Qui est derrière Multifaces Editions ? [Minuit, meurtre en mer] Interview
Il court en ce moment de multiples projets de financement de jeux de société français, et parmi ceux-là, un, encore inconnu au bataillon chez nous, a su nous intriguer. Nous avons donc cherché à en savoir un peu plus sur le projet : qui était derrière, comment le jeu s’était-il développé, qu’avait-il de particulier, qui, comment, pourquoi…!
Le jeu (que vous avez peut-être croisé dans les chroniques participatives de Gougou sur le web, ou dans la vraie vie, au salon d’Epinal ce week-end) s’appelle Minuit meurtre en mer, et il s’agit d’un titre compétitif qui propose plusieurs enquêtes. Les Experts sur un bateau si vous voulez !
Celui qui porte le projet, c’est Alain Luttringer. Il a monté sa petite entreprise d’édition depuis un peu plus de deux ans. Et il l’a fait pour ce jeu-là.
Tâchons d’aller enquêter sur cette histoire louche…
Bonjour Alain !
Bonjour à tous, et bonjour Shanouillette, enchanté de vous rencontrer ! Merci beaucoup à Ludovox de s’intéresser à nous :).
Je me présente donc, je suis Alain Luttringer, auteur et éditeur de jeux de société. Je suis le gérant de Multifaces Editions, maison d’édition basée à Strasbourg et créée fin 2014.
Alain est-il joueur ?
Vaste sujet ! Hmm, déjà, je suis un joueur de longue date (heu n’écrivez pas « vieux joueur », merci). J’ai commencé dans les années 1970 avec notamment les jeux Parker, les fameuses boîtes allongées aujourd’hui inrangeables, du rêve en boîte pour le petit garçon que j’étais :). J’ai suivi de très près le renouveau des années 90, avec entre autres les jeux Descartes, les boîtes euh multiformes aujourd’hui inrangeables, du rêve en boîte pour le jeune homme que j’étais :). Et puis, les années 2000-2010, tout le chamboulement progressif du monde du jeu avec une inflation de jeux de tous poils (du familial au velu, du thématisé au mécanique), du rêve en boîte pour euh, l’homme très musclé que je suis devenu (ben oui, à force de soulever toutes ces boîtes).
Et où vont vos préférences ?
Aujourd’hui, j’apprécie surtout les jeux aux thématiques fortes et porteuses, qui en prime font un peu mal à la tête^^. Je suis quasi aaatchllérgique aux jeux de hasard, abstraits ou trop mathématiques. Pour moi, un jeu est intéressant quand le joueur y met de lui-même, quand ce qui se passe dans le jeu dépend de ce que chacun décide de faire parmi plusieurs possibilités ; bref un jeu me plaît lorsqu’il faut agir le plus finement possible et non subir le jeu par manque de richesse ou une trop grande part d’aléa. Pour qu’un jeu m’attire, le thème et le type de jeu passent généralement en premiers, viennent ensuite mécaniques et esthétique, mais c’est un tout, une alchimie. Pour mieux situer, disons que j’apprécie particulièrement les jeux incluant gestion, stratégie, imagination, réflexion, précision, évolution, astuce, malice…
Alors ça donne quoi comme piliers pour votre ludothèque ? On veut des noms !
Parmi mes jeux préférés : Le Trône de Fer JCE, Archipelago, Troyes, Tzolk’in, Agricola, Settlers, Nations, Railroad Révolution, Robinson Crusoé, Andor, plus – hum – un paquet d’autres^^.
Vous me disiez que vous avez crée votre maison d’édition car vous aviez envie d’être… Auteur.
C’est pas un peu paradoxal ?
