Farshore : Everdell prend le large !

Farshore est une création de James A.Wilson, l’auteur d’Everdell, secondé par Clarissa A.Wilson, l’autrice de Mon petit Everdell.  L’éditeur le présentait comme plus abouti, avec quelques éléments repensés, une sorte d’Everdell 2.0. Nous en parlions dans cette news.

J’ai découvert assez tardivement Everdell de James A.Wilson, sorti en 2018 chez Starling Games qui pourtant me faisait de l’œil depuis des années, avec ces petits animaux mignons illustrés par Andrew Bosley dans un cadre champêtre. La grande force d’Everdell, c’est son édition et la cohérence thématique qui s’installe. Nous y construisons notre village de 15 cartes avec des bâtiments, on y installe nos créatures et finalement tout cela raconte une histoire et on se souvient de nos sessions. J’en avais entendu tellement de bien, que ce qui devait arriver arriva, j’ai été déçu, J’ai trouvé le jeu bien fait, très attachant, mais un peu surcoté (il est 35e sur BGG, oui quand même). D’ailleurs si vous avez de la curiosité, on a beaucoup, beaucoup de contenus sur Everdell : Just played, test, et plus.

À l’inverse, j’ai plutôt apprécié sa version enfant familiale suffisamment simple et avenante pour un public familial, tout en laissant assez de choix pour le parent qui joue avec son enfant, mais certes limité pour les joueurs que nous sommes. Nous en parlions ici.

Après avoir exploité sa licence avec moult extensions (Pearlbrook, Mistwood, Newleaf, Bellfaire), Starling Games a décidé de prendre une autre direction ou même plusieurs directions puisque comme l’indique la rose des vents du logo de leur gamme Edges of The Map, il va y avoir 4 nouveaux jeux se déroulant dans l’univers d’Everdell, Farshore étant le premier. Le prochain se déroulera dans les terres glacées et les autres, à suivre… Il est à noter que chacun de ses titres aura son illustrateur ou illustratrice attitré(e), surement pour créer une patte et une identité différente. Par exemple, Jacqui Davis remplace Andrew Bosley pour ce titre.

L’appel du grand large

Il est vrai que si l’on décale l’univers du cadre champêtre vers celui de la mer, on retrouve peu ou prou les mêmes choses qu’Everdell, à savoir de la pose d’ouvriers et la construction de tableau.

On aura toujours à la fin un tableau de 15 cartes, on retrouve les 5 mêmes familles de cartes, celles qui donnent des points en fin de partie, celles que l’on active avec nos ouvriers, celles qui donnent un revenu, etc. Et on retrouve les mêmes ressources même si elles n’ont plus les mêmes noms, univers maritime oblige, on passe au bois flotté, aux pierres marines, aux algues et aux champignons. La structure d’un tour reste elle aussi la même, placer un de ses meeples ouvriers, jouer une carte ou passer à la saison suivante.

 

 

 

Ce qui m’irritait particulièrement dans Everdell, c’est son opportunisme et le manque de choix, certes on peut jouer des cartes de notre main ou de la clairière (en payant les ressources), mais il arrive que l’on attende une carte dans le but de la chainer, par exemple, si j’ai la ferme, je peux jouer gratuitement la fermière ou même le fermier, enfin ça c’est si je l’ai dans la main ou sur la clairière, il arrive donc que j’attende une carte toute la partie sans qu’elle ne vienne. Que l’on soit bien clairs, l’opportunisme fait partie du jeu, et est même nécessaire pour créer de la tension. Mais cela donne ici l’impression que c’est tombé tout cuit dans notre bec, ou qu’au contraire, on n’aura jamais la carte attendue. C’est d’ailleurs un des principes directeurs de Forêt Mixte que je n’apprécie pas vraiment pour cette raison – car le joueur est dépossédé des bons coups, qui sont soit automatiques, soit absents. (Une balle perdue, une !) (Mais on vous invite à lire notre Just Played par quelqu’un qui a plus apprécié que moi.)

Dans Farshore, les auteurs ont réglé cela de manière hyper simple et maline : d’abord la Baie (qui remplace la clairière) servant de marché contient toujours 8 cartes, mais 8 cartes différentes, et ça change presque tout, car cela évite d’avoir 3 fois la même carte indésirable et non désirée, et de se retrouver avec rien de bien appétissant. Ici, on place les cartes identiques les unes sur les autres. Idée que l’on peut d’ailleurs reprendre telle quelle pour Everdell. Les auteurs ont fait un gros travail de sélection et étudié les cartes de Everdell pour ne garder que 40 ou 50 capacités différentes pour créer le deck. Ils ont aussi décidé d’enlever toutes les cartes un peu trop violentes envers les joueurs, ce qui de fait réduit l’interaction, mais est-ce une interaction souhaitable dans un jeu de pose d’ouvriers ? (Je vous laisse y répondre et je ramasse les copies à la fin de l’heure.)

