botanicus : un jeu massif
Hans im Glück, l’éditeur de L’âge de pierre, Carcassonne, El grande… revient en cette rentrée nous proposer un tour de jardin avec un jeu d’optimisation pour public initié. En tant que jardinier, vous avez la tâche de fleurir l’espace selon un plan précis. Vos clients ont des requêtes, il faut les satisfaire si vous voulez briller. Ils veulent des fleurs roses et vertes sur la première ligne, des petites pousses et des feuilles imposantes sur le bas etc… À vous de façonner le bon parcours et de planter judicieusement. Surtout que vous n’êtes pas seul, et que, si les outils sont disponibles, ils ne le sont pas tous, ni à tout moment. Alors, on fait quoi quand on veut arroser et que le voisin a piqué l’arrosoir ? Une fois encore, il va falloir jouer des coudes, même pour rendre hommage à la verdure.
Botanicus communie avec la nature puisque son matériel est zéro plastique et mélange coffre de rangement en carton, pions en bois (brouette, pelle, bourse et les animaux) avec une esthétique sobre et soignée. Petit plus qu’on apprécie, les jetons plante répondant au nom de Nepenthes Alata ou Mammillaria Elongata sont répertoriés en fin de livret pour les fans de botanique. Le tout est joli, clair et invite au jardinage ludique.
Pour jouer, il y a deux terrains principaux : son jardin (plateau personnel) et le plateau de jeu avec ses différentes pistes d’actions. D’un côté, un terrain où l’on travaille seul dans son coin, façon puzzle. De l’autre des emplacements qu’on ne peut pas partager, sauf si l’on sort son porte monnaie et que l’on paie. Casse-tête d’une relative simplicité en version de base, il devient plus tendu dans la variante avancée, nous y reviendrons.
Simple jardinier
Le jeu de base donne le même type de jardin à tout le monde. Un terrain épuré, avec ses bacs à fleurs en ligne, ses traces de pas pour donner une direction, sa réserve d’animaux… c’est en sorte une grille à remplir à renfort de pose de plantes.
Les jetons plantes sont de plusieurs couleurs, qui correspondent à leur état de floraison : graine jaune (1), les cotyledons roses (2), jeune plant (3) et fleur mature (4). On place son pion jardinier sur une des fontaines, ce sera son point de départ. Il peut toujours interagir avec les quatre massifs qui l’entourent. Une place est réservée pour accueillir les animaux qui font grimper le score plus ils sont nombreux. Leur type n’a pas d’importance.
Sur le côté droit, ce sont les requêtes, contrats à valider pour gagner des points. D’abord standard, la requête sera, une fois validée, remplacée par une requête spéciale. L’optimisation commence à la mise en place puisqu’on peut réorganiser cette seconde vague en tachant de la faire correspondre au plus près de ce qui est demandé en amont. Il est plus facile de passer d’un niveau 2 à un niveau 3 de plante, que de 1 à 4.
Le plateau de jeu, commun, est plus touffu, bien que clair. Il est divisé en deux parties. La partie supérieure affiche trois pistes où l’on glane des ressources avec la possibilité de faire la course, des bonus/points attendant à l’arrivée le premier : La bourse procure de l’argent, la brouette de l’arrosage et des animaux, la pelle donne des plantes de différents niveaux. Chaque piste distribue également des cartes spéciales (+ 2 plantes de niveau 1, 2 arrosoirs, 3 déplacements…).
