Looot y es-tu ?
Looot, avec trois o, c’est la nouveauté Gigamic la plus mise en avant par l’éditeur cette année sur la Croisette. On retrouve aux manettes Charles Chevallier (Abysss, Kanagawa…) & Laurent Escoffier (Loony Quest, Corto, Pix...), les auteurs qui étaient derrière Cap Color. Mais si, souvenez-vous cette belle idée de jeu de société “papier” (ou jeu de coloriage malin malinou), qui demandait aux joueurs de colorier des zones adjacentes d’un paysage pour tenter de remplir des objectifs avec cette simple contrainte de l’adjacence. Les auteurs ont d’abord repris l’ADN de ce concept simple comme bonjour pour le transformer en Combo Color (photo ci-dessous) une boîte pleine de plateaux effaçables (on vous en parlait en 2020 de ce côté là). Désormais, l’idée revient en jeu de plateau avec un univers Viking tout choupinet illustré par Naïade (Tokaido, Seasons, Tanuki Market, Snow time, etc).
Quel chantier ton fjord !
Vous ne coloriez plus, mais le geste de l’adjacence demeure proche, dans l’idée. En gros, vous placez un de vos Meeple Viking à côté d’un autre (votre ou adverse), et se faisant vous récupérez un jeton de ressource correspondant à la case (moutons, bois, or, haches) qui viendra sur votre plateau personnel, aka votre Fjord. C’est tout ! Ou presque. Vous pouvez aussi capturer des bâtiments : maisons, tours de guet, châteaux ont des règles de capture diverses, mais tout dépend toujours de l’endroit où vous avez pu placer vos vikings sur le plateau commun. Ainsi, l’effet course est bien présent sur cette zone centrale, mais Looot joue sur les deux tableaux, car votre Fjord requiert aussi beaucoup votre attention. De base, ce dernier comporte trois Chantiers : des cases qui vous demandent de placer tout autour certaines ressources ou bâtiments, contre des points de victoire. C’est déjà un premier axe de scoring que vous aurez envie d’honorer.
Sur votre Fjord, tout se joue dans l’agencement de vos jetons ressources et dans la prise de nouveaux objectifs (jetons Drakkar). Si vous placez tout ce petit monde astucieusement, vous pourrez profiter de synergies pour marquer un max de points. En effet, à l’instar des Chantiers, un jeton Drakkar requiert des ressources spécifiques qui doivent venir l’encercler, alors celui-ci pourra bonifier un scoring qui vous encouragera dans un axe de pose ; le top du top étant bien sûr d’agencer les choses pour que vos ressources valident plusieurs objectifs. Mais serez-vous trop gourmand, à prendre un Drakkar de trop ? Vous pouvez techniquement prendre un Drakkar par tour, mais saurez-vous faire fructifier tout cela sans vous bloquer ? D’autant que le Drakkar non validé vous vaudra une pénalité de 5 points à la fin.
J’avance, je te bloque
Chaque choix de pose de viking aidera toujours plus ou moins les autres dans leur propre progression (règle d’adjacence souvenez-vous), donc on hésite toujours entre prendre telle avance ou jouer la carte de la prudence. Si un Viking permet d’avancer dans nos desseins tout en bloquant l’adversaire, on ne va pas se priver. Avec les Drakkars aussi, plus la partie progresse, plus l’étau se resserre sur vos options – et ce que les autres cherchent à faire mérite un peu de surveillance pour éviter de se retrouver la hache dans l’eau. Bref, l’interaction est assez omniprésente, sans être agressive.
S’ajoute à tout cela deux petits éléments qui viennent relever la question de l’opportunisme dans le jeu. D’une part, la possibilité d’utiliser un pouvoir (entre “joue encore”, “place un viking sur une case déjà occupée”, et “gagne deux fois la ressource”) qui permettra de donner un petit coup de pouce opportun, pour la capture d’un bâtiment ou la réalisation d’un objectif par exemple. C’est le petit truc en plus qui pourra vraiment débloquer une situation, le petit patch d’adaptabilité qui peut rester anecdotique ou faire la différence, à condition de l’utiliser à bon escient.
D’autre part, la possibilité de prendre un Trophée. À la Augustus, vous avez droit à un seul Trophée dans la partie, et ils sont tous uniques. Petite question de timing ici aussi, car il faudra se décider au bon moment sans retour arrière possible (et là encore, il faudra surveiller les desseins adverses). De quoi ajouter une petite couche de choix sans non plus écraser les joueurs. Car dans Looot c’est l’épure du système qui est à souligner, d’autant qu’elle amène une fluidité remarquable.
Un butin des familles
Voilà donc un beau jeu d’agencement accessible offrant sans en avoir l’air une petite marge de progression pouvant bien donner envie d’y revenir. Rien de révolutionnaire ici : l’idée recyclée de Cap Color, de l’agencement et des objectifs à la Savannah / Caldera Park, des trophées à la Augustus… Malgré cela, Looot s’inscrit parfaitement dans la tendance actuelle, avec ce game design où vous construisez vous-mêmes votre scoring et vos contraintes (Cascadia, Akropolis, Harmonies…).
On comprend pourquoi Gigamic le met en avant pusiqu’il remplit tout le cahier des charges pour séduire une audience large : un principe accessible, des règles contenues, un tour de jeu fluide mais non sans dilemmes permanents (et crescendo) dans une durée maîtrisée, une interaction réelle mais familiale, une ergonomie impeccable, sans oublier les illustrations de Naïade. Looot a cet atout pour lui d’être un jeu métamorphe : il peut se jouer tranquillement dans un contexte familial ou augmenter sensiblement son espace de décision avec des joueurs qui taquinent. Le tout débarque en mai prochain.
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atom 30/03/2024
Le jeu est dispo sur BGA en Beta pour ceux que ça intéresse. Looot est très agréable, il offre un bel espace de décision et une grosse marge de progression, très satisfaisant quand on réussit à bien placer ses objectifs et à en réaliser plusieurs à la fois. J’adore ce principe d’objectif que l’on doit réaliser, mais c’est nous décidons si nous voulons les jouer et il faut bien réfléchir à leur placement sans quoi on va se punir tout seul, ce qui va arriver parfois si on est trop gourmand.