Noria : N.O.R.I.A. Noria !
Où l’auteur, à la recherche d’inspiration, commence l'article avec n’importe quoi
Ah, la Moria ! Son Troll des cavernes ! Sa compagnie de l’anneau en goguette ! Ses Hobbits malicieux et maladroits ! Ses nains trop tôt disparus ! Son Balrog ! Son « Fly, you fools! » ! C’est donc ce lieu mythique et mystique que Sophia Wagner nous propose de redécouvrir dans son premier jeu !
Quoi ? Comment ? Que dites-vous ? Ce n’est pas Moria ? Ah ? Noria, N.O.R.I.A. ? Mazette.
Toutes mes excuses. Pouf pouf.
Ah, Gloria ! Ce célèbre titre de Van Morrison repris par Patti Smith ! Gloooooria, Dji, El, Oouo, Er, Ail, Ey ! C’est donc une variante de cette chanson que nous propose Sophia Wagner, à base de Walkyries, mises en boîte comme des Vaches qui rient.
Plaît-il ? Toujours pas ? Sapristi ! Quel boulet je fais. Avec un N et pas un Gleu ? Noria, comme la roue dans la Folie des Grandeurs, animée par d’anciens grands d’Espagne et servant à irriguer un palmier finalement dévoré par un gourmand dromadaire ?
Ah ! La Folie des Grandeurs ! Cet inénarrable classique du cinéma français réinterprété par Sophia Wagner dans son premier opus ! Le plus drôle c’est quand il tombe dans du chewing-gum ; ah non, ça, c’est Rabbi Jacob, pardon.
Bon, Noria, donc, par quel bout le prendre ?
Le thème : circulez, il n’y a rien à voir
Nos amis d’Outre-Rhin ne sont pas connus pour être particulièrement attachés au thème d’un jeu, voire même, diront certains camarades, sont spécialisés dans une esthétique « particulière » et posant question dès les boîtes mêmes de jeux. Si, il est vrai, je ne me suis jamais trop remis de la vision de l’illustration de Goa ou encore d’Imperial, je n’ai personnellement rien contre la plupart des illustrations des boîtes de jeux allemandes, étant même sensible à l’esthétique rosenbergienne (oui, si on veut faire accéder le jeu au statut d’art, il va bien falloir en passer par l’utilisation de pareils mots). Mais il faut dire que je n’ai pas spécialement de goût. Je ne vois par exemple pas en quoi porter des chaussettes avec ses Birkenstock est choquant ; même si je ne le ferais pas.
Mais pourquoi cet animal parle-t-il des illustrations dans un chapitre consacré au thème ?
Pour deux raisons : parce que l’esthétique travaillée aurait pu promettre un certain thème (faut-il être naïf !) ; et qu’il ne faut pas rechercher le thème de ce jeu, au risque d’être fort déçu.
D’ailleurs, les règles expédient en quatre lignes l’univers et renvoient vers un site pour en savoir plus. Et que trouve-t-on dans ce site ? Des règles pour un joueur et de quoi s’abonner à une newsletter. Pas le moindre indice supplémentaire sur l’univers enchanteur de Noria. Autant dire que les espoirs d’un monde steam-punk un peu travaillé sont vite douchés.
Adieu aussi les espoirs suscités par des illustrations swiftiennes ou miyazakiennes. Le jeu aurait pu se dérouler à l’époque d’El Grande (soit donc précisément dans le même pays que La Folie des Grandeurs), qui lui-même aurait pu prendre place chez les Papous, il aurait été le même.
Ne vous attendez donc pas à vivre une grande aventure, nous sommes dans un pur jeu à l’allemande, avec une mécanique pure. Ouvrons donc le capot pour voir si elle capote ou pas.
Principe du jeu
Où l’auteur prouve l’intérêt d’être fainéant
Les règles de Noria ayant déjà été suffisamment expliquées sur ce site pour comprendre ce qui va suivre, je vous renvoie derechef à cette saine lecture : Noria : la roue tourne, tourne la roue !
