Dinogenics – Acide désoxyribonucléludique
Vous aimez les dinosaures ? Moi, je l’avoue, ça ne m’a jamais tellement captivé. J’en suis resté à quelques cauchemars d’enfance. Mais je dois bien dire que Dinogenics (de Richard Keene) a le flair de me titiller la curiosité : de la pose d’ouvriers et un pitch à la Jurassic Park (on crée son parc d’attractions pour des touristes qui se feront peut-être bouffer par les sauriens), voilà qui ne saurait se refuser. Ensuite, la boîte et le matos sont plutôt jolis, avec une belle présence de table… Passons directement à ce qu’on fait dans le jeu !
Objectif points
La cible du jeu, c’est une majorité de points de victoire acquis en faisant venir des visiteurs dans notre parc et en gardant de super bô dinos dedans. Chaque manche voit débarquer un certain nombre de touristes et si l’on a de la réputation, bim, on marquera plus. Les dinosaures, eux, apporteront un score que l’on marquera à chaque tour, pourvu qu’ils ne se soient pas fait la malle (en cas de malnutrition ou d’habitat mal respecté).
Lors des manches, on jouera des actions sur un plateau central, le plateau continent. Et là, on retrouve l’ADN classique des jeux de pose d’ouvriers : pose bloquante, copie d’emplacement, actions plus désirables que d’autres… tout cela pour, notamment, acquérir des crédits, échanger les crédits contre des clôtures et autre bâtiments (pensez Caverna, remplacez les moutons par des stégosaures, vous y êtes… voilà), mais aussi pour récupérer de l’ADN de dinosaure.
L’ADN de dinosaure, ce sont des cartes ESSENTIELLES pour faire progresser votre parc : collectez suffisamment d’ADN de la même famille, et hop, vous vous retrouvez avec un beau T-Rex flambant neuf, tout pimpant. Le souci, c’est que les sites permettant d’en acquérir font tourner une pioche bien grasse qui peut être complètement encrassée. Lorsque personne n’a de volière à ptérodactyles, leur ADN ne sert à rien… et lorsque vous cherchez l’ADN d’un dino qui ne vient pas, eh bien vous l’avez dans le baba et vous grognez de frustration.
On a bien quelques moyens de manipuler cela via un marché pas très sexy, ou encore une pioche sélective, mais ce n’est pas très agréable dans un jeu de gestion de se soumettre aussi fort au hasard. On notera tout de même un pis-aller, la création d’un dinosaure mutant avec des ADN différents. Mais bizarrement, cela ne fait pas gagner : c’est vraiment l’espèce de dinosaure que vous avez tendance à ne pas vouloir dans votre parc car peu rentable en PV.
Maintenance party
Il faudra nourrir les dinosaures carnivores #passionsacrificedechevres et éviter que les touristes (qui apportent sous et points) soient dévorés. Les joueurs peuvent d’ailleurs gagner des scandales (-6 points) si c’est le cas. Mais comment un dino croque-t-il des gens ? Eh bien, il faut que le dinosaure déclenche un saccage. Le saccage est déclenché lorsque des dinosaures ne sont pas dans le bon habitat (genre un t-rex et un raptor sont amenés à cohabiter, ou sont amenés à être mis dans des enclos non fermés), ou encore lorsqu’il est impossible de nourrir un dino. Autant dire que ces situations n’arrivent que lorsqu’on le cherche et il est fort possible de passer une partie entière sans déclencher de saccage. On se dit que c’est dommage d’écrire des règles et d’implémenter des mécanismes qui ne seront pas utilisés au final…
Par contre, si vous lancez le dé de saccage suite à une des conditions sus-mentionnées remplie (cohabitation impossible/pas de nourriture), il se peut fort que votre partie soit complètement ruinée (car cassage de bâtiment ou clôture et, donc, potentiellement, saccage en chaîne).
Des cartes événement rythment les tours et, si elles provoquent une variété de situations dans la partie, elles sont les seules à vraiment pouvoir nous mettre dans la panade. Et encore, les joueurs ont un tour pour se préparer, puisque la carte du tour suivant vous est montrée.
