Connaissez-vous les Leprechauns ? – Zoom sur Korrigans –
Connaissez-vous les Leprechauns ?
Ces lutins du folklore irlandais sont la plupart du temps vêtus de vert et portent des culottes courtes et ce drôle de chapeau plat ceint d’un ruban à boucle carrée si populaire le jour de la Saint-Patrick. Ils sont notamment célèbres pour conserver leurs pièces d’or dans des chaudrons cachés au pied des arcs-en-ciel.
C’est dans l’univers de ce petit peuple que nous entraîne ce jeu plein de charme à la thématique originale. Tout y est : les petits lutins vêtus comme décrit plus haut, le chaudron plein de pièces d’or qui apparaît au pied de l’arc-en-ciel, des trèfles à quatre feuilles et des menhirs à tire-larigot…
Que l’éditeur ait baptisé le jeu « Korrigans » a dès lors un petit goût de loupé. L’auteur explique ce choix : tous les jeux Ilopeli « doivent » comporter la lettre « K », quitte à s’éloigner du sujet. Si on extrapole un peu, à ce compte-là on verrait bien un jeu sur le thème des baleines à bosse qui s’intitulerait « Koalas » ! Bref c’est un peu ballot cette politique de titre, d’autant que des jeux sur les korrigans il en existe déjà, il y avait une vraie originalité à mettre en avant. Dommage !
Heureusement, pour le reste Korrigans est un très bon jeu familial qui peut facilement entrer dans la catégorie « coup de cœur ». Alors ouvrons le carton et voyons ça d’un peu plus près…
Du beau matos !
Première constatation : la boîte est bien remplie et le matériel est magnifique. La qualité des illustrations et des pions est une excellente surprise et nous plonge à 100% dans l’ambiance, ce qui est essentiel pour un jeu aussi fortement imprégné de sa thématique.
Un joli plateau dont le découpage nous change agréablement des hexagones et nous plonge dans une ambiance de landes et de bocages.
Au milieu de menhirs tellement jolis qu’on a immédiatement envie de partir en vacances en Bretagne, des figurines trop mimis et toutes différentes (extension non officielle du jeu : amuse-toi à donner un prénom à chacune). Elles entourent le chaudron rempli d’or le plus sexy jamais vu (il me FAUT ce chaudron !!!).
Des paravents même pas prévus au départ par les auteurs et pas indispensables… mais qui leur ont tellement plu qu’ils ont inventé exprès une règle originale et sympa à leur sujet !
Un jeu pour toute la famille
Comme on le voit, Korrigans est résolument orienté famille : tout y est gentil, coloré et sympathique, bourré de lutins, de trésors cachés et de petits animaux tout mignons. Tout ce qu’il faut pour que les enfants accrochent et plongent à fond dans la thématique.
Le jeu cible un public à partir de 8 ans, ce qui semble correct car les règles sont assez simples, sans toutefois être simplistes.
Les plus grands peuvent donc également y trouver du plaisir en jouant sur les aspects « anticipation » et « tactique » (bien sûr cela n’empêche pas de garder son âme d’enfant et de kiffer aussi les petits bonshommes et les menhirs !).
Le principe
Les Leprechauns se trouvent dans des champs remplis de jetons « trèfle à quatre feuilles ». Chaque joueur hérite de deux lutins, et à son tour de jeu il doit en déplacer un vers un autre champ, soulever discrètement les jetons qui s’y trouvent pour regarder quels trésors ils dissimulent sous leur face cachée, en choisir un et le garder pour soi, puis remettre les autres en place face cachée pour les prochains joueurs. Sous le jeton, un bonus en pièces d’or ou un petit animal sympathique (roitelet, souris, taupe, grenouille, lièvre ou écureuil).
Il est important de se constituer un bon pactole en pièces d’or au fil de la partie car le vainqueur sera le joueur le plus riche. Mais il est aussi important d’avoir des gentils petits compagnons animaux car les courtes guibolles des Leprechauns ne leur permettent pas de se déplacer d’un champ à l’autre par leurs propres moyens. Ainsi, si deux champs sont séparés par une barrière, il faudra avoir l’aide de l’écureuil pour gravir celle-ci. S’ils sont de part et d’autre de la rivière, seule la grenouille pourra vous emmener d’un ponton à l’autre, etc. Les compagnons détenus par chaque joueur conditionnent donc les déplacements qui lui sont possibles.
Au fil des tours, des jetons de couleur sont piochés pour révéler graduellement l’arc-en-ciel et restreindre progressivement les zones du plateau où le chaudron d’or est susceptible d’apparaître. Quand toutes les couleurs ont été piochées, l’arc-en-ciel est complet et le chaudron est mis en place pour le rush final. Chaque joueur dispose alors d’un ultime tour de jeu pour envoyer ses Leprechauns sur place et bénéficier d’un gros bonus de fin de partie s’il y arrive. Mais attention ! La règle liée aux compagnons animaux change pour le rush final, et cette fois chaque compagnon est défaussé quand il est utilisé pour un déplacement. Si deux franchissements de barrières séparent votre Leprechaun du chaudron, il faudra avoir prévu deux écureuils. D’où l’importance d’avoir anticipé le rush, ce qui rajoute indéniablement un intérêt stratégique au jeu.