 

 

Et surtout, on ne doit plus attendre une carte pour la chaîner, on peut installer un personnage dans un bâtiment du même type, ainsi je vais placer ce douanier dans mon phare et je ne paye pas les ressources. Mais pour cela je dois utiliser l’une de mes 3 ancres. 

Vous l’aurez compris : chaque joueur dispose en tout et pour tout de 3 ancres pour la partie et cela augmente l’espace de décision. À quel moment les dépenser ? Dès le début pour construire mon moteur ? Ou bien j’attends d’y placer un personnage plus coûteux plus tard pour ses points de victoire ? Les possibles s’en trouve grandement élargis sans pour autant que cela ajoute de la complexité.

 

Les dunes où l’on récupére nos cartes « map »

 

Autre point critiquable d’Everdell qui a été, il me semble corrigé, avec une extension : les cartes objectifs assez peu lisibles qui nous demandaient d’avoir telle ou telle condition et d’y placer un de nos ouvriers pour toute la partie. Cela a été remplacé par des tuiles Cartes que l’on peut aller chercher sur l’emplacement des dunes. Pour cela il faut avoir la condition et dans ce cas on récupère celle du dessus. Il y en a autant que de joueurs mais c’est de moins en moins rémunérateur. En fin de partie on comptera le nombre de cartes que l’on multipliera par la valeur totale sur les cartes (de 0 à 2). Laisser toutes les tuiles au même joueur, c’est ouvrir la porte à une bonne fessée. Il faut donc surveiller un minimum ses adversaires.

 

La piste des bateaux

 

La mer qu’on voit danser

Autre axe intéressant qui ajoute à la fois de l’opportunisme de la prise de décision : autour du plateau nous avons une piste de points de victoire particulière, un axe que l’on peut exploiter. Chaque saison, nous avons deux tuiles rose des vents, si la carte que l’on joue correspond à l’une des conditions on avance notre bateau d’ une case, de deux si les deux conditions sont réunies. Simple, non ? La encore, cela offre un petit espace de décision en plus, on a envie de bénéficier de cet effet.

 

Les tuiles roses des vents

 

En progressant sur cette piste on va aussi gagner des coffres au trésor qui valent deux points de victoire en fin de partie ou bien peuvent être dépensées comme une ressource joker, et là encore votre espace de décision s’en trouve augmenté. Il serait mieux de les garder, mais cela me permet de jouer cette carte plus rapidement et avant de passer, cartes qui me donnera un revenu ou des points de victoires. Farshore responsabilise le joueur, il lui donne les clés du camion.

 

 

 

Less is more

Toujours autant de mignonitude, les cartes sont désormais illustrées par Jacqui Davis qui avait déjà officié sur Mon petit Everdell. Les meeples sont tout aussi mignons, mention spéciale aux macareux qui ont ma large préférence. l’organisation des cartes a été repensée pour gagner en lisibilité. On retrouve encore une structure en 3 dimensions. Le phare qui trône dans Farshore qui reste tout aussi inutile que l’arbre et surtout il faudra le démonter à chaque partie vu qu’il ne rentre pas dans la boîte autrement. Pour ma part ça a été vite réglé, il est démonté et placé sous la boite. Les bateaux en plastique type playmobil ne sont pas non plus indispensables et augmentent probablement la facture, un pion à sa couleur aurait pu suffire, même s’il faut l’avouer ça reste agréable à l’œil.

Farshore s’inscrit dans cette famille de jeux implémentés, transformés, avec un ADN très proche du jeu existant, mais en corrigeant, modifiant, transformant, parfois à la marge parfois significativement. Un peu comme Wyrmspan avec Wingspan. D’un côté on peut regretter ce manque de prise de risques, mais de l’autre on peut aussi apprécier que l’on tire des enseignements du temps passé, pour améliorer le jeu.

 

Les tuiles îles qui disparaissent sous la marée haute à la saison de l’été.

 

En conclusion, si vous n’aimez pas du tout Everdell, je ne vois pas ce qui pourrait vous convaincre. Tout dépend de vos griefs, certains étant corrigés (hasard de pioche mitigé, retrait des cartes interactives, lisibilité des objectifs). Si par contre vous aimez Everdell vous devriez apprécier celui-ci, tant il lui ressemble, il sera juste un peu plus tendu, plus technique aussi.

