The Spoils se révèle
La plupart d’entre vous connaissent Magic, l’illustre ancêtre de tous les jeux de cartes à collectionner (et de fait des jeux de cartes évolutifs). Ce jeu, malgré son age (22 ans) est toujours plein de qualités et une véritable machine commerciale. Mais aujourd’hui, je vais vous parler du méconnu The Spoils, un jeu de cartes à collectionner un peu aux antipodes de Magic.
Ses créateurs sont des anciens joueurs de Magic qui ont souhaité moderniser l’ancêtre en corrigeant ses quelques erreurs de jeunesse.
Car on peut le dire Magic a des défauts. Haaaaaan ! En effet qui n’a jamais pesté lors d’une partie car il ne piochait pas de terrain ou à l’inverse parce qu’il en avait trop ? Même si les champions ont diverses techniques pour réduire au maximum ce risque en tournois, il n’en est pas de même pour les joueurs modestes qui souhaitent juste livrer de belles parties sans pouvoir invoquer (subir ?) le hasard de la pioche. C’est essentiellement sur ce point que The Spoils se démarque, mais je vais y revenir. Je souhaitais déjà attirer votre curiosité dans cette introduction qui n’en finit pas.
The Spoils est né en 2006 (la création/beta test a commencé en 2001, le jeu n’est sorti qu’en 2006 sous sa forme beta à savoir des paquets de cartes offerts, avec des cartes aux illustrations crayonnées), mais on peut considérer que son vrai lancement date de 2009 avec la 1ère édition.
Mais avant de regarder plus en détails comment le jeu fonctionne, je vais déjà vous présenter son univers.
L’univers décalé
Le jeu prend place dans le monde de Luridia qui est sur le point de basculer dans le chaos. Le complexe magico-industriel a généré de nombreux conflits qui menacent de dégénérer. Des cités-états s’affrontent pour imposer leur domination.
Ce qui nous donne cinq factions « Trades » prêtes à en découdre, toutes avec des capacités différentes (j’y reviens un peu plus loin). Étrangement, ce mélange des genres (les magiciens côtoient des techniciens fous ou encore des voleurs) passe plutôt bien, sans doute grâce aux superbes illustrations des cartes (certaines frôlent même avec l’érotisme, j’en connais que cela n’a pas laissé indifférents ^^). En tout cas, rien qu’en voyant une illustration, il est possible de savoir à quelle faction appartient une carte.
Et puis comme toujours, les textes d’ambiance qui figurent sur les cartes sont aussi là pour faciliter l’immersion du joueur.
Comment ça marche ?
Au niveau des mécanismes, bien que les termes changent, les joueurs de Magic seront en terrain connu : le but est de réduire l’influence de la faction adverse à 0 (on commence avec 20 ou 25 points). Pour cela, le joueur pourra mettre en jeu des personnages ainsi que des lieux et des objets. On retrouve également le mécanisme d’engagement des cartes (ici on dit qu’elles sont « depleted »), et la notion de réponse aux actions de l’adversaire (j’y reviens).
Première particularité, au début de son tour le joueur ne pioche pas nécessairement de carte. Il doit choisir entre mettre en jeu une Ressource ou piocher une carte. Les ressources jouent le même rôle que les terrains avec quelques différences cruciales.
Bien qu’il existe des cartes Ressource, n’importe quelle carte peut en fait faire office de ressources, il suffit de la mettre en jeu face cachée. Cependant les cartes Ressource apportent un effet supplémentaire : elles octroient un symbole de la Ressource au joueur. Ces symboles sont utiles pour jouer les autres cartes. En effet, chaque carte a un coût qui nécessite à la fois de payer un certain nombre de Ressources (incolores), mais également un seuil avec un nombre minimum de Ressources de ce type requis pour pouvoir être jouée. Enfin, dernier point important au sujet des ressources, chaque joueur débute la partie avec déjà deux cartes Ressource de son choix en jeu. Vous l’avez compris en me lisant, c’est sur ce point que The Spoils se démarque le plus de Magic en corrigeant son principal défaut de mana.
