Barbarossa – Retour sur une potion war-manga-deck explosive
Barbarossa, avant d’être un jeu de cartes, était le nom de code de l’opération d’invasion de l’armée allemande de la Russie lors de la 2ème guerre mondiale en 1941. A ce niveau là, le jeu reste fidèle à la trame historique en proposant le même objectif : conquérir Moscou, dans un jeu de type wargame à base de cartes servi par un mécanisme de deckbuilding.
Intro : la polémique…
Jusque là tout va bien et le thème éveille la curiosité pour se lancer dans une telle aventure ludique. Cela se complique lorsque l’on découvre la forme graphique qui ne se matérialise pas par des unités ou des engins de guerre classiques, mais par des jeunes filles en petite tenue dans des uniformes allemands bien trop petits pour contenir leurs formes des plus généreuses qui se vautrent dans des positions variées et suggestives : un choix des plus étonnant, détonnant même, qui interpelle, voire gêne si on ne garde pas en tête qu’il s’agit d’un jeu japonais où la culture du manga est reine – culture parfois difficile à cerner et appréhender vu de notre lointain hexagone.
Le jeu a suscité pas mal de débats lors de sa sortie en France l’été dernier (2014). Ils se sont même transformés en polémique car le jeu se situe en effet à la limite de l’immoralité de par la légèreté de la forme mise en avant, faisant revivre dans le fond un sujet lourd et inhumain de notre histoire. La seconde guerre mondiale est encore récente et a touché nombreux de nos proches ancêtres, si bien que le jeu peut en devenir troublant. Dans Barbarossa, on est bien loin de l’ambiance émouvante du récent jeu Les poilus, d’où émane un véritable hommage et respect pour les disparus et blessés de la première guerre mondiale.
Le mélange des genres peut donc choquer et je comprends les réticences des joueurs, et notamment celles des joueuses qui en général considèrent ce jeu comme antipathique, rebuté(e)s par son fond (viril) de type wargame et sa forme (machiste), réductrice envers les femmes. À ce propos, Shanouillette avait déjà élargi le débat en consacrant un article de fond sur la place des femmes dans les jeux de société. [NDLR : Cet article a en fait été publié durant l’été 2013, soit un an avant la sortie de Barbarossa en France].
La pochette est logiquement très controversée car elle arbore une des cartes les plus provocantes du lot. Le choix d’une illustration plus soft aurait été plus judicieux pour apaiser les esprits. D’un autre côté, cette décision franche annonce la couleur, évitant ainsi de soulever un sentiment après-achat de tromperie sur la marchandise : on a bien affaire à un jeu sexy, coquin mais pas non plus porno-hard !
Pour défendre le jeu, je dirais aussi que, même si parfois certains textes sont limites, la ligne rouge n’a pas été franchie pour des joueurs sensés (comme attendu pour des joueurs de plus de 16 ans) et l’édition française indique bien en préambule des règles l’aspect fictif et fantasmée de la seconde guerre mondiale. Ces précisions n’ont pas suffi à éteindre l’incendie de la polémique qui a tout de même désenflé depuis, laissant les pour et les contre dos à dos.
Intéressons-nous donc au jeu afin que vous puissiez vous forger votre propre opinion.
Le jeu propose une expérience ludique nouvelle en réussissant à décliner le deckbuilding dans une forme spécifique de mécanisme intéressant. Il serait donc dommage de passer à côté de ce jeu car il vaut vraiment le coup d’oeil détour ! Les détours donnent souvent lieu à des angoisses et des réticences en passant par des chemins inconnus parallèles et demandant un effort parfois contre-nature : il en va de même pour ce Barbarossa. Il faut passer outre le thème gonflé au silicone, laisser de côté ses a priori et accepter sa légèreté puérile et provoc pour, au final, tester le jeu et découvrir sa richesse stratégique. Et qui sait : peut-être vous amadouera t-il ?
Présentation générale
Barbarossa n’est pas un jeu nouveau puisque sa version originale chez Arclight Games date de 2010, mais il a mis un peu de temps pour être présenté dans sa version française éditée par Play & Win (Editions sans détour).