Même si je suis fainéant, je me fendrai néanmoins de quelques remarques liminaires sur le sujet des règles.
Les règles sont globalement claires, même si certaines explications auraient été tout aussi claires en étant plus concises. Elles démarrent en parlant de la façon de gagner des points en fin de partie, ce qui est une bonne chose à faire lors de l’explication orale, mais qui me convainc moins à l’écrit.
Certains points importants sont mal placés, comme un paragraphe situé à la fin des principes de base et intitulé « Avant le premier tour » qui aurait été plus facile à retrouver en étant dans la partie « Mise en place » : ce point stipule qu’il faut placer un de ses marqueurs sur une des pistes de score et risque de passer inaperçu, quoique important. C’est ce genre de détail qui risque de générer des erreurs de règles et les erreurs d’appréciations du jeu qui en découlent.
Le nombre de tours est connu d’avance et ne dépend que du nombre de joueurs. On a donc un certain temps pour marquer des points, ce qui simplifie la réflexion par rapport aux jeux où on peut décider plus ou moins directement de la fin de la partie.
La lecture des règles permet de comprendre qu’on a affaire à un jeu de ressources très classique : on récolte des ressources, on les transforme en marchandises et on peut transformer ces ressources ou ces marchandises en points de victoire. Du rabattu, donc. On peut d’ailleurs quand même noter l’effort touchant de thématisation des noms de ressources : nous trouverons donc du mycélium (plus original que du jambon), de l’obsidienne (plus piquant que le sempiternel caillou) et… visiblement à bout de souffle et à court d’idées, l’auteure nous propose de l’énergie (oui, vous me direz, c’est toujours plus original que de l’or ; mais on aurait pu reprendre l’idée très steam-punkesque de la vapeur trouvée dans le très dornien Steam).
Quant aux marchandises, elles ont des noms si chatoyants que je n’ai même pas tenté de les retenir. Voyez plutôt.
Mais si nous nous astreignons à nous dessiller les yeux afin de découvrir la gemme tapie dans sa gangue, nous remarquerons promptement deux originalités.
La première consiste à introduire des contraintes qui font qu’il n’est pas aisé de réaliser la chaîne : « produire, transformer, marquer des points ». Je parle évidemment ici du mécanisme de la roue que nous allons approfondir plus avant. Cela m’a évoqué Kanban. Concernant ce dernier, dans mon souvenir il était assez clair qu’il fallait récolter du matériel, puis construire des voitures, puis les expédier, mais il n’était pas du tout facile de le faire dans le bon ordre (encore qu’il soit contestable que le but dans ce jeu soit de produire des voitures…).
On peut également penser au récent Otys, qui lui aussi propose une mécanique de base simple (récolter des ressources, réaliser des contrats) dont l’optimisation est rendue compliquée par ce qui en fait son originalité, le système d’ascenseur.
En revanche, j’ai souvent vu des allusions à Tzolkin, plus liées à mon avis à la présence de roues qu’à une réelle parenté des mécanismes. Tout au plus peut-on recycler les jeux de mots pourris qui ont fait florès à l’époque : « ça tourne bien », « une mécanique bien huilée », « et pourtant, il tourne »… Tzolkin est, fondamentalement, un jeu de pose d’ouvriers à effet différé ; ici nous sommes plutôt dans un jeu d’optimisation d’actions sous contrainte. Mais cessons cette cuistrerie ludique.
La seconde originalité vient du fait que les joueurs peuvent influencer les points rapportés par chaque piste de score. La progression sur chaque piste ne relève pas du même défaut de difficulté. Normalement, les points générés par chaque piste sont à l’aune de cette difficulté. Cependant, la phase politique permet d’accroître les points générés par une piste et d’amoindrir ceux potentiellement générés par une autre piste. Il y a un aspect pari, partir seul sur une piste ne sera pas bon si on ne parvient pas en outre à faire croître les points gagnés sur celle-ci.
