Game Market d’Osaka, show some love for Christ’s sake!
Avec ce titre on ne peut plus explicite, laissez-moi reprendre mon souffle avant de me lancer dans le récit de mes aventures au Game Market d’Osaka. Cet événement, qui a lieu une fois par an, s’est déroulé le premier mars dernier. Jusqu’à l’année dernière, il était organisé près du centre-ville, dans un lieu chauffé, agréable et pratique d’accès. Cette année, personne ne sait vraiment pour quelle raison, le Game Market s’est retrouvé enfermé dans un aquarium de béton froid et gris, à des années-lumière de la gare la plus proche et des commerces, très pratique pour faire une pause café ou pour respirer un air un peu plus frais que celui, vicié, des salons de jeux de société.
J’ai toujours aimé le Game Market d’Osaka, et ce pour plusieurs raisons. J’aime la proximité plus marquée avec les auteurs de jeux, le fait que les visiteurs ont plus d’occasions de jouer avant d’acheter, et le caractère intime et décomplexé de l’événement d’une manière générale. Il faut dire que la présence des éditeurs étrangers brille d’un éclat absent. Ni AEG, ni TMG, ni personne d’autre que des amateurs de jeux de société. Malheureusement ce calme éditorial implique l’absence de la plupart des auteurs japonais bankables. Les joueurs de province se sont sentis d’ailleurs comme des laissés pour compte, leur passion abandonnée par ceux qui ont donné leurs lettres de noblesse au jeu de société japonais.
Heureusement que certains auteurs de plus en plus intéressants étaient présents. Je pense notamment à BakaFire, dont les récentes sorties chez ZMan me laissent penser qu’on est face ici à l’un des auteurs les plus passionnants et créatifs de ces deux dernières années. Jetez donc un œil à ce palmarès : Tragedy Looper, OWACON, Aristo-Maze et Ruinous ! Sans compter son dernier né : Reidemeister (le Maître des fils, en français). Je tiens aussi à signaler, mais ceci est une remarque hautement personnelle, que BakaFire est le premier auteur à me demander de traduire officiellement les règles d’un jeu japonais. J’ai traduit quelques règles pour Japon Brand en préparation du salon d’Essen 2014, mais c’est la toute première (toute toute première fois) qu’un auteur me contacte directement et me propose de réaliser la traduction ! Woot woot! Mais revenons-en à nos moutons pris au piège d’un délire temporel…
La présence étrangère était, je l’ai déjà dit, assez retenue mais j’étais heureux de faire la rencontre de Gary Kim et du collectif d’auteurs/éditeurs coréens qui a fait le déplacement jusqu’au Japon. Je vous montrerais bien ma boîte dédicacée de Koryo, mais je n’ai pas envie de faire des jaloux. L’illustration inédite de Noboru Sugiura réalisée pour ma fille en a fait suffisamment pour ne pas en rajouter. Les Taïwanais étaient là aussi, bien sûr, grands fidèles des rendez-vous ludiques japonais. Comme d’habitude, il y avait beaucoup de jeux de chats. Oui, des chats en carton plat, des chats en cartons pliés grands, ou moyens, voire petits, des chats sous forme de cartes colorées, de cartes rondes, ou carrées… Bref, le filon du jeu de chat semble marcher plus que jamais.
Allez, pour vous montrer que j’aime le Game Market d’Osaka, contrairement à ce que mon style un peu rêche de ses derniers mois laisse à penser, je vous invite à faire le tour des nouveautés et jeux intéressants remarqués pendant le salon. Je reviendrai de façon plus construite et complète sur certains d’entre eux, comme je l’ai partiellement fait pour le salon de Tokyo de novembre.
Parlons d’abord de l’un des jeux du couple Yoshioka. Ils sont tous les deux très sympathiques et je les remercie d’avoir d’ailleurs pensé à moi pour figurer dans leur livre « Board Game Shelf« , un projet dont je vous reparlerai sans doute très bientôt !
Kinoko Hunters
Kinoko Hunters est un jeu pour enfants. Vous incarnez des chasseurs de champignons ! Je suis persuadé que le mot chasseur mériterait d’être remplacé par cueilleur mais j’aime imaginer que nos aventuriers en plastique partent au péril de leur vie à la rencontre de champignons féroces et carnivores. Mais non, en fait, c’est un jeu tout mignon imaginé autour d’une mécanique d’équilibre, comme sait si bien les faire Haba (Tier auf Tier ou Super Rhino pour n’en citer que deux).
Le matériel en carton très épais est étonnant. Le seul reproche que je pourrais éventuellement faire au sujet du jeu tient à la difficulté de réaliser une colline bien fichue avant que le jeu ne commence. C’est en effet assez difficile dans la mesure où les tuiles arrondies ont une forte tendance à rester coller les unes aux autres. Les règles sont très simples, à votre tour, vous avez deux choix : poser un de vos cueilleurs sur une tuile champignon ou les retirer. Si vous les faites tomber, vous devrez vous acquitter d’une amende en champignons. C’est une explication très très succincte du jeu aujourd’hui mais je pense que je reviendrai dessus dans un article plus complet.
