Quarto – Après vous, très cher…

Ne vous laissez pas abuser par sa simplicité : Quarto est un jeu pour cerveaux tenaces et rigoureux. Comme les échecs, il s’agit d’un jeu abstrait qui oppose deux intelligences à travers une poignée de pièces. À la différence des échecs, il se joue en dix minutes.

Ici, pas de hasard, d’entourloupe ou d’astuces cachées. C’est un jeu d’analyse, de prudence et de savoir-vivre,  un jeu pour gentlemen. Il vous donnera envie d’enfiler un smoking italien et de vous carrer dans un profond fauteuil de cuir, un cigare à la main, affichant sous votre fine moustache un sourire goguenard à l’intention de votre adversaire.

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Prise en main

La première chose que l’on voit en ouvrant la boîte est le plateau de jeu : une petite dalle étonnement lourde à la sombre robe d’acajou. Une série de cercles gravés dans la résine dessinent une arène de 4 x 4 cases.

On retire le plateau de la boîte pour découvrir 16 pièces de bois serrées dans un sabot de carton. Il y en a des blanches et des noires, des grandes et des petites, des rondes et des carrées… L’œil novice parcoure cette diversité en y cherchant une logique. Une couleur pour chaque joueur, sans doute, mais quelle différence entre les formes ? Une grande pièce a-t-elle une plus grande valeur ?

 La vérité se révélera plus simple que cela, diaboliquement plus simple. Pour l’instant, on apprécie le poids des pièces, la qualité de leur facture, leur contact agréable au doigt.

On pose le plateau sur la table. Et là, miracle ! Vous pouvez commencer à jouer. Quarto ne demande aucune autre mise en place.

Servez-vous un cocktail puis, en bon gentilhomme, rivalisez de politesse avec votre adversaire pour savoir qui aura l’honneur de donner le coup d’envoi.

 

Open the box

Open the box

 

Les règles

Le principe de Quarto est d’une simplicité désarmante. Les 16 pièces du jeu sont toutes définies par une combinaison unique de caractéristiques :

– 8 sont blanches, 8 sont noires.

– 8 sont grandes, 8 sont petites.

– 8 sont rondes, 8 sont carrées.

– 8 sont creuses, 8 sont pleines.

Les 16 pièces de Quarto. Comptez-les, vérifiez-les : il n'y en pas deux pareilles.

Les 16 pièces de Quarto. Comptez-les, vérifiez-les : il n’y en pas deux pareilles.

 

À son tour, un joueur choisi l’une des pièces non jouées et la tend courtoisement à son adversaire. Celui-ci la saisit, compose un remerciement de bon ton, et la pose sur une case libre du plateau. S’il complète ainsi une ligne ou un carré de 4 pièces partageant ne serait-ce qu’une seule caractéristique commune, il a gagné la partie.

Est-ce là tout ? Et bien oui, ma foi. Il vous faudra peut-être une minute pour expliquer Quarto à un nouveau joueur. Soyons grands seigneurs : deux minutes, parce qu’il ne sert à rien de se presser.

 

La partie

Nos deux gentlemen se mettent donc à la tâche. Entre deux gorgées, ils se présentent mutuellement des pièces et les placent sur le petit échiquier. Les premiers tours sont plutôt décontractés : peu importe la pièce que l’on donne et où on la pose, il est impossible de jouer un coup décisif tant que 3 pièces ne sont pas alignées. Certains joueurs se défileront, dispersant au maximum les pièces autour du plateau pour retarder l’instant de vérité. D’autres, plus agressifs, couperont au plus court.

La tension monte très vite. À chaque tour, les lignes dangereuses se multiplient. La réserve de pièces disponibles se vide. Quelqu’un finira fatalement par faire une erreur, ou par n’avoir d’autre choix que de tendre à l’adversaire une pièce qui lui sera fatale. On se met à redouter le moment où c’est à nous de choisir. Tout semble bloqué. Ah, cette pièce à l’air libre, mais est-ce bien sûr ? Je revérifie les alignements connus… ça semble bon. De toute façon, je n’ai pas le choix, toutes les autres pièces disponibles me semblent condamnées. Je tends ma pièce à mon adversaire. Il la considère un moment, puis la pose sur une case quelconque. Il n’a pas pu en faire un coup gagnant, c’est à lui maintenant de me donner une pièce. Je me laisse aller dans mon fauteuil en réprimant mon excitation. Cette fois, il va se tromper ! Il ne peut plus que se tromper !

Voyons si vous avez bien suivi : dans cette situation, quelles sont les pièces à ne PAS donner à votre adversaire ? Réponse en bas de l'article.

Voyons si vous avez bien suivi : dans cette situation, quelles sont les pièces à ne PAS donner à votre adversaire ? Réponse en bas de l’article. *

 

Il me tend une pièce, et je déchante. Je ne l’avais pas vue, celle-là. Je ne peux rien en faire. Je la joue, et considère mes options. Toutes les pièces restantes augurent la défaite. Il ne me reste qu’à feindre un flegme impérial, féliciter mon adversaire et demander une revanche.

 

En résumé

Quarto est un jeu abstrait en duo qui va droit au but. En moins de dix minutes, vous aurez livré un bras de fer mental qui ne pardonne aucune défaillance. Le jeu se distingue par son esthétique épurée, la qualité rare de son matériel, l’économie et l’élégance de son système.

Seul bémol, mais de taille : on en fait le tour aussi rapidement qu’on l’apprend. Il peut être agréable de s’y livrer encore et encore avec de nouveaux partenaires ou de régler ses comptes avec un rival, mais le jeu n’offrira rien de nouveau au fil des parties.

 

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* Réponse au test : C’était un piège. La partie est déjà finie, avec un alignement de 4 pièces creuses dans la diagonale. Mais si on néglige ce détail, il ne faut pas donner de pièce carrée, haute ou creuse. Vous les aviez toutes ?

> La fiche du jeu

Un jeu de Blaise Müller
Edité par Gigamic
Distribué par Gigamic
Pays d’origine : France
Date de sortie : 1991
Pour 2 joueurs
A partir de 8 ans
Durée moyenne d’une partie : 15 minutes

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2 Commentaires

  1. Grovast 05/01/2015
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    Merci pour le coup de projecteur qui retranscrit bien le mano à mano intellectuel qu’est ce jeu.
    Il vaut bien une chronique, sans doute.

    Je ne dis jamais non à une partie sur le pouce, mais je ne dois pas être cablé pour, je suis trop mauvais 😀

     

  2. Shanouillette 06/01/2015
    Répondre

    Welcome El Cam dans la famille des contributeurs voxiens et merci pour cet élégant article sur un sujet qui ne l’est pas moins…

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