une société Biélorusse, Wargaming.net, sorti tout d’abord sur PC en 2010 et sur Xbox360 par la suite.
Ce jeu est un MMO – comprendre jeu vidéo en ligne massivement multi-joueurs –, qui propose de contrôler des véhicules blindés au cours de différents types de scénarios d’affrontement à 15 contre 15 visant à capturer des bases adverses, détruire l’escadron ennemi ou obtenir un certain nombre de frags.
Le jeu est un mélange action / simulation, proposant un gameplay assez simple dans le maniement du véhicule et probablement assez éloigné de la véritable complexité de ce type d’engin.
En revanche, tous les modèles de tanks sont de fidèles répliques des modèles d’origine intégrant leurs spécificités techniques : poids, taille, manœuvrabilité et possibilités d’armement, qu’il faudra rechercher, débloquer, acheter et ensuite améliorer.
World of Tanks Rush : Kezako ?
Contrairement au jeu vidéo, on n’est plus le pilote d’un seul tank, mais le commandant d’un escadron de blindés qui va devoir construire son armée et sa stratégie à base d’un mécanisme principal de deck-building.
La victoire sera calculée en fonction de la quantité de médailles que l’on collectera au cours de la partie, celles-ci faisant donc office de points de victoire.
Les médailles seront obtenues de diverses manières :
- La destruction de tanks adverses.
- La capture de bases adverses.
- La réalisation d’objectifs précis.
Cela pourrait sembler assez classique, si ce jeu n’avait pas quelques particularités / originalités qui en font une jolie réussite de portage de licence jeu vidéo en deck-building :
- Le jeu se joue très vite, environ 30 min, et même moins avec des joueurs habitués dans une configuration 2-3 joueurs.
- Les points de victoire s’obtiennent majoritairement dans une logique de confrontation directe assez brutale.
- Le système de choix des actions des tanks compétence-défense / attaque / achat est assez malin.
- La main constituée de seulement 3 cartes impose une optimisation féroce est assez peu usuel dans les jeux de ce genre.
Inspection du chassis
Petite boîte carton facilement transportable qui inclut un sabot assez classique, qu’on ne jettera pas nécessairement cette fois-ci, tant il calera tout juste le matériel au millimètre.
On a des aides de jeu au format cartes et des règles de jeu en 3 langues (anglais, allemand, français), sachant que les cartes n’intègrent aucun texte de jeu, seulement des pictogrammes.
Au niveau du nombre de cartes, on aura un nombre sensiblement plus faible que les grands classiques du genre (Ascension, Dominion, Thunderstone) mais pour un coût bien moindre (23€).
On aura :
- Des cartes pour la déco seulement : 1er joueur, cimetière de tanks ;
- 12 cartes objectif ;
- 5 sets de cartes de base ;
- 5 sets de 6 cartes pour les decks de départ ;
- 5 aides de jeu recto-verso ;
- 100 cartes véhicules, 25 pour chaque pays qui sont URSS, Allemagne, Etats-Unis et France.
Les illustrations sont plutôt travaillées et mettent en scène des tanks ou des militaires des différents pays dans des actions héroïques du style : « Parler dans une radio ou un talkie-walkie », « montrer une colline du doigt », « pointer le canon de son tank dans une direction ».
Bref, il faut dire je suis pas hyper sensible au thème « uniformes et gros canons à roulette de la seconde guerre mondiale », mais on peut pas dire que ce ne soit pas bien fait, et ça respecte la licence World of Tanks qui est à cheval sur la fidélité des modèles (par exemple les tanks russes ont leur nom en cyrillique).
Le matos respecte les standards de solidité / épaisseur / qualité sans pour autant vous tirer un « wahou ».
On pourra y jouer de 2 à 5 et globalement, de toutes ces configs jouées, j’ai pas eu le sentiment d’une qui ne tournait pas, bien que l’on préfèrera jouer à plus de 3 pour le fun que produira l’augmentation des interactions.
La mise en place est très rapide et ne nécessite aucune préparation particulière. Les règles sont assez simples, même si pas organisées au mieux, et vous les laisserez rapidement rangées dans la boîte tant l’aide de jeu est suffisante.
Globalement on a en main un jeu bien fait, conçu pour se trimballer facilement pour montrer aux copains, se sortir, s’installer et s’expliquer rapidement, commercialisable facilement dans un bon nombre de pays et respectant la licence initiale.