Il faudra donc contracter des alliances de circonstances, surveiller ses adversaires du coin de l’œil (du bon coin) pour voir s’ils sont en mesure de ruiner vos efforts.
Ce mécanisme évoque d’autres jeux et, pour des raisons liées à ma mémoire, seul le nom d’Imperial parvient à accéder à mon cortex supérieur : dans ce jeu également, si vous êtes les seul à acquérir des parts d’un pays, personne ne vous aidera à faire monter la valeur de ses parts. Cela génère des alliances de circonstances ou l’obligation d’avoir les moyens de faire fructifier seul ses investissements.
Les pistes de score à double progression : il est plus facile de progresser sur celles de gauche mais elles rapportent normalement moins de points ; mais attention, rien n’est joué, on peut manipuler les cubes gris pour faire varier le rapport relatif des pistes.
Le matériel
Nous l’avons déjà signalé, nos amis outre-rhénans ont sorti leurs plus beaux pinceaux pour illustrer ce jeu. Le verso du plateau figure même l’illustration non entachée par l’iconographie nécessaire au jeu.
À quoi cela sert-il ? Mazette ! Déjà, l’art ne sert pas nécessairement voyons ! Ensuite, cela peut permettre une variante intéressante du jeu dans lequel on pose les éléments en tâchant de se rappeler à quoi l’emplacement correspond. Enfin, vous pouvez toujours l’encadrer pour agrémenter votre pièce. Il y a bien des gens qui mettent ce genre de choses sur leurs murs, ce n’est pas pire :
Le matériel est globalement bien conçu et j’apprécie particulièrement l’aide de jeu située sous les roues, qui soutient à la fois les explications et permet aux néophytes de s’y retrouver rapidement au cours des premiers tours.
Voyez un peu la belle table que le tout nous donne :
Comme il faut bien rouspéter un peu, outre les pions qui servent de marqueur de tours qui sont un peu trop riquiquis, je signalerai deux limites assez gênantes.
La première est que les chiffres qui indiquent le coefficient multiplicateur de la progression sur les échelles de score se voient très peu car ils sont trop petits. Si on passe trop vite dessus lors de l’explication des règles, on peut avoir de fausses idées sur le décompte. Plusieurs joueurs, peut-être peu attentifs pendant l’explication, ont eu une révélation tardive (en milieu de partie) sur la façon de décompter les points, ce qui a nui à leur stratégie de début de partie. Ce genre de petits détails éditoriaux peut regrettablement affecter la réception d’un jeu par ailleurs travaillé.
Les chiffres servant au décompte de points, assez peu lisibles par rapport aux autres informations.
La seconde, sans doute encore plus pénalisante, est qu’il faut être très vigilant lorsqu’on tourne les roues afin d’éviter que les jetons d’action ne passent sous elles. Je crois que je n’ai pas vu une seule partie (sur cinq) sans que tôt ou tard un joueur moyennement maladroit ne constate, dépité, qu’il a joué un bout de partie avec une ou deux actions de moins car les jetons s’étaient perdus dans les brumes de l’espace-temps rotatif.
Mais trêve de chipotage, nous sommes des enfants gâtés ! Rappelons-nous le matériel des années 80, voire 90…
Ah, et si vous vous demandez à quoi servent les pions numérotés de A à F (si je puis dire), ils servent à la règle du jeu solo (particulièrement apprécié de Yann).
L’avis des joueurs
On le sait, Noria a fait des déçus. Peut-être l’attente du jeu allemand à thème fort suggéré par les illustrations ? Noria n’est en rien ce messie ludique, la mécanique est assurément froide, détachée.
Comme je m’étais engagé à écrire un Just Played sur ce jeu et que les premières parties m’avaient laissé perplexe, j’ai insisté. Je renâclerai en effet toujours à parler en mal d’un jeu sur un média en ayant trop peu d’arguments pour le faire.
