Illustré par Chris Quilliams, Philippe Guérin
Edité par Next Move Games, Plan B Games
Distribué par Asmodee
Pays d'origine : Canada
Langue et traductions : Allemand
Date de sortie : 2016-10
De 2 à 4 joueurs
Durée d'une partie entre 30 et 45 minutes
Thèmes : Art, Médiéval
Mécanismes : Collection/famille, Draft, Tuiles
Types de jeu : Jeu de plateau
Complexité du jeu : Amateur, Familial
Azul est un jeu vous plaçant dans la salopette d’un carreleur d’azulejos. Vous remplissez les fresques du palais royal d’Evora. Créez les meilleurs agencements pour gagner le plus de points. Pour avoir une idée plus précise, Ludochrono et Just played sont là pour ça.
Le jeu n'a l'air de rien comme ça, mais est au final une évidence dès qu'on en connaît les principes. Et son historique ne détrompe pas : succès monstre lors de sa sortie au salon d'Essen, lauréat de l'As d'Or 2018 et du Spiel des Jahres 2018, le jeu des carreleurs a déjà un palmarès à faire rougir les plus grands.
J'ai pu faire jouer Azul à des groupes divers, plus ou moins experts, et dans toutes les configurations.
ACCESSIBILITE DES REGLES 19,5
Du côté technique, autant vous dire que j'ai complètement oublié ce qu'il y avait dans la règle tant elle est gravée en moi. J'ai donc été rouvrir la boîte pour l'inspecter, et, de façon assez peu surprenante, la règle était sans tache. Très bien illustrée, complète, elle ne manque de rien et pourra être mise entre toutes les mains.
QUALITE DU MATERIEL 17
Pour un jeu qui ne présente que du carrelage, Azul est tout de même fort bien loti. Entre les plateaux épais et clairs, les fabriques plutôt pas mal, les tuiles très agréables à manipuler (pas exactement raccord avec celles de la cover, mais il faut être vraiment tatillon pour y voir une rupture thématique !), le matériel enchante et fait son petit effet quand on le déballe face à des joueurs innocents. Et on a vite fait de jouer machinalement avec les tuiles défaussées pour faire d'autres motifs géométriques ; autant dire qu'il s'agit d'une grande réussite.
Quelques bémols : les cubes de score, noirs, discrets, sobres, pas à l'aune du reste, et qui bougent sûrement un peu trop facilement quand un plateau de score commun plutôt que personnel aurait été sans doute permis d'éviter ces errements. Si l'on pinaille, on pourra également arguer que le rangement un peu grand pour le contenu.
On n'aime pas : le prix de la boîte, un peu chérot pour son contenu. Et avec ça, deux des cinq ensembles de tuiles sont vierges. Pour les avoir illustrés, il faudra repasser à la caisse avec l'amère sensation d'être une vache à lait.
THEME 11
Autant le dire, le thème et l'histoire dégagées ne sont pas les forces d'Azul. En bon héritier de l'école allemande, le jeu multi-primé a plaqué un thème dont les éléments se raccordent peu ou prou aux mécanismes. L'immersion est en grande partie due à la matérialité des composants – que l'on salue une fois de plus – mais, malgré une belle exécution, Azul ne raconte rien. Et la façon de marquer des points, abstraite, n'aide en rien à se représenter le but ultime qu'est la décoration du palais d'Evora.
DUREE DE VIE 12
Azul n'est pas un titre infini : il est, au contraire, un des jeux les plus constants qu'il m'ait été donné de chroniquer. Mais cette constance est plutôt plaisante dans ce cas précis. Même si les défis proposés par l'opus sont les mêmes de partie en partie, les options pour parvenir à les surmonter sont toujours différentes et à considérer : il n'y a pas vraiment d'automatisme.
