Les Tribus du Vent : voltiger… sans perdre l’équilibre !

Les Tribus du Vent de Joachim Thôme parle d’un sujet qui a le vent en poupe ( 😉 ) depuis quelques années : la crise écologique et la possibilité que notre planète devienne inhabitable. Mais, au lieu de vous plonger dans la noirceur traditionnelle des jeux post-apocalyptiques, son jeu, Les Tribus du Vent, nous pousse à imaginer de nouvelles façons, plus raisonnables et respectueuses de la nature, d’habiter une planète pourtant ravagée par la pollution. Comment faire ? Il faut apprendre à voltiger !

Dans les Tribus du Vent, chaque joueur incarne en effet une tribu de voltigeurs qui tentent de construire des villages sur les arbres et d’assainir des parcelles de terre en érigeant des forêts. Il s’agit d’un jeu pour deux à cinq joueurs dont les parties ne devraient pas excéder les deux heures : en effet, le jeu prend fin lorsqu’un joueur parvient à construire le cinquième village sur son plateau.

Alors, allez-vous vous lancer dans une course à la construction de villages, ou tenter de développer harmonieusement votre tribu ?

 

Commençons par les fondations…

Construire des villages dans les arbres : il n’y a rien de tel pour stimuler notre imagination, mais cela ne se fait pas n’importe comment. Les joueurs jouent en effet tour par tour et peuvent réaliser une action parmi trois : jouer une carte, construire un village ou construire un temple.

Voici comment se présente le plateau d’un joueur et les cartes posées sur le présentoir.

 

Pour jouer une carte, il faut remplir les conditions indiquées dans le carré gauche. Tandis que la construction d’un village requiert d’avoir assez d’habitants qui peuplent la forêt. Si vous êtes coincés avec vos cartes, vous pouvez toujours en défausser trois pour construire un temple sur n’importe quelle forêt, et récupérer ainsi un bonus instantané.

Les cartes permettent de gagner de l’eau (la ressource du jeu), déplacer les voltigeurs, enlever de la pollution ou encore choisir et poser des tuiles Forêt. Ces actions sont toutes nécessaires au développement de votre tribu : l’eau sert à placer les forêts sur des cases qu’il faudra dépolluer au préalable. Si vous voulez construire un village, il faudra que les voltigeurs se déplacent d’abord vers la tuile Forêt concernée.

On construit un village en retournant une Forêt dont tous les emplacements sont occupés par des voltigeurs. À part rapporter quelques points, la construction des villages a surtout pour fonction de faire avancer la partie et de vous faire piocher des cartes que vous pourrez soit garder pour leur objectif de fin de partie, soit utiliser pour leur bonus instantané.

Outre à rapporter l’un des bonus instantanés indiqués sur votre plateau (les plateaux des joueurs sont asymétriques), les temples permettent de gagner des points si vous en construisez au moins trois. Si vous arrivez à en construire quatre, cela pourra faire la différence lors du décompte final.

Si vous voulez un aperçu plus précis des règles des Tribus du Vent, vous pouvez regarder le Ludochrono.

 

De bonnes interactions pour un développement solitaire

D’un point de vue mécanique, l’originalité des Tribus du Vent réside dans le mécanisme de jeu des cartes. Chaque carte appartient à l’un des quatre éléments – la terre, l’eau, le feu ou l’air – et la plupart d’entre elles indiquent des conditions qui concernent aussi bien votre propre main que celle de vos deux voisins (à votre gauche et à votre droite). C’est pour cela que vos cinq cartes doivent toujours être placées sur votre présentoir.

Par exemple, certaines cartes ne pourront être jouées que si vos adversaires possèdent des cartes du même élément. Pour d’autres, il faudra que vous possédiez plus ou moins de cartes de l’élément concerné qu’au moins un de vos adversaires. Si vous satisfaisez la condition pour vos deux voisins, vous récupérerez une meilleure récompense. Plus rarement, les conditions des cartes porteront uniquement sur votre main. Cela permet d’éviter que votre jeu soit entièrement dépendant de la gestion de cartes des autres joueurs.

Par exemple, la condition de la première carte, c’est d’avoir une carte de chaque élément dans sa main, elle permet soit de poser une tuile Forêt (coût : 4 Eau) soit de récupérer 5 Eau. Pour la troisième, vous additionnez vos cartes Terre à de celles de vos voisins. Le coût de la Forêt change en fonction du total. Pour jouer la cinquième et gagner 3 déplacements (et une dépollution), il faut qu’au moins l’un de vos voisins ait une carte Air.

 

D’ailleurs, vos adversaires ne pourront jamais vous mettre les bâtons dans les roues en connaissance de cause. Si votre jeu et votre main peuvent leur donner quelques indices, il est rare qu’un joueur choisisse une carte pour en embêter un autre. Vous aurez plutôt tendance à jouer des cartes pour vous développer dans votre coin, et tout obstacle provoqué pour les autres n’est en général qu’une conséquence indirecte et involontaire.

En effet, les actions autorisées par les cartes ne concernent que votre propre plateau de joueur. Ce qui veut dire qu’une fois la condition remplie, vous pourrez réfléchir à la façon la plus pertinente de réaliser l’action permise par la carte que vous avez jouée. Il s’agit donc à la fois de refaire sa main en tenant compte des cartes de vos voisins, et d’élaborer une stratégie qui vous permettra d’optimiser le développement de vos tribus.