Autre élément qui pourrait être intéressant mais qui ne marche pas trop : suivant les niveaux de réputation, les joueurs auront différents montants de touristes. C’est un peu la double peine : si vous n’êtes pas bon, vous aurez moins de visiteurs, donc moins de sous et de points de victoire… Globalement, j’ai l’impression que le catch-up est inexistant et qu’un joueur qui démarre bien va l’emporter sans trop de souci.
Dans les actions réalisables, nous avons aussi la possibilité de jouer des cartes Manipulation, qui ont un effet surpuissant ou très situationnel, et il en va de même pour les bâtiments, qui ressemblent à de petits incréments plutôt que de vrais développements. Occasion un peu ratée pour ces derniers, quand dans Caverna, qui décidément lui ressemble bien, chaque construction est un palier conséquent. Ici, il n’y a que peu ou pas de tension sur les crédits, qu’on peut acquérir de plein de façons !
La critique est fossile, l’art est dix fossiles
En somme, je tire de mon expérience de Dinogenics un constat plutôt triste : il s’agit d’un jeu que j’aurais aimé aimer, au pitch et au matériel alléchant, mais à l’exécution défaillante. Pourtant, le thème est plutôt sexy et on se glisse facilement dedans… Mais il ne se passe pas grand-chose de passionnant dans une partie car le rythme en est laborieux. Mais ce qui me chiffonne le plus est cette dissonance entre ce que l’on veut faire (des points, de l’optimisation tendue à la Caverna) et les moyens ou limites (info partielle pour les bâtiments, pioche ADN aléatoire, cartes Manipulation aléatoires et super-fortes). Le mécanisme de saccage semble vraiment surfait : il est fort possible qu’il n’y ait aucun saccage dans la partie (c’est même le cas de la majeure partie des sessions, sauf si l’on veut se tirer des balles dans le pied pour voir ce que ça fait) et pourtant, c’est un mécanisme qui a demandé de l’attention, qui est développé. J’en conçois une certaine amertume : le jeu se veut eurotrash mais la mayo a mal pris. On se retrouve donc avec un jeu de gestion récitant les poncifs allemands… tout en les rendant inélégants et inefficaces à coup d’un chaos cher à l’école américaine. Et je crains qu’il ne s’agisse pas d’une question de goût, car j’apprécie ces deux genres de jeu, séparément, ou même mélangés, lorsque l’harmonie mécanique est meilleure.
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Meeple_Cam 24/09/2020
Je suis dans l’ensemble d’accord avec cette analyse. Autre point dérangeant : à 3 joueurs, on ne commence qu’avec 3 ouvriers pour en avoir un 4ème à la phase 4. Avec 3 ouvriers, on ne fait rien, le jeu n’avance pas. Pourquoi avoir fait ça?
Néanmoins j’ai pris du plaisir à jouer à ce jeu et je serai partant pour y rejouer, notamment parce que le thème est assez présent et que j’aime bien construire mes petits enclos. Mais oui, adeptes du contrôle en jeu de gestion, passez votre chemin. Dans les points positifs, il y a la dizaine de scénarios solo proposés, avec des configurations de départ différentes et des règles spécifiques.
Poseidon2 24/09/2020
moi ce qui ne t’a pas plu est ce qui me plait : des surprises et du hazard. Je ne sais pas combien de partie tu a faites mais vu que les cartes sont puissantes, si on est à la bourre, il suffit de prendre des cartes pour revenir dans la partie. De la même facon sur un score de 100-120 points le fait de ne pas etre en tete de la piste de reputation n’impact que peu en terme de point. Et il suffit d’infester les hôtels pour virer les gens . IL est vrai que c’est un jeu ou jouer sans les cartes signifie se tirer une balle dans le pieds.
Mais si on aime les jeux avec interactions et suprises c’est excellent et beaucoup moins soporifique qu’un jeu de gestion de base 🙂
fouilloux 25/09/2020
« Vous aimez les dinosaures ? Moi, je l’avoue, ça ne m’a jamais tellement captivé » J’ai pas réussi à lire plus loin.
