Star Wars Unlimited – Dans une galaxie très familière…
Dans la multitude de jeux sortis, il y a parfois des jeux de cartes à collectionner. Ou des jeux de cartes évolutifs. Fantasy Flight Games s’était d’ailleurs fait le chantre de ces derniers, avec Game of Thrones, Horreur à Arkham, le Seigneur des Anneaux et Android Netrunner qui marquèrent durablement le paysage ludique. Mais d’autres à collectionner (Star Wars Destiny, Warhammer Invasion et Conquest) ou des entre-deux avec Keyforge et son système de decks unique et algorithmique. Tous ces jeux ont eu leur heure de gloire mais ont aussi, pour la plupart, cessé leur activité. En effet, rares sont les jeux de ce genre ayant tiré leur épingle du jeu : il faut avoir une communauté bien accrochée pour soutenir le jeu… et ceci ne se fait que si le jeu reste intéressant, continue à avoir une vie. Dans un écosystème papier largement dominé par Magic: The Gathering, Yu-Gi Oh! et Pokémon, l’arrivée fracassante de Lorcana change la donne l’an dernier. Il faut compter sur un autre mastodonte. Puis Altered et son Kickstarter un peu fou pour un JCC. Sans compter tous les jeux qui fonctionnent bien en ce moment (Flesh and Blood, par exemple). C’est dans ce contexte complexe que Star Wars Unlimited pointe le bout de son nez.
Dans un univers pas si lointain…
L’objectif est simple : réduire la base de l’adversaire à zéro point de vie. Pour ce faire : vos unités peuvent l’attaquer… ou attaquer les unités adverses. Mais attention : les unités au sol se cantonnent au sol, et les spatiales à l’espace. Ce genre de twist mécanique a déjà été vu et revu dans nombre de jeux de cartes (Magic en tête avec des capacités comme le Vol, ou Elder Scrolls Legends avec ses multiples champs de bataille à chacun alimenter d’unités), mais il paraît, à défaut d’être frais, limpide. On le verra, c’est une des constantes de design de ce jeu : il se veut accessible, peut-être la marche au-dessus d’un Lorcana, mais bien moins complexe que d’autres.
La structure du jeu est très libre, héritière d’années d’expérience de FFG : à son tour, on a le choix entre de nombreuses actions : jouer une carte, attaquer avec une unité, activer une carte, passer, prendre l’initiative (et être premier le tour suivant). On est loin des jeux qui vous proposent de réaliser votre tour en entier ; ici, chaque action peut trouver une réponse immédiate. Chaque mouvement est guetté, anticipé par l’autre.
Vous incarnez également un leader qui peut s’activer pour un effet bonus sympa. Mais quand la partie aura un tant soit peu avancé, hop ! Vous retournez votre leader et il descend sur le champ de bataille. Vous perdez sa capacité activable mais renversez le cours de la bataille. Avoir un personnage très fort comme cela vous permet notamment de signaler à votre adversaire une menace de taille à laquelle il doit répondre. C’est valorisant de déclencher cela, et on peut même vouloir réaliser un genre de course pour y parvenir.
Pour jouer des cartes, il faudra des ressources. Et ces ressources sont nos cartes elles-mêmes : à la manière de Lorcana ou Altered, on utilise nos cartes en tant que ressources. Cela offre des axes de réflexion : quelles cartes mettre en ressources ? Quand s’arrêter ? Il pourra être intéressant de décider de piocher deux cartes d’un coup et en fin de partie on se retrouvera rarement coincés à attendre que la carte du dessus du paquet soit la bonne : excellente décision.
Ces ressources, en effet, sont définies en début de partie mais lorsque les deux joueurs ont passé, ils piochent chacun deux cartes, et décident s’ils en mettent une en ressources.
Les pommes ne sont pas tombées loin de l’arbre : on reconnaît tout ce qui fait le succès d’autres JCC.
Est-ce que j’ai aimé ? Plutôt, oui. Je trouve les décisions du jeu plutôt intelligentes, voire très intelligentes. Il s’agit de gérer ses deux lignes de front, le spatial étant plus rare que le terrestre. Ces fronts sont autant de timers, d’outils de pression qu’on va mettre à notre adversaire. On aura toujours le choix d’attaquer l’adversaire ou sa base… mais c’est souvent au prix de sa propre capacité de réaction. L’aller-retour très intense entre les joueurs fonctionne à merveille mais l’ensemble manque pour moi de folie – après, c’est un premier set, ça sera vite étendu, et FFG aurait dit avoir deux ans et demi d’avance sur les produits –, mais peut-être que je ne considère pas ce genre de jeu avec un œil suffisamment neuf. En tout cas, j’ai préféré Altered pour ses innovations, et Lorcana me semble moins hostile et plus instinctif. Mais c’est sans doute un entre deux et un univers qui parleront à pas mal de gamers. (Star Wars tentant d’agiter chez moi une nostalgie inexistante ; de base les licences ne me parlent pas beaucoup mais alors celle-ci, elle ne me fait ni chaud ni froid.)
Si jamais on devait jauger Star Wars Unlimited sur le plan de l’innovation pure, on est un peu au ras du plancher. Mais l’ensemble des décisions orientant le gameplay cherche assez précisément à résoudre des problèmes récurrents de jeux de cartes à collectionner… et à créer un bon produit (on le verra plus tard).