Baka is on Fire
Parlons ensuite de Reidemeister, de BakaFire. Il s’agit principalement d’un party game. Par contre, il ne faut pas vous attendre à vous éclater la panse de rire en y jouant. Vos méninges vont sacrément travailler. Les Maîtres des Fils que vous incarnez pendant la partie ont pour mission de réarranger les fils qu’ils ont à leur disposition en respectant l’illustration proposée par la carte devant eux. Il faut aller vite sans faire d’erreur et, croyez-moi, c’est beaucoup moins facile qu’il n’y paraît.
Heureusement, BakaFire a pensé à tout et propose 4 niveaux de difficulté différents, permettant à des novices de se joindre à la compétition lorsqu’ils jouent avec des habitués du jeu. C’est joliment réalisé, comme toujours chez cet auteur, les règles sont traduites en 3 langues (français, avec des coquilles dues à l’incompréhension de la langue cible par le copieur/colleur, groumph!, allemand et anglais) et on s’amuse rien qu’à balayer du regard l’originalité de la mécanique.
Voilà ce que cela donne quand vous êtes en pleine partie !
Goritia en solo
Parmi les jeux notables, il y avait aussi Goritia, de l’auteur de Shephy, disponible lors du dernier salon d’Essen. La particularité de cet auteur, c’est qu’il réalise des jeux qui se jouent uniquement en solitaire. A noter que pour son deuxième jeu, il a eu l’excellente idée de travailler avec deux auteurs désormais publiés à l’étranger : BakaFire et IWasGame (Welcome to the Dungeon, Vorpals). Dans Goritia, mot-valise composé de Gorilla et de Solitaire, vous jouez avec deux types de carte : des gorilles et des bananes. Le joueur devra essayer de constituer une pyramide où les gorilles seront toujours associés à suffisamment de bananes pour être bien nourris.
A surveiller
Parmi les autres découvertes intéressantes, plusieurs jeux attendus ! D’abord, le nouveau jeu de Cocolo Games, dont l’auteur/éditeur Sakaue aurait pu consacrer un peu plus de temps à améliorer la qualité de la traduction anglaise. Ce jeu a pour particularité de proposer une expérience vraiment riche, approfondie selon le nombre de boîtes que vous avez sous la main ! J’en parlerai plus tard dans un article sur les jeux à mettre en lumière. Il y avait aussi le groupe de créateurs Chaga Chaga Games, habitués au succès à chacune de leur apparition. Récemment, Downgo Dungeon a eu droit à une traduction coréenne ! Reste à voir si le jeu traversera d’autres frontières. Je n’en doute pas à vrai dire.
Fruit Picking avait droit à une seconde édition, et Catalo~gue à une troisième ! Deux jeux uniques qui ne trouvent semble-t-il pas preneur hors du Japon, et c’est bien dommage. De même pour Stamp Graffiti, party game malin et très amusant où ne pas savoir dessiner ne pose de problème qu’aux rares esthètes assis autour de la table. Maintenant, attachez votre ceinture en bambou, je vous emmène faire le tour des tables ! Je vous préviens de suite, je n’ai pas annoté chacune des photos que je vous propose. D’une, parce que je suis une feignasse innommable, et de deux, parce que !
fouilloux 16/03/2015
Effectivement le salon fait austère. Tu as pu voir quelques jeux What the fuck?
Izobretenik 17/03/2015
Il y en avait moins cette fois-ci. Je suis sûr que le prochain, à Tokyo, me réservera de belles surprises en la matière ! 😉
Shanouillette 16/03/2015
comment tu as l’air de retenir ta respi sur la photo avec Gary Kim ! mdr
Izobretenik 17/03/2015
🙂 J’étais nerveux ! Et puis, je venais d’arriver dans le salon, encore frigorifié et trempé.
madtranslator 16/03/2015
Merci pour ce bel article sur l’OGM. Je suis content que Bakafire t’ait demandé de traduire ces jeux ! Bravo ! Il a dû apprécier ton travail sur Aristo-Maze à sa juste valeur, et en plus du pourra traduire directement à partir du japonais, ce qui fera gagner du temps ! 😉
Izobretenik 17/03/2015
C’est une discussion que l’on a eue souvent, et tu connais mon point de vue, je considère qu’un travail de traduction, comme tout travail, passionné ou non, mérite salaire. Je sais de source sûre que désormais Japon Brand devra aussi se soumettre à cette logique, compte-tenu de l’argent que JB génère. La preuve, BakaFire est un des poulains de JB. C’est une bonne nouvelle et cela favorisera sans doute un investissement plus important des auteurs quant à la localisation de leurs jeux.
bgarz 17/03/2015
Merci pour ce reportage !
j’ai même entrevu l’extension de Cat Hidding 😉