Le jeu réunit de 2 à 5 joueurs à partir de 16 ans et l’auteur japonais Atsuo Yoshizawa est aussi le créateur de Dynamite Nurse Return, un autre jeu aux mécanismes similaires avec des soubrettes dans un univers médiéval-fantastique hospitalier tout aussi détonnant ! La durée du jeu est annoncée de façon optimiste à 60 minutes et il faut bien rajouter 30-45 minutes pour une première partie complète car malgré une accélération en fin de partie avec des unités plus puissantes, le début est long.
Le but du jeu est d’obtenir le plus de points de victoire en fin de partie en allant conquérir des villes russes jusqu’à ce que Moscou tombe sous les bombes des unités allemandes.
Chaque joueur démarre avec un paquet identique de 8 cartes et va développer son armée en achetant des unités puis les déployer sur sa zone de front pour tenter de s’emparer de collines fortifiées, positions stratégiques et enfin des villes, synonyme de points de victoire. Le jeu s’arrête immédiatement dès qu’un joueur a réussi à envahir Moscou, la dernière carte ville objectif.
Le Matériel
Le matériel est constitué uniquement de cartes de bonne qualité (au nombre de 305) et d’un livret de règles proposé dans un format petite boîte de rangement avec encore plus d’un tiers de vide, très adaptée pour le transport, un peu moins pratique pour sortir et trier les cartes car la boite est dépourvue d’onglets de classement.
Les illustrations des cartes sont disons chatoyantes et dans la pure école manga composée selon les crédits du jeu par 15 illustrateurs différents de l’école militaire kawaii (à prononcer « ka-wa-i » et qui signifie « mignon » en japonais) que je découvre. Pour plus d’infos sur la définition de la mode Kawaii, c’est ici. La directrice artistique a également collaboré pour un autre jeu manga de deckbuilding et soubrettes bien connu : Tanto Cuore (version sur I-bidule disponible).
Les dessins des personnages tous féminins sont bien mis en valeur par leur grandeur puisqu’ils occupent les trois-quarts du format de la carte, laissant peu de place au texte expliquant les effets de la carte dans une police un peu trop petite. À noter aussi que chaque carte comporte un texte d’ambiance en filigrane, à la police encore plus minuscule et au contenu parfois évocateur limite, dans la lignée du jeu.
Deux cartes de type aide de jeu sont fournies et sont bien utiles : l’une résume les phases du jeu et l’autre donne la signification des symboles utilisés dans le jeu.
Le livret de règles est illustré et clair, sauf pour la partie assaut sur les villes qui manque de précisions : un exemple d’assaut avec succès et défaite aurait permis de lever les ambiguïtés.
Le jargon et les icônes du jeu
Le jeu contient un jargon spécifique qui demande un petit temps d’adaptation et qu’il est opportun de connaître avant de démarrer la partie car il est présent sur de nombreuses cartes :
- « Acquérir« une carte : mettre la carte dans sa pile de défausse
- « Épuiser« une carte : pencher la carte à 90° ce qui la rendra indisponible pour le tour en cours (et qui sera réactivée en phase initiale du prochain tour)
- « Défausser« une carte : la mettre dans sa pile de défausse (logique)
- « Éliminer« une carte : la retirer définitivement du jeu
- « Rapatrier« une carte : la remettre dans sa pile d’origine (zone de guerre commune)
- « Déployer« une unité : mettre la carte dans sa zone de front qui reste alors dans cette zone et sur laquelle le texte de dessous en jaune pourra être activé par la suite
- « Assaut« : déclarer l’attaque sur un objectif (autorisé une seule fois par tour) pendant sa phase tactique
Présentation générale d’une carte (unité) :
Présentation des différents types de cartes
Les cartes sont de différents types :
1. Cartes de type ressources (cartes au cadre gris)
Il s’agit des cartes générant des points de ressources qui servent à acheter des cartes unités et parfois à payer des unités puissantes au front.
Il existe 3 types de cartes de transport générant des points de ressources :
- transport terrestre : coût = 1 point de ressource, génération de 1 point de ressource quand jouée
- transport routier : coût = 3 points de ressource, génération de 2 points de ressource quand jouée
- transport ferroviaire : coût = 5 point de ressource, génération de 3 points de ressource quand jouée
2. Cartes unités (cartes au cadre vert)
Le jeu propose 15 piles de cartes différentes d’unités disponibles au recrutement en payant le coût en points de recrutement de valeur 1 à 6 selon la puissance de la carte.
Ces cartes sont le cœur du jeu et dotées chacune de différents effets et caractéristiques. Toute la panoplie des unités guerrières sont présentes : unités d’infanterie, de grenadier, génie, artillerie, régiment de tank et autres bataillons blindés.
