Pocket Imperium – Un 4X dans ta poche

Pocket Imperium fait partie de ces nombreuses nouveautés sorties lors du dernier salon d’Essen. Ce qui m’a tout de suite intrigué et qui a valu que je m’intéresse de près à lui, c’est qu’il est présenté comme un 4X minimaliste en 45 minutes. Au passage, sachez tout de même qu’il est disponible gratuitement en Print & Play depuis 2013, et qu’il a obtenu un Golden Geek Award en 2014. Le jeu part donc avec de sacrés atouts.

Voilà une boîte bien remplie !

Voilà une boîte bien remplie !

Un quoi ?

Aïe, je n’ai pas écrit trois lignes, que j’ai déjà perdu la moitié des lecteurs.

Ok, reprenons depuis le début.

Un 4X est un jeu de civilisation en 4 phases : eXplore, eXploit, eXpand, et eXterminate. Donc, en gros des phases d’exploration de l’environnement, d’expansion de sa civilisation (en levant des armées), d’exploitation des ressources, le tout afin d’exterminer ses adversaires. Un programme somme toute très alléchant.
Les principaux ambassadeurs de ces jeux sont Twilight Imperium 3, un monster-game aux parties très loooongues, Sid Meyer’s Civilization le jeu de plateau, ou encore Eclipse qui avait déjà réussi le tour de force de contenir un 4X en deux heures !
Ces jeux de civilisation s’accompagnent généralement de phases de recherche, pour améliorer son développement, et de diplomatie (parce qu’on évite de taper sur tout le monde en même temps, ça fait mauvais genre, et on est sûr de s’en prendre plein la tronche en retour).

Afin d’accélérer le jeu et se concentrer plus sur les conquêtes de territoire, l’auteur de Pocket Imperium a fait le choix de retirer ces phases de recherche (aucune amélioration possible tout au long de la partie) et de diplomatie (il y aura bien sûr quelques discussions autour de la table pour vous influencer les autres joueurs, mais ce n’est pas de la grosse diplomatie).

Une planète convoitée...

Une planète bien convoitée…

 

Si vous êtes un tant soit peu doué en anglais, le terme Pocket dans le titre ne vous aura sans doute pas échappé. Il indique en effet un jeu de petit format, qu’on peut facilement emmener partout. La boîte n’est certes pas grande, mais elle est bien remplie. Elle contient sept tuiles hexagonales recto-verso qui permettent de constituer le plateau de jeu avec des systèmes planétaires, des vaisseaux (pions en bois de couleurs et de formes différentes), quelques cartes d’action, des jetons de points de victoire et la règle de jeu.

La règle n’est pas bien longue, et sa lecture est très agréable (d’autant que la traduction française fournie est de qualité). Il est ainsi possible de démarrer sa première partie en moins de 15 minutes. D’ailleurs, Sha-Man vous prouve dans ce Ludo Chrono qui ne prend vraiment que 5 minutes (un challenge pour quelqu’un d’aussi bavard ^^).

La conquête de l’espace en trois mouvements

Le concept du jeu est simple : À chaque tour, les joueurs vont programmer l’ordre dans lequel ils vont effectuer les actions Explore, Expand et Exterminate. Puis tous les joueurs révèlent simultanément leur première action. Et là, première grosse originalité du jeu, en fonction de ce qu’ont joué vos deux voisins, votre action aura plus ou moins d’impact. En gros, si nous avons tous les trois joué l’action Explore, alors l’espace est congestionné, et nous ne pouvons déplacer qu’une seule flotte. Alors que si j’avais été le seul à jouer cette action lors de cette phase, j’aurais pu déplacer trois flottes. Il en va de même pour les actions Expand (je peux placer plus ou moins de nouveaux vaisseaux en jeu) et Exterminate (je peux conduire plus ou moins d’attaques contre des planètes). Cela amène une grosse part d’interaction dès cette première phase, car il faudra estimer au mieux ce que vont jouer les adversaires afin de jouer en décalage par rapport à eux, pour maximiser les effets des actions (ou à l’inverse, pour réduire l’effet de leurs actions). En sachant évidemment qu’ils font le même raisonnement dans leur coin…

Quelle action choisir en premier ? Un choix difficile auquel il faudra faire face à chaque tour.

Quelle action choisir en premier ? Un choix difficile auquel il faudra faire face à chaque tour.

 

Puis, un autre mécanisme ingénieux apparaît : l’ordre de résolution des actions. En effet, les actions ne sont pas résolues dans l’ordre du tour, mais toujours dans l’ordre déterminé suivant : Expand, puis Explore, puis Exterminate. Il est ainsi possible de réagir aux actions des adversaires, notamment par rapport à l’action Exterminate, car il est possible de renforcer ces planètes via l’action Expand, ou de fuir (ou se renforcer) via l’action Explore.

Marquer des points en exploitant ses ressources

Une fois que les trois phases ont été résolues, les joueurs procèdent à la phase Exploit qui permet de gagner des points de victoire (on n’en gagne pas au travers des combats, mais seulement via les planètes conquises), et de vérifier qu’on peut alimenter notre flotte (limite d’empilement selon la taille de la planète sur laquelle stationne la flotte).
La façon de marquer des points est là aussi originale et donne une dimension opportuniste au jeu. En effet, chacun leur tour, les joueurs indiquent la tuile qui va être décomptée. Et sur chaque tuile, il y a 4 points à gagner réparties sur des planètes qui permettent de gagner 1 ou 2 points. Il arrive qu’une civilisation soit la seule présente sur une tuile, dans ce cas, elle est la seule à marquer des points. Mais s’il y a plusieurs civilisations, alors elles marquent toutes des points. Les six tuiles périphériques sont ainsi décomptées. Et si un joueur contrôle la tuile du centre, il peut alors choisir une nouvelle tuile à décompter. L’air de rien, ce système d’attribution des points va donner au jeu tout son dynamisme en poussant les joueurs à explorer les autres systèmes afin de grapiller quelques points sur les tuiles comptabilisées par les autres joueurs. Un joueur trop statique sur sa tuile n’aura ainsi aucune chance de victoire.