Si, c’est paradoxal :). Je suis un insatiable « créatif » (même sur une plage au soleil au lieu de bronzer, même en roulant au lieu de surveiller les panneaux, même quand on me parle au lieu de bien faire attention^^), touche-à-tout (mais j’ai compris, à force et … faute de temps, qu’il valait mieux se focaliser sur certains domaines seulement pour aller plus loin) et voilà quelques années déjà que plusieurs jeux sont en gestation. À vrai dire, déjà tout petit je confectionnais des petits jeux variés (des labyrinthes sur papier, des jeux narratifs à parcours, variantes de jeux classiques), puis ado (tout un univers de jeu de rôle jamais montré à personne^^), puis adulte (euh ben notamment avec Multifaces Editions !).
Un besoin de créer…
Oui, une envie, un besoin, et ceci, toujours dans la variété (de sujets, de genres). C’est la base de Multifaces Editions. Ensuite, ben à un moment, j’ai décidé de changer de métier (en 2013), j’étais auparavant consultant culturel indépendant. Et, en me demandant si je ne pourrais pas m’essayer comme auteur de jeux avec mes projets, je me suis rendu compte que se faire éditer ne paraissait pas des plus aisés. D’où la suite logique : et si je me lançais carrément comme éditeur, avec la dizaine de projets de jeux variés sur lesquels je travaillais depuis un moment ? Au delà de ça, la multiplicité des tâches à conjuguer pour « faire l’auteur-éditeur », même si c’est souvent écrasant (adieu we et vacances !), me correspond tout à fait ; d’autant qu’il m’apparaît, au fond, que mon métier aujourd’hui conjugue un peu tout ce que j’ai appris auparavant, une sorte de suite logique ou de croisée des chemins.
Alors vous êtes devenu un auteur auto-édité.
Vous avez quand même une ligne éditoriale pour Multifaces ?
Nous publierons en priorité ces prochaines années nos propres créations, avec – au stade actuel – un rythme de parution relativement lent (1 à 2 jeux par an). Notre ligne éditoriale est large : principalement gestion, stratégie, enquête, aventure, etc. Toujours à destination des joueurs adultes/ados. Pas de jeux abstraits, trop « mathématiques » ou avec trop de hasard (comme je le disais !). Avec des thèmes extrêmement variés, souvent liés à l’histoire ou aux civilisations, mais pas que. Des jeux où l’on s’investit personnellement, des jeux où le principal n’est pas toujours de l’emporter mais de passer en compagnie des autres joueurs de bons moments, des jeux qui permettent de s’évader, de rêver, des jeux avec un peu de culture planqué dedans (oups), des jeux de passionnés pour les joueurs qui seront sur la même longueur d’ondes. Nous verrons bien, selon le succès rencontré, comment Multifaces Editions pourra se développer par la suite.
Vous dites toujours « on ». Y aurait-il d’autres suspects sur ce bateau ?
Le « on » correspond à la structure Multifaces Editions (pour la boutade, « rien n’est à toi, tout appartient à la société anonyme », comme chante Eddy Mitchell dans l’une de ses chansons^^). Je suis le seul « œuvrier » à plein temps de Multifaces Editions, mais il y a pas mal de collaborateurs occasionnels, au premier rang duquel ma femme, Carole, qui apporte énormément (« cherchez la femme ! », comme on dit), mais aussi des testeurs, des relecteurs, certains membres de ma famille ou amis qui soutiennent, relaient, assurent parfois certaines tâches.
Enfin, Multifaces Editions, c’est aussi quelque part nos partenaires directs : les illustrateurs, les graphistes, un collaborateur commercial cherchant à étendre notre réseau de revendeurs locaux (pour notre jeu de connaissances sur l’Alsace), etc.
Pouvez-vous nous parler plus précisément du dernier projet en cours, Minuit meurtre en mer ? Un petit pitch ?
Oh oui ! Dans Minuit, Meurtre en Mer, les joueurs se glissent dans la peau de détectives privés, réunis en congrès sur un navire de croisière. Ils apprennent au matin qu’un décès suspect est survenu la veille à minuit… Meurtre, suicide, accident ? Qui est le responsable, pourquoi est-il passé à l’acte et comment s’y est-il pris ? Aussitôt, émerge un pari entre eux : qui sera le plus fin limier à bord d’ici l’arrivée du navire au port ? À noter qu’on peut aussi déclencher la fin de partie avant, avec des révélations et, dans les deux cas, tout le monde va émettre ses hypothèses pour chacun des 3 éléments d’enquête : coupable, mobile, mode opératoire.