Les menhirs enrichissent ces règles de base en proposant des petits bonus. S’il ne reste plus qu’un seul trèfle dans un champ après le passage des autres joueurs (donc à priori le trèfle le moins intéressant dont personne ne voulait), le joueur qui en héritera aura aussi droit à un lot de consolation : le bonus caché sous le menhir (il y a un menhir dans chaque champ). Par exemple le troll assoupi qu’on peut placer entre deux champs pour bloquer le passage, ou le farfadet qui souffle sur le paravent d’un autre joueur pour forcer celui-ci à jouer à découvert pour tout le reste de la partie.
Un petit air de déjà-vu
Les vieux croûtons ludologues les plus érudits ne manqueront pas de relever des similitudes avec Sagaland, une création allemande qui avait reçu le Spiel des Jahres en 1982. Là où Korrigans nous entraîne dans l’univers de lutins celtiques, Sagaland nous immergeait à l’époque dans celui des contes de fées germaniques. Il fallait y découvrir des trésors dissimulés sous des sapins coniques auxquels ressemblent beaucoup les menhirs plutôt coniques sous lesquels sont cachés les bonus de Korrigans. Néanmoins il s’agit davantage de réminiscences (agréables du reste) que de réelles ressemblances, les mécaniques de jeu de Sagaland étant très différentes.
Un jeu pour familles (pas du tout ?) nombreuses
En théorie Korrigans se joue de 2 à 5 joueurs mais selon toute vraisemblance plus on est de fous et meilleure est l’expérience de jeu. En effet, l’un des ressorts importants du gameplay est d’être le premier à piquer les bons bonus et de laisser les nanars aux autres. Tout le monde appliquant évidemment la même tactique, il faut optimiser ses déplacements et foncer sur les champs pleins de bonus et éviter les secteurs déjà pillés par les adversaires. Avec quatre adversaires dans la nature, le jeu ne peut clairement pas fonctionner autrement.
Par contre avec un seul adversaire on peut supposer qu’il n’y a pas une pression de folie et qu’on peut relativement faire son petit bonhomme de chemin chacun de son côté sans trop se gêner. En outre, les chances sont plus faibles d’épuiser tous les bonus d’un champ, déclenchant ainsi la révélation du bonus caché sous le menhir. Dans ce cas les menhirs font toujours joli sur le plateau de jeu mais concrètement ils n’ont plus d’utilité dans la partie.
Certes, on peut toujours arguer que jouer à deux accentue le côté « familial » puisqu’il n’y a plus de « coups de p***te » et que tout le monde garde sa chance. En somme, Korrigans est un jeu pour familles soit nombreuses soit monoparentales !
Attention néanmoins : ces déductions sont faites par extrapolation de la règle à cinq joueurs, la règle officielle n’étant pas encore publiée à l’heure où cette chronique est rédigée. Il est très possible que les auteurs aient prévu un rééquilibrage efficace dans une variante pour deux joueurs.
Conclusion ?
Au final Korrigans cumule beaucoup d’atouts :
- Les illustrations et la remarquable qualité du matériel favorisent l’immersion dans une thématique attrayante et originale.
- Les règles sont accessibles à tous mais laissent aux plus grands la possibilité d’arbitrer des options stratégiques.
- L’harmonie familiale ne risque pas d’être brisée car les joueurs les plus jeunes ou les moins aguerris éviteront le phénomène très frustrant de blocage au cours de la partie grâce aux nombreux choix possibles : choix du Leprechaun à activer parmi deux possibles, du champ où aller, du trèfle à garder…
- Les parties sont fluides et rapides, et le gameplay met en avant deux « niveaux de lecture » en fonction de la maturité des joueurs : une chasse au trésor ludique pour les enfants, et pour les adultes une petite tension sous-jacente pas désagréable due au sentiment permanent de « compte à rebours avant le rush final ».
Principaux défauts :
- Un titre assez mal choisi
- Un gameplay optimal pour un maximum de joueurs mais qui risque de perdre sensiblement en efficacité à deux joueurs (à confirmer avec la release officielle du jeu quand elle sortira)
- Après les gamins vont vous tanner pour partir en vacances en Irlande (dans ce cas essayez au moins de viser la Saint-Patrick ! J)
Bon jeu !
[NDLR : le jeu est désormais disponible pour une trentaine d’euros].Un jeu de Arnaud Urbon & Ludovic Vialla
Illustré par Olivier Fagnère
Edité par Ilopeli & Matagot
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Grovast 20/11/2014
Tiens, j’avais jamais percuté pour le K ! Avec ce genre de lettre, ça va être de plus en plus dur à respecter 😉 D’autres ont essayé et Ystari a fini par craquer.
Merci pour l’article en tous cas, ça donne envie d’au moins s’y intéresser, ça peut faire une idée de cadeau en cette période propice.
Shanouillette 21/11/2014
Oui un bon timing pour ce jeu familial avec les fêtes qui approchent…
Merci à Inky pour cette première contribution !!