7th Citadel, l’attaque des sombres courges

The 7th Continent est un jeu qui a marqué. Son côté monde ouvert était vraiment neuf à l’époque, tout comme son système de découverte du plateau, repris depuis dans de nombreux jeux, comme Tainted Grail par exemple. Le jeu a de plus été un énorme succès commercial, puisque, lors de son passage sur kickstarter, il a levé 7 millions de dollars et amené 43 000 contributeurs… pour son reprint ! On parle rarement du succès d’un jeu, mais on peut dire que dans le cas présent, celui-ci est carrément au rendez vous. Et franchement… je n’ai jamais compris pourquoi. Attention, je pense qu’il s’agit d’un bon jeu, mais qui me semble très exigeant et pas adapté à tout le monde. Que le jeu soit un succès, oui. Mais à ce point, j’ai vraiment été surpris. Personnellement, ses défauts m’avaient à l’époque pas mal rebutés, et une fois la première malédiction faite, j’ai dit stop.

Et puis, à Cannes, j’ai eu l’occasion de jouer à la suite « spirituelle », qui m’a fait tellement bonne impression que j’ai décidé de le backer. Pour info, voilà ce que Shanouillette en disait à l’époque. Et devinez quoi, les boites sont arrivées. Et devinez quoi, j’ai joué quelques parties, et on va voir si le jeu tient ses promesses pour le moment. Attention, il est important de rappeler que je n’ai pas joué à tout : il est largement possible que des choses, notamment au niveau de l’histoire, changent dans les scénarios suivants.

Premiers pas

Commençons par un petit rappel sur ce dont on parle. La 7th Citadelle est un jeu d’aventure qui reprend les mécanismes du 7th Continent. On va se déplacer sur un « plateau » que l’on va découvrir petit à petit. Ce plateau est composé de cartes, que l’on va mettre les unes à côté des autres au fur et à mesure de nos déplacements. Chaque lieu va nous permettre d’interagir avec lui selon ce que l’on va trouver. On trouvera aussi des énigmes et parfois des éléments cachés qui vont nous aider dans nos aventures. Enfin, pour gérer nos actions dont l’issue est incertaine, on aura des tests à faire. Pour cela, on piochera autant de cartes qu’on le souhaite dans notre deck. Ces cartes auront des étoiles ou des demi-étoiles, et on espérera en trouver assez pour réussir notre action. Le deck représente notre fatigue : si on l’utilise trop vite, on devra le reformer en payant des points de vie.

Les cartes de ce deck ont d’autres utilités : on pourra parfois les garder en main, et s’en servir pour aider à la réussite de nos actions dans certains circonstances.

Une combinaison de cartes qui vous donne deux étoiles

Voilà pour les grandes lignes du jeu, qui sont largement les mêmes que dans le 7th Continent.. à quelques détails près.

Le monde la 7th Citadelle

La première différence majeure avec son aîné c’est que l’histoire de la 7th Citadelle est totalement indépendante du 7th continent. Elle se déroule dans un monde d’héroic-fantasy assez original, qu’il n’est pas évident de résumer. Mais essayons quand même. Vous étiez esclaves dans la citadelle d’un « Nécroduide », des mages maléfiques qui ont infusé la magie noire dans des végétaux pour lutter contre un ennemi assez peu sympathique, les fouisseurs, des espèces de vers géants. Néanmoins, sans que vous ne sachiez pourquoi, votre prison, la fameuse citadelle du titre, s’est soudainement écroulée en partie, les Nécroduides semblent y avoir succombé et il ne reste que vous, les survivants hagards dans un monde à l’agonie. Votre but va être tout simplement de survivre.

Là vous vous dites « ok, on va retrouver une ambiance comme le 7th Continent« . Et bien… pas du tout. En effet, dans la 7th Citadelle, vous êtes à la tête d’une petite communauté, mais qui va être sédentaire. Votre but est de tout faire pour préserver celle-ci. Alors bien sûr, cela va impliquer d’aller parcourir le monde pour mener des quêtes à bien, mais toujours avec l’idée qu’il faudra revenir à la maison à la fin. Et… cela change pas mal de choses sur l’ambiance et sur le gameplay.

