Rebirth : renaissance du Dr Knizia ?

Reiner Knizia est un auteur très prolifique, 813 jeux selon BGG. Il a à son actif des jeux aux qualités ludiques inégalées, des Ra, des Modern Art, Samurai, My City, Tigre et Euphrate et j’en passe. Un auteur très écolo puisqu’il recycle ses jeux et ses mécaniques. Disons plutôt qu’il les remet au goût du jour (des réitérations). 

On ne va pas le cacher, un nouveau Knizia c’est toujours intéressant, mais parfois les rééditions comptent sur son nom et les jeux ne valent pas tripette. Rebirth c’est un peu sa renaissance : de la pose de tuiles, de la majorité, du contrôle de zone, des objectifs, mais avec une mécanique ultra épurée qui nous a tous séduits à Ludovox (il était dans notre vidéo Top du mois de novembre).

 

 

 

Un monde en décrépitude renaît de ses cendres

Le monde a subi des catastrophes, notre civilisation se reconstruit en harmonie avec la nature. En réalité le thème n’est qu’un habillage pour un jeu abstrait (même s’il y a du hasard), mais tout fait sens, c’est l’essentiel. Le but est de marquer le plus de points de victoire, avec de la connexion, de la majorité, des objectifs.

 

 

Un jeton, une action, plein de possibilités.

Avec Rebirth on assiste à la renaissance de Knizia, un jeu d’une simplicité mécanique, un simple jeton que l’on pioche dans notre réserve et que l’on place sur le plateau. Sur cette base hasardeuse, on va devoir faire les meilleurs choix.

Les jetons sont de trois types, les fermes agricoles, les fermes énergétiques, et les cités. Un jeton Ferme placé marque un point, plus s’il est adjacent à d’autres fermes de notre couleur (et du même type). Les jetons cités, nous donneront des points une fois la cité complétée et selon un principe de majorité. La contrainte est limitée, on ne peut placer les fermes que sur leurs icônes ou des icônes vides, quant aux cités, ils vont uniquement sur les emplacements de cités. 

Mais ce n’est pas tout, on gagne le contrôle d’un château si l’on se positionne à côté et on dépose sa tour pour le signaler. Si l’on est majoritaire et qu’un autre joueur s’y trouve, on rend la tour en question au joueur pour y placer la sienne. C’est chez moi désormais. Bien entendu il pourra revenir reprendre le contrôle. Chaque château rapporte 5 points de victoire. Autant dire que l’on va se battre pour chacun d’eux. Un château étant entouré au maximum de 6 hexagones, il peut être sécurisé.

 

Ce château appartient à Orange, il a la majorité et ne pourra plus être repris.

 

À côté d’une cathédrale, vous piochez une carte mission privée. Celle-ci vous donnera 5 points en fin de partie si vous l’avez accomplie. Plus vous prenez des missions tard et plus elles vont être compliquées, voire impossibles à réaliser. 

 

 

Les cités (avec les jetons du même nom) rapportent des points selon la taille de la cité, mais si un joueur la contrôle totalement, il gagne les points du premier et du deuxième. De quoi là aussi placer son jeton malgré tout, pour grappiller quelques points et ne pas laisser un joueur faire le stock de points faciles. 

Après une intense réflexion (mais courte), je pose ma tuile en fonction des différents paramètres, qu’ils soient communs ou privés avec les cartes missions. je reprends une tuile, mes adversaires jouent, oh c’est déjà à moi. L’air de rien, avec un simple jeton, le docteur crée des dilemmes très forts. Je me place là pour renforcer ma majorité. Ah ! mais ici, ça serait quand même bien d’en chercher une nouvelle. En plus, ça correspond à ma mission. Knizia est un auteur de génie, il sait nous détourner de nos objectifs personnels.

 

 

à deux joueurs.

Je pose ce jeton ferme agricole, j’en ai 4 reliés, ça fait 4 points, en plus ça me permet d’assurer ma main mise sur ce château, mais j’avance aussi sur cette mission qui me demande d’avoir deux groupes de fermes agricole, et comme je suis à côté d’une nouvelle cathédrale, je pioche une nouvelle carte mission. Oula ! Cette mission ne va pas être simple, mais elle est encore réalisable et me laisse la possibilité d’aller chercher la majorité sur un autre château. Voilà le genre de dilemme que vous allez avoir. 

