Gosu X : eXpert Game
Gosu de Kim Satô (initialement sorti en 2010) est un jeu de cartes à combo et d’affrontement qui avait indubitablement ses fans. Une suite est parue en 2012 nommée Gosu 2 : Tactics, une suite ou plutôt une ré implémentation comme on dit, vu le nombre de modifications – mais on y revient. Gosu X est donc la toute nouvelle version. C’est aussi un peu une Arlésienne car maintes fois annoncé et repoussé, mais on peut difficilement reprocher à un éditeur de prendre le temps de travailler son titre. À noter : ce dernier avait mis à disposition une version print and play en PDF pendant le confinement afin que les joueurs puissent le tester. Là aussi, une démarche qui augure du meilleur ; après tout, on ne prend pas ce genre de risque si le jeu est “broken” ou faillible.
De mon côté, je ne connaissais Gosu que de nom, mais j’avais eu l’occasion d’essayer cette dernière version sur le festival de Vichy et j’avais été plutôt surpris par le jeu et sa mécanique, mais aussi sa violence et le temps d’apprentissage nécessaire.
Logiques de Clans
Dans Gosu, nous avions un deck de cartes commun aux joueurs, et nous avions 5 clans de Gobelins différents – d’où le nom Gosu : Goblins Supremacy. Dans cette version X, nous en avons désormais 8, tous très typés. L’autre chose qui a changé, c’est le mode de sélection : en effet, exit les pioches communes, avant de débuter le combat, nous draftons, non des cartes mais des clans. Un joueur choisit un clan, son adversaire deux clans, puis c’est au premier joueur, qui ajoute deux clans, et enfin son adversaire prend un dernier clan.
Ce mode de sélection permet de bien se préparer des futures combos car chaque clan est typé. Par exemple, avec Phoenix on va surtout avoir des mots clés piocher ou rejouer ; avec Goan-Sul, on sera plus sûr du capturer / détruire ; avec Galmi, on axe plutôt le soutien (et le gain des égalités).
On ne va pas se mentir, lors de la première partie, vous choisissez les clans qui vous plaisent visuellement, ou les couleurs qui vous parlent. Par exemple, en tant qu’“ancien habitué” des conventions Magic, Phoenix m’évoquait l’eau (et oui) et des pouvoirs accélérateurs, tandis que Goan Sul en rouge sentait plutôt la foudre. Justice comme son nom l’indique, va jouer sur des effets d’équilibre. Mais évidemment, plus on joue, plus on connaît le jeu, et plus on comprend les synergies que l’on va pouvoir mettre en place entre tel ou tel clan.
Si vous savez comptez, il existe huit clans, on en sélectionne trois chacun, il en reste donc deux, et cela non plus n’est pas négligeable, car les deux restants vont ajouter des règles pour toute la partie. D’ailleurs certains peuvent être vraiment pénibles (comme Narashima qui limite notre main à 5), ou au contraire bien utiles à notre jeu (comme Tomorrow qui donne la capacité Echo aux cartes de niveau 3).
Le gout du sang
Une fois que vous avez mélangé vos 3 decks de 15 cartes, vous en piochez 7 pour débuter la manche.
À son tour, le joueur actif peut poser une carte ; dans ce cas, il la place devant lui et active les effets. Nos cartes ne sont pas posées n’importe où sur la table, mais placées de gauche à droite et de bas en haut. Les troupes débutent en bas, les héros au milieu et les immortels tout en haut.
La toute première carte doit toujours être de niveau 1 et ne coûte rien, idem d’ailleurs pour les cartes du même clan. Par contre, pour placer une carte d’un autre clan, il faudra payer (donc défausser) deux cartes, et bien sûr contrainte oblige, on ne peut pas placer de carte niveau 2 si l’on n’a pas de cartes niveau 1 du même clan.
On se retrouve donc avec nos 7 cartes en main planifiant nos actions au mieux : par quelle carte je vais commencer, pour prévoir quelle combo ensuite, etc.