J’ai donc fait une partie à deux, puis une à trois, et puis trois à quatre. Comme en cette période je pratique l’échangisme ludique, je n’ai pas dû avoir plus d’un partenaire commun sur ces parties, ce qui en fait onze. Je ne les ai pas débriefés intensément, mais je leur ai posé de subtiles et adroites questions pour me donner des idées, du genre « alors, qu’en avez-vous pensé ? ». Mis à part un joueur qui a dit que ce n’était pas son style de jeu et qui a clairement affirmé ne pas avoir aimé, les autres étaient moins mitigés, voire positifs. Les retours autour de moi vont du « je n’ai pas spécialement envie d’en refaire une autre sans savoir dire pourquoi ; j’ai bien aimé le système de scores avec ses pistes mais le principe de la roue ne m’a pas plus emballé que cela » au « j’en garde une bonne impression ; on trouve un bon niveau d’interaction entre joueurs, le système des roues est intéressant, la diversité de stratégies également ».
De ce que je peux en déduire de mon petit bout de la lorgnette, ce jeu ne suscite pas une adhésion générale et ne révolutionne pas le monde ludique (mais quel jeu le ferait encore ?), mais il a tout à fait sa place dans le milieu actuel et mérite qu’on s’y intéresse, d’autant qu’il est la première œuvre de son auteure.
Nous allons tâcher d’approfondir tout ceci dans la partie suivante.
Alors, heureux ?
Comme il ne ferait guère sérieux d’être un chroniqueur béat qui semble apprécier tous les jeux auxquels il s’essaye mais comme il ne serait guère responsable non plus de dire du mal d’un jeu après une première expérience ratée (je me rappelle de la mauvaise presse qu’avait reçu Die Händler von Genoa à sa sortie et qui avait conduit pas mal d’internautes à le rejeter bien à tort car ce jeu original gagne à être connu), je vais tâcher de mettre de l’ordre dans mes impressions partagées en décrivant de la façon la plus objective possible ce qui peut rebuter selon le profil psycholudique et ce qui au contraire est indubitablement une preuve d’un bon jeu.
Si vous recherchez, pour pimenter votre vie ludique, des jeux dont le thème est reflété par les mécaniques, ce jeu n’est assurément pas fait pour vous ; il est dans la droite ligne de l’école allemande, cela ne fait aucun doute. Les illustrations originales ne sont que de façade et ne parviennent pas à cacher longtemps que nous avons affaire à une mécanique pure. Dans ce cas, je ne peux que vous conseiller de jouer à La Guerre de l’Anneau ou encore Star Wars : Rebellion (qui sont un poil plus longuets à jouer).
Plus gênantes sont les petites erreurs d’édition déjà mentionnées (coefficients multiplicateurs de points de la progression sur la piste et les jetons qui passent sous les roues). Si vous ne voulez pas que l’intérêt de votre partie soit obéré et votre analyse du jeu biaisée par ces aspects, vous devrez redoubler d’attention, ce qui en soit peut gâcher le plaisir ludique.
La mécanique générale est extrêmement classique et revue : collecte de ressource, transformation, acquisition de points (à la belle époque, on faisait cela avec du cochon, du caillou, et on construisait un château même pas dans le ciel). Elle est compliquée par le mécanisme des roues qui pourra laisser froid ceux qui n’ont pas envie de se confronter à ce qui peut sembler un artifice ludique car l’essentiel du jeu est là. On peut légitimement avoir l’impression que cette sophistication est le fruit d’une maladresse d’une première œuvre mais, sans anticiper sur la partie suivante, ce serait se montrer trop sévère car cette mécanique pose des questions intéressantes.
Le système de décompte des points à double entrée (progression sur la piste ; manipulation de ce que rapporte la piste) peut également gêner ceux qui n’aiment pas voir le fruit de leurs efforts ruinés par de basse manœuvres politiques.
Enfin, on peut avoir l’impression que les parties vont se ressembler ; mais ça, c’est souvent le genre de bêtises qu’on dit un peu vite après une première partie, je suis à peu près persuadé que des joueurs imaginatifs et habiles peuvent tirer de la mécanique du jeu des dynamiques de parties qui ne se ressembleront pas.