En revanche, l'expérience de jeu diffère vraiment avec le nombre de participants : à quatre, on se concentre sur ce qu'on voudrait obtenir quand à deux, c'est le denial qui prime. On souhaitera alors priver l'autre de ce qu'il lui faut tout en se taillant la part du lion, tout en blocages indirects et en calcul à plusieurs coups d'avance. Les décisions prises sont dès lors prévues contre l'adversaire, et malgré les règles très simples, c'est parfois assez cornélien : que prendre, que laisser, que mettre en pool commun ? Dois-je viser le remplissage de mes lignes pour ce tour coûte que coûte, ou tant pis si je termine plus tard ? Dois-je prendre le jeton premier joueur, pour qu'untel soit dernier à jouer ensuite, malgré le malus que cela me vaudra ? Me faut-il déclencher la fin de partie ce tour-ci ou est-ce que je tente le grand chelem colonne/couleur ? Avec peu de contraintes, on a des prises de décision fortes à chaque partie.
Pour les fanatiques du jeu, une face B des plateaux donnera un peu plus de liberté avec un plateau de carrelage vierge de tout patron, mais cela n'apporte pas autant de renouvellement que prévu : on se sent simplement plus libre de construire son sudoku de céramiques, et on le fera de façon tout à fait opportuniste. Enfin, on regrette un peu les tuiles Joker qui auraient pu faire partie du jeu de base et s'ajouter en variante, alors qu'ils coûtent un rein sur l'internet (un euro la tuile supplémentaire, rien que ça).
MECANISMES 15,5
Si l'on attendait l'auteur, Michael Kiesling, sur un point, c'était bien celui de la mécanique interne du jeu. Et, effectivement, Azul est d'une fluidité exemplaire. Mais si les tours s'enchaînent (en se ressemblant un tantinet, admettons-le sans honte aucune), les prises de décision ne demandent jamais la validation des autres joueurs. Parfois, lorsqu'un joueur est trop en avance lors d'une partie à trois ou quatre, on peut négocier un peu avec son/ses adversaires pour prendre le lot dont le premier a besoin, mais les arbitrages, collusions et négociations s'arrêtent là : on joue surtout pour son propre tableau, pour son score.
Toutes les configurations ne donnent pas le même jeu. À deux, l'ambiance studieuse s'installe : on est là pour gêner l'autre dans son développement et c'est bien plus appréciable, interactif et calculatoire que le jeu à quatre joueurs.
Azul abonde de bonnes idées : prendre des tuiles excédentaires remplit un Plancher de malus, ce qui donne, au final, une certaine latitude pour faire des erreurs ou pour contre-drafter les tuiles qui plairaient à l'adversaire par exemple. La position de premier joueur, parfois très enviable dans ce jeu de collection (surtout quand la partie avance et que l'étau se resserre), est transférable via une tuile particulière que l'on placera dans son plancher. À vous de voir si le jeu en vaudra la chandelle car les petites pénalités, à force, font quelques dégâts. Cela dit, le gros des points sera à prendre dans les bonus de fin de partie, par exemple parvenir à réaliser des couleurs complètes est très exigeant mais très bénéfique (10 points par couleur) ! Alors tout au long de la partie on se posera la question : petits points tout de suite ou gros points pour plus tard ?
Azul mérite ses lauriers, c'est certain. Accessible comme peu, d'une fluidité et d'une épure à toute épreuve, il se pare d'un matériel dont les capacités seules permettent de se raconter un bout d'histoire (ce qui n'est absolument pas couvert par le reste du jeu, redisons-le). Ce matériel se paie toutefois, et la stratégie de merchandising qui va avec est un brin agaçante.
D'une évidence mécanique rare, il fait partie de ces jeux dont on se demande s'ils n'ont pas toujours existé. En conséquence, Azul, face à ses contemporains, fait figure de classique et ne souhaite pas adopter de posture innovante. Mais pourquoi Plan B et Next Move se plieraient-ils à la course à l'innovation mécanique quand il suffit d'exécuter une partition classique aussi magistralement pour obtenir un grand succès ? C'est peut-être ce classicisme un peu froid qui m'empêche d'avoir le coup de coeur sur ce test.
- Marche toujours
- Fluidité exemplaire
- Le matériel
- belle profondeur pour des règles simples
- Classique
- Un poil cher
- Moins maîtrisable à 4 joueurs
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