Skyvince 25/09/2020
Pour avoir fait une partie, j’étais plutôt intéressé, le thème, l’ambiance, les illustrations. Les déceptions sont venues de 2 points pour moi : dans le même tour tous les joueurs ont posé leur premier dino avec 2 cartes ADN et 1 case, le mien avait besoin de 2 cases, donc pas pu faire de dino tôt dans la partie. Je me suis dit que parfois, être à contre-courant sur un jeu de pose d’ouvrier ça peut le faire, mais visiblement pas sur une première partie… et l’autre déception (plutôt bien jouée par un joueur au dernier tour) fut la carte qui redispose jusqu’à 3 ouvriers déjà placés, pour le coup, prévoir déjà où on pourra peut-être se poser, c’est un peu le sel des jeux de pose d’ouvrier, mais qu’un joueur puisse chambouler tout le plateau avec 1 carte, voir bloquer tout un spot en un tour, j’ai trouvé la carte super forte… j’ai bien pioché des cartes hein, mais qui me proposaient de bousiller mon pauvre dino durement né pour le remplacer par des mutants… Alors sans doute la situation a fait que … mais tout de même…
Ha et je n’arrivais pas à intégrer que les visiteurs faisaient des points et ce, toute la partie, pour moi, ils apportaient juste de la tune… va savoir…
En dehors de ça, je crois qu’à chaque fois que j’ai pu, j’ai « dépensé sans compter », une chouette immersion, les événements peuvent être problématiques suivant la stratégie mise en place, on a quand même un tour pour les voir venir.
Au final, je pense avoir bien aimé, mais je ne suis pas sûr ^^ Du coup, faudrait que je refasse une partie, le nombre de joueurs a peut-être un impact important aussi sur les sensations de jeu (on a joué à 4).
Voilà pour mon retour 🙂
Meeeuuhhh 27/09/2020
>La critique est fossile, l’art est dix fossiles
Alors là, chapeau. Ça met la barre haut. Très haut.
Umberling 30/09/2020
Cétacé inspiré, je l’admets ! J’ai cherché un peu 🙂
christ 28/09/2020
Entièrement en désaccord sur l’analyse.
Par exemple , si on créé des dino à la 3 em manche , on peut gagner!! Par une stratégie fine par exemple en créant des pterodactyles, des brontosaures ou des tyrex…
J’ai 7 parties avec ma compagne et le jeu est intense, fun et donne une envie de rejouer incroyable même avec des aspects chaotiques qui rendent le jeu immersifs, contrairement à un dino island certes sans chao mais un jeu de comotabilité.
Frédéric Ochsenbein 29/09/2020
Perso j’ai adoré. Certes grandement pour le thème, mais aussi pour la dynamique du jeu. Les tours de table s’enchaînent rapidement, les possibilités sont multiples. Lors des quelques parties que j’ai fait, les rebondissements sont nombreux. Un joueur peut prendre le large et vite retombé. Certes le hasard est présent, mais avec la mode des jeux alliant tirage de cartes et plateau c’est une constante, et elle me dérange moins dans un jeu fun comme Dinogenics que dans Terra Forming Mars ou Maracaïbo. De plus il y a toujours moyen de tirer son épingle du jeu, les dinos sont très bien équilibrés avec leur avantage et inconvénient (même les mutants qui combotent avec des procédures) et donc il y a moins de cartes gamebreaker que dans les jeux susnommés (yeah je viens de me faire un tas d’ennemis ^^). Mon bémol personnel concerne les procédures : certaines sont bien fortes, d’autres peu utiles selon la situation.
A 4 il tourne très bien, avec une guerre des visiteurs et un choix drastique à faire avec seulement 3 actions dans le tour (puis 4).
A 2 joueurs il tourne merveilleusement bien, avec plus d’actions (4 puis 5 dans le tour) donc un développement de parc plus abouti, mais là c’est plus la priorité de mes actions qui va être crucial (les places sont rares ^^).
morlockbob 30/09/2020
je vais rejoindre Poseidon sur le côté hasardeux, il dynamise le jeu.Il faut accepter le chaos/ On peut s’en relever, tout dépend quand il tombe