Et concrètement, où étiez-vous le soir du meurtre ?
Haa, bonne question…! 🙂 Alors, concrètement, c’est un jeu de plateau compétitif, pour 2 à 6 joueurs à partir de 12 ans, qui propose de nombreuses enquêtes passionnantes ! Les joueurs arpentent le navire (représenté en plans), fouillent les différents lieux, interrogent les suspects sur différents sujets de conversation, cherchent des pistes, vérifient des alibis, font la part des choses parmi les infos qu’ils obtiennent…
Certaines infos vont être publiques, d’autres non, selon les choix de méthode d’investigation des détectives. Les suspects se déplacent sur le navire. Les joueurs utilisent les livrets d’enquêtes pour prendre connaissance de pistes et disposent de feuilles d’enquêtes pour noter l’essentiel de ce qu’ils trouvent. À la fin du jeu, un système de score départagent les joueurs.
[NDLR : Règles du jeu ici]
J’ai cru comprendre que le premier proto datait d’il y a 7 ans, est-ce exact ?
En effet, Minuit, Meurtre en Mer est un projet de longue date. C’est avec ce jeu là et parce que autour de nous tout le monde a trouvé que c’était vraiment du solide (plus le fait que pas mal d’autres projets de jeux étaient déjà en réflexion à côté), que j’ai décidé de lancer Multifaces Editions. La gestation de ce jeu a été longue.
Pourquoi cela ?
Il y a énormément de textes donc beaucoup d’enquêtes à écrire et… à playtester. Au fur et à mesure, nous avons pu affiner ce jeu par petites touches. Même si, au fond, il n’a pas tant changé que cela depuis sa genèse.
Vous avez passé tout ce temps sur ce projet là ?
Non en fait, en parallèle, nous avons édité un jeu de connaissances sur l’Alsace (2 volumes déjà parus dans la collection) et travaillé sur d’autres projets. Mais autant de temps passé sur Minuit, Meurtre en Mer a permis de pouvoir l’épurer (de petites règles, souvent sympas mais trop anecdotiques, ont été évacuées), l’équilibrer (les mécaniques comme le matériel, par exemple le nombre de cartes) et de le modeler au mieux. Il y avait aussi ce défi de rendre Minuit, Meurtre en Mer intéressant (à notre avis) aussi bien pour des joueurs passionnés et habituels que pour des publics moins rompus aux jeux de société (par exemple des passionnés d’histoires policières) et le large panel de nos testeurs semble montrer que c’est plutôt le cas.
Etes-vous l’unique auteur du jeu Minuit, Meurtre en Mer ?
Oui, l’unique auteur. C’est un peu la raison d’être de Multifaces Editions, je suis l’auteur de tous nos jeux à venir, avec une dizaine de jeux en préparation (que l’on sortira au fur et à mesure ces prochaines années), voire quasi fini pour les deux prochains : un jeu de stratégie à deux dont on parle déjà un peu sur le site (Medrival) et un jeu de « gestion/ambiance » en rapport avec la musique (sans besoin de connaissances sur la musique ou sa pratique) qui n’a pas encore de nom déposé. Bref, je fonctionne un peu comme Christophe Boelinger avec Ludically, voire Sébastien Dujardin avec Pearl Games (même s’il diversifie un peu ses auteurs).
Le jeu connaîtra-t-il une distribution en boutique ?
Bien sûr, les boutiques sont indispensables au secteur et constituent le meilleur lien entre les joueurs et les éditeurs. Nous espérons d’ailleurs que les boutiques vont soutenir notre lancement, les conditions sont intéressantes pour eux et sans elles, cela risquerait d’être un peu juste… Boutiques, travaillons la main dans la main ! A noter que nous n’aurons un lien direct avec les boutiques que lors de cette campagne, une fois le jeu publié c’est Novalis, notre distributeur, qui prendra le relais.