Ces cartes ont une valeur d’attaque à effet immédiat ou lorsqu’elles sont déployées et utilisées au front lors d’un assaut.
3. Cartes stratégie (cartes au cadre jaune)
Il existe 3 piles de cartes stratégie : transport aérien, faveur du führer et Plan des opérations.
Elles donnent tous un gros bonus à effet immédiat mais sont remis dans la pile des unités de recrutement à la fin de son tour au lieu de rejoindre sa pile de défausse.
4. Cartes d’état major (cartes au cadre mauve)
Ces cartes sont assez gourmandes en point de recrutement (5 ou 6) et forment une seule pile : seule la carte du dessus est disponible en recrutement.
L’état major est composé de 3 cartes uniques différentes de commandement et 2 cartes bâtiments en triple.
Il permet d’obtenir un pouvoir permanent lorsque la carte est déployée et des points de victoire en fin de partie (sauf l’unité des mécanos de combat qui répare les tanks).
5. Cartes objectifs (cartes au cadre bleu)
Il s’agit des cartes que nos unités vont combattre lors des assauts des joueurs, et sont disposées en 3 piles :
- colline fortifiée (défense de 3), déployée dès son assaut gagné : permet de réduire de 1 la force de défense d’une carte objectif (en rapatriant la carte, soit la remettre dans sa pile commune)
- position stratégique (défense de 7), déployée dès son assaut gagné : permet de réduire de 2 la force de défense d’une carte objectif (en rapatriant la carte) et rapporte 1 PV en fin de partie si non utilisée
- 12 cartes ville de défense de 10, 12, 14, 18 et 24 pour Moscou qui donnent des PV, respectivement 8, 9, 10, 12 et 15 PV pour Moscou. Seule la ville du dessus de la pile est attaquable, Moscou étant la dernière carte de la pile.
6. Cartes événements (cartes au cadre violet)
Ces cartes sont empilées face cachée et on en pioche une lorsqu’un joueur lance un assaut contre la ville objectif visée. Révéler cette carte événement augment la défense de la ville russe selon la carte dévoilée de valeur 0, 3 ,4 ,6 ou du nombre d’unités déployées.
Si le combat est remporté, la carte événement rejoint sa défausse et octroiera un pouvoir lors de son activation (carte ennemi) ou bien la carte donne un effet immédiat (carte obstacle) pour aller retarder la progression de ses adversaires (destruction d’unités, malus permanent comme la carte bourbier).
Mise en place
Il faut retirer une pile de cartes du jeu. Les règles conseillent d’enlever la pile État-major pour la première partie mais on préfère plutôt se passer des cartes ressources de base les moins efficaces et que nous avons déjà en main de départ : les cartes de transport terrestre.
Comme proposé dans la règle, respecter la disposition des cartes dans la zone de guerre de haut en bas en fonction de leur valeur en coût de recrutement croissant est une bonne idée, facilitant la lisibilité et le choix des cartes lors de leur recrutement.
Chaque joueur démarre avec un deck identique composé de 6 cartes de transport terrestre (générant des points de ressources et nécessitant pas de points tactique pour être jouées) et 2 cartes régiment de grenadier (1 point de tactique requis).
Le tour de jeu
Le tour de jeu est composé de 4 phases :
- Phase initiale : réactivation de toutes les unités épuisées
- Phase tactique : réception d’un point de tactique et activation de cartes en payant leur coût en points de tactique, déclaration d’un combat (un seul objectif par tour)
- Phase de renfort : réception d’un point de renfort et acquisition d’une carte par point de renfort en payant le coût en points de ressource
- Phase finale : défausse des cartes de sa main sauf une si désiré, puis pioche de 4 nouvelles cartes de son deck. Les points excédentaires générés sont perdus (non conservables pour le tour suivant)
La partie
Première partie découverte à 2 avec 6gale.
Les premiers tours s’apparentent à une phase d’équipement ou l’on recrute des unités avec nos cartes ressources puis quelques combats s’engagent en formant des fronts faibles pour conquérir des positions stratégiques (diminuent de 1 les collines fortifiées), puis des collines fortifiées (diminuent de 2 la défense des villes) qui rejoignent notre front et les quelques unités déjà présentes.
