La couronne d’Emara, la promesse d’un roi
Royaume d’Emara.
Vous – et une palanquée d’autres Nobles triés sur le volet – avez été convoqués par le Roi Thédorius pour faire vos preuves. Si vous parvenez à satisfaire les citoyens d’Emara, à les loger et à les nourrir, vous serez peut-être le prochain à monter sur le trône.
Aidé par deux Émissaires, il vous faudra faire preuve d’ingéniosité et de rigueur pour parvenir à vos fins.
Un thème qui, comme bien souvent dans les jeux à l’allemande, semble manquer un peu d’originalité et qui risque très vite de se laisser effacer par les mécaniques. Faire ses preuves pour monter sur l’échelle sociale ou s’attirer les faveurs d’un régent, c’est un peu la marotte des jeux à univers médiévaux (Rise to Nobility, Caylus, Lancaster, Staufer dynasty, etc). D’ailleurs les illustrations – de qualité – sont de la griffe de Dennis Lohausen (Descendance, Les Tavernes de la Vallée Profonde, A Fest for Odin, Merlin, …), un « classique » de l’école allemande (il a commencé à illustrer du j2s dans les années 90), qui donne le ton : propre mais pas révolutionnaire.
Prévue pour 1 à 4 joueurs, d’une durée d’environ une heure, La Couronne d’Emara promet de combiner judicieusement placement d’ouvriers, gestion de ressources et planification. Le jeu est signé Benjamin Schwer à l’origine de plusieurs jeux enfants chez Haba tels que Les héros de Kaskaria, mais aussi de Yéti (AEG/Matagot) ou encore Hadara (bientôt sur les étales) bref, un auteur pluriel et pas franchement novice donc, mais qui s’inscrit depuis peu dans la tradition euro. Le tout est édité chez nous par Matagot, mais initialement par la maison Pegasus que l’on ne présente plus.
Un Royaume sous haute tension
Dans La Couronne d’Emara, vous disposez de 6 manches de 3 tours (donc 18 tours au total, si vous suivez) pour avancer sur les deux pistes de score : les points Citoyens et Bâtiments. Mais attention, il vous faudra progresser avec équilibre sur les deux pistes, puisque seule la plus petite des deux valeurs sera prise pour le décompte final (des citoyens non logés sont rarement ravis, et des bâtiments vides ne contribuent pas à votre popularité…). Déjà dans Tigre & Euphrate Knizia nous forçait à scorer sur la couleur où on était le plus faible, pour nous obliger à nous développer de façon homogène. Une idée qui a voyagé depuis dans des jeux comme Sapiens, Wendake ou Monsterlands.
À votre tour, vous allez poser une de vos cartes Action sur l’un des trois emplacements disponibles de votre plateau personnel, bloquant de fait son utilisation jusqu’à la fin de la manche.
L’emplacement ainsi sélectionné indique le nombre de case(s) dont il faudra déplacer l’un de vos pions Émissaires (1, 2 ou 3 cases, dans le sens horaire) tandis que la carte Action vous donne des bonus divers (ressources, action ou déplacement supplémentaires…). Il n’est donc pas possible de se déplacer deux fois du même nombre de case(s) pendant une manche ! Un facteur important à prendre en compte pour éviter de se retrouver au mieux avec un tour peu optimal, au pire avec une action totalement inutile.
Vous allez ainsi jouer une carte à tour de rôle jusqu’à ce que les trois emplacements de tous les joueurs soient complets, signifiant la fin de manche : les cartes sont défaussées et une nouvelle manche peut débuter. Si vous commencez avec un deck de 9 cartes Action, la version de base vous propose de piocher aléatoirement 3 cartes en début de chaque manche, nécessitant adaptation et optimisation au vu des cartes déjà jouées et à venir.
La version avancée quant à elle vous permet de jouer directement avec les 9 cartes et de sélectionner vous même les 3 cartes que vous souhaitez jouer durant la manche. Le hasard disparaît alors pour laisser place à un jeu purement calculatoire et stratégique.
Deux plateaux sur un plateau
Petit twist intéressant : vos pions Émissaires évoluent non pas sur un, mais sur deux plateaux indépendants, qui ne donnent pas accès aux mêmes actions.
Chacun de vos tours permet donc de déplacer l’Émissaire de votre choix sur son propre plateau circulaire. Celui du plateau Campagne permettra de collecter des ressources (bois, tissus, céréales et pierres), qui pourront être dépensées lorsque vous déplacerez le second Émissaire sur le plateau Ville, engrangeant ainsi des points Citoyens et Bâtiments.