Han tire toujours en premier
J’ai beau ne pas être super sensible au thème, il est là. Il aide. Difficile de ne pas voir plein de petites élégances à droite et à gauche sur la façon dont il fonctionne. Foin des dégâts qui disparaissent : vous les matérialisez via des jetons (certes fins dans les starter decks, mais autant vous dire que les gros joueurs les troqueront vite contre des substituts plus efficaces) qui restent de tour en tour. Des jetons Bouclier et Expérience viendront s’affixer à des cartes de façon très logique.
Et même au sein du design, on trouvera une thématique qui toujours souhaite appuyer, de façon peu subtile mais efficace, ses thèmes. Par exemple, C-3PO et R2-D2 sont indépendamment utilisables mais très synergiques. “Je suis ton père” fait juste assez de dégâts pour annihiler Luke (sauf si son contrôleur crie “noooon !”). Han Solo tire toujours en premier alors que le combat est ailleurs toujours simultané, Obi-Wan donne de l’expérience à des unités… La liste est longue.
Entre le moment de tension généré par la transformation des leaders sur le dernier tiers de la partie, le début demandant d’être rigoureux dans sa construction et toutes les petites pulsations thématiques, et l’action toujours alimentée par une pioche généreuse, on se retrouve avec un jeu qui a du mordant. On n’est jamais totalement à la rue, ou si c’est le cas, l’adversaire nous submergera en si peu de temps qu’on ne se confondra pas en une attente molle. Globalement, les bases arrivent en bout de souffle assez rapidement et on ne comptera pas plus d’une vingtaine de minutes par partie : bonne pioche.
Consumériste
L’économie de Star Wars Unlimited peut paraître complètement ruineuse de prime abord : des niveaux de rareté en veux-tu en voilà, la nécessité d’avoir un leader et une base avec son paquet de cinquante cartes, des traitements graphiques alternatifs à la pelle (hyperspace art, showcase leaders, foil), des cartes disponibles uniquement dans les starters… On en aurait le tournis. Mais en fait, certaines cartes communes et inhabituelles sont plus que viables, compétitivement parlant : on est loin de vouloir un deck plein de légendaires et de rares qui sont plutôt des cartes autour desquelles on bâtit une stratégie. Les cartes fixées dans les starters sont présentes en 3 exemplaires chacune (le max autorisé dans un deck).
Les collectionneurs tout crin, eux, auront de quoi faire : le consumérisme galopant et les multiples versions de chaque carte créent une collection difficile à compléter (et sûrement hors de prix). Mais vendre les cosmétiques sur le marché de seconde main est faisable et pourra certainement vous donner des billes pour augmenter votre collection normale, si le bling ne vous intéresse pas.
Il n’empêche que vouloir mélanger les collectionneurs et les joueurs n’est pas une mauvaise idée mais a des effets certains. Personnellement, je me fiche totalement des foils et des illustrations alternatives, mais payer un produit plus cher parce qu’il propose quelque chose dont je ne veux pas, bof, vous voyez. Et oui, revendre les cosmétiques ailleurs, ça se fait, mais si vous êtes végétarien vous n’achetez pas de sauce bolognaise en pot pour en retirer les bouts de viande sous prétexte que la conserve était disponible. Si vous vous jetez dedans soyez au courant que ça peut être moins coûteux qu’escompté, mais sûrement que ça demandera un peu de travail.
Formats et soutien
Star Wars Unlimited semble parfaitement taillé pour des environnements restreints comme le scellé et le draft (lire notre article sur le scellé à Lorcana) : en effet, son système de bases permet d’avoir accès peu ou prou à la moitié des cartes (vous additionnez les symboles de votre leader et de votre base). Mais mieux, il propose un mode multijoueur, le mode Twin Suns, à la manière du Commander de Magic. Avoir un environnement adapté au scellé ou au draft vivifie traditionnellement les communautés autour de l’acte d’achat (vous allez faire votre petit tournoi mensuel en boutique, achetez trois quatre paquets pour ce faire), assurant aussi l’adhésion des boutiques au produit.
Les formats multijoueur ont prouvé, eux, leur efficacité à accommoder les joueurs plus sociaux et plus occasionnels. Dans le mode Twin Suns, déjà développé, chacun des quatre joueurs joue pour sa peau avec deux héros (mais deux gentils ou deux méchants, pas moyen de faire le super moit-moit). En prime, comme dans le commandeur, les cartes sont limitées à un exemplaire dans le deck. Mais dès qu’un joueur est éliminé, le joueur l’ayant éliminé soigne sa base de 5 points de dégâts. Et une fois la manche en cours finie, hop, fin de la partie et celui qui a le plus de vie restante l’emporte. Si vous êtes éliminé tôt, vous n’avez donc pas à attendre. Je n’ai pas pu essayer ces modes de jeu, mais écoutez, pourquoi pas ! En tout cas, ça donne envie.
On note aussi d’ores et déjà une base de données officielle et un deckbuilder.
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zozo la fritte 23/03/2024
Essayé ce jour même, je ne lui trouve rien de révolutionnaire et un peu fade et super classique.
Le thème est bien attaché on retrouve la série originale.
cependant Destiny était bien laaaargement au dessus, dommage qu’Asmodée ce soit planté sur la distribution :/