Trudvang Legends par CMON : plus dure sera la chute…

 
trudvang-legends-boiteBien que son aura ait singulièrement faibli ces derniers temps, CMON n’entend cependant pas s’en laisser compter ni se laisser intimider par les jeunes loups aux dents rayant le parquet d’Awaken Realms (Ndlr : This War of Mine, Nemesis, Lords of Hellas…).
C’est donc sans frémir d’un poil qu’a été lancée la campagne de Trudvang Legends (Fel Barros, Guilherme Goulart, Eric M. Lang) face à un Etherfields (Michał Oracz) arborant crânement 25 000 contributeurs et 2 300 000 Livres Sterling. Même pas peur. 
 
Mais de quoi parle-t-on au juste ? Basé sur le jeu de rôle suédois « Trudvang Chronicles », Trudvang Legends en reprend l’univers, à savoir celui des mythes et légendes nordiques et celtiques, dans un jeu coopératif et narratif jouable uniquement en campagne.
Les joueurs vont vivre des aventures guidées par le Livre des Sagas et chacune de leurs actions aura un effet sur la suite des évènements. Les règles elles-mêmes qui régissent le monde dans lequel ils vont évoluer peuvent en être affectées, ainsi que le monde physique.
 
Concrètement, des portions du plateau de jeu pourront se retrouver bloquées ou, à l’inverse, accessibles alors qu’elles ne l’étaient pas en début de partie. Cette possibilité se matérialise par des sleeves collés à certains endroits du plateau de jeu et dans lesquels on glisse des cartes en fonction du déroulement de l’aventure. Une sorte de « legacy light » non destructif en quelque sorte. Ce système permet de ranger le plateau de jeu à un instant « T » de l’aventure en y laissant les modifications effectuées et permettant ainsi de reprendre le jeu avec un minimum de manipulations.
 
trudvang-legends-plateauL’élément qui fera la qualité du jeu est bien évidemment ce fameux Livre des Quêtes. Certains s’inquiètent du fait qu’il ne fasse qu’une centaine de pages et craignent un manque de variété et donc de rejouabilité.
CMON balaie tout cela d’un revers de main et n’hésite pas au contraire à parler de « rejouabilité infinie » (« endlessly replayable » en VO). Comme d’habitude, la vérité se situe certainement entre ces deux visions.
 
Un élément de gameplay qui pose question est le système de résolution des combats, à base de runes, piochées à l’aveugle dans un sac, qui vont être allouées à des emplacements du plateau de joueurs. D’aucuns s’inquiètent, à juste titre à mon sens, d’avoir là quelque chose qui risque fort de ralentir, voire de casser, la dynamique de la partie, chaque combat risquant de s’éterniser à cause de la réflexion induite, sans même parler d’analysis paralysis.
 
trudvang-legends-figurineSur le chapitre de la direction artistique, on est sur du CMON, c’est clair. Mon opinion là dessus peut être résumé en une interjection, aussi courte que chargée de sens : bof ! Voilà, c’est bien mais sans plus. Ça fait le boulot, mais sans me faire rêver. Et la confrontation visuelle avec Etherfields est à cet égard des plus violentes. CMON ne se renouvelle pas, et face à ces nouveaux éditeurs ambitieux qui ont tout compris à Kickstarter, ça fait mal. Même les figurines, pourtant autrefois véritable fer de lance des campagnes CMON, n’excitent plus grand monde.
 
Alors attention, cela n’enlève rien aux qualités intrinsèques du jeu, mais voilà, quand il s’agit de lâcher 200 € (parce que bon, hein, on sait tous que peu de gens se contentent du pledge de base), on a tendance à comparer. Et là, la comparaison est peu flatteuse. Pas du tout en fait. Surtout que CMON ne change pas d’un iota sa façon de faire avec les stretch goals. Des héros en plus, plein. Quelques monstres par ci par là. Et ça, les joueurs n’en veulent plus. Ils veulent, et encore plus dans un jeu à tendance narrative comme celui-ci, des scénarios supplémentaires, de l’ajout de gameplay, des extensions gratos, de l’amélioration de matériel qui claque, enfin des trucs comme font, je sais pas moi… au hasard… Awaken Realms par exemple :mrgreen: !
 
trudvang-legends-plateau-2Et la lassitude envers CMON, latente sur les dernières campagnes, est ce coup-ci flagrante. De façon assez violente même, aurais-je tendance à dire. Pour résumer mon sentiment, je pense qu’on assiste en ce moment au premier gros plantage de CMON. Qui aurait parié qu’une campagne de CMON arriverait, sur une semaine, à aligner 5 jours en négatifs et un en positif de justesse ? Pas moi.
 
