♫♫♫ Elysium, Elysium
Elysium cherche-moi des poux,
Brise-moi quelques synapses,
Et frustre moi un peu
On a treize quatorze dieux dans nos Cieux ♫♫♫
Elysium est le dernier jeu des Space Cowboys (après Splendor et Black Fleet). pour joueurs confirmés à experts pour des durées de partie de 90 min (120 min pour une première partie avec explication de règles).
Face à l'engouement général et à la notoriété des éditeurs, il est particulièrement difficile de donner un avis critique à propos de ce jeu, mais je me lance. Autant le dire tout de suite, le résultat, après une partie, a été pour moi en deça de ce que je pouvais espérer et en deça des premiers avis dithyrambiques que j'ai pu lire ici ou là. En toute objectivité, Elysium est à mon avis un jeu solide, agréable, possédant de nombreuses qualités mais pas la GROSSE PERLE et la GROSSE BOMBE ludique pour gamer de ce début d'année.
Tel un Diogène moderne, j’ai essayé d’analyser ce jeu en faisant fi de l’attente et de la notoriété des éditeurs. Détaillons un peu les différents aspects.
L'aspect éditorial : (08/10)
C'est du solide. Les Space Cowboys font bien le métier comme d'habitude, c'est bon de le rappeler, même si ici je n'ai pas été particulièrement sublimé par rapport à leurs précédents jeux ou par rapport à d'autres éditeurs.
Les + :
- La communication autour du jeu : un peu too much parfois mais il faut bien avouer que le site web consacré au jeu est super bien réalisé, la règle est très bien expliquée par Mr Croc également. C'est bien que l'objet culturel "jeu" bénéficie des mêmes atouts que d'autres objets culturels en termes de communication
- Un jeu fabriqué en EU (Allemagne) : c'est déjà ça !!!
- La qualité des cartes : ergonomiques et très maniables (car toilées)
- Les règles très bien écrites, agréables à lire avec un petit encart -'ce que vous allez oublier'- très bien pensé
- L'ergonomie des cartes (les icônes et les différents effets des cartes sont clairs)
- Un prix adapté au matériel
Les - :
- Les illustrations, le fait d'avoir choisi un illustrateur pour une famille de Dieu qui m'est apparu un peu futile. En effet, les illustrations sont réussies mais je n'ai pas été sublimé (ni ma table de jeu non plus) par celles-ci compte tenu que c'est un argument marketing des Space Cowboys. Sans doute est-ce dû au thème hélléniste du jeu, qui a explosé dans le secteur culturel moderne et qui me laisse donc de plus en plus froid !
- Les totems de couleurs, autre élément marketing, n'apportent finalement pas grand chose au game play (côté matériel j'ai préféré les jetons poker de Splendor)
L'aspect stratégique : (07/10)
Ah le premier jeu expert des Space Cowboys, on peut donc sans crainte mettre ses mains dans le cambouis de la carlingue sans avoir de reproches "oui mais c'est un jeu familial, tu comprends, il faut une mécanique pas trop exigeante". Allons-y donc gaiement :
Pour moi, un jeu comme Elysium qui a un système de cartes avec des pouvoirs (instantanés, pouvoir à activation...) m'évoque immédiatement Magic (qui a à peu près labouré tous les sillons de ce que l'on peut faire avec un pur jeu de cartes). Comme Seasons par exemple, je m'attends donc à avoir des sensations proches avec cet illustre ancêtre (mais pas identiques). La plus-value ludique provient, pour moi, des systèmes qui sont développés autour des pouvoirs de cartes pour ce genre de jeu.
