Des nouvelles d’Embracer : résilience asmodéenne, bilan carbone et politique pro-IA

Alors qu’Embracer vient encore une fois de fermer un studio de jeux vidéo dernièrement (Pieces Interactive, le développeur d’Alone in the Dark), et que l’avenir de bon nombre de ses employés demeure incertain en particulier sur ce segment, le groupe suédois vient d’annoncer sa décision d’adopter une politique pro IA. 

Son bilan annuel permet en effet de lire : « Il est certain que l’un des principaux risques pour une entreprise est de ne pas utiliser l’IA, car cela signifierait un désavantage concurrentiel par rapport aux autres acteurs du secteur. La plupart des entreprises procéderont à l’intégration de l’IA de différentes manières. » déclare Tomas Hedman, responsable de la protection de la vie privée et de l’IA chez Embracer Group. 

Vous le savez peut-être, mais de nombreux acteurs (et pas des moindres) du jeu vidéo assument leurs recours à l’IA. Par exemple, au début de l’année, le patron d’EA, Andrew Wilson, a déclaré que 60 % des processus de développement de l’éditeur pourraient bientôt être influencés par l’IA générative. Et n’oublions pas que Sony, Ubisoft, Square Enix, et bien d’autres ont également commencé à se pencher sur l’utilisation de l’IA, non sans créer de nombreux débats au sein de la communauté inquiète des gamers. Côté jeu de société, la question a aussi généré de vives polémiques et plusieurs éditeurs ont commencé à se situer : pour (Hasbro, FryxGames ou Captain Games…) ou contre (Bombyx, Stonemaier games, Paizo…) quand certains ont traversé de vives controverses pour en avoir utilisé (Awaken Realms…). 

L’annonce d’Embracer se veut rassurante pour les employés : « Nous ne voulons pas remplacer les gens par l’IA, mais leur donner les moyens d’agir. C’est le cœur de notre approche centrée sur l’humain pour exploiter le potentiel de l’IA », poursuit M. Hedman. Le groupe met en place des directives qui encadrent l’utilisation de l’IA, comprenant des principes directeurs et une évaluation des risques. Embracer Group se dit conscient des risques potentiels associés à l’utilisation de l’IA, faisant référence aux possibilités de résultats biaisés, non inclusifs ou peu éthiques. C’est ici que d’après Hedman, Embracer doit « agir consciemment ». 

« Nous voyons de grandes opportunités pour l’IA dans la vitesse de développement des jeux, la logistique et la planification ». Tomas Hedman, Embracer

« À mesure que les modèles d’IA deviennent plus puissants, nous pouvons tirer parti de leur capacité également dans le processus créatif, par exemple en identifiant les incohérences dans les scénarios et la narration. Nos équipes créatives bénéficieront d’avantages considérables en matière d’écriture de scénarios, de création d’images, de génération d’idées, de contrôle de la qualité, etc. En outre, à mesure que les modèles deviennent plus proches de l’homme, l’interaction entre les joueurs et les fonctions assistées par l’IA sera beaucoup plus dynamique. Si, dans un scénario de jeu, vous négociez, l’IA peut s’en souvenir la fois suivante. Cela rend l’ensemble de l’expérience de jeu beaucoup plus intéressante et réaliste ».

Même si l’on pense de prime abord aux jeux vidéo en lisant cela, l’annonce d’Embracer ne précise pas dans quelles mesures l’IA sera encouragée dans les différentes branches du groupe et en particulier côté jeu de société. Une chose est sûre, après avoir licencié plus de 1500 personnes et annulé 80 projets, cette nouvelle politique n’aura pas bonne presse, même si le groupe assure qu’elle pourrait ouvrir la porte à de nouvelles embauches. « L’IA permet non seulement à nos développeurs d’en faire encore plus et d’être plus efficaces dans certaines tâches, mais elle ouvre également le codage à un groupe plus large de développeurs. L’entrée dans le secteur pourrait être plus facile pour les personnes handicapées qui, par exemple, ne peuvent pas utiliser un clavier aussi facilement que les autres », a déclaré Tomas Hedman.

 

Retour sur la résilience asmodéenne 

Côté Asmodee, le bilan indique que le segment des jeux de société a connu une croissance organique, mais avec une évolution des bénéfices plutôt stable. “Asmodee a généré d’importants flux de trésorerie au cours de l’année (Ndlr : le document souligne par ailleurs les effets de la liquidation des stocks) et a pris de nouvelles mesures pour affiner et élargir son portefeuille de produits.” 

Le grand nom qui est mis sous les projecteurs reste encore une fois Star Wars™ : Unlimited, arrivé en mars dernier, et qui n’a pas déçu, c’est le moins qu’on puisse dire. “Asmodee, en collaboration avec le célèbre studio interne Fantasy Flight Games, dispose d’une feuille de route pluriannuelle claire avec le développement de produits pour plusieurs sets futurs déjà terminés et reste concentré sur la création d’un écosystème solide pour les joueurs et les détaillants afin d’installer Star Wars™ : Unlimited comme un succès à long terme.” 