Autre différence majeure, le joueur peut attaquer autant de fois qu’il le souhaite pendant son tour, mais pas avec les mêmes personnages qui deviennent depleted quand ils ont attaqué ou défendu. Cela apporte une dimension tactique indéniable au jeu. Ajoutez à cela qu’il est possible d’attaquer la faction adverse (le joueur) ou un Lieu qu’il aurait posé en jeu. On pourrait comparer les lieux de The Spoils aux enchantements de Magic. Ceux-ci ont des Points de Structure qu’il faut réduire à 0 pour les détruire. À la différence des personnages, le Lieu ne récupère pas ses points perdus à la fin du tour. Autre élément nouveau qu’il va falloir prendre en compte : outre la Force et la Vie, les Personnages ont une troisième caractéristique de combat qui est la Vitesse. Celle-ci est importante à prendre en compte car cela veut dire qu’en combat tous les personnages n’infligent pas leurs blessures en simultané, mais qu’il y a un ordre dans la résolution du combat (la vitesse la plus forte est gérée en premier).
Je suis sûr que j’ai déjà pas mal éveillé votre intérêt avec ces quelques nouveautés. Il me reste un point à aborder qui fait toute la différence entre un bon jeu de cartes et un excellent jeu de cartes : la possibilité de réagir aux actions de l’adversaire. On retrouve donc ici une notion de réponse par l’intermédiaire des cartes et effets Tactiques. À cela prêt que l’ordre de leur résolution est très clair, ce qui évite de nombreuses questions (même si vous vous en poserez quand même certaines lors des premières parties, c’est normal, il faut perdre certaines habitudes prises dans d’autres jeux). Par exemple, pendant le tour de l’adversaire, vous ne pouvez jouer de carte (ou effet) Tactique qu’en réponse à une de ces trois actions : pose d’une carte, combat et fin du tour. Ainsi, si votre adversaire ne fait rien pendant son tour, vous ne jouerez vos effets qu’à la fin de son tour.
Tout joueur de Magic le sait, le nerf de la guerre, c’est les cartes en main. Plus un joueur va piocher, plus il se rapproche de la victoire. Disposer de ressources en abondance est également un facteur clé. Et si je vous disais que dans The Spoils vous pourrez piocher et poser des ressources plusieurs fois par tour, y compris pendant le tour de l’adversaire ? Voilà une solution intéressante pour répondre à certaines actions. Attention par contre, cela n’est pas gratuit et se produira après quelques tours seulement. En effet, piocher une carte coûte 3 ressources, et poser une nouvelle ressource en coûte 4. C’est sans doute le mécanisme le plus difficile à appréhender quand on vient de Magic.
Et avec tout ça en tête, si je vous présentais les différentes trades disponibles ? Elles sont au nombre de cinq et il y en a pour tous les goûts et tous les styles de jeu.
Les Trades
- Les Bankers sont des chats avides de richesse et de pouvoir, ce qui se traduira par la possibilité de jouer de nombreux lieux et de piocher beaucoup de cartes.
- Les Gearsmiths sont des passionnés de technologie avec de gros robots et toute une panoplie d’items pour les rendre encore plus puissants.
- Les Arcanists sont capables de s’infiltrer facilement grâce à la capacité covert qui leur permet d’attaquer sans être bloqué.
- Les Warlords sont les gros bras du jeu. En affrontement direct, rien ne leur résiste.
- Enfin les Rogues, ne manquent pas de coups tordus (vol de personnages adverses, retirer des personnages du jeu…) pour venir à bout de leurs adversaires.
Il est évident qu’il est conseillé d’assembler au moins deux trades (avec trois, ce sera plus dur au niveau de la gestion des ressources) de manière complémentaire.
Enfin, sachez que chaque trade a son histoire qu’il est possible de découvrir en BD (en anglais).
Débuter facilement et pas cher
Bien qu’il soit possible de vous imprimer des decks de démo disponibles sur le site de l’éditeur, je vous conseille de commencer par jouer les decks préconstruits proposés dans la nouvelle boîte de démarrage (The Basic Box of Awesomness) vendue pour à peine 20€ (il y a deux boîtes de couleur différente, mais le contenu est le même et une seule boîte suffit pour commencer).
Ensuite, lorsque vous souhaiterez construire votre propre deck de 75 cartes, il est conseillé de choisir deux factions. Et le plus simple est de commencer en assemblant leurs 2 decks préconstruits et en retirant quelques cartes Ressource.
Ensuite, vous pourrez étoffer votre jeu en achetant des boosters, et jouer en ligne avec OCTGN.