Je ne vais pas y aller par quatre chemins : Farshore corrige tout ce qui ne me convenait pas dans Everdell. Plus tendu, avec moins d’opportunisme, le jeu a aussi été rationalisé. Il semblerait qu’éditeurs et auteurs aient écouté les retours des joueurs. Les règles sont plus élégantes – un des objectifs affichés des auteurs puisqu’ils en parlent dans leur carnet d’auteur – et les ajouts mécaniques élargissent l’un espace de décision. Mention spéciale à la rose des vents et aux ancres qui donnent plus de sens aux chainages, ou aux trésors que l’on peut utiliser comme joker ou garder pour leurs points. En d’autres termes, Everdell Farshore responsabilise les joueurs, leur laisse le gouvernail du bateau et à eux de voir la direction qu’ils souhaitent prendre.

 

La carte du monde d’Everdell.

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7 Commentaires

  1. saka-saka 05/04/2024
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    Everdell fait partie de ces jeux qui, à la longue, m’ont déçu, pour toutes les raisons que tu évoques. On ressent de la frustration pendant les premières parties parce que les cartes attendues ne sortent pas (que ce soit pour le chainage ou pour l’accomplissement des objectifs) et que certaines cartes faibles sont en trop grand nombre. Après une petite dizaine de parties, j’espérais trouver des stratégies pour contourner ce défaut, sauf qu’il n’y en a pas : le deck ne tourne pas assez rapidement, notre main de cartes non plus (il y a bien une action forêt qui fait piocher des cartes, mais elle n’est pas disponible à toutes les parties, et de toute façon, notre main est limitée à 8). C’est donc une bonne nouvelle si ce défaut est corrigé avec Farshore, je vais d’ailleurs l’essayer avec Everdell.

    Les autres ajouts de règles sont plutôt appétissants également. Reste le dilemme d’investir dans cette version (à un prix non négligeable) quand on a l’original. Le plus logique serait probablement de revendre Everdell pour acquérir Farshore dans la foulée…

    • atom 05/04/2024
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      De manière générale je n’aime pas cette mécanique ou tu dois attendre une carte précise, et c’est ce qui m’a fortement déplu sur Foret Mixte. Ici je ne l’ai pas précisé mais on a une action disponible pour tout le monde qui permet de défausser autant de cartes que l’on souhaite et refaire sa main à huit, cela corrige le probléme dont tu parles. de même une autre action disco à tout le monde permet de défausser jusqu’à 3 cartes pour prendre jusqu’à trois ressources. ça reste couteux, mais ça débloque une situation. Et je trouve qu’ils ont réussi à ce que l’on ait des choix plus décisifs et moins évidents. Il faudrait aussi analyser combien il y a de cartes différentes. Dans Farshore j’ai l’impression qu’on voit toutes les cartes assez rapidement, mais ce qui peut paraitre un défaut, est probablement une qualité car c’est plus maitrisable. Ils ont travaillés à réduire ce nombre pour garder des synergies possibles et dans les faits ça marche.

  2. morlockbob 05/04/2024
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    Très plaisant effectivement, mais oui, ça fait très cher le correctif

  3. ihmotep 05/04/2024
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    J’adorais Everdell malgré les défauts cités (pour sa fluidité, et il me transporte dans sin univers). Revendu après moultes parties et moultes réflexions, celui-ci me fait bien de l’oeil (et de la patte, et de la tentacule ^^)

  4. Rody Sansei 05/04/2024
    Répondre

    Et le prix plus que honteux, on en parle aussi, ou bien… ?

    On ne vous dit pas que le jeu était prévu à 100€ au départ et que devant la grogne des boutiques, Matagot a décidé magnanimement de le baisser à 90€.

    Risible. Et honteux (oui, je me répète).

  5. xicluna 07/04/2024
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    Fan d’everdell et possesseur de la complète collection je vais avec plaisir tester la variante de 8 cartes diff et empiler les identiques =) en effet ca devrait fournir plus de variété et permettre de faire tourner légèrement plus l’énorme deck quand on inclus des extensions ^^

    Pour les ancres joker ca ressemble fortement aux portes dorées de l’extension newleaf ou pareil on en a en nb limité mais sert de joker =)

    • atom 08/04/2024
      Répondre

      Je n’ai jamais joué qu’à’ Everdell, pas d’extensions, cependant pour l’écriture de cet article j’ai fait quelques recherches et j’ai vu qu’en effet certaines choses étaient modifiées avec les extensions En effet la mécanique d’ancre on peut l’adapter, il suffit de chercher 3 objets, des pommes de pins par exemple et le tour est joué ou des meeples arbres. Le marché avec 8 cartes différentes en effet c’est quelque chose que j’adapterais automatiquement, ça ne réglera pas tout s’il y a trop de cartes mais ça peut réduire cet effet. J’ai une variante pour les jeux quand on joue à deux (Grand Austria Hotel par exemple).Quand les cartes ne bougent pas assez, se mettre d’accord pour enlever une carte à la fin du tour, ou simplement la première (celle qui a stagné le plus longtemps dans la rivière).

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