Quelles sont les raisons de ce kickstarter ?
La première raison est que sans l’aide « à la source » (donc via ce KS) des joueurs intéressés, ce jeu ne verra pas le jour du tout… Multifaces Editions ne dispose pas des ressources financières suffisantes pour éditer entièrement le jeu par ses seuls moyens. Pour situer, nous avons déjà financé le développement, l’illustration, le graphisme et la communication du jeu (budget de 25 000 euros environ), mais la fabrication du jeu (plus transport, cheminement et même les frais de campagne aussi) requiert encore un budget conséquent. Pour une édition de 3 000 boîtes par notre fabricant spécialisé européen, nous avons besoin de rassembler 38 000 euros, pour 4 000 boîtes 48 000 euros… [NDLR : Plus d’infos là-dessus sur la page du KS]
La 2e raison de notre campagne est que nous pouvons plus finement ajuster le volume de boîtes produites pour cette première édition, avec déjà une idée et ceci bien sûr dans la limite des fonds qui seront disponibles au 15 avril (y a environ 2 semaines de délais annoncés par KS pour le déblocage des fonds après la clôture de la campagne).
Enfin la 3e, c’est bien sûr que c’est aussi une très bonne vitrine, là aussi nos moyens de communication étant limités, la campagne permet de largement parler du jeu avant qu’il sorte… à condition que la campagne soit réussie.
Quand on voit des livrets d’enquêtes dans un jeu on pense forcément à Sherlock. Qu’apporte Minuit, Meurtre en Mer aux jeux d’enquêtes, segment déjà bien rempli du monde ludique ?
Minuit, Meurtre en Mer est un jeu probablement à part dans la galaxie ludique, même si depuis quelques temps d’autres jeux d’enquêtes commencent à fleurir (on pense notamment à Watson & Holmes, différent mais disons proche parent, un peu plus que Sherlock Holmes Detective Conseil encore). C’est un jeu de plateau, pas un jeu de rôle, un jeu qui se déroule dans un lieu et à une époque un peu originale par rapport aux autres jeux (huis-clos sur un navire de croisières dans les années 1980/1990 même si les enquêtes sont le plus atemporelles possibles (pas de dates citées).
On y enquête sérieusement, mais on s’y amuse aussi beaucoup, par le système de jeux (gestion de son détective, concurrence entre les joueurs, bluff possible sur la qualité des pistes suivies ou ses intentions…), par l’ambiance, qui donne vraiment très souvent l’impression aux joueurs qu’ils sont sur ce navire à enquêter et rencontrer les passagers le peuplant (nous observons souvent les joueurs en rajouter un peu en imaginant des compléments à ce qui se passe ou ce qu’ils font, il y a presque un petit côté jeu de rôle mais sans Maître du Jeu).
C’est un jeu compétitif (non coopératif), les détectives ayant fait le pari d’être le plus fin limier à bord d’ici la fin de la partie ; donc on s’observe, on suit ce que font les autres (d’autant qu’on bénéficie parfois des fruits de leur enquête s’il ont choisi la méthode rapide d’investigation), on optimise ses déplacements, on copie parfois ce que font les autres, on lâche des faux sous-entendus pour brouiller les pistes, on déplace les suspects pour les éloigner des confrères ou les empêcher de fouille une cabine VIP intéressante, on se passe devant pour accéder à des lieux intéressants, etc. C’est un jeu très vivant, plein de choses se passe durant l’enquête.
Et ensuite, il y a l’enquête. Il ne s’agit pas de trouver 2 ou 3 infos cachées, comme souvent dans les jeux de déductions (famille Cluedo ou Mystères à Pékin), mais véritablement d’acquérir des « bribes » de cette histoire, au fur et à mesure que l’on choisit de suivre telles ou telles pistes (encore faut-il obtenir ces informations), pour essayer de comprendre ce qu’il s’est passé et donc de déterminer qui a fait le (mauvais) « coup », pourquoi et comment il s’y est pris. Ceci avant que la fin de partie ne soit déclenchée par le jeu (le navire gagne le port le plus proche au fur et à mesure, mais on ignore exactement quand il y parviendra) ou par un joueur (qui provoque la fin de partie en annonçant à l’issue de son tour vouloir faire des révélations à la fin du tour de table).