Le seul défaut, à mon sens, tient dans la double phase de score du dernier tour (phase Exploit du dernier tour, plus un décompte de fin de partie dans la même configuration du plateau) qui tend à vraiment favoriser le joueur en tête lors du dernier tour. Et pas forcément celui qui aura été régulier au cours de la partie (car finalement, les différences de points marqués par les joueurs à chaque tour ne sont pas si importantes).

Début de partie à trois joueurs.

Début de partie à trois joueurs.

Des combats meurtriers et des choix difficiles

Le jeu est donc très dynamique, et incite les joueurs à s’affronter régulièrement. Pour autant, il faut aussi savoir économiser ses forces car les combats sont très meurtriers. Ils sont résolus de manière simple et rapide : autant de vaisseaux éliminés dans chaque camp simultanément, jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un camp (ou personne). On évite ainsi de perdre du temps dans des lancers de dé (rappelez-vous, on vous a promis des parties de 45 minutes). Et une fois votre flotte décimée, il vous faudra au moins deux tours (en jouant judicieusement votre action Expand) pour vous reconstituer une flotte digne de ce nom.

Ce que j’apprécie particulièrement dans ce jeu, c’est qu’à chaque tour, on est obligé de jouer les trois types d’action, sans que cela nous limite pour autant dans les choix et les stratégies. Étrangement, c’est même le contraire. Car cette contrainte amène toute une dose de réflexion. Et cela permet de mélanger plusieurs niveaux de stratégies (à moyen terme sur la partie, à court terme sur l’ordre des actions du tour) et de tactique (que faire finalement lors de la résolution de chaque action, en fonction des choix des adversaires).

Fin du tour 3. Au tour 4, le joueur rouge va se faire sévèrement fesser !

Fin du tour 3. Au tour 4, le joueur rouge va se faire sévèrement fesser !

En 45 minutes, vraiment ?

Selon le nombre de joueurs, on ne joue pas le même nombre de tours. Et on ne joue étrangement que six tours à trois joueurs contre huit à quatre joueurs. Inutile d’être un surdoué en math pour comprendre que les parties à quatre joueurs sont plus longues qu’à trois. Résultat : on jouera une partie à trois en une trentaine de minutes contre une heure à quatre (d’autant qu’il y a plus de discussions entre les joueurs). Mais au final cela reste une durée courte, ce qui permettra de le sortir en fin de soirée par exemple pour se détendre un peu et se mettre dessus dans la joie entre amis.

Jusqu’à présent, comme à chaque fois j’ai présenté le jeu à des nouveaux joueurs, j’ai toujours joué sur le plateau de base, qui se renouvelle déjà bien grâce à son côté modulaire (les planètes sont toujours placés différemment, ce qui produit des plateaux toujours différents). Cela a un impact notamment s’il y a de nombreuses planètes en contact avec la tuile centrale, car cela promet de nombreuses menaces d’exterminations. Mais le verso des tuiles amènent de nouvelles idées, et la règle propose également des dispositions supplémentaires. A essayer lors de mes prochaines parties…

Fin de la partie, c'est finalement le vert qui l'emporte, grâce à un double scoring avantageux au dernier tour !

Fin de la partie, c’est finalement le vert qui l’emporte, grâce à un double scoring avantageux au dernier tour !

Ça ressemble à un 4X, mais ce n’est pas un 4X

Malgré les efforts de l’auteur, les sensations ne sont pas les mêmes qu’avec un 4X. Sans doute car tout va plus vite (explorations, combats…). Selon les joueurs les positions sur le plateau seront plus ou moins statiques, mais il n’y a pas un tour sans affrontement (sauf le premier), et guère d’alliances qui durent non plus. D’autant que devant l’étroitesse du plateau, il y aura toujours un joueur pour profiter de chaque situation, ce qui complique les alliances. Donc plutôt qu’un 4X, nous sommes ici en présence d’un jeu de majorités et de placements. Cela ne lui enlève en rien ses qualités, loin de là. C’est un jeu que j’apprécie justement pour tout ce qu’il nous offre en choix et en interactions dans un temps contenu. Car j’avoue avoir été bluffé par la règle très bien conçue, avec tant de possibilités dans si peu d’actions. Chapeau bas M. Mortimer !

> Vers la fiche de jeu

Un jeu de David J. Mortimer
Illustré par Brett J. Gilbert, Todd Sanders
Edité par Good Little Games, LudiCreations
De 2 à 4 joueurs
A partir de 10 ans
Durée moyenne d’une partie : 45 minutes

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2 Commentaires

  1. elniamor 04/12/2015
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    Tu m’as convaincu ! Merci pour l’article… Pourquoi jouer en un nombre de tours prédéfini et pas s’arrêter au 1er à x points par exemple, pour éviter l’effet de fin de partie que tu relèves ?

  2. Guillaume LEMERY 05/12/2015
    Répondre

    Ce jeu a vraiment plein de qualités en effet. Il mérite un bon coup de projecteur. En plus, il est encore disponible en PnP donc il n’y a aucune raison de passer à côté.

    Pour ta proposition, je ne suis pas convaincu. Le plus simple me paraît plutôt de soit enlever le décompte final, soit remplacer le décompte du dernier tour par le décompte final.

     

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