Un mécanisme original qui nécessite une bonne dose d’anticipation et de coordination entre le déplacement des deux Emissaires pour optimiser au mieux les actions.
Pour ne pas vous perdre dans les méandres des points de règles, je vous ai présenté les axes principaux du jeu. Mais sachez que l’ensemble est plutôt riche et qu’en plus de vos déplacements, boost des cartes Action et actions des cases du plateau Ville, vous disposez de 3 « bonus » (en réalité des actions optionnelles) utilisables à chaque tour : Élever votre rang de Noblesse (pour quelques points de Citoyen), Embaucher un Artisan (pour améliorer vos récoltes) et Recruter un Conseiller (aux effets spéciaux, pouvant parfois booster les points Bâtiment et Citoyen). Des bonus dits facultatifs mais qui dans les faits permettent de diversifier votre stratégie et sont des sources non négligeables de points supplémentaires.
Une couronne peut en cacher une autre
Si la mécanique qui régit La Couronne d’Emara n’est pas novatrice, elle offre cependant au jeu une agréable profondeur stratégique. En effet, réussir non seulement à coordonner l’évolution de ses deux Émissaires sur deux plateaux différents, tout en gérant au mieux ses emplacements disponibles et les déplacements qu’ils octroient risque bien de faire chauffer la matière grise !
Nous sommes là dans un pur jeu à l’allemande, chaque coup peut (et doit !) être minutieusement planifié, avec la possibilité très agréable de s’affranchir ou non du tirage aléatoire de ses cartes Action selon le mode choisi.
De toute façon, vous pourrez user des tours de vos adversaires pour calculer au mieux votre prochain coup, puisque les interactions sont faibles et se limitent (comme souvent dans ce type de jeux) à diminuer les récompenses ou en augmenter le coût des actions pour les suivants.
Pour autant, La Couronne d’Emara n’est pas un jeu indigeste, et si l’on passe sur les illustrations et l’atmosphère globale, un peu sèches, le jeu est plutôt fluide et étonnamment rapide pour des règles de cette envergure.
D’ailleurs, s’il semble s’adresser à des joueurs chevronnés, il pourrait aussi être un bon début pour faire découvrir la gamme experts aux joueurs réguliers. Surtout que la prise en main est assez rapide et intuitive grâce à l’iconographie simple et efficace. Si les possibilités de glaner des points Citoyens et Bâtiments sont pléthoriques, on ne bascule pas pour autant dans une salade de points sans saveur, et aucune stratégie ne semble écraser les autres.
La rejouabilité semble assurée grâce aux deux plateaux quadrisécables dont les configurations changent à chaque partie (sans compter la possibilité un peu loufoque de mélanger plateaux de Ville et de Campagne !), aux cartes Événements qui ponctuent les manches et aux nombreuses cartes Conseillers.
La présence d’un mode Solo – de plus en plus commune – est à noter, même si je n’ai pas encore pu me faire mon avis dessus.
Pour résumer, La Couronne d’Emara s’inscrit dans la lignée des jeux de gestion à l’allemande, avec une thématique qui s’oublie vite, il reste cependant un peu plus accessible (et rapide) que nombreux de ses aînés, sans pour autant renoncer à son aspect stratégique et calculatoire. Si le cœur n’est pas révolutionnaire, il sait apporter ce qu’il faut de tension et de difficulté, tant pour planifier et optimiser vos actions que pour équilibrer judicieusement vos scores de Citoyen et de Bâtiments. Amateurs de triturages de neurones, prévoyez le détour !
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morlockbob 26/11/2019
un des très bons jeux de cette fin d’année
Salmanazar 26/11/2019
Mieux que Hadara ?
morlockbob 27/11/2019
Les deux n ont vraiment rien en commun. Emara c est du jeu a l allemande genre posé d ouvriers/ressources tandis que je rapprocherai plus hadara d un esprit à la ganymede avec ses collections et optimisations.
morlockbob 27/11/2019
j ai laissé deux avis pour ces deux jeux sur ce site
Salmanazar 27/11/2019
Ok, merci.
Groule 26/11/2019
Merci pour l’article ! Quelqu’un a-t-il testé le mode Solo ?
Flemeth 26/11/2019
Un jeu curieusement frais pour une mécanique très classique. J’ai adoré !