Lorsque l’on sent son front suffisamment puissant pour égaler la valeur de défense de la 1ère carte visible ville russe et encaisser celle de la carte évènement (rajoute 0 à 6 points de défense), on peut se lancer à l’assaut de la carte ville…
6gale et moi suivons la même stratégie en achetant les unités Panzer bien puissantes. Les tours s’enchaînent et nos decks deviennent de plus en plus épais et la résolution des attaques de villes plus nombreuses et plus complexes aussi avec des combos diverses et variées à activer.
À noter qu’il est possible de « rapatrier » (remettre la carte dans le dessus du paquet commun) certaines cartes unités du front en utilisant la totalité de leurs points de force lors de combats, permettant ainsi d’assainir son deck.
Le jeu devient ainsi de moins en moins fluide au fil de la partie et je devine une attente un peu longuette à plus de 2 ou 3 joueurs.
Les cartes d’état-major sont sympathiques car certaines donnent des pouvoirs efficaces si couplés avec ses cartes, d’autres apportent des possibilités supplémentaires pour marquer des PV en fin de partie selon le nombre d’unités ou objectifs avancés spécifiques présents.
Les cartes stratégiques offrent une aide précieuse même si elles sont single-shot en retournant directement dans la pile de réserve et non dans sa défausse, un oubli bénéfique qu’on a eu tendance à appliquer par erreur…
Je loue les services de Miss Paulus qui permet de défausser une infanterie pour déployer un tank de sa pioche durant sa phase de renfort et de Miss Hoth (goodies) qui permet de gagner 1PV par colline fortifiée en fin de partie.
La dernière ville à conquérir est forcément Moscou et sa valeur en point de victoire est à la hauteur de la méga-force nécessaire. C’est 6gale qui réussit le coup de maître final et remporte la partie 63 PV à 57 PV (de mémoire).
Le jeu est vraiment intéressant avec un bon goût de reviens-y (non pas pour reluquer de nouvelles cartes, mais plutôt essayer d’autres stratégies).
Comparaison avec Dominion (logique, me direz-vous)
Le jeu comporte de grosses similitudes éléments avec son ainé Dominion, voire même des cartes très proches avec des effets combinés équivalents :
DOMINION | BARBAROSSA |
Point d’action | Points tactique |
Point d’achat | Points de renfort |
Piocher des cartes | Points de pioche |
Cartes cuivre, argent et or | Cartes transport terrestre, routier, ferroviaire |
Coût des cartes achetées en or | Coût des cartes recrutées en points de ressource |
PV acquis par l’achat des cartes domaines/duchés/provinces | PV acquis par la conquête des villes russes |
Cartes de PV : cartes jardin | Cartes de PV : cartes état-major |
Qu’est-ce qu’il y a donc de nouveau/différent dans Barbarossa par rapport à Dominion ?
– Constitution d’un front en étalant des cartes devant soi qui sont actives durant les tours suivants leur pose – Possibilité de sacrifier les cartes des unités au front pour augmenter son attaque – Points d’attaque donnés par les cartes (unités, collines fortifiés, positions stratégiques…) – Pioche d’un évènement augmentant le points de résistance de la ville attaquée + effets secondaires – Dégâts subis lors de la conquête d’une ville russe obligeant à reconstruire un nouveau front (bien dans le thème wargame) – Possibilité de conserver une carte pour le tour suivant : donne une dimension plus stratégique – Aspect wargame-conquête mieux rendu que l’acquisition des domaines/duchés/provinces – Moins « mécanique » que Dominion |
Bilan
Le cœur tactique du jeu se situe à deux niveaux, offrant de nombreuses stratégies :
- dans la phase tactique avec la formation et la gestion de sa zone de front + les assauts lancés contre les objectifs.
- dans la phase de renfort pour la construction de ses futures unités
La possibilité offerte de conserver une carte pour le tour suivant améliore le contrôle de l’effet aléatoire de la pioche. Cette option appréciable et appréciée est maintenant souvent proposée dans les jeux de deckbuilding (Extension Dominion, Thunderstone Advance, Eminent Domain, Time Masters, Rune age en dépensant de l’influence…) ou de draft (extension de Ginkgopolis).
La variété des cartes et leurs effets offrent plusieurs axes stratégiques, des combinaisons d’unités jouissives jubilatoires. La gestion de sa zone de front apporte un élément tout à fait nouveau et respecte bien le thème « wargame » : on prépare ses unités de façon tactique avec les cartes objectifs avancés puis on attaque des villes lucratives en PV, ce qui ne sera pas sans conséquences puisqu’on y perd logiquement des troupes quelque soit l’issue du combat.