Du choix dans les roues
Le jeu propose de vrais choix qui ne seront sans doute pas les mêmes selon le nombre de joueurs (je n’ai pas assez d’expérience pour tirer de conclusions sur ce point). Parmi ces choix, on a les questions de l’ouverture : par exemple, va-t-on choisir d’utiliser son premier jeton de connaissance pour faire de la politique de façon précoce tant que ce n’est pas cher ou pour faire tourner la roue de façon à optimiser les actions de ses premiers tours ?
Comment va-t-on choisir d’améliorer les actions présentes sur sa roue ?
Sur cette dernière question, on peut se dire que la roue centrale est la plus importante à compléter, car, si on y rajoute une deuxième action, elle permettra de faire une action à chaque tour ; des esprits plus subtils que le mien auront sans doute de bons arguments pour me faire remarquer que ce n’est pas si évident. Mais admettons. Quelle action rajouter ? Considérons les quatre ouvertures suivantes :
Évidemment, on peut aussi considérer l’option de mettre une action de production afin de générer massivement une ressource (par exemple de l’obsidienne pour progresser rapidement sur la première piste).
La première option dite du « fainéant » (pourquoi le fainéant ? Parce qu’elle permet de s’abstenir d’avoir à tourner la roue du centre) permet d’être sûr de pouvoir à chaque tour se rajouter des actions et donc optimiser sa roue ou de progresser sur les pistes dès qu’on le peut. Assez efficace.
La deuxième option, dite du « voyageur » permet de voyager au moins un tour sur deux et donc de découvrir des îles, qui permettront à la fois de construire des usines pour produire des marchandises (relativement peu utiles en début de partie) et pour récupérer les jetons connaissances (beaucoup plus utiles dès le début de partie pour manipuler sa roue ou faire de la politique) ou d’augmenter sa production de ressources en récupérant des bateaux. Les voyages permettent d’augmenter son savoir et de s’enrichir, c’est bien connu. Assez efficace.
La troisième option, dite du « marteau », permet d’améliorer précocement sa roue en retournant les jetons d’action pour doubler sa capacité et d’être prêt à produire des marchandises. Je suis moins convaincu de son efficacité car, lors d’un tour, une seule action peut être doublée : avoir trop de jetons retournés peut ne pas être très utile. Mais j’ai vu des personnes fort bien utiliser cette ouverture, utile du reste si on part sur la production de marchandises. Assez efficace donc.
La quatrième option, dite du « bonus » permet de doubler n’importe quelle action un tour sur deux. Je ne l’ai jamais essayée car j’ai toujours joué à la partie d’initiation où ces jetons coûtent quatre ressources, ce qui me refroidit un peu, mais avec d’autres mises en place initiales où le bonus a un coût plus faible, cette option doit être à considérer. À voir donc.
Ces quatre options d’ouverture (cinq si on rajoute l’option ressources) montrent qu’il y a des choix à explorer et que l’on peut combiner avec d’autres choix à faire : aller récupérer rapidement des jetons connaissances ou améliorer sa productivité de ressources en voyageant, se focaliser tôt sur la politique pour clarifier les options ou au contraire cumuler sa connaissance pour frapper au bon moment (mais à un coût plus élevé et donc moins efficacement), se focaliser sur les pistes ressources moins rémunératrices ou se lancer dans l’option plus compliquée mais plus prometteuse de production de marchandises ; essayer de progresser sur les quatre pistes et miser sur le coefficient multiplicateur de la plus faible progression ou au contraire tout miser sur une piste, la valoriser au maximum et valoriser également la piste qui récompense la meilleure progression. Bref, cela fait déjà beaucoup de questions et il m’en échappe sans doute beaucoup d’autres.
Comme les mouvements de la roue sont prévisibles, on ne peut que s’en prendre à soi-même si on la construit mal : ce mécanisme de « wheel-building » (construction de roue) est donc plus maîtrisable en soit que les mécanismes apparentés de « deck-building » et de « bag-building » où on est suspendu à ce que l’on pioche ou que l’on tire. Là, pas de hasard et les réfractaires à Fortuna souvent adeptes des jeux germains devraient y trouver une certaine satisfaction.