Embracer se félicite aussi d’un nouveau partenariat avec Lego, avec le lancement de Monkey Palace (news), et souligne aussi l’importance du projet Altered (dont Asmo est co-proprioétaire). Le groupe loue par ailleurs les mises en avant du Spiel des Jahres avec Mysterium Kids, Challengers ! et le Sonderpreis d’Unlock ! Kids.

D’après Embracer, Asmodee a l’objectif de croître organiquement avec le marché, ce qui se traduit par “une croissance organique moyenne à un chiffre, en plus de toute croissance par acquisition”. L’ambition d’Asmodee est également d’augmenter ses marges par rapport aux niveaux actuels grâce à “une meilleure répartition des revenus et à une gestion continue des coûts, tout en maintenant une conversion élevée des liquidités”.

 

 

Embracer semble retrouver un peu d’oxygène depuis la vente de Gearbox Entertainment à Take-Two Interactive Software Inc. pour un montant de 460 millions d’USD. Le document assure que cette transaction aura permis de réduire la dette et d’apporter un peu de souffle à la trésorerie. 

 

Bilan carbone : Fonds pour le Climat

Le bilan annuel met aussi en avant le Fonds pour le Climat qui a pour ambition de faire mieux que de simplement “acheter des compensations” pour les émissions carbone du groupe. L’idée est ainsi de financer des initiatives internes qui visent à réduire activement les émissions carbone d’Embracer, conformément à leur engagement de réduire de 45 % leurs émissions d’ici 2030. Ainsi, un comité (composé du directeur financier, du responsable des relations extérieures, des responsables du développement durable du groupe) décidera des initiatives et des projets qui bénéficieront d’un financement – tout en s’engageant à évaluer les résultats régulièrement.

Après avoir fait l’inventaire de ses émissions carbones, Embracer estime que le gros de son champ d’application tourne autour des biens et services achetés, des voyages d’affaires et des déplacements des salariés, mais aussi des infrastructures informatiques et également des jeux de société et de leurs packaging. “Nous faisons partie du mouvement visant à atténuer le changement climatique dans l’industrie du jeu et du divertissement.” assurent-ils. Cette politique aura-t-elle des répercussions positives concrètes, ou s’agit-il d’une posture visant à redorer leur blason ? Seul l’avenir nous le dira !

 

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6 Commentaires

  1. Humpf 22/06/2024
    Répondre

    Merci pour cette actu de suivi des affaires.

  2. NicolaT 23/06/2024
    Répondre

    Je m’interroge sur un point : Asmodee est bien initalement un distributeur ? Pourquoi alors dans chaque résumé d’Embracer ce secteur  n’apparaît que de facon très succinct, le communication se focalisant principalement sur le domaine de l’édition ?
    De plus, je vois que l’on parle de bilan carbone et de sa réduction…  or Asmodee en tant que distributeur ET boutique en ligne est probablement un des secteurs d’Embracer le plus polluant. Ne se pourrait-il pas être une préparation des esprits à une fermeture progressive dans les années qui viennent du secteur distribution ?
    En tout cas, merci pour ce nouvel épisode « Des Aventures d’Asmodee », vivement le prochain, j’ai hâte de connaitre la suite.

  3. Salmanzar 23/06/2024
    Répondre

    Notre monde est délirant où plus rien n’est facile, y compris créer et vendre des jeux de société.

    Bilan carbone, partenariat avec Lego, fond climat, croissance organique, augmentation des marges …. tout ce qu’il faut faire pour qu’une société reste en vie : c’est fou !

  4. Connor84 24/06/2024
    Répondre

    « responsable de la protection de la vie privée et de l’IA »

    Tout un poème.

    Je vais postuler comme responsable de la protection environnementale et de la croissance des flux.

    • Sha-Man 24/06/2024
      Répondre

      C’est marrant je me faisais la remarque que tout est interchangeable dans le titre que tu suggères « responsable de la protection environnementale et de la croissance des flux » de manière quasiment crédible.

      Tu pourrais être « reponsable de la croissance environnementale et de la protection des flux » Ou encore « responsable de la protection de la croissance et des flux environnementaux ».

      Je sais pas si c’est très bon signe si un jour on nous propose ce genre d’intitulés 😉

      • Connor84 24/06/2024
        Répondre

        Bah vu l’amour pour les locutions creuses et les postes tout aussi concaves, c’est pas impossible

        Mieux vaut un titre bien français: responsable de la protection des photocopies et de la munstiflette. Ah non, munstiflette c’est encore de la novlangue.

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