La partie inférieure est composée de 8 colonnes comprenant 4 emplacements où chaque joueur va placer son pion fleur pour effectuer l’action de la piste correspondante avec une des trois pistes du haut. Une quatrième case ne rapporte rien mais permet d’être premier joueur. Car c’est le pion le plus en haut qui débute le prochain tour. On ne joue pas en sens horaire. Les places offrent des jetons bonus, rendant le jeu dynamique. On peut donc à la fois gagner de l’argent et avancer sur une piste (en dépensant cet argent) et réaliser une action. Ce sont sur ces colonnes que le blocage va agir. Il est parfois bon de sacrifier un tour pour être sûr de prendre ce que l’on désire au tour suivant. On peut aussi payer et se placer au même endroit qu’un autre pion. Petit malus, on ne réalise que l’action, sans bénéficier du bonus. Le jeu n’est donc pas fermé. Ceci permet d’éviter un blocage trop pénalisant, encore faut-il gérer son argent.
Les tours sont simples, rapides. Phase 1 : on agit déjà avec son jardinier que l’on déplace ou pas. Attention, c’est payant. C’est aussi le moment de jouer ou de vendre une carte spéciale. Phase 2 : le pion fleur le plus haut choisit un emplacement et s’y pose. Il prend son bonus et avance son meeple sur une des pistes, récoltant plante, carte, arrosage etc. Les jetons plantes sont placés sur les massifs et on regarde si une requête est validée.
La fin du jeu arrive une fois que les 8 colonnes ont été traversées 2 fois. Il reste alors UNE action de son choix à effectuer.
Jardinier paysagiste
Là où Botanicus la joue malin, c’est en proposant une variante expert (pour initiés) qui va élever le jeu vers plus de réflexion. Le cœur du jeu reste le même, il faut toujours valider ses requêtes, se placer… mais les ajouts ou transformations sont loin d’être gratuits. La gestion de l’argent, les choix de placement, s’ils restent évidents, vont être malmenés.
Des objectifs de fin de partie sont distribués en début de partie et demandent de remplir une condition particulière. Chaque fois que cette condition existe, on marque des points (chaque carré composé de 4 massifs, 1 point par massif construit…). Les jardins sont uniques créant l’asymétrie. Si cela n’a pas réellement d’influence pour les autres, le fait de devoir circuler en faisant des virages, de démarrer avec moins de requêtes ou plus d’objectifs va conditionner la stratégie. Les déplacements du jardinier ont augmenté, il faut payer, encore plus ! Les animaux, points sur pattes en mode basique, ont désormais un rôle et débloquent des pouvoirs (le papillon augmente les points rapportés par les requêtes…). Au second parcours de la piste des colonnes, un second jardinier viendra prêter main forte. Les actions et déplacements sont maintenant partagés, on n’a plus à se désespérer d’être en haut du terrain et de n’avoir pas assez de pas et d’argent pour bouger. Une souplesse bienvenue. J’avoue qu’après avoir testé la variante, nous ne sommes pas revenus à la version de base.
Un jardin extraordinaire ?
On ne va pas vous raconter des salades, Botanicus n’a rien d’original dans le genre : on pose des pions pour réaliser des actions, on bloque la place que l’on choisit, et on tente d’assembler au mieux son puzzle pour coller à la demande. Mais Botanicus a pas mal de qualités pour passer outre un survol rapide. Non pas que ce titre révèle une dimension cachée en jouant, mais plutôt parce qu’en jouant, on s’amuse, on réfléchit, on anticipe, le tout dans un décor agréable autant pour les yeux que pour la manipulation. En version jeu de base, on peut déjà par moment avoir quelques difficultés et se creuser la tête pour éviter les actions perdues comme posséder un arrosoir et n’avoir rien à arroser, anticiper sa construction de ligne pour la seconde requête… Le blocage existe, c’est un incontournable mais on est, par exemple, moins regardant sur les sous. On fait plutôt attention à être à côté d’un massif vide quand on veut planter. La question des places dans la colonne reste importante et il faut s’adapter, on n’aura pas toujours ce que l’on veut, mais le fait de payer pour venir en second, permet une certaine fluidité du déroulement.
On évitera la partie à 2 avec joueur fantôme. Ce sont clairement les choix des joueurs qui créent, du moins sur cette phase, la tension. On évitera aussi car le côté multi solo se ressent plus dans cette configuration.