Le début du jeu est assez dynamique puis perd en fluidité avec des tours de joueur composés de plus en plus d’action et donc d’une durée plus conséquente.
Le jeu est aussi très long, surtout à 4 ou 5 participants où l’attente doit être importante : il y’ en a de la préparation avant qu’un joueur soit en mesure d’atteindre Moscou.
De plus, dévoiler d’entrée de jeu une carte ville puissante (par exemple Leningrad à 18 points de défense) ralentit considérablement la progression du jeu : on est obligé de construire son deck et son front en boucle sur un grand nombre de tours avant d’aller se frotter à l’unique ville sur-défendue russe proposée en objectif. Je pense qu’il serait judicieux de préparer la pile des cartes villes objectif de façon progressive avec les valeurs de défense des villes des plus faibles aux plus fortes. Rien n’empêche aussi d’éliminer des cartes villes pour diminuer la durée de partie ou proposer 2 cartes d’objectif au lieu d’une seule.
Mise à part la compétition / course aux objectifs et unités d’élite, l’interaction entre les joueurs est plutôt faible. Certaines cartes événements bienvenues en apportent un peu mais ce n’est clairement pas la panacée. Un défaut difficile à gommer et inhérent aux jeux présentant le mécanisme de deckbuilding.
En conclusion, le jeu est vraiment bon, les parties sont plaisantes et on finit par être indulgent en prenant les commentaires déplacés de certaines cartes au deuxième voire troisième degré !
L’auteur ne s’est pas arrêté à l’opération Barbarossa puisque il a crée un autre jeu du même tonneau, en plus difficile selon les avis de la toile, intitulé El Alamein. Il comporte les mêmes ingrédients mais dans un cadre désertique nord-africain, censé nous faire revivre la guerre du désert de 1942 des Allemands contre les Anglais. Il ne s’agit pas d’une extension mais d’un « stand-alone » plutôt conseillé de jouer seul même s’il est possible de le combiner avec Barbarossa. Cet opus n’est pas encore disponible en VF mais il ne saurait tarder.
Deux points de règles à clarifier :
1/ Doit-on annoncer au préalable toutes les unités envoyés au combat lors d’un assaut ou peut-on librement ajuster les unités présentes au front ?
La règle stipule que le joueur doit au préalable « déterminer le nombre de points d’Attaque dont il dispose » avant l’attaque et la révélation de la carte évènement (qui rajoute de 1 à 6 points de défense à la ville).
Arnaud interprète cette règle de la façon suivante : il faut déterminer les unités que l’on envoie au combat parmi celles disponibles sur son front, ce qui signifie que l’on peut soit prendre un risque en n’envoyant pas toutes ses unités, soit à l’inverse, en n’envoyer plus que nécessaire et donc au final sacrifier des unités inutilisées.
6gale a lui plutôt compris cette règle en adaptant au mieux la force d’attaque dont on dispose en n’activant que les cartes nécessaires pour atteindre la valeur de défense globale de la ville (défense de la ville + évènement). La prise de risque se limite alors à la carte évènement.
Personnellement, je comprends le dilemme mais avoue préféré l’interprétation de 6gale car la première alourdit le jeu avec le calcul de la prise de risque à chaque assaut et rend le jeu encore plus long avec plus d’unités sacrifiées qu’il faut recommencer à acquérir… et parfois une ville non conquise ! On tourne alors en rond…
Je sais de quoi je parle car je suis le premier à attaquer et envoie donc le max d’unités pour atteindre la valeur de défense de la ville + 6 mais tombe malheureusement sur une carte (bonus) qui fait piocher une 2ème carte évènement. Résultat : mon attaque est un échec cuisant alors que j’avais encore d’autres unités en réserve….grrrr… super frustrant !
Qui a raison ?
2/ Peut-on panacher la destruction de position stratégique et collines fortifiées lors d’un assaut pour combattre une ville et son événement ?
La règle laisse penser que non si on la lit au pied de la lettre car elle stipule qu’il est possible de défausser des cartes « collines fortifiées » ou des cartes « positions stratégiques » pour diminuer la force de la ville visée + événement ! En y réfléchissant, cette interprétation est très réductrice et dessert le thème wargame : je me demande donc si le « OU » de la règle ne devrait pas plutôt être un « ET » !