Je pense que vous en savez maintenant assez sur les mécanismes. Et je vous vois déjà me dire « Bon, c’est bien gentil cet article, mais alors ce jeu, je le trouve où ? Et je joue avec qui ? ». Et c’est là que le bât blesse. Le jeu n’est pour le moment disponible qu’en anglais (passe encore), et qu’il est peu distribué en France (on le trouve sur la boutique en ligne du distributeur Ludiworld, et une célèbre boutique de jeu strasbourgeoise ainsi que chez nos partenaires LudikBazar et LudiBay). Et pour pouvoir y jouer autre part que chez vous, bien qu’il existe quelques événements ponctuels proposés par le distributeur, il va falloir prendre votre bâton de pèlerin et convertir les joueurs (et peut-être même devenir Ambassador ?). [EDIT : Ludiworld distribue toute boutique ayant envie de tenter l’aventure].
Je pourrais vous présenter les quelques extensions déjà parues (au rythme d’une tous les 18 mois, là aussi ça change de Magic), mais dans la mesure où elles sont épuisées pour la plupart, je n’en parlerai pas dans cet article. [EDIT : Seule la première édition et Seed 2 sont épuisées mais la plupart des cartes sont réeditées dans la 2nd edition et Seed Saga].
Sachez simplement que la dernière, Holly Heist – Unlikely Heroes a pointé le bout de son nez fin mars (plus la réédition des cartes Seed en septembre, mais là, je vais vous perdre).
Un agréable JCC pour budget limité
En conclusion, The Spoils ne révolutionne pas le genre, mais apporte suffisamment de nouveautés pour proposer une alternative solide à Magic. Bien que vendu sous la forme d’un JCC, donc nécessitant un certain budget, il reste toutefois abordable grâce à son cycle de parution des extensions très lent : à l’image d’un JCE, il vous suffit de mettre 15€ chaque mois dans la tirelire et de la casser une fois tous les 6 ou 12 mois pour vous acheter quelques lots de boosters. À moins que vous n’ayez la chance de pouvoir participer aux tournois de Draft et Scellé proposés par le distributeur en région parisienne, ce qui sera une parfaite occasion pour étoffer votre collection tout en jouant dans un milieu sympa et détendu. À noter : le jeu devrait s’accélérer d’ici 2016 mais rester accessible comparé à Magic. Participer à des tournois reste le moyen le moins onéreux de remporter des cartes. Plusieurs boutiques en France (Le Temple du Jeu, La Guilde des Joueurs, Ludiworld, la Carte chance, Trollune, etc) propose des événements, renseignez-vous vers chez vous si ça vous branche !
Enfin, pour aller plus loin, je vous invite à consulter le site de l’éditeur (en anglais), et surtout les quelques articles parus en français (et à participer au forum) sur Run4Games.
Un jeu de Josh Lytle
Edité par Arcane Tinmen, Tenacious Games
Langue et traductions : Anglais
Date de sortie : 2012
De 2 à 6 joueurs , Optimisé à 2 joueurs
A partir de 13 ans
Durée moyenne d’une partie : 40 minutes
Vlan 06/10/2015
y’a-t-il une chance que le voir localisé un jour?
Umberling 06/10/2015
À vue de pif, je dirais que non : la localisation d’un jeu coûte très cher, et le public est quand même assez niche.
Guillaume LEMERY 06/10/2015
Je sais que certains éditeurs ont étudié la possibilité de… Mais comme le précise Umberling, le coût est sans doute trop important pour une marché finalement assez petit.
On est plus à l’époque de la folie des JCC, où tout et n’importe quoi sortait.
Shanouillette 06/10/2015
« c’était mieux aaaaavant » ;p
Guillaume LEMERY 06/10/2015
Ce n’est pas ce que je voulais dire, pffff 🙂
Ce que je voulais dire, c’est qu’il y a 20 ans, il y aurait sans aucun doute eu une VF. Mais à notre époque, peu d’éditeurs sont prêts à se lancer face à Magic (ou alors via des JCE). D’un autre côté, il y a 20 ans, à part les jeux de Garfield et L5R, il n’y avait pas de jeu doté d’autant de qualités que The Spoils.
Shanouillette 06/10/2015
Oui c’est sans doute vrai 🙂 je taquine je taquine ^^
Wormhole Surfers 13/10/2015
Bonjour,
merci pour cet article ! Ce jeu pourtant excellentissime est trop méconnu, du coup ça fait plaisir de voir qu’on en parle. Je me suis permis d’envoyer par mail à Ludovox quelques corrections/précisions à apporter à l’article 😉