Sheriff of Nottingham – Robin des bois n’a qu’à bien se tenir…
Le Shérif de Nottingham, ça doit vous parler. En théorie, ça vous met Robin des Bois bien en tête, et le personnage du Shérif vous apparaît bien véreux. En jeu de société, c’est un sacré casting qui s’y colle. André Zatz et Sergio Halaban, que l’on connaît aussi pour le controversé Warehouse 51, signent donc une réédition de leur jeu Robin Hood (2011) avec en plus Bryan et Benjamin Pope (Mage Wars Academy, Mage Wars Arena).
En gros, les joueurs sont des marchands qui ne se satisfont pas de l’édit du Prince John : devrait-on se contenter de pain et d’eau (et de pommes, et de fromage et de poulets) ? N’a-t-on le droit qu’à une vie sans saveur et sans douceur ? À cela, les marchands de Notts vont répondre par la négative ; les Nottinghamiens sont de bons vivants ! Ils seront donc tout à fait disposés à acheter des biens un peu moins… légaux ?
Disons simplement que le Prince John et ses reîtres risquent de prendre tout cela d’un mauvais œil, et que le Sheriff se doute de la supercherie. Il soumettra les marchands à la question pour savoir quelles marchandises se trouvent dans leur chargement. Et c’est là que les choses se gâtent.
Le but du jeu est donc d’être le marchand le plus riche en trompant le Sheriff. Le twist, c’est tout simplement que le Sheriff est incarné à tour de rôle par chaque joueur ! Torsion thématique certes, mais au final, ce rôle tournant rend la partie dynamique et donne aux joueurs de nouvelles problématiques à chaque fois, faisant office de kingmaker (ou de kingslayer).
Petite précision : j’ai le jeu édité par Arcane Wonders et non la version française de Iello qui arrive dans le mois prochain. Cependant, question règles, aucun changement n’aura été apporté.
D’un point de vue matériel
Deux thermoformages séparés remplissent la boîte : l’un sert à caser les différentes pièces et l’autre, les cartes. Et l’un comme l’autre sont utiles ! Ils constituent des éléments facilitant le jeu (au moins, le triple sabot est là pour les cartes) mais ne sont pas très pratiques d’utilisation, ou alors j’ai des doigts trop boudinés. Quant à leur qualité… Il n’ont pas encore rompu, mais j’ai un peu peur pour le sabot. Malgré tout, le thermo mobile est une riche idée.
Les cartes sont de bonnes facture, voire très bonne, alors qu’on ne fait pas de gestion de main. Un peu fines, mais intissées et ça c’est plutôt une bonne nouvelle pour la durabilité du matériel.
Le carton des pièces et des plateaux personnels est très épais et tiendra bien la distance.
En revanche, les sacs à marchandises me semblent peu solides, surtout au niveau du bouton pression qui sera sollicité à tous les tours. Et le stand-up de Sheriff n’est pas très stable.
Filou ou pas ?
Un tour de jeu est cyclique et le choix d’actions, plutôt restreint. On peut vider un peu sa main, puis on la remplit en piochant dans les défausses (visibles) ou dans la pioche (cachée). Ensuite, on placera jusqu’à 5 marchandises dans la pochette de marchandises. Lorsque ce sera fait, il faudra les déclarer au Sheriff (en déclarant une marchandise légale et le nombre qu’on en a : le prince John veut faire simple) puis négocier avec lui s’il vous soupçonne de cacher de la marchandise de contrebande ou d’avoir une déclaration frauduleuse. Car oui, il faudra mentir comme un arracheur de dents si vous souhaitez faire passer de la bibine. Ou même si votre marchandise légale est plus diversifiée que souhaité…
[Note : la plupart du temps, j’ai préféré jouer en déclarant tous les biens légaux un par un. C’est donner plus de force aux biens légaux, réduire certaines facilités de Sheriff et rendre les négociations plus âpres.]
Et si d’aventure vous versiez assez de pognon, ou que vous promettiez assez de cartes, le Sheriff pourrait vous laisser passer.
En cas de contrôle, une amende est payée en fonction des cartes déclarées. Le contrôlé paie pour chaque marchandise frauduleuse, et si jamais le contrôleur a tort, il doit payer un dédommagement au marchand qu’il a suspecté.
Lorsque tout le monde aura été Sheriff deux fois, la partie s’arrête et les scores sont comptés. Des majorités proposent des bonus pour chaque marchand ayant approvisionné Nottingham avec des marchandises légales. On compte deux récompenses par marchandises, et cela amène un petit peu de diversité dans la partie (et permet aux aficionados du légal de pouvoir gagner).
Snug smug smugglers!
Le pitch du Sheriff vend pas mal de rêve. Par contre, question application, c’est une autre histoire. D’abord, c’est un jeu où il faut mentir. Ou du moins, il faut supporter de pouvoir le faire. Certains joueurs n’apprécieront absolument pas le jeu de la menterie et, du coup, subiront la partie comme un bête jeu de hasard, amputés d’une part considérable de stratégie. De même, souvent, les négociations avec le Sheriff s’arrêtent à oui ou non, et ne vont pas rentrer dans des détails un peu fourbes (« Je te donne un fromage de mon chargement si tu me laisses passer. OK ? Je n’ai que de la contrebande et pas de fromage. Désolé mon gars, tu t’es fait rouler ! ») ou dans ces accords vraiment véreux qui font le sel du jeu. Du coup, quand je présente le jeu à un groupe, j’endosse le rôle de Sheriff dès le début pour montrer l’exemple et mettre les futurs Sheriffs au parfum.
Du coup, oui, c’est un peu périlleux quand on ne connait pas ses joueurs. Si vous n’avez aucune idée de leur niveau de poker face, abstenez-vous peut-être. D’ailleurs, la config à trois joueur souffre un peu du peu de relations que l’on peut nouer entre les joueurs : le jeu n’est alors qu’à 20 % de ses capacités et le fun sera démultiplié dès le quatrième larron.
Il y a aussi le côté répétitif et assez calculatoire du jeu : au final, on fait passer des marchandises entre 4 et 8 fois selon le nombre de joueurs et cela peut sembler un peu mécanique. Et là encore, c’est la dose d’interaction et d’engagement des joueurs qui crée le ressenti.
Pas évident, donc, mais son accessibilité et son thème plaisent facilement. Je préfère initier les adultes, qui prennent plus de plaisir à se tirer dans les pattes alors que les ados osent moins, bizarrement.
Pour peu que la sauce prenne, je passe de très bons moments avec ce titre : si on échoue, on a toujours de quoi se refaire, le bluff est fun, l’interaction sheriff-marchand peut s’avérer tendue et m’amuse beaucoup. Pour un jeu plus stable (mais moins fun et complet), je conseille Prohis, aux mécanismes assez similaires. Entre les deux, je préfère le Shérif, cela dit. [Note : Pour vous faire votre propre idée, nous avions tourné un live comparatif entre Prohis, Sheriff, et Deal].
Bref, c’est un jeu un tantinet capricieux, mais dans les bonnes mains, il fera vraiment des heureux…!
Edité par Arcane Wonders
Traduit et distribué par iello
Langue et traductions : Anglais, Français
Date de sortie VO : 08-2014
De 3 à 5 joueurs
A partir de 13 ans
Durée moyenne d’une partie : 60 minutes
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morlockbob 27/01/2016
Plus fun que Prohis… voilà un bon point.
Essayé entre temps et validé !!
il reste qu il faut aimer se mettre en scène, jouer le jeu, barratiner, sinon ça marche mais on perd le sel de la partie…iello a assuré sur ce coup là