Ressources du jeu
Un jeu de Atsuo Yoshizawa
Illustré par une ribambelle d’illustrateurs de l’école militaire Kawaï
Edité par Play Win – Éditions sans détour
Pays d’origine : Japon
Date de sortie VF : 07/2014
De 2 à 5 joueurs
A partir de 16 ans
Durée moyenne d’une partie : 60-90 minutes
>> Aide de jeu sur le site Vind’Jeu
>> Présentation du jeu sur le site éditeur (Play Win / Éditions sans détour)
PS : Pour la petite anecdote, Barbarossa est aussi le nom d’un autre jeu plus ancien de Klaus Teuber (auteur des colons de Catane), édité par Kosmos et qui avait remporté le Spiel de 1988 ! Il y est question de faire deviner des objets en pâte à modeler, bien loin du « war-manga-deck » japonais ! Fiche du jeu ici.
Il existe aussi plusieurs autres jeux de pur « wargame » répondant à ce nom de code.
PS2 : merci à 6gale pour la découverte et les explications du jeu.
LUDOVOX est un site indépendant !
Vous pouvez nous soutenir en faisant un don sur :
Et également en cliquant sur le lien de nos partenaires pour faire vos achats :
TheGoodTheBadAndTheMeeple 24/03/2015
Mince ! Il est sorti en Français, dingue qu’une maison ait pris ce risque !
J’ai tanto cuore a la maison qui est beaucoup moins osé, dirais-je. Et vraiment bon je trouve.
Super article, fort complet !
Zuton 24/03/2015
Oui, j’ai aussi bien aimé Tanto Cuore sur les quelques parties pratiquées sur la version informatique…
Galuf 25/03/2015
Ha oui tient je savait pas qu’il etait aussi sortie en francais. Encore une fois l’article ne le dit pas (ou j’ai louper ?), heureux que l’article est pas fait l’amalgame avec le nazisme.
Zuton 26/03/2015
Pour la sortie en VF, l’article le dit bien au début de la présentation générale.
Galuf 31/03/2015
Oups je m’en excuse, j’ai fait ma mauvaise langue ^^
6gale 24/03/2015
L’article est très bon. Je suis heureux de t’avoir fait découvrir le jeu. Le ton est juste et tu n’es pas rentré dans la polémique. Bravo !
Zuton 24/03/2015
Oui, pas facile d’écrire un article sur un jeu si contrasté et sur lequel il faut presque s’excuser (envers soi-même et les autres) d’apprécier !
ARFOGRE 24/03/2015
Bravo à Zuton pour cet super article…
Zuton 24/03/2015
Merci pour tes encouragements !
Jiba 24/03/2015
Ce qui me gêne dans le thème du jeu, ce n’est pas tant les « petites tenues » (qui sont présentes dans bien d’autres jeux). C’est le côté « les gentils nazis sexy contre les méchants russes », limite révisionniste (à ce que je sache, Moscou n’est jamais tombé entre les mains des allemands, l’opération Barbarrossa historique étant un échec, peut-être cela aurait-il dû être préciser dans l’article !).
Rien qu’en souvenir de mon grand père maquisard, je ne jouerai pas à ce jeu ! Pas contre j’ai bien aimé les poilus :p
Zuton 24/03/2015
Oui, tu as raison, l’opération Barbarossa fut un cuisant échec pour les allemands et a engendré bien trop de victimes. Le jeu ne respecte donc pas la trame historique et l’oubli est ainsi réparé grâce à ton commentaire ! J’ai tenté de rester aussi objectif que possible et prendre le jeu avec du recul en le considérant pour ce qu’il est à mes yeux : simplement un jeu et non un véhicule de propagande nazi qui voudrait réviser l’histoire. C’est lui donner une dimension politique qu’il n’a pas. Je n’ai pas l’impression de trahir la mémoire de mon grand-père résistant en y jouant et je n’en ai pas pour autant oublié l’horreur de la réalité de la seconde guerre mondiale (comme toutes les autres trop nombreuses guerres d’ailleurs). Tout est question de feeling et de prise ou pas au deuxième degré mais je comprends tout à fait et respecte les réticences (mon but n’est pas d' »évangéliser » Barbarossa, on aime ou aime pas !). Et bien d’accord avec toi, le jeu Les Poilus est excellent et s’exprime dans un autre registre avec un thème fort, émouvant mais aussi plus sérieux qui lui ne laisse pas la place à la fantaisie, et je dis cela sans regret : le jeu est une sacrée bonne expérience et prend une dimension bien plus humaine !