Cette situation déplorable est à mettre au crédit d’un ensemble de choses. Ce dont j’ai parlé au-dessus, bien évidemment, ce à quoi vous pouvez ajouter des gaps entre les stretch goals trop élevés ainsi que des frais de port assez flous (ce, juste après le scandale de ceux de Bloodborne lesquels, rappelons-le, ont subi une augmentation lors du pledge manager de 2 à 5 fois ce qui avait été annoncé au cours de la campagne). Le manque de présence dans les commentaires de la campagne n’a pas aidé non plus.
 
Mais ce qui a fait mal à cette campagne, très très mal, ce sont ces deux lettres qui devraient désormais être écrites systématiquement en rouge sang tant elles en ont fait couler (virtuellement, je vous rassure) : EB. Oui, ces fameux early birds temporels dont je ne cesse de dénoncer les méfaits mais que nombre de porteurs, et même des très expérimentés visiblement, veulent à tout prix expérimenter, aveuglés qu’ils sont par les résultats des très rares campagnes à avoir su (pu ?) en profiter. CMON les avait abandonné mais les résultats de ses dernières campagnes, certainement pas à la hauteur des attentes, les ont malheureusement incités à y revenir.
 
 
backers per day
 
 
Et tout CMON qu’il soit, l’éditeur n’a surement pas vu arriver le retour de manivelle et se l’est visiblement pris en pleine poire. Les chiffres causent d’eux-mêmes : jour 1, plus de 8 000 contributeurs ; jour 2, encore près de 3 700 supplémentaires (là au QG de CMON, on se dit c’est gagné) ; jour 3, 108 soutiens. Paf ! Ça piquouille, surtout quand on est pas habitués. Réaction classique, proche du réflexe pavlovien : déstockage d’add-on, histoire de maintenir le niveau en dollars. Mais rien n’y fit, et le montant chuta.
 
Mais que vois-je arriver au loin, brandissant fourches et torches ? Qu’entends-je ? Qu’acoustiquai-je ? Mais bien sûr, ce sont les hordes des défenseurs de la cause CMONienne. Alors, on se calme : oui, je sais, malgré toutes ces avanies, cette campagne ferait rêver la grande majorité des éditeurs présents ou espérant venir sur Kickstarter. C’est clair, 1 150 000 $ et 11 500 soutiens, c’est pas de la roupie de sansonnet. Vu de loin. Mais à l’échelle de CMON, c’est pas jojo. Ça l’est d’autant moins que, pour la première fois, l’éditeur semble totalement dans l’incapacité d’enrayer la descente aux enfers. Pas au point de tomber sous le seuil de financement, faut pas exagérer non plus. Mais les deux semaines qui restent risques d’être looonnngues ! (actuellement 1 151 600/20 000 $ et 11 455 soutiens. Fin le 15 août).
 
Pub-Tipeee-grand-format-copie
 
LUDOVOX est un site indépendant !

Vous pouvez nous soutenir en faisant un don sur :

Et également en cliquant sur le lien de nos partenaires pour faire vos achats :

acheter etherfields sur espritjeu

11 Commentaires

  1. barisele 01/08/2019
    Répondre

    Perso quand je vois ce débordement de matériel  d’ etherfields, ça me fait fait l’effet d’un monstre injouable. Galère à sortir, à jouer, à ranger. Et puis ce mythe du jeu qui se renouvelle sans cesse grâce à son matériel pléthorique est une chimère je trouve. Peu de personnes ne se lassent pas d’avoir fait 20 parties du même jeu. Ce n’est que mon avis bien sûr. Tant mieux pour ceux que ça fait vibrer.

    • Gougou69 03/08/2019
      Répondre

      Très sincèrement, je te rejoins complètement. Cette débauche de matériel est un repoussoir pour moi, mais je comprends parfaitement que ce soit au contraire attirant pour d’autres.

  2. Escrivio 02/08/2019
    Répondre

    Je pense également que le fait que Simone ne propose toujours pas le fruit de leurs campagnes dans plusieurs langues (dont celle de Molière) cause également beaucoup de tort, là où la concurrence adresse cet aspect de plus en plus – soit en finançant ces aspects par le collectif de backers (les productions Awaken Realms), soit en proposant la traduction en add-on pour une somme adaptée (Dimension Games) que les backers sont prêts à payer.