Vérification des canons
Au niveau des 100 cartes de véhicules qui sont le cœur du deckbuilding que l’on va réaliser, on va retrouver 5 types représentés par des symboles distincts, avec des valeurs [d’attaque – défense] et des capacités distinctes :
- Les tanks légers, symbole losange, sont tous [1 – 1]
- Les tanks standards , symbole double barre, sont tous [1 – 2]
- Les canons automoteurs, symboles triangle et carré, sont tous [2 – 1]
- Les tanks lourds, symbole triple barre rouge, sont tous [2 – 2]
- Les unités auxiliaires, symbole de rond, ont des valeurs variables allant de [0 – 0] à [2 – 2] et seront surtout caractérisés par leurs capacités spéciales.
Ça parait complexe comme ça, surtout que toutes les cartes sont différentes, mais en fait le type de véhicule est un paramètre plutôt mineur qui aura son importance surtout pour les objectifs de fin de partie (on y revient plus loin) et pour les tanks lourds qui ont une particularité en terme de puissance de feu.
Chaque carte représente un véhicule d’un pays donné et sera très clairement identifiable avec un code couleur clair et un symbole du pays en question (URSS / Etats-Unis / Allemagne / France), ce qui a une importance capitale dans le fonctionnement du jeu.
Comme je l’ai dit, les cartes de tanks ne comportent pas de texte, seulement des icônes.
Celles-ci sont assez claires, bien que l’on pourrait suggérer quelques améliorations pour bien identifier le coût d’achat des ressources produites et que les symboles « base uniquement » et « tanks uniquement » donnent l’impression de vouloir dire l’inverse.
Pourquoi barrer une icône pour signifier que l’on ne peut attaquer que cet élément ?
Chaque tank possède un nom, un pays et une valeur [attaque – défense] qui va définir son blindage et sa puissance de feu ; également un coût d’achat tant qu’il n’a pas été recruté, puis éventuellement des capacités spéciales et la ressource qu’il peut produire pour recruter une fois qu’on l’a en main.
Le jeu fonctionne sur un système dit de « rivière » comme par exemple Ascension.
Nous aurons toujours au centre de la table 4 cartes véhicules disponibles à l’achat tirées d’une pile unique mélangée avec conviction. À chaque tour, la dernière carte sera expulsée et une nouvelle arrivera.
Un bon point pour ce jeu est que la rivière tourne très vite et, malgré certaines possibilités de début de partie un peu limitées, on a rapidement du choix et le système est du coup simple et assez opportuniste.
Attention car dans certains cas, nous aurons la possibilité de recruter beaucoup de véhicules d’un coup, ce qui donnera un sentiment de satisfaction assez immédiat mais qui sera payé très chèrement durant le développement de la partie.
Car sous ses dehors simplistes, WoT est un jeu qui pardonne peu les écarts de conduite au niveau du deckbuilding.
Identification des cibles
Avant de tirer, il va déjà falloir savoir où tirer !
En début de partie, on va donc commencer par tirer… « ah ça y est je peux y aller chef ? »… « Non pas encore ! »… des objectifs qui rapporteront 5 médailles chacun en fin de partie.
Autant que le nombre de joueurs +1 parmi les 12 disponibles, pour avoir du choix.
Globalement ces objectifs vont orienter votre stratégie et développement pendant la partie car ils vont pouvoir se gagner en étant celui qui aura dans son deck le plus de :
- Bases détruites : stratégie démolisseur aggressif ;
- Tanks d’un type particulier : du coup il faudra faire attention aux symboles en achetant ;
- Cartes dans son deck : celui qui aura le plus gros escadron plein de tanks ;
- Médailles d’un pays donné : on y reviendra mais en gros ça veut dire qu’il faudra orienter son recrutement vers les tanks de ce pays.
Cela étant dit, les objectifs ne donnent pas la victoire à eux seuls, il faudra compter sur 2 autres éléments clefs : les bases et les médailles.
Chaque joueur commence avec 3 bases en jeu en début de partie, chacune valant 3 médailles. A noter que la fin de partie est annoncée dès qu’un joueur a perdu sa dernière base.
Par ailleurs les médailles (simples ou doubles) de chaque pays vont pouvoir se gagner en détruisant des tanks adverses avec des groupes d’assaut dudit pays, par exemple si je détruis 2 tanks avec 2 tanks français, cela me donne le droit de gagner 2 médailles simples ou 1 médaille double française.
Les médailles valent tout simplement 1 ou 2 points suivant si elles sont simples ou doubles et elles vous permettront également de concourir pour l’objectif de fin de partie « plus de médailles de tel pays ».
