Issu de l’esprit un tantinet génial de Jamey Stegmaier (interview du monsieur ici), Scythe est décidément son titre phare. Caracolant au top des sites ludiques et cher au cœur de beaucoup de gamers, Scythe est une réussite sur nombre d’aspects, parvenant à réconcilier les amateurs de jeu de gestion à l’allemande et les amateurs de jeu d’affrontements un peu plus sanguins. Si vous ignorez tout de cette réussite ludique, je vous invite à consulter notre Just Played, qui vous en dira long sur la bête ventrue qu’est Scythe – et, par la même occasion, cela me permettra d’éviter de répéter.

Or donc sortira prochainement (normalement ce deuxième trimestre 2018) une application Scythe. J’ai pu essayer un build de test pendant une session de bêta fermée. Je m’en vais donc vous livrer mes impressions sur le produit, mais prenez ma diatribe avec un peu de modération : il ne s’agit là que d’un prototype. Fort avancé, certes, mais des améliorations pourraient être effectuées par le développeur, The Knights of Unity.

Ambiance

La mise en ambiance est toujours assurée par les artworks de Rozalski, sublimée d’une couche de 3D avec des meeples stylisés et peints, ainsi que de belles figurines.
Tout cela est bien fidèle, et nous serons au plus près des figurines, mais à portée de dézoom. Voilà qui permet une bonne lisibilité, parfois plus que sur le jeu de plateau qui dégoulinait un peu de matériel.
La musique m’a très vite agacé ; je ne l’ai pas trouvée fine, ni discrète ni agréable, même si son côté dynamique permet de faire monter la tension au moment où on combat, où les factions atteignent l’usine…

Les tours ennemis.

Jouabilité

Le portage de Scythe a de bons avantages. Avec de tels jeux, le rangement et la mise en place s’avèrent souvent pénibles, et la bonne tenue d’une table peut s’avérer complexe quand on a autant d’éléments de jeu. Ici, les tours passent vite et de façon fluide. Parfois trop : il manque un peu de feedback pour dire ce qui se passe. Heureusement, un discret historique des actions de la partie vient rappeler et recontextualiser chaque mouvement.

Cependant, on est plus que jamais plongé dans l’aspect comptabilité : les tableaux de statistiques s’accumulent et il est difficile de lire l’écran tant il est submergé de chiffres nécessaires à l’établissement d’une bonne stratégie. Il est bien entendu possible de réduire les champs, mais j’ai eu l’impression, durant mes parties, d’avoir la tête dans le guidon ; de peaufiner mon moteur économique et de ne pas regarder ce qui se passait ailleurs. Voilà ce que l’application Scythe ne parvient pas encore à émuler : le sentiment d’oppression constante, d’espace limité, de menace larvée, de guerre froide. On nous promet un chat en ligne, mais je crains que ça n’alourdisse les parties, quand un canal vocal serait peut-être ce qu’il faut pour rendre les négociations plus vivantes.

L’écran de démarrage de la partie vous indique ce qu’il faut savoir.

La façon de fonctionner du plateau des actions est encore un peu floue (mention spéciale à l’amélioration, qui n’est pas ergonomique du tout), et j’ai un certain nombre de fois omis de réaliser un certain nombre d’actions secondaires. Ce qui m’a fait rager bien correctement devant mon écran. Le jeu « organique » avait l’avantage de s’expliquer par son matériel, de permettre de manipuler les éléments si l’on se trompait ou si l’on voulait voir ce qui se trouvait sous un élément recouvert. Là, le plateau d’actions du joueur est petit, et ce même sur un écran de bonne taille, il faut chercher pour valider ses objectifs, les pistes de score sont dures à lire… Bref, l’expérience de jeu de la version physique de Scythe était pensée jusque dans son matériel et c’est pour l’instant cela qui pèche pour la version application : l’interface utilisateur n’est pas évidente du tout.

Perspectives

Je l’ai dit plus haut, tout ceci n’est qu’une version bêta que les développeurs corrigeront sûrement.

Quelques développements sont à surveiller, et d’autres à célébrer. Si j’ai testé la version Steam Windows, la version Steam Mac est d’ores et déjà prévue, ainsi que des versions mobiles iOS et Android. Je crains cependant pour ces versions, car l’ergonomie doit encore être différente (adaptée aux taps divers et variés, aux petits écrans), et c’est aujourd’hui très loin d’être le cas. Lors de sa sortie, Scythe sera disponible en français et dans un certain nombre d’autres langues.

Du jeu organisé (des tournois) sera mis en place, et ça, c’est une bonne chose. Enfin, les extensions sortiront en DLC. Ce qui permettra à tous les fous de Scythe de s’y adonner sans avoir à rassembler des joueurs qui ont un agenda surchargé. (Surtout que les parties sont globalement écourtées par rapport à ce qui pourrait se passer en vrai.)

Ça sentirait pas le fight au sud du plateau ? (en haut, les ressources des joueurs.)

On l’attend…

Ben, je dois vous dire, je ne l’attends pas vraiment. Non pas que l’application soit véritablement décevante. Non, au final, elle est plutôt bien gaulée pour une bêta, et je gage que les améliorations porteront leurs fruits, car rien n’est insurmontable. Ce qui me chiffonne, avec ce Scythe, c’est tout simplement que la version physique m’est plus sympathique. J’ai fait des caisses de parties d’Ascension, de Lords of Waterdeep, de Cthulhu Realms ou de Jaipur sur mes applis, mais au final, pour Scythe, je préfère encore « le faire en vrai ». Je gage que ce sera tout de même un beau produit d’appel qui permettra de jouer avec des amis qui sont très très loin (des Conquérants du lointain ! Haha !).

Rendez-vous d’ici quelques mois (deuxième trimestre 2018 annoncé, mais ça pourrait prendre un poil de retard) pour le verdict final.

L’IA est un peu faible.

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