L’ile au forban – Tu click ou tu point ?

L’auteur Stéphane Anquetil est principalement connu pour la gamme Crime zoom. Ce sont des jeux d’enquêtes dans des boîtes compactes. Il revient aujourd’hui avec Pixel Aventure : l’île au Forban. Ce sous-titre laisse à penser qu’il s’agit du premier opus d’une nouvelle gamme. Nous retrouvons un des principes de Crime zoom : une série de paysages composés d’un rectangle de 2 fois 2 cartes. On peut retourner une des cartes pour découvrir des informations sur l’un des éléments représentés sur l’illustration du recto. La grosse différence est que cette fois nous n’avons plus une enquête policière, mais une revisitation des jeux vidéo du type “point & click” qui faisaient fureur dans les années ‘80. Les illustrations de type pixel art participent à l’ambiance vintage.

pixel aventure paysage

un lieu : 4 cartes qu’il est possible de retourner pour avoir plus de détails sur un élément illustré

 

Sous le sunlight des tropiques

Dans cette aventure au soleil, nous nous retrouvons aux Seychelles, où nous allons explorer une île à la recherche de notre oncle et d’un trésor. En retournant certaines cartes de paysage nous pouvons trouver des objets. Ceux-ci peuvent être combinés avec des lieux, si on souhaite les utiliser à cet endroit (par exemple l’objet Clé avec la carte paysage du salon qui représente un coffret). Comment associe-t-on les cartes ? Au dos des cartes objets se trouvent divers petits paragraphes à côté de petits symboles. Si l’un d’eux est présent sur la carte paysage, on peut lire le paragraphe correspondant et dépenser un temps. Car oui, presque toute action que vous effectuerez coûte un temps : faire une association objet-lieu, retourner une carte paysage, changer de lieu. 

Vous disposez de 96 temps pour la partie. Vous les décomptez grâce à une sorte de trombone à déplacer sur le pourtour d’une carte. 48 petites cases de chaque côté d’une carte format 63x88mm, autant vous dire que c’est une tâche plutôt délicate que de déplacer précisément ce petit compteur de temps. Personnellement, je suis allé au plus simple : un stylo et des traits sur une feuille blanche. 

Carte servant à suivre le temps qui passe.

 

Sac à dos magique

Tout au long de notre aventure, nous allons trouver divers objets. Notre sac à dos permet d’en conserver uniquement quatre. Ainsi, lorsque nous trouverons le cinquième il faudra en abandonner un. Il sera toujours possible de faire un “échange” et reprendre l’objet laissé (en dépensant un temps), et ceci même si nous avons changé de lieu. Pas très logique, mais bon, c’est moins “lourd” que faire un aller-retour (donc dépenser deux temps) jusqu’au lieu où on l’a laissé. Un sac à dos aussi grand que le sac de Mary Poppins (et avoir un inventaire illimité) était une autre option 😉 . Il n’est pas évident de savoir quels objets nous seront utiles et surtout dans quel ordre, puisqu’il n’y a pas une linéarité imposée dans l’exploration des lieux et donc le déroulement de la partie, ce qui est plutôt une bonne chose.

Comme je vous l’expliquais plus haut, lorsqu’on veut se servir d’un objet, on retourne la carte et on regarde s’il y a l’icône du lieu où on souhaite l’utiliser. Lorsqu’on parcourt du regard la carte objet en recherche de l’icône en question, il est difficile de ne pas lire partiellement le texte des paragraphes qui ne correspondent pas. Quand une combinaison objet-lieu ne sert à rien, on a juste du texte (à supposer que cette combinaison existe), tandis que pour LA combinaison nécessaire à l’avancée du scénario, on a du texte et un renvoi à la nouvelle carte débloquée. Renvoi sous forme de petit encadré noir qui se repère immédiatement quand on retourne la carte. Ainsi il est quasi impossible de ne pas se divulgâcher et repérer (voire mémoriser) la “bonne” icône de lieu où il faudra utiliser cet objet. Les Adventure games, autre gamme de jeux point & click, utilisait un livret regroupant tous les paragraphes résultats possibles. Il me semble que ça générait un peu moins de spoil, mais en étant aussi moins fluide dans les manipulations. Ce n’est pas évident de bien reproduire en jeu de société les possibilités qu’offre un jeu vidéo…

Verso d’une carte objet. plusieurs utilisations qui ne servent pas. Une seule est utile (floutée).

