Dice Theme park : Kaban sur un manège
Les parcs d’attractions ont pour objectif de nous faire vivre un moment d’évasion, en mettant des paillettes dans les yeux de leurs visiteurs. Les grands manèges, les grand-huits, les maisons hantées, que de plaisir à parcourir ces attractions. Dans Dice theme park, vous n’allez pourtant pas aller chercher les sensations fortes dans des machines à vous retourner la tête (au sens propre du terme), mais vous allez construire ce fameux parc, afin que le public s’arrache les billets d’entrée. Du fun et des bonbons, voilà ce qui est attendu.
Dans Dice theme park, vous êtes un promoteur d’attractions, et vous allez construire votre parc de loisir. Chaque joueur construit le sien, le public saura estimer le meilleur. À travers cinq manches de jeu, vous allez donc acquérir de nouvelles attractions, mettre des stands de confiseries, recruter des mascottes, et surtout accueillir la foule qui se masse à vos portes.
Les règles du Park
La partie va être assez structurée, car chaque manche sera séparée en six phases, qui pourront se faire soit simultanément, soit dans l’ordre du tour établi.
La première phase sera de choisir deux cartes de sa main. Chaque joueur commence la partie avec un set de cartes « Personnel » identiques, ayant plusieurs fonctions. Elles vont définir le revenu du tour par joueur par la somme des deux cartes choisies. Et oui, ce n’est pas l’affluence du parc qui générera vos bénéfices, ce sont les personnels que vous choisirez).
Ces cartes définiront aussi l’ordre de jeu pour la manche. De manière générale, plus on gagne de revenu, moins on a des chance d’être premier joueur. Les cartes vous donneront enfin des bonus pour le tour, qui s’activeront spécifiquement sur une des phases à venir. Une réduction sur l’achat des stands, par exemple. Cette phase se fait en simultanée, et il est à noter que les deux cartes choisies iront dans la main du joueur à votre gauche à la fin de la manche.
La seconde phase permettra le choix d’un wagon de visiteurs pour votre parc. On est à l’heure de la modernité, exit les cars encombrants, bonjour les monorails. Plusieurs wagons sont disponibles, et les visiteurs sont représentés par des dés de couleur dont la valeur sera toujours la même d’une manche à l’autre sur les wagons, mais la couleur pourra changer. Cette phase est faite dans l’ordre du tour, et le premier joueur prendra généralement le wagon avec les dés de valeur les plus fortes, sauf si il a vraiment besoin de dés de couleurs spécifiques. En effet, les dés de valeurs fortes permettront plus d’activations d’attractions un peu plus tard.
La troisième phase sera celle de l’agrandissement de votre parc. Vous pourrez, dans l’ordre du tour, acheter une et une seule attraction. Les parcs des joueurs s’agrandiront donc au même rythme, au delta près d’une action bonus permettant de gagner une attraction de la défausse. Le choix de l’attraction se fera en fonction de la manière de l’activer avec vos dés-visiteurs, de son type (pouvant activer un bonus si on arrive à en avoir plusieurs de même type), d’un éventuel petit bonus de revenu, et surtout des points de victoire qu’elle rapportera à son activation.
Cette phase permet aussi de recruter une (et une seule) mascotte, qui viendra se rajouter à celles préalablement acquises. Vous savez, la mascotte, c’est cette personne qui a un costume d’animal un peu ridicule, qui amuse les enfants, qui est présent sur des photos familiales inoubliables, et qui doit crever de chaud sous le soleil estival. Dans votre parc, vos mascottes seront primordiales dans l’optimisation d’activation des attractions.
Vient la quatrième phase, toujours en simultané, où on pourra acquérir un à deux stands qui viendront bonifier vos attractions lors de l’activation, en fournissant du revenu, des points de victoire ou une activation supplémentaire. On pourra aussi acheter une (et une seule) tuile plan pour aider nos dés-visiteurs à se déplacer dans le parc plus facilement.
La cinquième phase est le cœur du jeu, celle où les neurones s’activent pour permettre la meilleure expérience possible à vos dés-visiteurs. En simultané, chaque joueur va plancher sur son parc pour activer les attractions. Chaque attraction a une condition d’activation qui requiert des dés-visiteurs. Cela peut être des dés de couleurs, ou avec des valeurs particulières, ou pair/impair, ou un mix de tout cela.
