FOCUS : intime conviction
Mais pourquoi ce titre ne fait pas référence à Mr Sherlock ? ou Holmes ? même pas Baker Street, non cette petite boîte, c’est Focus. Subtil pour un jeu de communication d’idées, sans paroles, à jouer à deux.
Petit coup de loupe sur ce nouveau jeu d’Antonin Boccara et Romaric Galonnier édité par Oldchap Games.
Fauteuil
Pour égayer les soirées de Sherlock, Watson a inventé un jeu qui fait appel à l’intuition, mais aussi aux détails. Si ce n’est pas une enquête, c’est évidemment de la déduction qui est en jeu. Mais surtout de la communication non verbale.
Livre
Entre les deux joueurs, on place seize images. Chacune des personnes aura également une carte Repère qui lui indique sa carte, celle qu’elle va devoir faire deviner à l’autre, celle que l’autre ne devra pas prendre, sinon c’est perdu John ! Alors comment gagner ? En éliminant, tour après tour, des cartes de la grille, en espérant que ce n’est pas la carte secrète de l’autre. Sans paroles, sans communiquer. De l’intuition, oui, mais également des indices à donner à son comparse. Vous aurez compris qu’il s’agit d’un jeu coopératif. L’idée est de guider l’autre vers notre carte Pièce à conviction. Toutes les cartes sont des images qui représentent tantôt des objets, tantôt des lieux ou des paysages.
Damier
Pour faire deviner aux autres notre objectif secret, nous avons pu apprécier pas mal de jeux qui faisaient appel à des mots que l’on assemble (Pyramide), ou un mot qui renvoie vers d’autres (Codenames, Mot malin), des mots qui guident vers une image (Dixit), des images qui se en flèchent d’autres (Shadows Amsterdam), à du guidage (Marche du crabe). Des jeux que j’apprécie pour la connexion qu’il se crée entre nous. Cette fois, Focus nous demande de créer une suite d’images pour déduire une autre image. Nous allons créer non pas un lien direct entre deux mots ou plusieurs, nous allons plutôt construire un environnent lexical ou contextuel.
Ce qui semble simple ne l’est pas en réalité, enfin, ça dépend des deux protagonistes. Chacun a un champ lexical, une expérience, une connaissance différente de chaque image, on met tellement de choses différentes dans chaque tiroir qu’est un mot, que communiquer son idée n’est pas aisé. Et l’expérience du jeu sera étrangement simple avec une personne, et redoutablement compliquée avec une autre.
J’ai commencé ma ligne d’indices avec « Fauteuil ». Que mettez-vous dans ce champ lexical là ?
Menotte
Il ne s’agit pas seulement de faire deviner à l’autre son idée, car nous allons prendre des cartes dans cette grille, chacun son tour, pour préciser le sens de notre mot. Ce qui signifie que mon comparse pourrait bien m’enlever une carte que je pensais utiliser comme indice, ou pire, prendre ma carte secrète (défaite immédiate dans ce cas). Nous sommes liés, une carte est autant un indice que je donne qu’une hypothèse que j’enlève.
De tous les jeux d’association d’idées précédemment cités, tous ont un assemblage bien identifié qui requiert une connivence entre les joueurs. En voici un dernier que j’invoque, Hot & cold, qui pourtant ne met pas en jeu les mêmes mécanismes puisque dans ce dernier, un binôme connait un mot et va donner la température de proximité avec les mots qui se dévoilent avec des cartes (froid/tiède/chaud), les autres joueurs essayant de comprendre de quel mot il s’agit. Dans Hot & cold (on en parlait ici), on saisit une idée et on la déroule, on façonne ensemble le champ lexical qu’on comprend mutuellement, mais qu’on essaie d’éloigner du mot central pour noyer les autres joueurs. Je retrouve ce plaisir dans ce lien entre nos deux esprits, cette ligne de crête sur laquelle on avance ensemble. Et il arrive ce moment de bascule où on cherche à réduire les possibilités qu’on a ouvertes, réduire les choix, guider en prenant un indice tout en enlevant une solution. Le jeu est là, le délice est à ce moment où on guide vers la solution, tout en étant sûr (on ne l’est jamais !) qu’on ne prend pas la carte secrète de son complice. Il faut alors que notre partenaire comprenne qu’on ne donne plus des indices pour guider vers notre image, qu’on a commencé délicatement à éliminer en faisant comprendre que la bascule a opéré.
Vous vous demandez comment ne pas perdre à la première carte par hasard ? Ils y ont pensé : l’un des deux commence la partie en prenant une carte d’une rangée de quatre cartes qui n’est pas dans la grille de seize.
Après Fauteuil, j’ai pris livre, puis damier et menottes. Vous l’avez ?
Carte à jouer
Les illustrations de Simon Caruso sont des images simples à lire, car il y a déjà bien assez à faire avec nos idées galopantes, il ne fallait pas charger l’image. Elles représentent l’imagerie de Conan Doyle, des objets du passé, qu’il faudra parfois nommer quand on joue avec les plus jeunes, ou même entre adultes, ça évitera de voir autre chose que son coéquipier.
Une carte à jouer devrait suffire maintenant !
Loupe
Focus est une petite boîte qui contient un grand jeu. Il est pour tout le monde, mais tout le monde ne communiquera pas de la même façon. On apprend beaucoup de ce langage en images sur l’autre. Il y a une façon de casser le jeu, que je vous laisse deviner et que je vous encourage à ne pas utiliser pour garder le plaisir de la communication de l’idée. Les grilles étant tirées au hasard, certaines fois la communication sera aisée, tandis que d’autres tirages nécessiteront d’aller chercher des idées plus lointaines, de prendre plus de risques dans les choix et les éliminations. Si le hasard est présent, et parfois malheureux, ce n’est pas si grave. On joue en quelques minutes, on perd, mais on ne va pas s’arrêter sur cet échec, on recommence et lors d’une partie, on finira par ce qu’il ne reste plus que deux images, nos deux cartes Pièce à conviction, et on pourra alors jouer en mode Sherlock qui permet d’émettre une proposition en cours de partie.
Cette suite de cartes sont mes indices pour vous faire jouer.
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Alfa 20/06/2023
C’est un remake de Similo ?
Natosaurus 21/06/2023
Comme dans Similo ou One key, on va effectivement enlever des cartes pour au final viser la carte secrète. Seulement il y a de nombreuses différences, et les sensations ne sont pas vraiment les mêmes. La plus importante est qu’il n’y a qu’une personne dans Similo qui donne des indices, et il n’y a qu’une seule « idée » à enlever (mais une, puis deux, puis trois cartes…), alors que dans Focus c’est les deux joueurs qui tour après tour enlève une seule carte. Et cet enlèvement constitue un nouvel indice. Dans Similo le nouvel indice vient de cartes supplémentaires, et non de la grille des cartes à enlever. C’est vrai qu’on peut résumer les deux jeux en disant qu’on doit faire trouver la carte secrète en donnant des indices, mais les différences de jeu et de sensation sont elles bien différentes.