Sha-Man 24/03/2015
Je pense qu’il faut prendre tout ça d’un point de vue « humoristique extrême ».
Il faut voir qu’au Japon ils sont plus décomplexés par rapport à ça. Déjà c’était loin de leur guerre et en plus ils étaient pas vraiment du même côté que nous.
Parle leur de « The Manhattan Project » et explique leur l’humour qu’il pourrait y avoir dans un jeu parlant de la course à l’armement nucléaire, je pense que tu auras des réactions qui t’étonneraient au vu du traumatisme du massacre très largement occulté dans le reste du monde.
D’accord il y a quelques trucs sur les mémoriaux d’Hiroshima et Nagasaki, mais vois-tu beaucoup de sentiment de culpabilité sur ces 2 bombardements qui je cite « on enfin permis de mettre fin à la guerre ».
Alors bien sûr, je ne défends que le fait qu’il s’agit de différences culturelles et d’humour extrême, mais le côté révisionniste ou voire même jouer les méchants nazis pour latter les alliés n’a jamais posé problème pour les centaines de milliers de joueurs de jeux vidéos d’une quantité phénoménale de titres qui le proposent.
DaP 24/03/2015
Rien que pour le thème ce jeu mérite sa place dans ma ludothèque, mais en plus le jeu a l’air vraiment bon: « Shut up and take my money! »
Shanouillette 24/03/2015
moi j’avoue que j’ai eu le jeu entre les mains et c’est pas tant les filles qui m’ont dérangé ni le thème nazi, mais le mélange des deux, l’un et l’autre peut se faire, mais le mix’ des deux, ça m’fait comme si on me faisait du pschiit dans les yeux pour m’faire reculer. Rendre « sexy » des nazis, j’y arrive pas. Pourquoi pas des ku klux klan’s girl en string blanc. Je sais pas, y à un truc qui me bloque politiquement.
eolean 24/03/2015
Merci pour cet article Zuton qui éclaire en profondeur un jeu dont le mécanisme est très intéressant. Concernant le thème et les illustrations, il faut bien voir que dans la culture nippone, le nazisme n’a absolument pas le même echo qu’en europe ou même dans le monde occidentale. Je pense que Izobretenik pourrait nous donner un bon éclairage dessus. Mais les japonais ne sont pas (ou beaucoup moins) touché par l’horreur même que ça représente pour nous. Il faut se méfier avec ce jeu parce qu’on est tout proche du point Godwin !
Personnellement, je n’adhère pas à cette excentricité dans ce cadre pseudo-historique. Autant j’aurais pu l’envisager dans le jeu avec le lycée pour jeune fille. Autant là, on est en plein dans l’anathème. Je comprends que le côté décalé puisse plaire à certains, mais moi je trouve que derrière tout ça il y a du marketing provocateur à outrance pour faire le buzz et pour vendre et la mayonnaise ne prend pas chez moi.
Par contre, pour la curiosité du mécanisme pour lequel j’ai entendu de bons echos, je l’essayerai volontiers un jour.
Shanouillette 24/03/2015
Je te rejoins totalement. C’est marrant, Sha-Man était justement en train de me dire qu’Izobretenik pourrait nous dire à quel point le nazisme n’est pas vu de la même façon là-bas. Il y a du cosplay de nazis dans les salons au Japon. D’ailleurs Monsieur Bizon de Street Fighter n’est rien autre qu’un général nazi. Effectivement, il est évident qu’ on n’a pas le même passé, les mêmes références… et les réactions sont donc complètement différentes sur ce genre de choses. Le pendant de tout ceci étant… quid de la VF ? il est clair que de choisir de le faire en France c’est vraiment autre chose, je le vois moi aussi comme un mouvement provoc qui permet de faire parler. Et ça marche ! J’apprends que ce jeu connaissait une autre version (un thème de tank je crois) du coup ça permettrait de découvrir le jeu (qui a l’air bon) dans une ambiance plus… sereine ^^
Sha-Man 24/03/2015
Je n’ai a absolument aucune affection pour les 2 themes melanges de ce jeu.