Plus le jeu avance et plus la tension est forte. Le décompte pourra laisser des surprises. Dans une session, un joueur contrôlait très peu de châteaux, mais avec les missions il nous a tous coiffés au poteau.

 

Irlande terre verte (ou le plateau avancé)

Avec le plateau de l’Irlande, c’est la même limonade en ce qui concerne la mécanique, mais cette fois plus de cathédrales avec des missions privées. Au début de la partie, on a tiré des missions publiques avec un avantage au premier qui les réalise (les autres peuvent les accomplir tout de même). On monte en interaction dans un jeu qui n’en manquait déjà pas, la tension augmente, les choix à arbitrer aussi.

 

 

En se plaçant autour d’une Tour ronde, on déclenche l’effet du jeton du même nom. (une seule fois par tour et par joueur). De simples points, mais aussi des effets comme choisir un des jetons que l’on a mis de côté en début de partie, et surtout le jouer. Là aussi, à bon escient, dans le bon tempo, ça permet de faire des coups flamboyants. Hop ! non seulement je viens de te reprendre le château, mais j’ai également réussi cette mission privée avant toi. Le beurre et l’argent du beurre. Placer un jeton x2 sur une mission encore non réalisée. Démultiplication des choix et analyse du plateau au programme. Encore plus de blocages aussi.

 

 

Renouveau du jeu de tuiles ?

Reiner Knizia a tellement réalisé de jeux, que l’on ne peut s’empêcher de trouver des parentés, des similitudes avec d’autres titres. Je pense à Babylonia découvert il y a peu, où l’on retrouve le principe de groupes de tuiles, ou Samurai avec son système de contrôle assez similaire à celui de Rebirth, mais les deux titres sont beaucoup moins purs et plus alambiqués (jouez quand même à Samurai c’est vraiment bien). On me souffle dans l’oreille des jeux comme Durch die Wüste (La traversée du désert en français) ou encore Mille Fiori

La comparaison s’arrête là, Rebirth est beaucoup plus immédiat, quand je le présente à des amis joueurs il y a toujours parfois un sentiment de perplexité. On peine à imaginer la richesse et la profondeur malgré un choix réalisé à partir du hasard et pourtant…  

On pourrait être tenté pour pallier le hasard de piocher deux tuiles au lieu d’une, mais avec deux jetons, c’est plus de paralysis analysis. Rebirth pousse à s’adapter, point final. Si vous désirez avoir plus de contrôle, ce n’est pas à Rebirth qu’il faut jouer.

Deux plateaux, deux manières de jouer. Vous jouez en famille ? Préférez l’Écosse, la tension est moins forte et les missions privées vont ajouter un peu de prise de risque. L’Irlande est plus ouverte et sujette à des combos, ce qui la rend mieux adaptée pour jouer avec un public « gamer ». On perd un peu en fluidité ; on va plus analyser le plateau pour faire des coups suboptimaux. 

Deux petits bémols, d’abord pour rester à un prix plancher, cette version utilise des jetons en carton, largement suffisant, sauf peut-être pour le jeton de score, on aurait aimé quelque chose de plus pratique, mais c’est vraiment pour pinailler. La règle du bris d’égalité manque un peu d’élégance.

Que ça soit l’Ecosse ou l’Irlande, Rebirth parvient à toujours être satisfaisant, vous n’avez pas la tuile que vous auriez souhaitée ? Ce n’est pas grave, il y a toujours un coup à faire. Le maître mot c’est l’adaptation. À préférer à 3 ou 4 joueurs pour avoir une tension plus importante, mais le jeu fonctionne aussi très bien à deux.

Rebirth est soutenu par son édition fort jolie au demeurant et une ergonomie parfaite. Avec ces règles simples, le jeu est très fluide et les sessions restent contenues dans les 45 minutes (moins d’une heure avec des joueurs qui suranalysent). Avec ces deux plateaux, Rebirth propose deux gameplay à la fois similaires et différents. Rebirth est un petit bijou d’élégance, avec une forte interaction, de la prise d’un risque d’un côté, de la combinatoire de l’autre, le tout avec un seul jeton, une pureté de design qui force l’admiration.

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