Léger spoil, quelques cartes du début de l’aventure

 

Niveau ambiance et narration, on a un vrai plus. Le monde est vraiment très original, et on se sent tout petit au milieu de ces puissances qui s’affrontent, dont on serait d’ailleurs bien en peine de préférer l’une ou l’autre. Il n’est (pour le moment en tout cas) pas question d’aller s’y frotter, et on a peu (pas) d’indices sur ce qui s’est réellement passé et pourquoi le monde s’est effondré d’un seul coup. Nous sommes pour le moment faibles, et les grandes intrigues ne nous concernent pas. Ce sentiment de ne pas être au cœur de la Grande Histoire et de simplement essayer qu’elle ne nous broie pas est très original et peu vu. Cela transparaît bien dans le sens où on ne trouvera pas d’épées magiques ou de sortilèges puissants : chaque rencontre est un vrai danger, et l’épique n’est pas au programme. De plus, tout est aussi ouvert : vous pouvez être aussi altruiste ou vil que vous le souhaitez. L’immersion est néanmoins bien présente, notamment à travers l’ajout d’un livre de conversation, que l’on pourra lire en fonction des (rares) autres personnages vivants que l’on va rencontrer. Plus de dialogues, donc plus de narration, donc beaucoup plus d’immersion dans l’histoire. Le livre est d’ailleurs assez conséquent, il reflète ainsi une histoire très riche.

 

La carte du monde

 

Malgré tout, ce sentiment de monde post apocalyptique à l’abandon n’est justement pas vu sous le prisme de la défaite, mais au contraire de la reconstruction. C’était une intention des auteurs de ramener de l’espoir dans cet univers, et c’est un peu ce que l’on a avec la construction de notre communauté. Celle-ci va en effet grandir, avec de nouveaux bâtiments, de nouvelles protections, une influence étendue… Certes on doit survivre mais on doit aussi rebâtir sur les ruines de l’ancien monde. Cela créé un ambiance là encore assez particulière, même si on retrouve des intrigues classiques : nourriture à trouver, camp à défendre contre des brigands etc… Il faudra aussi bien choisir les bâtiments à construire en fonction des avantages qu’ils fournissent. Ceux-ci sont d’ailleurs variés et clairement on a envie de tous les faire. On pourra d’ailleurs préférer envoyer des éclaireurs parcourir les terres effondrées et rendre notre carte un peu plus précise pour les explorations futures.

L’arbre d’amélioration de vos persos et de votre communauté.

 

Ce système de « village » à reconstruire a aussi une conséquence sur le gameplay : fini les quêtes de 20h ou plus du 7th continent. Cette fois nous aurons des scénarios de 1h à 2h (à deux en tout cas) que l’on pourra compléter en une seule session de jeu. Et ça, c’est vraiment appréciable ! On pourra plus facilement ajouter/enlever un personnage dans l’aventure, et surtout une session de jeu sera toujours satisfaisante car on aura terminé quelque chose. La difficulté viendra du fait que votre vie va petit à petit baisser au fur et à mesure de l’avancée et de votre fatigue, ce qui vous forcera à revenir parfois au camp plus vite que prévu. Souvent, les scénarios ne seront d’ailleurs pas simplement des échecs ou des réussites, il y aura plusieurs objectifs à trouver, dont le nombre  déterminera notre niveau de réussite… et la suite de nos aventures.

En effet, les scénarios font partis de campagnes avec des embranchements multiples, ce qui donne la possibilité de les rejouer pour faire les scénarios que l’on aura pas vus. J’aime bien ce côté niveau de réussite jusque là, car on se pose souvent la question de continuer alors que l’on a peut-être suffisamment d’éléments, même si on sait dès le début combien sont attendus. Deux campagnes « seulement » se trouvent dans la boîte. Je dois dire que j’ai une petite appréhension au vu de la carte globale que l’on dès le début du jeu, on a l’impression d’un monde immense, mais je vois pour le moment mal comment on pourrait tout visiter, à ce que j’ai vu pour le moment. Cela assure quand même entre 15 et 20 parties pour jouer les deux campagnes, ce qui reste très satisfaisant.

Comme on a des scénarios plus courts, plus besoin d’aller chasser ou de perdre du temps à chercher de la nourriture. Je trouvais ça peu amusant dans le 7th Continent, alors je suis ravi que cela ait disparu. En revanche, comme on aura moins de moyen de reprendre de l’énergie, on a beaucoup moins envie d’aller explorer, et on fonce plutôt tête baissée sur l’objectif du scénario. Néanmoins, on aura des scénarios de « pause » où on aura uniquement à faire des missions secondaires et faire évoluer nos personnages.