Ici, il faut reconnaître plusieurs nouveautés et spécificités appréciables :
- la gestion d’achat des cartes et de prise des quêtes, emmenant pas mal d’interactions entre les joueurs, avec un système de colonne, des plus astucieux. Contrairement au classique « coût de mana », on peut incliner une colonne d’une autre couleur que celle qui est requise pour prendre une carte ou une quête
- le dilemme entre garder une carte pour bénéficier de son pouvoir ou la faire passer dans son Elysium pour marquer des points (et perdre son pouvoir)
- la gestion de l’argent, qui est l’unique moyen de faire passer des cartes de son domaine dans son Elysium
Ce que j’ai apprécié :
- La tension autour de la prise des cartes et des quêtes. Même si j’ai connu des dilemmes ludiques plus difficiles dans ma vie, le choix de la colonne à défausser est assez calculatoire et demande souvent de nombreuses prises de risques. Ce système de paiement de cartes est très intéressant. C’est THE IDEA du gameplay
- La possibilité de faire des « coups tactiques » bien sentis grâce aux pouvoirs de certaines cartes et à leurs enchaînements. Je parle bien de coups tactiques
- Une prise en main relativement facile et une fluidité réelle dès la fin de la 1ère manche, si tenté que l’on soit un peu gamer
- Une bonne rejouabilité. Les différentes familles de cartes et l’arrivée aléatoire des cartes susciteront des parties différentes et des adaptations quasi constantes
- Les différents sets de dieux de départ proposés qui a priori (je n’ai pas testé toutes les possibilités) participent à la rejouabilité et orientent les parties selon le type de sensation recherché
Ce que je n’ai pas trouvé dans ce jeu :
- Une bombe ludique en puissance : pas d’innovation majeure. Ok, le jeu tourne bien, il est plutôt plaisant, il a des bonnes idées mais je n’ai pas pris de claques par rapport à mon passif de joueurs. Je peux concevoir que ce jeu soit nécessaire et novateur pour des gamers plus occasionnels qui n’ont pas connu la fabuleuse richesse de Magic. Les pouvoirs des différentes cartes sont assez classiques.
- Une thématique forte en lien avec la mécanique du jeu : la thématique du jeu fonctionne mais est clairement plaquée à la mécanique. Payer de l’or pour écrire des légendes ???... Mhhhh… De plus, pas vraiment de saveur concernant l’écriture des légendes : ça ressemble plus à une salade de Point de Victoires à la féta qu’une véritable construction de stratégies. Au final, c’est celui qui reconstituera le plus de familles de couleurs et/ou de valeurs et plus ou moins vite que les autres qui sera l'élu des Dieux
- Des combinaisons de cartes (combos) qui feraient pâlir Richard Garfield lui-même. Plus que des combos, j’ai pu asséner des petits coups, assez plaisants mais assez peu spectaculaires
- Une lisibilité stratégique claire : à part prendre au nez et à la barbe quelques cartes à ces adversaires, les faire râler avec des cartes agressives, il est assez difficile de lire le jeu adverse et de semer des embûches au bon endroit et au bon moment. De plus, le jeu est vraiment trop équilibré, encore une fois, les joueurs se tiennent en très peu de points... et il est bien difficile d’expliquer sa victoire et/ou sa défaite en fin de partie
- le supplément d’âme qui en ferait pour moi un hit qui se détache de la masse des jeux astucieux et solides que l’on voit régulièrement dans nos étagères. Le timing de la partie m’a particulièrement déçu (tout ça pour ça !!)
Conclusion :
Elysium est un bon jeu mêlant opportunisme et gestion de cartes, qui ne fera sans doute pas l’unanimité dans la communauté des joueurs.
Il contient de très bonnes idées et des qualités indéniables, qui suffiront à ravir les néophytes (et c’est un point fort, ce n’est pas une insulte) mais qui laisseront les gamer, aux bagages ludiques un peu plus conséquent, un peu moins enthousiaste et élogieux.
Il se peut que mon avis varie légèrement avec le temps et après l’accumulation de parties avec des configurations différentes mais je peux d’ores et déjà dire (j’ai consulté mes augures ludiques) qu’il ne sera pas à l’instar de 7 Wonders ou de Dominion une révolution ludique.
J’y retournerais volontiers mais l’envie de multiplier les parties n’est pas présente. Une assez grande déception par rapport à l’attente et aux promesses.
Mention bien (15/20), sans plus.