La variante expert est clairement bien pensée, sans alourdir le jeu, elle le propulse sur une marche supérieure et pose de véritables challenges, donnant une vraie dimension aux animaux ou à la piste bourse qu’on peut avoir tendance à délaisser en mode basique. Plusieurs stratégies sont possibles (les contrats, les objectifs mais aussi la course sur les pistes…) et s’équilibrent entre elles. L’interaction, même si elle passe au second plan par rapport au puzzle est importante, encore plus sur les derniers tours. Plus le jeu avance, plus l’optimisation doit être sans faille. Il faut penser à préparer la fin pour ne pas se retrouver avec un dernier coup à vide. Il est bon d’avoir une vue d’ensemble pour s’en sortir.
Botanicus ne renouvelle donc pas le genre mais ce qu’il fait, il le fait bien et le résultat est plus que satisfaisant. Les multiples ajouts de la variante et les petits détails du jeu en général mènent à un ensemble de bon niveau. À votre tour d’enfiler votre tablier, chausser ses bottes, et d’aller voir si vous avez la main verte, en évitant la configuration 2 joueurs.
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Flemeth 19/09/2024
Comme tu le dis c’st un jeu qui ne révolutionne rien mais qui est bien fait et très agréable. L’édition y est pour quelque chose, et le gameplay élégant et simple d’accès tout en proposant un joli petit challenge intellectuel en fait un jeu à ne pas bouder.
morlockbob 19/09/2024
un jeu massif ou massifs (de fleurs) 🙂
atom 20/09/2024
Comme vous dites, un jeu ultra classique, rien de vraiment novateur, mais c’est chouette à jouer. Par contre pour moi le jeu c’est la version experte, l’utilisation des animaux est beaucoup plus intéressante et fine, j’aime bien aussi que l’on ait deux jardiniers. Bref désormais je propose la version experte même pour la premiére partie, sauf si j’ai un public familial, mais de toute façon ce n’est pas ce que je proposerais à un public familial. Comme tu dis, on regrettera la version 2 joueurs ou le premier joueur en plus de jouer en premier bloque une autre action, ça peut être frustrant car à notre tour, pas le choix de soit être premier joueur pour le tour suivant, soit d’avoir de l’argent pour garder un peu de contrôle.
Flemeth 21/09/2024
Pour info, j’ai pu parler avec un représentant de Hans im Gluck qui m’a dit que le plateau proposait une initiation avec son coté « simple » mais que le jeu était destiné à être joué en mode expert par la suite. Les jetons fleurs ont également été pensés (pensées ?), car j’ai eu des retours de joueurs qui ne comprenaient pas pourquoi les jetons n’étaient pas double face. En fait ils ont testé différents modes de jetons, et se sont rendus compte que proposer des jetons de chaque niveau engendrait moins de frustration que des jetons double face, même si cela impose plus de matériel et donc plus d’argent. Ils vont loin chez HiG !
atom 23/09/2024
Merci pour ces infos. En effet, quand on joue avec le mode expert ça parait évident que le jeu était pensé (haha bis=) comme ça. Tu veux dire qu’ils voulaient faire des jetons pour chaque niveau ? ça aurait été long dans la mise en place non ?
Flemeth 23/09/2024
Pour être claire, Hans im Gluck a fait tester ses jetons fleurs, certains étant double face (niveau 1/2 et niveau 3/4) et d’autres étant uniques (comme ça l’est actuellement). Et ils se sont rendus compte que la majorité des joueurs avait la frustration de retourner un jeton 2 alors qu’ils souhaitaient poser un jeton de niveau 3 (car en pleine réflexion on peut oublier qu’il faut prendre un nouveau jeton). Cette constatation les a convaincus de produire plus de jetons, tous uniques, pour un coût certes supérieur mais à leurs yeux ça en valait la peine 🙂