 

Le bon équilibre pour prendre son envol

La mécanique de gestion de main des Tribus du Vent n’empêche pas toute prévision : il est tout à fait possible d’élaborer une stratégie à partir des cartes qu’on a en main, et de la suivre, aussi longtemps que les cartes de vos adversaires vous le permettent. D’ailleurs, chaque fois que vous refaites votre main, vous choisissez la carte que vous piochez, ce qui permet d’élaborer son jeu de façon à satisfaire les conditions des cartes qui vous intéressent le plus.

Toutefois, à moins que vous suiviez de très près le jeu de vos voisins – en général, on réfléchit plutôt à l’action qu’on réalisera le tour suivant -, vous ne pourrez pas tout prévoir avec une certitude absolue. Parfois, vous aurez la mauvaise surprise de ne pas avoir joué l’une de vos cartes à temps. Les bonnes surprises arrivent aussi : en changeant son jeu, votre voisin vous permettra aussi de jouer une carte dont vous convoitiez l’action depuis longtemps.

En somme, pour tirer votre épingle du jeu, il faut à la fois vous montrer capable d’anticipation, de capacité d’adaptation, et d’un peu d’opportunisme, mais il est important de préciser qu’une partie des Tribus du Vent se déroule en général dans une bonne ambiance et sans la moindre agressivité entre les joueurs. D’autre part, vous devrez veiller à trouver un autre équilibre : celui entre un développement très poussé de votre tribu – ce qui aurait pour effet de vous faire marquer plus de points – et l’avancement dans la construction de vos villages qui accélère le cours de la partie

Durant les premières parties, on peut avoir tendance à beaucoup se concentrer sur les objectifs de fin de partie (certains prennent du temps), la dépollution, la pose de tuiles Forêt, ou encore la construction de temples… Cela fait beaucoup de choses à faire et les possibilités de ce jeu donnent effectivement beaucoup de directions potentielles à suivre pour votre tribu. Mais, si vous essayez de les suivre toutes en même temps, vous risquez de vous éparpiller.

Durant la première partie, j’avais beaucoup développé ma tribu en réalisant mes quatre objectifs (à gauche du plateau). Finalement, j’ai mis fin à la partie au grand dam des autres joueurs qui n’ont pas pu faire de même.

 

Si un joueur choisit de construire plus vite que vous ses cinq villages, la fin de partie sera abrupte. Il faut donc prendre régulièrement la température de l’avancement du jeu en regardant les plateaux des autres joueurs et trouver, non seulement un équilibre entre adaptation et stratégie, mais aussi celui entre développement de sa tribu et accélération de la partie.

 

Voltige ouverte à toutes et tous !

Avec des interactions suffisamment soutenues pour ne pas avoir le sentiment de jouer dans son coin, mais jamais agressives, Les Tribus du Vent se prêtent bien au jeu « initié », en famille ou entre amis. Pour un jeu de ce niveau, les règles sont accessibles et les pictogrammes clairs, ce qui facilite grandement la prise en main, même pour les néophytes. J’apprécie particulièrement les illustrations de Vincent Dutrait qui donnent libre cours à l’imagination de chacun, et permettent d’être plus présent au thème du jeu.

Il faut reconnaître que, même si on peut trouver les couleurs criardes, le plateau et les cartes sont d’un bel effet.

 

D’un point de vue ergonomique, mon seul reproche porte sur la proximité entre les jetons Pollution et l’élément Feu, d’une part, et entre la ressource Eau et l’élément Eau, d’autre part. Cela peut porter à confusion, mais si l’on insiste bien sur ces différences en expliquant les règles, les joueurs autour de la table finissent par s’y habituer.

Les Tribus du Vent reste un jeu stratégique, tout en étant accessible. Si les différentes façons de marquer des points sont claires, la réflexion stratégique portera plutôt sur le tempo de la partie et sur les buts que vous poursuivrez en développant votre tribu. Il faudra donc prêter attention à ne pas s’éparpiller et garder à l’œil le jeu des adversaires. D’un point de vue tactique, on tirera profit de la mécanique de jeu des cartes des Tribus en étant capable de saisir les opportunités et d’adapter sa stratégie.

J’apprécie particulièrement jouer aux Tribus du Vent à partir de quatre joueurs. Comme chaque joueur a un voisin différent, cela évite qu’on ait un sentiment de répétitivité. À deux, un voisin est remplacé par la rivière de cartes – ce qui est malin. À trois, les parties sont fluides mais, lorsque les trois joueurs suivent des stratégies compatibles par leurs mains de cartes respectives, on peut avoir le sentiment que le jeu traîne en longueur et devient répétitif.

L’une des forces des Tribus du Vent réside à mes yeux dans le fait qu’on puisse le sortir aussi bien avec des néophytes (à condition de prendre le temps de bien expliquer les pictogrammes et les règles) qu’avec des joueurs initiés ou experts. Sans être extrêmement complexes, les parties comportent suffisamment de réflexion pour qu’on ne s’ennuie pas. C’est pour cela que je le sors régulièrement, et que je prends encore plaisir à y jouer de temps à autre. Enfin – et c’est important dans un contexte de hausse des prix – il faut reconnaître que le prix de ce jeu reste très raisonnable.

 

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