Les dés-visiteurs doivent, bien sûr, être présents sur l’attraction, et leur activation a deux effets : ils réduisent leur valeur de 1 (jusqu’à disparaître si la valeur tombe à zéro), et un des dés-visiteurs doit se déplacer sur une attraction adjacente, ce qui lui permettra éventuellement de l’activer dans la foulée.
Les joueurs vont donc chercher à activer le maximum d’attractions en analysant les réductions des valeurs et les déplacements. C’est ici qu’interviendront les tuiles plan et les mascottes. Les tuiles plan permettent de déplacer un dé sans l’activer. Les mascottes permettent de modifier la valeur d’un dé, ou de changer temporairement sa couleur, ou encore d’activer une compétence spéciale (en mode expert). Chaque attraction ne peut être activée qu’une fois par manche, sauf stand spécial mis sur l’attraction ou pouvoir d’une de vos carte Personnel.
Enfin, la dernière phase, celle de maintenance, permet de réinitialiser les éléments et d’enlever les dés de valeur 1 de votre parc, les autres restent à leur place.
Des objectifs communs seront à atteindre sur les trois dernières manches, selon conditions, et le joueur ayant le plus de points gagne la partie.
Va jouer dans le Twister
Vieux routier des jeux vidéos, j’avoue avoir fait mes armes sur Theme park, sorti en 1994 chez Bullfrog studio, où on avait un vrai simulateur de gestion de parc d’attractions, avec nos visiteurs qui hurlaient dès qu’ils n’avaient pas un stand de nourriture à proximité. Mon attente vis à vis de cet opus ludique était de retrouver un peu de ce qui avait bercé mes heures sur mon Amiga 500.
Ce jeu est issu d’une campagne participative Kickstarter, dont la livraison aux bakers et en boutique vient d’arriver. Sans être une suite, il est dans la lignée de Dice Hospital, étant aussi centré sur la gestion de dés, sans nécessité de les lancer. Les auteurs de cet opus Parc ne sont pas les mêmes, il s’agit là d’Adrian Adamescu et Daryl Andrews, qui sont les créateurs de Sagrada entre autres.
Dice theme park, à catégoriser dans les jeux experts, propose un exercice d’optimisation pour gérer l’arrivée des visiteurs et maximiser l’activation de nos attractions. En effet, plus on active d’attractions à chaque manche, plus on gagnera de points. Les premières phases de chaque manche sont en général assez rapides, car elles permettent essentiellement les achats de préparation à la phase d’activation. Une petite tension peut se faire sur l’argent lors des premiers tours, mais qui s’estompe progressivement grâce aux divers bonus activables.
La phase d’activation est la partie la plus intéressante car il va falloir utiliser judicieusement les fluctuations des dés et les éléments à notre disposition pour s’assurer que notre parc sera exploité le mieux possible. Cette phase, relevant presque de la suite logique mathématique pour enchaîner les activations, est un effort cérébral assez stimulant, mais solitaire, chacun ayant le nez sur son parc à ce moment.
Un des points intéressants et original du jeu est le transfert des cartes Personnel à nos adversaires. Ces cartes proposent souvent des actions assez puissantes, il faut donc avoir conscience que, si on en profite à son tour, c’est notre adversaire qui aura l’opportunité de l’utiliser à la manche suivante. Dans mon ressenti, c’est la partie interaction la plus marquée, d’autant qu’il est autorisé de jouer deux fois la même carte si on les a en main, ce qui peut être très avantageux.
Il est étonnant de constater à quel point Dice Theme park force la linéarité. À chaque tour, on ne pourra acheter qu’une attraction, ni plus, ni moins. Idem pour les mascottes, les plans, les améliorations. Au final, les parcs de tous les joueurs évolueront au même rythme, et on ne pourra pas vraiment comparer notre progression avec les parcs adverses.
On pourrait imaginer que le choix des attractions soit un moment d’observation de la situation générale, et essayer de bloquer un autre joueur en lui prenant celle convoitée (en combotant les symboles), mais la pratique montre qu’on se concentre plutôt sur ses besoins que ralentir un adversaire. Ainsi, la différentiation ne se fera pas sur notre capacité à développer notre parc, mais sur celle de bien gérer les déplacements de nos dés-visiteurs.