À la fin, dans les deux cas, tous les joueurs livreront leurs 3 hypothèses (avec une 2e chance à chaque fois), avec un système de score départageant les joueurs. Les enquêtes sont très variées, construites toujours différemment, avec parfois (dans les plus avancées) des modifications de mise ne place et de règles pour surprendre les (futurs) vieux briscards du jeu 🙂 [ces enquêtes-là, de niveau expert, seront peut-être débloquées avec les paliers avancés de la campagne].
Voici quelques aperçu, sûrement bien lacunaire, de l’ambiance et des enjeux dans Minuit, Meurtre en Mer…
Qu’est-ce qui fut le plus compliqué dans le développement du jeu ?
Hmm, pour moi, c’est formaliser la règle écrite de la façon la plus « pure » possible, c’est-à-dire à la fois la plus concise, synthétique, épurée, précise, non équivoque, complète et performante possible. En fait, on peut relire 60 fois une règle (c’est un peu notre style ^^) il y a TOUJOURS (c’en est rageant, parfois !) des améliorations possibles dans la formulation, la précision, le choix des mots, l’exhaustivité des descriptions, etc. La règle doit tendre vers la perfection, (sans prétention), c’est très important et très difficile de se faire bien comprendre juste avec du texte pour expliquer comment jouer. Bref, on y met une attention particulière, parce que la règle est évidemment centrale. Bon, il y a environ une centaine d’autres choses de compliqué dans le développement d’un jeu, mais c’est la 1ère qui m’est venue :).
Combien peut-on jouer d’enquêtes différentes ?
Il va falloir attendre la fin de la campagne pour connaître le nombre définitif d’enquêtes dans la boîte. Le palier 100% propose déjà 16 enquêtes, les prochains paliers supplémentaires vont rajouter chacun une enquête supplémentaire notamment (jusqu’à un maximum de 20 enquêtes dans la boîte « de base »). La campagne de financement participatif Kickstarter en cours, jusqu’au 31 mars, est particulièrement intéressante pour nos souscripteurs, puisque outre le préachat livré à domicile d’1 ou 2 boîtes de Minuit, Meurtre en Mer à un prix très avantageux (bien moindre, en Europe, au futur prix en boutique), y est joint un livret d’enquêtes bonus avec 3 enquêtes supplémentaires inédites (non incluses dans la boîte disponible à terme dans le commerce). Bref, les souscripteurs disposeront de 19 à 23 enquêtes dès la sortie ! Nous envisageons bien sûr, pour plus tard et selon le succès que remportera le jeu, des livrets d’enquêtes supplémentaires sous la forme d’extensions.
Une enquête peut-elle être rejouée ou c’est du one shot ?
Notre système a également été conçu pour que les enquêtes puissent être rejouables au bout d’un certain temps. En effet, il est possible de suivre jusqu’à 60 pistes différentes dans une enquête. Or, en moyenne, les joueurs peuvent trouver la solution en connaissant environ la moitié de ces pistes ; aussi, si un jour lointain ils rejouent à la même enquête, il est impossible qu’ils aient les mêmes pistes et à fortiori dans le même ordre. De plus, les suspects portent toujours les mêmes prénoms d’une enquête à l’autre (bien qu’il ne s’agisse pas du tout des mêmes personnes), ce qui ajoute à la confusion ;). Nous avons fait tester plusieurs enquêtes deux fois aux mêmes testeurs à deux ans d’intervalle : non seulement aucun ne se rappelait des solutions, mais ils ont même tous nié à chaque fois y avoir déjà joué !
Vous parliez d’un changement de carrière, mais aujourd’hui vous vivez de l’édition ?
