Babylon VS Monkey Palace, la battle des jeux de construction

Oyez oyez, en l’an de grâce 2024 se tient le premier affrontement des jeux de construction, qui va voir s’affronter deux jeux sortis presque en même temps, et qui nous proposent tous les deux de réaliser une construction en 3D. Un même objectif, deux réalisations, qui va sortir vainqueur de ce combat ? Qui aura le plaisir de voir son adversaire écrasé sous un parpaing pour illustrer sa défaite* ? Voyons voir ça tout de suite.

La présentation des adversaires

À ma gauche, notre premier participant est Babylon. Comme on s’en doute, ce jeu vous propose de construire les jardins suspendus de Babylon. À chaque tour, on va piocher une tuile dans la carrière commune. En fonction de la tuile choisie, on récupérera des piliers qui vont nous permettre de placer nos tuiles, de plus en plus haut en prenant appui les unes sur les autres. Sur nos tuiles, on aura des décorations représentées, (statue, escalier, fontaine, pont). Chaque décoration a des conditions à respecter pour être placée, et évidemment, plus elle sera haute, plus elle rapportera des points. On ajoute quelques événements, des bonus quand on varie les décorations et les couleurs sur les tuiles et voilà. Plus de détails dans le ludochrono.

Je place une tuile sur des piliers.

À ma droite, Monkey Palace, un jeu porté par rien de moins que … Lego ! Et oui c’est le grand retour de la marque à la brique dans le monde du jeu de société. Nous allons devoir construire un palais en ruine dans la jungle, en construisant des escaliers « d’arches. » En effet vous aurez à votre disposition des arches, des petits piliers (la brique de base Lego) et des grands, qui correspondent à trois des précédents. À votre tour, vous allez faire un escalier dont chaque marche sera une des arches à votre disposition. Cet escalier devra forcément être montant, et la hauteur des marches et leurs appuis vont être gérés par les piliers. Plus votre escalier aura de marches, plus vous gagnerez de la monnaie de singe. Cette monnaie de singe va vous servir à acheter des cartes. Ces cartes vont à la fois vous donner des bananes (qui sont les points de victoire) et vos prochaines briques, soit quand on achète la carte, soit de façon régulière à chaque tour. Il faudra donc bien choisir vos cartes, puisqu’on aura un espace limité pour les garder. On ajoute un singe qui se déplace à certaines occasions pour coincer les autres, des bonus avec la taille de nos piliers, et deux petites variantes qui nous rajoutent un papillon et une grenouille qui permettent de bloquer les autres ou de se débloquer soi-même (franchement, jouez avec, ça ne complexifie pas beaucoup le jeu). Là aussi, un ludochrono vaut mieux qu’une longue explication.

Je finis ici un escalier de 4 marches.

Round 1 : Accessibilité

Le premier terrain de l’affrontement sera l’accessibilité. Quand on regarde les boîtes, ce round a l’air plié : d’un côté nous avons un jeu Lego, avec l’esthétisme épuré typé jouet propre à la gamme, de l’autre Babylon et sa couverture qui semble marron malgré les différents éléments colorés qui la compose. Et en effet, la boîte annonce bien le résultat : le premier est pour 8+, le second pour 10+. Le point va donc à … Babylon. Et oui, moi aussi cela m’a surpris. Et pourtant…

Les règles de Monkey Palace sont plus courtes que celles de Babylon, et pourtant, vous l’avez vu dans le paragraphe précédent, j’ai eu besoin du double de place par rapport à son adversaire pour expliquer son fonctionnement général. Une fois que l’on a compris, il n’y a plus de soucis. Mais l’explication n’est pas si simple. Et puis, reste quelques points flous. De plus, la lisibilité du jeu n’est pas évidente : on aura souvent besoin d’estimer la hauteur des piliers à construire, et franchement cela devra être fait au moment de les construire car les hauteurs sont dures à mesurer. Pourtant, il faudra souvent préparer son coup à l’avance pour savoir quelle carte prendre à quel moment et donc planifier un peu où l’on va construire. Certes, on ne sera jamais bloqué et on arrivera quasiment tout le temps à faire ce que l’on veut, mais ce n’est pas toujours évident de se représenter les différentes possibilités. On aura aussi quelques points de détails pas évident à mémoriser. Bref on est bien sur un 10+ qui pourra même déconcerter certains adultes.