A la rigueur pourquoi pas le cote « WTF ».
Pas assez poussé malheureusement pour etre appreciable, il aurait fallu des dinosaures mutants Russes a combattre, des extraterrestres ninjas, tout le monde en slip et la, ok.
Ce qui me derange le plus dans ce jeu finalement tient en 2 choses : 1/ quelque part il va pas assez loin dans le delire pour oublier la critique serieuse. 2/ et c’est la le vrai probleme je ne trouverai personne avec qui y jouer. Soit parce que je suis gené de le sortir, soit parce que les gens refusent d’y jouer.
Comparé a un war on terror ou on peut jouer des terroriste et faire des attendats suicides (ce qui de base ne fait rire personne evidemment) mais avec une telle critique du monde actuel, un tel humour dejante et decale, et bah y a pas photo.
Finalement je me demande si c’est pas le manque d’humour qui peche le plus…
TheGoodTheBadAndTheMeeple 25/03/2015
Encore une fois comme tu le disais, une vraie question de culture.
Mais je confirme que Tanto Cuore déjà, il n’y a que des soubrettes et le jeu rebute les gens. Les filles s’offusquent et les mecs n’assument pas… Mais j’arrive quand même à y jouer 🙂
Perso, que ce soit le thème décalé de Manhattan Project ou celui-ci je m’en fiche. C’est un jeu, et ça permet justement de libérer ses pulsions 😛 Ça ne détronera pas un Call of Duty, un Paper please ou un GTA …
fouilloux 25/03/2015
J’avoue que je suis partagé. D’un côté j’applaudis la démarche d’importer uun jeu tel quel du pays où il a été créé, pour amener la culture du pays avec: Je critique suffisamment les États Unis lorsqu’ils font des remakes de films étrangers pour que ce soit à leur sauce.
De l’autre, je ne peux m’empêcher de penser quele succès de ce jeux est très intimement lié à l’aspect « racoleur » (pour ne pas dire autre chose) de ces illustrations. Ok, le jeu est peut être bon, et tout les acheteurs ne l’ont pas acheté pour ça. Néanmoins, quand un jeu qui a subit un traitement médiatique assez léger (c’est le premier article que je vois traitant de sa mécanique), qui n’est à priori pas conseillé par les boutiques (dixit mon vendeur habituel), que les joueurs ont du mal à proposer, et qui arrive pourtant à faire des ventes impressionnantes (il me semble qu’il a été en tête sur philibert pendant un moment), j’ai du mal à croire que les culottes y soient pour rien.
Galuf 31/03/2015
A vrai dire sa lui porte aussi a prejudice, le jeu est tres bon, est m’interresse au plus haut point en terme de gameplay. neanmoins sont aspect visuel est un gros frein, car je sais que j’aurait du mal a le sortir :'(
Sha-Man 25/03/2015
A quand un jeu sur des Grammar Nazis en slip ? Une idée de thème pour ton proto Umberling ? 😉
Umberling 26/03/2015
Vil sha-man. Tu sais que j’affectionne ce thème très important pour moi : la grammaire doit être respectée à tout prix!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
(Aucun point d’exclamation n’a été blessé dans ce commentaire.)
grogro 17/04/2015
t’as oublié un espace insécable après le point
thonywood 26/03/2015
Voilà un jeu qui finira dans ma ludothèque, d’une pour le gameplay que vous venez de décrire et de 2, j’aime le côté décalé et provocateur. Le côté bien pensant me dérange beaucoup. Effectivement, mon groupe de joueurs n’a rien à voir avec des « gros machos poilus », on apprécie l’humour au 3ème degré. Cela ne me dérangera pas de le sortir avec mes amies, simplement parce qu’elles me connaissent et que je n’aurai pas à me « justifier » (pas vraiment crédible en gros macho 😉 ). A côté de « Borgia, le jeu malsain », Barbarossa est un jeu pour « midinette ».
Mais je comprends pleinement que certaines personnes puissent être choquées par le thème et les illustrations. A jouer la provocation dans les illustrations, on se doute bien que cela ne passera pas auprès de beaucoup de joueurs.
foogyboy 15/12/2015
Étant un fan de Dominion et Thunderstone, j’ai été séduit par ce jeu. La mécanique du deckbuilding est toujours aussi efficace et les illustrations apportent un plus bien agréable. Je recommande chaudement 🙂