Non. Mon métier précédent, notamment, m’a permis de voir un peu venir, mais pour se développer Multifaces Editions qui dispose encore de petits moyens (humains comme financiers) procède par étapes et, une fois les factures payées, ce qui reste est obligatoirement réinvesti dans le projet d’édition suivant.
Du coup quels sont les plus gros challenges pour une petite maison d’édition aujourd’hui, d’après votre expérience ?
Arriver à se faire connaître du public (nos jeux, notre maison d’édition voire notre travail d’auteur) et ensuite espérer à un moment être reconnu par le public et nos partenaires pro (pour la qualité de nos jeux et le sérieux de notre travail) ; arriver à communiquer au mieux avec peu de moyens, à faire tourner la maison d’édition (un difficile travail d’équilibriste économique^^), à se développer au fur et à mesure en réinvestissant sans cesse pour (pouvoir) continuer.
Un jeu, chez nous, se travaille des années à l’avance entre les débuts du processus créatif, le perfectionnement du jeu, la matérialisation de prototypes successifs, le testing auprès d’un panel large et varié dans des cercles privés puis plus tard par le public sur des animations ludiques, l’écriture d’innombrables versions des règles, le perfectionnement du jeu et l’amélioration de son efficacité, les travaux illustratifs et graphiques, les échanges avec les fabricants et autres partenaires, la communication… C’est une sacré aventure que de concrétiser un jeu de société :).
Et si vous deviez donner un conseil à un jeune auteur qui se demande s’il doit se lancer ou non dans l’auto-édition, vous lui diriez quoi ?
Je n’ai pas spécialement de conseils « universels » à donner à de jeunes auteurs, mon expérience étant limitée à ce stade… Le métier d’éditeur n’a rien à voir avec celui d’auteur, il suppose de parvenir à gérer, anticiper et faire face au mieux à quantité de choses différentes et touchants souvent de loin seulement la création… (administration, compta, budgets, prévisions, communication, webmastering, aspects juridiques, suivi des sorties et tendances, etc. etc.) et demande d’être particulièrement organisé, attentif, vigilant, c’est un boulot énorme de tous instants et pas forcément « payant », même s’il peut faire rêver certains joueurs-auteurs, j’imagine.
Pour finir, vous pledgez, vous, en tant que joueur ?
C’est un univers que je connaissais peu jusqu’à présent, qui se révèle passionnant et enthousiasmant, mais qui demande d’investir beaucoup de temps pour suivre l’actu, une ressource particulièrement difficile à trouver pour un éditeur/auteur (la riche actualité du jeu en général prend beaucoup de temps à suivre chaque jour) ! Cela dit, notre 1ère campagne KS avec Minuit, Meurtre en Mer nous a aussi permis de nous intéresser vraiment au participatif et j’irai sans aucun doute à l’avenir, jeter de temps un temps un œil aux campagnes m’intéressant.
Merci Alain, et bonne chance pour la suite !
La fiche de jeu
Le projet participatif (se termine le 31/03/2017)
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morlockbob 14/03/2017
Ahlalala, mon regret du Festival d’Epinal, pas eu le temps d’y jouer. Mais au moins on a pu compter sur leur présence
Gougou69 14/03/2017
Très instructif cette petite interview !
TheGoodTheBadAndTheMeeple 15/03/2017
completement, ca me donne envie de pledger ^^
Je suis inquiet sur l’agressivité en jeu. J’aime Sherlock parce qu il est full coop, et watson n holmes est aussi tres gentil sur la resolution. Je ne vois pas si c est plus mechant que ça.
eolean 15/03/2017
Les jeux d’enquêtes ne sont pas forcément mon truc, mais par contre je suis très intéressé par la ligne éditorial que souhaite prendre Multiface ! Bon courage 🙂
Skies 15/03/2017
Merci pour cette interview très intéressante. J’ai backé le jeu il y a plusieurs jours, j’espère qu’il sera financé ! (Et avec quelques stretch goals débloqués, soyons fous 🙂 )