La phase d’activation m’a aussi assez surpris. Véritable cœur du jeu, je m’attendais à avoir à faire des choix cornéliens, sacrifier une attraction pour mieux en bonifier une autre, avoir des dés-visiteurs perdus au fin fond de mon parc. Et bien pas du tout. Sur les quelques parties faites, en optimisant et en se servant du pouvoir des mascottes, il a toujours été possible de tout activer, et d’exploiter tous mes dés-visiteurs.
Pour peu qu’on ait anticipé cette phase, on peut dérouler notre plan sans accroc. Cela se résume, non pas à si je peux activer une attraction, mais si je peux l’activer plusieurs fois (sous réserve d’en avoir la possibilité via les stands ou les cartes Personnel), tout en anticipant la manche suivante.
La phase d’activation s’avère aussi de plus en plus pénible au fil des tours au vu du nombre de dés-visiteurs à manipuler. Il faudra être vigilant sur chaque action réalisée, le retour en arrière n’étant presque pas possible. L’erreur est d’ailleurs très vite arrivée sans que personne ne s’en rende compte (comme un oubli de déplacer ou réduire un dé).
De façon tout à fait paradoxale, le thème est magistralement absent de Dice theme park. On ne ressent nullement l’excitation d’aller dans un parc d’attractions, ou de gérer la satisfaction de nos clients. La thématisation des attractions est complètement occultée, on ne regarde ni leurs noms, ni leurs illustrations, qui sont de toute façon maquées par le matériel du jeu. Les dés-visiteurs arrivent tels des robots via les monorails et ne retranscrivent en rien la foule parcourant notre parc, à la recherche de sensations fortes. Dice theme park se révèle être très centré sur la mécanique, sans qu’une histoire ne se mette en place.
En fin de partie, les joueurs auront généralement des scores assez proches. Les écarts se feront surtout sur les objectifs communs des derniers tours, ainsi que la capacité à activer plusieurs fois les attractions les plus généreuses en points. Pour cela la carte Personnel permettant de refaire une activation est très convoitée. Pouvoir en jouer deux sur une attraction rentable est une bonne option pour foncer vers la victoire. On rejoint la linéarité du jeu où on avance au même rythme sans réel éléments différenciants.
Les objectifs communs sont ce qui donnera de la rejouabilité au jeu. Les occulter est une erreur stratégique, et c’est un des rares moments où on sera vigilant au jeu de nos adversaires pour être dans la course à leur réalisation.
Le jeu propose deux modes de jeu (familial et expert) ce qui est appréciable, avec une règle plutôt bien construite et illustrée. Le mode expert fait jouer en cinq manches au lieu de quatre en familial, permet d’utiliser les compétences des mascottes (en plus de leur influence sur les dés), et d’avoir des bonus asymétriques entre les joueurs via un administrateur (exemple : activer un dé jaune ne fait pas baisser sa valeur pour un joueur). Le mode expert complexifie la phase d’activation des attractions, permettant d’optimiser encore plus les déplacements de vos dés-visiteurs. Dans la version entre mes mains, plusieurs extensions, issues de la campagne Kickstarter, étaient proposées dans le livret de règle (pack promotionnel, mini extension surprise) mais … sans le matériel dans la boîte vu qu’on le trouve dans la version Deluxe.
Il est où le roller coaster ?
J’avoue ne pas avoir été conquis par Dice theme park, le jeu proposant une trop grande linéarité dans le développement de son parc et une interaction entre joueurs trop réduite. Je n’ai pas retrouvé la sensation d’excitation à construire un grand et beau parc. Cela dit, le jeu est assez simple d’accès, même si l’effort demandé pour bien optimiser son parc requiert une bonne concentration.
J’attendais plus de fun, plus d’étoiles dans les yeux, même pour un jeu d’optimisation comme celui-ci. Au final, la sensation est plus de mettre en place une chaîne de montage, dont les rouages devront être le mieux huilé possible, plutôt qu’aller hurler sur un grand huit avec une barquette de frites à la main. Tout de suite, cela fait moins rêver.
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Ihmotep 23/02/2023
J’avais lu Kanban sur un manège et je ne trouvais pas le rapport :). Faut que je fasse une cure de désintox ^^
Article très clair, sans y avoir jouer cela me donne une bonne idée des atouts et défauts du jeu