Enfin, soulignons que les actions présentes sur les trois roues reviennent toutes en moyenne un tour sur deux, mais pas avec la même fréquence : les deux actions de la roue centrale vont strictement revenir un tour sur deux, tandis qu’une action de la roue extérieure va être présente trois tours de suite, puis absente trois tours de suite. Ceci permet aux plus optimiseurs de se proposer un petit casse-tête ludique intéressant (mais pas insoluble) ; et les anti analysis-paralysis s’en sortiront assez bien en se fiant à leur instinct et en recourant aux moments critiques aux jetons de connaissance pour manipuler leurs roues.
Bref,
J’espère vous avoir convaincu par cette ébauche d’analyse au demeurant assez primaire que ce jeu va bien au-delà du mécanisme de production-transformation-récompense qui le rendrait plan-plan et que le mécanisme double des actions-roues à construire et des pistes de scores à double entrée donneront du fil à retordre aux joueurs les plus chevronnés et en quête de brise-neurones.
Si ces quelques lignes ont suscité votre curiosité, je vous engagerais donc à vous faire votre propre avis ou à redonner une seconde chance à ce jeu si vous l’aviez rejeté sous prétexte bien compréhensible d’excès de sorties ludiques.
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Grovast 13/04/2018
Merci pour cette intervention fort bien tournée sur le fond et la forme. Entre le clin d’œil (fort à propos) au chasseur TIE, le concept de cuistrerie ludique, et autres rigolades, je me suis largement gaussé.
le zeptien 02/05/2018
Un monsieur Meeeuuuhhh à la prose reconnaissable entre mille. Merci pour cette longue et patiente présentation. je dis patiente car il est pas facile de creuser un jeu que l’on apprécie pas totalement. J’avais jeté un œil intéressé sur Noria durant le festival du jeu de Montpel’, mais du coup, je vais un peu plus réfléchir maintenant. Au fait, je vois que bien années après, vous ne vous êtes toujours pas remis des mauvais avis sur Die Händler von Genoa. Je pourrais citer les noms des coupables, mais bon, il y a prescription depuis… en tout cas merci pour cette belle présentation. 🙂
atom 03/05/2018
Ce jeu m’attire et cela malgré les retours mitigés. J’ai la sensation qu’il pâtit comme Otys d’un positionnement pas clair. Trop gamer ? Pas assez pour les joueurs ? Il me semble qu’il y a de quoi faire avant de le jeter aux orties. Je vais finir par l’acquérir pour me faire ma propre idée. Excellent article sur la forme et sur le fond.
eolean 03/05/2018
Il est curieux ce jeu, j’en discutais justement hier avec un ami. Il est intéressant car le système de la roue et du scoring est intéressant. Mais on a là, selon moi, l’exemple parfait d’un jeu qui induis une nouvelle mécanique, mais où l’intégration des différents systèmes n’est pas fluide. Au final, je dirai que le jeu ne « coûle » pas…
J’ai eu la sensation d’un jeu plutôt bon, intéressant mais sans avoir envie d’y revenir. Comme si on avait fait le tour après la première partie… Tu nous diras ce que tu en penses 🙂
Meeeuuhhh 03/05/2018
Merci de vos retours.
Pour Die Händler von Genoa, M. Le Zeptien, l’idée n’est pas en effet de pointer des coupables, mais plutôt de souligner la qualité du jeu et qu’on a failli passer à côté et que, même si la production ludique fait qu’on peut passer à côté de pleins de jeux sans pour autant rater sa vie ludique, c’est toujours dommage.
M. Eolan, votre réaction est celle de quelques-uns des joueurs que j’ai eus à ma table « jeu plutôt mais sans envie d’y revenir ». Je me suis « forcé » à y revenir et je n’en suis pas déçu… Si vous avez l’occasion, je serai curieux de vos retours.