À l’inverse, Les règles de Babylon sont assez simples. On comprend facilement ce qu’il faut faire et comment le faire, et même si on pourra se retrouver à oublier des scorings au début, ce n’est pas si grave. Deux points de règles restent un peu pénibles : le nombre de colonnes que l’on récupère à chaque tour, ainsi que les restrictions pour placer les statues. À part cela, on voit assez bien ce que l’on peut faire, du moins sur le court terme. Sur le long, c’est un peu plus difficile néanmoins. Babylon n’est donc pas un gros jeu comme on pourrait le croire, et comme pour Monkey Palace, on n’est jamais vraiment bloqué dans ce que l’on veut faire.

Babylon 1 – 0 Monkey Palace

Si si, on va construire un truc comme ça !

Round 2 : Fluidité 

On s’en doute un peu vu le round précédent, c’est encore Babylon qui s’en sort le mieux. Surtout parce que l’on joue quasiment tous en même temps car on a chacun notre construction. Dans Monkey Palace, on construit le même palais, et il faudra donc attendre le tour du joueur précédent pour savoir quoi faire, car il pourra choisir un chemin qui va bloquer le nôtre (voir utiliser le singe pour cela). Comme on l’a dit, il est difficile de se projeter, et le jeu Lego a ainsi pas mal de temps morts, alors que Babylon roule sans accrocs.

Babylon 2 – 0 Monkey Palace

Quelques événements qui vont changer le jeu.

Round 3 : Interaction

L’un comme l’autre ne brillent vraiment pas par cet aspect. Néanmoins, on devine facilement du round précédent à qui va le point : dans Babylon on joue vraiment dans notre coin, aucun élément de scoring n’est dépendant de ce que les autres joueurs ont fait. Pas même une petite course ou une majorité, rien. La seule interaction c’est lorsqu’un joueur prend la tuile que l’on voulait, mais même là on aura souvent (voir toujours) une solution de replis. Dans Monkey Palace en revanche, notre tour sera directement influencé par ce que les autres auront fait. On aura même des effets pour les bloquer un peu, même si cela arrive plus souvent par accident que par intention. Il est déjà difficile d’envisager toutes les possibilités pour soi, alors pour les autres… Les deux cartes d’extension, le papillon et la grenouille, rajoutent quand même une petite couche qu’il serait dommage de ne pas expérimenter (enfin je dis ça, mais on n’a jamais utilisé grenouille).

Babylon 2 – 1 Monkey Palace

 

Round 4 : Rejouablité-stratégie

Pour ces deux jeux, le setup de départ est le même, il n’y a pas vraiment d’asymétrie entre les joueurs, ni d’éléments vraiment aléatoires à même de changer en profondeur la partie. La rejouabilité viendra donc des différents axes stratégiques proposés. Et c’est là que le bât blesse doublement. Aucun des deux ne parvient réellement à proposer de choix dans ce sens là. On fait un peu toujours la même chose d’un tour à l’autre, sans vraiment pouvoir lancer une stratégie au long court. Certes, Monkey Palace va nous demander de choisir les briques que l’on reçoit chaque tour, et dans Babylon il faudra prévoir comment construire nos jardins quelques tours à l’avance. Néanmoins, dans les deux cas notre partie ne va pas franchement se différencier de la partie des autres joueurs (les scores sont souvent serrés), ni énormément de la partie suivante. Et il faut bien reconnaître que ce n’est pas bon signe quand après deux parties de chaque jeu, aucun ne donne vraiment l’impression de proposer encore des choses à découvrir. Babylon aurait peut-être un léger avantage, mais pas  significatif. Malheureusement personne n’a le point.

Babylon 2 – 1 Monkey Palace

Les différents bonus.

Round 5 : Matériel et manipulation

Là quand même, on arrive sur le terrain de Lego, et c’est sans surprise à son avantage. Certes, les jardins que l’on va construire dans Babylon sont plus stables qu’on pourrait le croire, et on ne les fera jamais écrouler à cause d’une mauvaise construction. Mais on n’égalera jamais la robustesse et la facilité d’assemblage des Lego, qui vont parfaitement s’agencer et se manipuler très facilement. On ne risque pas non plus de tout faire tomber à cause d’un faux mouvement.