Les bases comme les médailles sont des éléments qui vont intégrer notre deck une fois gagnés et cela n’est pas pour nous arranger car leur effet est nul, ou peu s’en faut. On retrouve donc une mécanique classique de deckbuilding anti-win-to-win (soit « je gagne donc je gagne encore plus ») qui est particulièrement violente dans ce jeu, du fait que l’on a que 3 cartes en main à son tour. 1 médaille + 1 base en main, c’est généralement un tour où l’on ne fait pas grand-chose.
Chaaaaaargeeeeeeez !
Chaque joueur, à l’instar de tous les jeux de deckbuilding, commencent avec la même base : 4 ingénieurs fournissant 1 ressource pour recruter, 1 technicien que l’on peut jeter pour recruter automatiquement un tank de valeur 1 (si disponible…) et 1 volontaire qui permet d’acheter plus d’un véhicule à son tour.
On a donc 6 cartes en deck et on pioche 3 à chaque tour, sans valeur d’attaque ni capacité de pioche, en gros on est dans la phase de préparation. Sauf manque de bol monstrueux, on en sort généralement avec au moins 1 tank dans le deck.
A son tour, on va commencer par réparer ses éléments abîmés par les méchants (les autres joueurs) et révéler sa main.
A partir de là, on va pouvoir faire 3 types d’actions, dans n’importe quel ordre, sachant que chaque carte ne peut servir que pour 1 seul type :
- Attaquer : on va pouvoir constituer un groupe d’assaut de tanks d’un même pays uniquement, puis les faire attaquer l’un après l’autre les cibles de notre choix. (détails sur la meule plus loin)
- Utiliser des capacités ou/et défendre : tout tank qui possède soit une valeur de défense, soit une capacité peut participer à cette phase. On peut d’abord activer les capacités si les icônes en question sont présentes, puis décider si l’on souhaite mettre le tank en défense devant une de nos bases ou non. Un tank en défense empêche d’attaquer la base directement tant qu’il se trouve devant elle.
- Recruter : les tanks possédant une valeur de ressources vont les cumuler pour permettre de se payer un tank disponible au centre de la table. À noter qu’une capacité permet de recruter plusieurs tanks, au lieu de la limite par défaut qui est 1 seul. Certains tanks vont également produire des ressources qui ne permettent de recruter que des tanks de leur pays à eux.
Les choix disponibles à chaque tour sont souvent assez cornéliens du fait de la limite de 3 cartes en main, il faudra faire des choix tranchés entre les types d’actions pour les faire efficacement.
Attention, ne pas se louper : les capacités des tanks ne se déclenchent QUE si on fait l’action permettant de les mettre en défense. Il est donc interdit de les utiliser en plus de les faire attaquer ou recruter.
Feu à volonté !
« Aaah, la douce odeur de la poudre brûlée au petit matin, et le tremblement de la terre sous le martèlement des obus venant transformer les tanks ennemis en amas de métal surchauffé… »
Dans WoT, le cœur de la stratégie c’est la gestion des combats de ses tanks. Chacun aura une puissance de feu de 1 ou 2 et un blindage de 1 ou 2 également.
Lors de la déclaration d’un assaut, il faudra composer un groupe ne comportant que des tanks du même pays qui possèdent une valeur de combat supérieure à 0.
Quand ce groupe est constitué, on va pouvoir assigner les cibles aux tanks l’un après l’autre.
Il peut s’agir soit d’autres tanks, soit d’une base et la résolution est simple et immédiate :
On peut voir que la destruction de base va donc demander des efforts particuliers tels que l’acquisition de tanks coûteux que sont les tanks lourds ou tels que l’obtention en main d’au moins 2 tanks d’un même pays, voire 3 si la base est défendue.
Or, en partant de 3 cartes en main, vous imaginez qu’il va falloir trouver des moyens d’épuration et de pioche pour arriver à ce résultat.
Quand vous aurez résolu tous les assauts, sachant que rien ne vous empêche d’attaquer des joueurs différents et de varier les cibles, vous allez vérifier les dégâts infligés et collecter les récompenses à mettre dans votre défausse :
- Pour chaque tank détruit, vous prendrez une médaille correspondant au pays de VOS tanks attaquants.
- Pour chaque base détruite, vous prendrez… la base en question.
Arrivés au stade de la confrontation directe dans le jeu, si vous découvrez qu’aucune main ne vous permet de faire attaquer plus d’un seul tank à la fois, rappelez-vous bien de comment vous avez acheté vos tanks et organisé votre deckbuilding sur les capacités de pioche et d’épuration (actions renforts et réparation).