Le joueur actif peut aussi déclencher une carte précédemment posée. Enfin, il peut passer – car oui on n’a que 7 cartes en main, donc soit on trouve le moyen de piocher plus de cartes pour faire durer le tour (et il existe plusieurs moyens de le faire), soit on finit par passer. Ici, passer peut être un geste stratégique : votre adversaire pourra réaliser que trois dernières actions ; s’il avait prévu de jouer plus, dommage pour lui.
On peut aussi piocher des cartes en utilisant un ou deux de ses jetons d’activation, mais ça sera au détriment d’une activation.
Il est aussi possible de « relever » une carte, c’est-à-dire remplacer une carte présente dans son tableau par une autre. Bien sûr, quand on débute on ne voit pas beaucoup d’intérêt à cette action, d’autant qu’elle coûte des cartes qui se révèle avec l’expérience : par exemple, cela permet de remplacer une carte de notre « tableau » par une autre plus adaptée, qui plus est en la protégeant de la destruction.
Une fois la manche terminée, on compare les forces en présence. Le gagnant remporte la grande bataille et surtout repart avec un jeton suprématie. Au bout de deux, il gagne la partie. Un élément qu’il ne faut donc pas négliger !
Se révèle déjà un des gros twist du jeu : nous avons plusieurs moyens de remporter la partie, soit avec deux jetons suprématie, soit en ayant cinq jetons d’activations (on débute avec deux), soit en remplissant son tableau, c’est-à-dire si l’on a 15 cartes devant soi (bon courage !). Mais il existe encore d’autres moyens de l’emporter, tout dépendra des clans en jeu.
Après une grande bataille, on doit détruire la moitié de notre armée (de nos cartes), on appelle cela le chant des morts, et … ça porte bien son nom. Nous allons donc devoir reconstruire notre jeu, ou une partie de celui-ci, à la manche suivante.
Sans maîtrise la puissance n’est rien
Comme beaucoup de jeux du genre, nos premières parties sont un peu brouillonnes, on ne comprend pas nécessairement tous les mots clés et les concepts, que veut dire Éthéré, Écho ou bien Merveilleux, Vétéran, Libérer, Capturer… Il y a un monde entre comprendre de manière théorique et pratique 🙂
Détruire, c’est simple, on détruit une carte Libre dans la zone de jeu de l’adversaire (une carte est considérée comme Libre si elle n’a pas de carte à sa droite ou au-dessus d’elle). En revanche, on peut la capturer, c’est-à-dire qu’on la retourne sur son recto et qu’elle n’est plus comptée pendant la grande bataille (en de fin de manche), à moins qu’on ne l’a libère avant.
Vous avez ici un aperçu des bases. Au début, vous tâtonnez et petit à petit vous comprenez la richesse du jeu et tout ce que vous pouvez réaliser. Par exemple avec Justice, on a un moyen de gagner plus immédiatement la partie. (J’ai essayé, je me suis approché du but, mais comme dirait l’autre : “ce n’est pas un échec, mais ça n’a pas marché”).
eXpertise
Si tu veux te perfectionner aux échecs ne joue pas avec ta petite sœur (sauf si elle s’appelle Elisabeth Harmon), mais affronte des grands joueurs, des maîtres.
Cela tombe bien pour moi, j’ai un ami grand fan de Gosu qui était très curieux de découvrir cette nouvelle version. Après quelques explications, j’ai rapidement vu ses yeux briller … et c’était un peu le début de la fin pour moi. Cette carte Justice par exemple, est beaucoup plus simple à réaliser avec le mot clé Écho (qui permet de réaliser deux fois l’action). Avec l’immortel Xian, il lui a suffit de copier l’effet d’une carte en jeu pour l’emporter me laissant médusé.
Je n’ai pas fait que de la figuration dans cette partie. Mais on apprend vite au côté d’un “maître” ! L’action de relever une carte, je la réalisais surtout pour maîtriser une contrainte de pose, mais elle peut devenir beaucoup plus stratégique. Et alors avec relève cachée, cela prend une toute autre tournure, on peut aller chercher une carte dans sa défausse. Tout d’un coup de nouvelles possibilités tactiques s’offrent à vous ; détruisez une de vos propres cartes, puis allez la chercher dans votre défausse avec relève cachée, et réalisez à nouveau son effet.