    • Gougou69 03/08/2019
      Répondre

      Perso, je ne suis pas sûr que ça leur cause tant de tort que ça, si l’on considère une localisation sur un rapport coût (élevé à coup sûr) / gain potentiel. Reste la solution dont tu parles de faire payer un pack de localisation, mais là encore les backers non anglophones sont-ils prêts à payer un supplément qui peut être non négligeable si l’éditeur ne prend pas un bout du coût à sa charge ? C’est l’éternel dilemme, que beaucoup d’éditeurs ont résolu en se concentrant sur l’anglais. Et même pour Trudvang, le résultat de la campagne ne va pas leur faire changer d’avis de si tôt je suis sûr.

      • Umberling 06/08/2019
        Répondre

        On note aussi des cessions de droits pour localisation (on a bien eu Blood Rage en VF). Par contre, pour le temps que ça prend, ça dissuade un peu d’attendre (parce qu’on n’a aucune garantie que ça paraisse, en sus).

  3. Thalum 03/08/2019
    Répondre

    D’accord sur pas mal de points, cette campagne est très mal menée.

    Niveau gameplay une vraie vidéo, simplement filmer des gens en train de jouer comme pour BR ou RS, aurait sans doute pu adresser les interrogations sur la lourdeur du jeu et notamment la résolution des combats. Et faut pas venir parler de spoil pour un jeu qui n’arrivera pas avant 1,5 an.

    Par contre niveau DA je ne suis pas d’accord, elle reprend bien l’ambiance de l’univers de Trudvang et je préfère de loin celle-ci à Etherfield que je trouve surchargé. Le goûts et les couleurs …

  4. Marco 03/08/2019
    Répondre

    Je ne suis pas fan de com, j’ai quelques jeux achetés en commerce

    mais un article qui se réjouit d’un plantage ne m’intéresse pas

    cet éditeur a apporté beaucoup aux jeux, je ne comprends pas cette haine

     

    • Gougou69 03/08/2019
      Répondre

      Ah là là, ces biais cognitifs qui font qu’on voit dans un texte ce qu’on veux absolument y trouver ! Parce-que j’ai beau me relire, je ne vois absolument pas ce qui te permet de dire que je me réjouis d’un plantage, que je reconnais de plus être très relatif. Je mets le doigt sur les points négatifs de cette campagne, qui est à ce jour la pire menée par CMON, point barre. C’est factuel, c’est chiffré : nous en sommes au sixième jour de perte de backers d’affilée.

      Et je ne saurais trop te conseiller de revoir les notions concernant les sentiments et notamment celui de la haine. Car si tu vois de la haine dans mon article, j’ose à peine imaginer tes réactions à la moindre agression verbale dans la vraie vie. Si tu veux bien te donner la peine de relire (ou de lire ?) les chroniques dans lesquelles je cause d’un jeu CMON (et ça commence à en faire quelques-unes), tu verras que c’est un éditeur que j’ai même globalement plutôt tendance à apprécier.

  5. Thalum 03/08/2019
    Répondre

    Cette campagne a été vraiment mal menée.

    Les intégrations sur la lourdeur du gampeplay auraient mérité une vrai vidéo de gens qui JOUENT au jeu comme ils l’avaient fait pour BR et RS. Quand à l’excuse du spoil car jeu narratif, il va se passer quand même un an et demi avant la réception…

    Par contre pour la DA je ne suis pas du tout d’accord. Elle respecte bien l’ambiance de l’univers d’origine, elle est simple et épurée pour mieux distinguer les éléments de jeu. Je préfère de loin celle-ci à Etherfield qui me parait beaucoup trop surchargée. Les goûts et les couleurs…

    • Gougou69 03/08/2019
      Répondre

      Clairement, la direction artistique d’un jeu est l’élément le plus soumis à la subjectivité. Les goûts et les couleurs, comme tu dis. Moi je trouve ça un peu trop « sobre », mais comme je l’ai écrit, c’est mon opinion. Qui ne vaut que ce qu’elle vaut, c’est à dire sur ce genre de sujet pas grand-chose.

      Pour le reste, je suis bien évidemment parfaitement d’accord avec toi.

  6. Kyojin 10/08/2019
    Répondre

    encore un coop …

Laisser un commentaire