Babylon 2 – 2 Monkey Palace

Round 6 : Rangement et mise en place

Et alors que Monkey Palace venait d’égaliser, Babylon reprend immédiatement l’avantage avec sa boîte. On pourrait penser que c’est un détail, mais non. D’un côté, Babylon a parfaitement pensé sa boîte pour que tout tienne dedans et que en gros, on l’ouvre et on joue. Le rangement est assez rapide aussi, la boîte est bien remplie, sans vide. Bref on est dans les meilleures pratiques du marché. À l’inverse, Monkey Palace n’a pas du tout prévu le rangement. Résultat, nos pièces de Légo partent dans tous les sens et il faudra tout retrier à chaque partie. C’est franchement pénible et bien dommage ! Le démontage ne sera pas très pratique non plus, voire un peu fastidieux. Bref, à l’inverse, Monkey Palace n’a pas été très bien pensé pour cela. Je ne sais pas pourquoi mais vu le thème du jeu, je trouve cela un peu dommage.

Babylon 3 – 2 Monkey Palace

Vous le voyez la petite différence de taille qui fait que tout va valdinguer?

Alors que là c’est net et propre.

 

Round 7 : Satisfaction procurée par la construction finale

La messe semble dite : Babylon entame ce dernier round, le plus important d’entre tous peut-être, avec un point d’avance. Et il arrive en plus avec des arguments en sa faveur : avec ses figurines de décorations en plastique, ses ponts, ses tuiles avec des fleurs, le fait que l’on construise seul, on imagine mal comment un jeu qui ne vous offre que de simples briques carrées de trois teintes assez ternes pourrait faire mieux.

Et pourtant, c’est bien à Monkey Palace que je donne le point ! Et oui car dans Babylon, malgré tous les éléments en sa faveur, ces jardins ne sont pas aussi luxuriants qu’on l’espérait. Il manque de couleurs, de fleurs, de plantes dans tout cela, et on ne voit pas réellement de verdure. Les tuiles sont un peu ternes et la construction pas si folle : au mieux, on a trois niveaux les uns sur les autres, mais sans plus. À l’inverse, Monkey Palace nous fait monter, haut, très haut, toujours plus haut ! Il est moins contraint et permet donc des architectures beaucoup plus barrées, et là on le sens le temple en ruine au milieu de la jungle. Alors certes, on aurait pu en attendre plus de la part de Lego : plus de singes et d’animaux, plus de couleurs, de formes de pièces etc… Pourtant, cette simplicité retrouvée (je trouve les pièces des Lego actuelles trop spécialisées et bridant la créativité) nous donne la satisfaction enfantine de construire quelque chose à partir de rien. Il n’y a pas de murs, la construction n’a aucun sens, et pourtant elle représente exactement ce que l’on imagine : une construction des temps anciens envahie par la végétation. C’est tout bête mais des briques de trois couleurs différentes que l’on prend sans y prendre garde donne un côté chaotique qui rend le tout plus réaliste. Il n’y a pas à dire, Lego sait y faire. Peut-être qu’avec de la peinture sur les décorations Babylon reviendrait dans la course ?

Babylon 3 – 3 Monkey Palace

Y’a pas à dire ça fait envie !

And the winner is…

On pourrait se dire qu’on en reste là, égalité ? Moui, pas loin. Dans les deux cas les jeux vont nous apporter une certaine satisfaction à construire quelque chose d’assez impressionnant en 3D, mais malheureusement dans un cas comme dans l’autre, ils vont, à mon sens, manquer un peu d’éléments pour donner envie d’y revenir.

Mais bon, pas d’égalité dans cette compétition. Je vais donc utiliser les pouvoirs que je me suis auto-conférés en tant qu’arbitre, et départager les deux prétendants. En l’occurrence, c’est Babylon qui a ma préférence. Au final, il me semble offrir plus de profondeur pour plus d’accessibilité, même s’il faut reconnaître que le plaisir de la construction de Monkey Palace m’a beaucoup plu. Néanmoins, son gameplay ne m’a pas convaincu. En revanche, je salue le retour de Lego sur la scène des jeux de société, et j’espère qu’on verra d’autres jeux dans le même genre.

*Bon, je vais pas faire ça. Même si maintenant que l’idée est lancée ?

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