Bah faut plus le faire, c’est nul 😉
Chef ? Alors on a gagné, chef ?
« Euh attends je regarde combien de médailles on a… »
La fin de partie va s’annoncer donc dès qu’un joueur va perdre sa dernière base ou si une pile de médailles simples est vide. Elle en compte initialement 9.
Le premier joueur ne changeant pas d’un tour sur l’autre, on terminera celui en cours évitant une fin sèche et donnant des chances égales à tout le monde.
On passe alors à la phase de décompte, où quelques surprises peuvent survenir vu que plus on aura de joueurs à la table, plus il sera difficile de suivre avec précision le type de tanks qui aura été acheté pour remplir ce genre d’objectifs.
Les médailles de pays ou les récompenses sur la destruction des bases seront généralement assez visibles pendant la partie et génèreront moins de surprise même si les scores peuvent être assez serrés suivant la réussite dans sa stratégie.
On additionne les 3 points de chaque base détruite (celles que l’on aura réussi à conserver ne rapportent rien), les points des médailles, on récupère les objectifs complétés et on compare.
Le décompte est généralement assez simple et on peut rapidement enchaîner sur la suivante en reprenant nos decks de base, en rendant les médailles et en re-mélangeant tous les tanks ensemble.
Chef ? On y retourne, chef ?
« Ouaiiiiiis ! »
Pour être honnête, le thème des gros trucs en métal qui se tirent dessus m’a laissé un poil froid, même s’il est correctement rendu dans ce type de jeu.
Pour le reste j’y retourne sans hésitation, car le jeu ne tombe pas dans des écueils de certains jeux de deckbuilding qui ont fini par me lasser.
Je donne donc un double-pouces-en-l’air à :
- La complexité modérée et la durée de partie courte qui me permettent d’y faire jouer des amis qui ont peur de se lancer dans Rune Age ou Thunderstone.
- La confrontation directe plaisante qui n’handicape pas trop violemment et qui permet d’éviter la frustration de se faire raser de près, mais évite la froideur du « chacun joue dans son coin ».
- Le système de deckbuilding malin avec les cartes de pays et les types de tanks qui se prend vite en main et avec la dose d’opportunisme sur la rivière et son renouvellement rapide évitant à la fois les stratégies redondantes et la problématique de blocage sur des cartes qui n’intéressent personne.
- Le plaisir immédiat de la destruction qui parle à mon cœur d’améritrasheur.
- Le système de main limitée à 3 cartes qui pousse un peu la stratégie et apporte rejouabilité et profondeur.
- Les configs qui tournent bien de 2 à 4 joueurs au vu de mes parties de test et rien qui laisse présager le contraire à 5.
- Les tours de jeu fluides et rapides qui limitent le « sur-combotage » d’actions / cartes.
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Umberling 06/10/2014
La dilution du deck est en effet très palpable, et on n’a pas très envie de se farcir les médailles ou les bases trop tôt. Par contre, des stratégies émergent très vite : la pioche, qui permet de se diluer en factions (de splasher), la recherche, qui permet de se garder un deck clean tout en faisant monter la valeur de son deck (mais qui prend du temps) ou l’achat avec des véhicules de faction. La façon d’attaquer découle naturellement de ces stratégies, mais l’interaction est quand même génératrice de perturbations, donc on se retrouvera souvent avec 2 factions dominantes et 1-2 « splashées ».
Olfenw 06/10/2014
Merci pour ce compte-rendu bien détaillé qui donne envie … Je ne vous remercie pas Ludovox 😉
Sha-Man 06/10/2014
Ah désolé mais je suis grand fan de deckbuilding, et j’avoue que celui-là est quand même assez frais.
Rien d’exceptionnel, mais enfin du bon bourre dans le tas avec du deckbuilding et des objectifs, pas seulement des points.
Dans le même genre, je ne te conseille pas de lire mes articles sur Rune Age et son extension « Le serment et l’enclume » puisque tu risquerais de ne pas me remercier vu que je suis un peu passionné quand j’en parle…
C’est mon jeu de deckbuilding préféré.
Zuton 21/03/2016
Une bonne surprise découverte seulement ce week-end, soit presque 2 ans après cet article (Sha-Man tu devrais te remettre aux JP !). Le jeu m’a bluffé et plu malgré des tours parfois à vide : 3 cartes, c’est pas bézef pour comboter…
Sha-Man 21/03/2016
Ah si seulement j’avais le temps…