Ceux qui l’arpente

L’autre élément majeur lié à l’ambiance et au gameplay, ce sont les personnages. Et oui, on a cette fois chacun un personnage avec son propre deck, chacun ayant sa spécialité, ce qui normalement permet de la vraie coopération, puisque chacun gérera son énergie et prendra les tâches et actions pour lesquelles il est le plus spécialisé. On retrouve un certain aspect deckbuilding puisque l’on peut ajouter des compétences dans notre deck et donc customiser notre personnage. Le soucis avec ce système est que selon moi il ne marche pas très bien. En effet, pour pouvoir utiliser les capacités d’une carte, il faut l’avoir en main au moment opportun. Or, il s’agit là d’une conjonction d’éléments que l’on ne maîtrise pas vraiment. Du coup, nos « spécialités » sont rarement utilisables, car il y a une bonne quarantaine d’actions différentes dans  le jeu, on ne sait jamais quand telle carte nous sera utile. C’est assez frustrant de ne pas pouvoir utiliser la carte dont on a besoin alors que l’on sait qu’on l’a ! On a donc du mieux à ce niveau là par rapport au 7th Continent, mais ce n’est pas encore ça. C’est d’autant plus frustrant quand il s’agit de quête « annexe », trop coûteuse à réaliser si on n’a pas la bonne carte au bon moment, ainsi, on a de bonnes chances de passer à côté. Et encore, on est à deux avec un peu plus de cartes en mains ! Je ne sais pas si le jeu à 4 n’est pas encore plus embêtant de ce point de vue là.

 

Quelques équipements

 

On retrouvera également le « brouillard » qui nous empêche de savoir précisément où l’on va se déplacer, et qui va créer des événements aléatoires. Là aussi, certains sont très pénalisants, mais pas le choix on doit les passer. Dans le domaine du frustrant on citera aussi certaines actions qui limitent le nombre de cartes que l’on peut utiliser pour compter les étoiles : sans l’objet adéquat, c’est un échec assuré. Et pourtant, elles sont souvent incontournables. Je trouve cela assez peu amusant, surtout quand les échecs font très très mal.

Enfin, mon dernier reproche ira vers le système de « tremblesol », un équipement censé nous protéger des fouisseurs, mais qui thématiquement (pour le moment) ne fait pas sens du tout. En revanche, il est bien pratique d’un point de vue mécanique pour nous indiquer qu’il ne faut pas aller explorer certains lieux trop tôt. Cela donne un aspect un peu artificiel qui est un peu regrettable.

 

Bilan

Je reste partagé sur cette 7th Citadelle. Sans aucun doute, j’apprécie le jeu bien plus que le 7th Continent, et, si ce n’était le thème moins universel, c’est clairement ce second opus que je conseillerais. La segmentation des parties, les améliorations mécaniques, l’histoire plus fouillée… tout une liste d’éléments qui jouent en sa faveur et me donnent clairement envie de continuer la campagne, et ne me font pas regretter de m’être lancé dans l’aventure. En revanche, je ne suis pas certain d’ouvrir de nouveau la boîte une fois les aventures terminées, d’autant que je ne suis pas subjugué par le jeu : la mécanique centrale de prise de risque n’est pas assez satisfaisante pour moi, et je regrette vraiment de ne pas pouvoir utiliser mes compétences quand j’en ai besoin.

Dans tous les cas, on se reverra pour le test, pour vous livrer un avis après avoir joué toute la campagne !

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5 Commentaires

  1. benjamin 13/05/2024
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    merci pour cette analyse fine et précieuse, pour ceux qui comme moi se tâtent quant à l’acquisition de ce jeu (et qui comme moi ont trouvé le 7e continent très poussif et pénible une fois passé – très vite – la surprise positive de la nouveauté).
    Question: avez vous fait la campagne de Tainted Grail et si oui avez vous trouvé ça grandiose ou pas ? Supérieur à 7th citadel ? La réponse à cette question me donnera au bon indice pour savoir si nous sommes sur la même longueur d’onde et donc pouvoir estimer la pertinence de votre analyse de ce 7e citadelle en ce qui me concerne.

    • Shanouillette 14/05/2024
      Répondre

      Hello, pour info l’ami Fouilloux a écrit le test de Tainted grail bonne lecture ! 😉

      • benjamin 14/05/2024
        Répondre

        en effet, un test bref mais éloquent. Donc je pense que fouilloux et moi partagent la même vision sur ces jeux, et je pense donc fortement souscrire au nouveau KS 7th citadel qui s’ouvre début juin (reprint du jeu + grosse extension au menu).
        Dans l’intervalle je vais revendre le 7e continent, son open world en mode die & retry ne me convenant guère.

        • Umberling 14/05/2024
          Répondre

          C’est bref mais tu peux déplier les catégories et là, ça le devient… moins !

    • fouilloux 14/05/2024
      Répondre

      Pour répondre simplement: j’ai adoré Tainted Grail, je le préfère à 7th Citadel

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