Vision basse résolution

J’ai l’âge des personnes ayant connu les jeux vidéo des années ‘80-’90, mais ne les ayant pas vraiment pratiqués, je n’ai pas saisi les éventuelles références. À l’inverse, j’ai trouvé que ce choix d’illustration en pixel art rendait parfois difficile la reconnaissance des éléments représentés, et donc compliquait la décision de retourner ou non telle carte. Le jeu dispose de beaucoup de fausses pistes, dans le sens où un grand nombre de cartes ne nous font pas avancer, ainsi, si on ne parvient pas à identifier un élément clé dans une illustration, on peut se retrouver à tourner en rond un certain temps. C’est certainement voulu dans le design du jeu, mais je n’ai pas trouvé ça agréable.

Mini spoil (sélectionnez pour faire apparaître): à un moment donné il faut trouver comment atteindre une trappe, j’avais déjà retourné 90% des cartes et les autres ne me semblaient pas pouvoir donner accès à un objet qui pourrait m’être utile, et pourtant si, il a fallu que je tâtonne jusqu’à le trouver. A posteriori, quand on sait ce que représente un certain détail de l’illustration on peut comprendre le lien logique, mais le style graphique n’aide vraiment pas, bien au contraire.

Verso d’une carte paysage : on voit l’icône en rouge. On peut associer un objet et chercher cette icône sur la carte objet pour voir s’il se passe quelque chose.

 

Heureusement, d’autres étapes du scénario peuvent se résoudre grâce à plusieurs objets. Ainsi, du moment qu’on en a trouvé un, on pourra avancer dans le scénario. J’apprécie que dans un jeu d’enquête il y ait une pression de temps, que l’on n’ait pas le temps d’explorer toutes les pistes et que l’on soit obligé d’analyser et conclure avec uniquement une partie des informations. Par contre pour un jeu narratif avec un objectif et donc une fin de l’histoire, je trouve que c’est un problème qu’il y ait des nœuds narratifs (c’est à dire des passages obligés pour avancer dans le scénario) que l’on ne peut atteindre que d’une seule façon s’il y a une limite de temps (ou points d’action).

 

C’est un beau roman, c’est une belle histoire

Au-delà de ces quelques écueils mécaniques qui m’ont déçu, j’ai trouvé l’histoire très bien écrite. Il y a 5 épilogues différents. En effet, quand on a épuisé nos 96 temps (ou avant si on est vraiment confiant), on retourne au lieu de départ et il faut présenter un objet au pilote du bateau qui nous a amené sur l’île. Selon quel objet on lui donne, la fin de l’histoire ne sera pas la même. Le choix de cet objet ne se fait pas uniquement en fonction de ceux qu’on a trouvés, mais aussi en fonction de ce qu’on a compris de l’histoire. Ainsi, on peut avoir atteint les 3 objectifs fixés par le jeu en début de partie mais connaître une triste fin si on n’a pas compris ce qui se tramait entre les lignes. Je trouve que c’est LA bonne surprise que réserve ce Pixel Aventure, et qui l’amène au-delà du simple point & click. Le style est empreint d’humour avec de nombreux jeux de mots que l’on trouvera drôles ou pas. Pour ma part, elles m’ont fait sourire la plupart du temps. Il y a enfin besoin de résoudre deux petites énigmes pour compléter le scénario. Elles sont assez simples et classiques et ne représentent pas le cœur du jeu.

 

Un peu d’humour dans le descriptif des objets.

 

À la fin du livret de règle, on trouve la “Soluce” qui indique les étapes successives de la résolution du scénario. Il y a aussi une double page qui donne quelques détails supplémentaires sur certains points de l’histoire qui aurait pu échapper aux joueuses.

 

Conclusion

Le principe de base de Crime zoom est décliné dans un point & click sur un thème île au trésor. Même s’il correspond parfaitement à la thématique, le style pixel art des illustrations ne m’a pas trop plu et surtout il a été un obstacle par moment au bon déroulement de l’aventure. Il y a des pointes d’humour dans le texte des cartes auxquelles certains pourront être sensibles, et un dénouement avec 5 fins possibles selon notre compréhension de l’histoire et qui est le principal point positif que je retiens du jeu. La mécanique d’association objet-lieu serait perfectible puisqu’il y a trop de possibilités de se spoiler les autres réponses. 

Malgré ces quelques défauts, j’ai trouvé les textes bien écrits (ce qui n’est pas toujours le cas dans ce type de jeu et mérite donc d’être signalé) et le scénario intéressant. Je garderai donc un œil sur cette nouvelle gamme.

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