C’est ici que je reviens sur les clans : avec la pratique, on comprend mieux chacun d’eux, et il y en a pour tous les goûts. Vous aimez jouer agressif, détruire les cartes des joueurs, vous devriez vous sentir dans votre élément avec Goan Sul. Avec Tomorrow ou Phoenix, vous pourrez plus jouer sur les combos ; Justice ou Abhilasha (mes préférés) sont plus dans le contrôle ; avec Phoenix ou Narashima, vous aurez plus de moyens d’avoir des cartes ; Xi’an ou Galmi sont plus dans le soutien. À nous de construire nos synergies tout en tenant compte des clans pris par l’adversaire, sans oublier les règles qui vont se rajouter en fonction des deux clans restants. Certains peuvent être une vraie épine dans le pied.
Bonne pioche !
Le travail d’illustration de David Sitbon est magnifique mais j’avoue être plutôt hermétique à cet univers issu d’Immortal 8, que je trouve trop froid et trop peu accessible pour moi. Le travail éditorial et ergonomique est excellent il faut le souligner ; on a en plus un bel objet avec son plateau, ses jetons en bois sérigraphiés, etc. Les cartes sont de bonne qualité, mais j’ai fini par les glisser sous plastique, surtout pour faciliter les différents brassages, étant donné qu’on les mélange très souvent. Je vais un peu chipoter, mais je regrette l’absence d’une aide de jeu qui expliquerait les différents mots clés, car sur les premières parties, on passe beaucoup de temps à se transmettre le livret de règles.
Gosu X propose un gameplay très riche. Les possibilités semblent infinies. Vous devez répondre à l’adversaire, bloquer ses actions, le ralentir, etc. Avec ses huit clans, vous pouvez construire votre jeu dans une grande variété d’axes stratégiques (plus de contrôle avec Justice ou Abhilasha, plus d’agressivité avec Goan-sul, plus de combos avec Tomorrow, etc).
Je regrette tout de même un peu son manque d’accessibilité ; il faudra éprouver le jeu avec un adversaire à votre taille pour en tirer la substantifique moelle. Je pense que si vous êtes du genre « joueur kleenex » vous risquez de passer à côté de la proposition, car à mon sens ce Gosu ne se révèle que si on peut s’y investir. À titre de comparaison, il est plus expert que l’excellent Radlands dont nous parlions dernièrement (Jp, Test).
Bref, si vous avez le bon public sous le coude ou que vous êtes amateur de jeux à combo exigeants et techniques, vous devriez adorer ce Gosu X. En tout cas chez moi, il est venu rejoindre d’autres excellents jeux à deux de ma ludo, sans faire pour autant doublon, celui-ci ayant son caractère propre et ses spécificités.
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Ihmotep 16/02/2023
Fan de Gosu je vois que cette version présente une base commune avec toutefois beaucoup beaucoup de changement ^^. Gosu est extrèmement tactique, ce qui amène une énorme rejouabilité et des twists mémorables lors des parties.
J’avoue que je serai curieux de tester ce Gosu X qui semble allourdir la version originale sans forcément amener plus de plaisir de jeux. Si un joueur passant par là a pu s’essayer à Gosu et Gosu X, je serai curieux de savoir si cette nouvelle mouture apporte plus de profondeur, de meilleurs sensations, bref un meilleur Gosu que le Gosu de l’époque :).
Les illustrations sont également sur un autre registre. Là elles font très adultes, limite malaisante pour certaines, alors que Gosu proposait des gobelins très « manga » du plus belles effets mais également plus « grand public »
Umberling 17/02/2023
Je l’ai trouvé meilleur que le Gosu de l’époque, mais ma dernière partie de Gosu remonte à 2012 donc bon, mon souvenir est vieillot 😉
atom 17/02/2023
Comme dit dans l’article, j’ai joué avec un fan de Gosu premier du nom et il a adoré, il a même largement préférè au deux, et même au tout premier.
Ihmotep 17/02/2023
Oki s’il est encore meilleur que Gosu premier du nom c’est plus que gageur ^^. Gosu reste un de mes meilleurs souvenirs en jeux de cartes